Avempace — également connu sous ses noms arabesIbn Bajja (ابن باجة enarabe) ouAbu Bakr Mohammed ben Yahya ben as-Sayegh (أبو بكر محمد بن يحيى بن الصايغ) — est unphilosophe,médecin,astronome, géomètre,musicien etpoètemusulmanarabe[1],[2],[3],[4] né entre 1077 et 1082 dans ce qui est maintenant lacomarque de Saragosse, et serait mort empoisonné vers1138 àFès. EnOccident, il est principalement connu sous le nom latinisé d'« Avempace ». Il eut pour maîtreAvenzoar (Ibn Zohr).
Esprit universel, musicien,compositeur, poète et scientifique, il écrivit plusieurs livres, comme laLettre d’adieu,l’Épître de la conjonction del’Intellect agent avec l’homme et leRégime du solitaire, inachevé[5]. Il composa également des chansons et des poèmes populaires, et s’adonna à l’étude desmathématiques, de l’astronomie et de labotanique. Il jouait duluth et est considéré comme un des fondateurs d'un style musical typiquementandalou : lemouachah (ou muwaššah)[6].
Il étudie la musique, la poésie, la philosophie et la logique d'al-Farabi. Lorsque Saragosse est prise par lesAlmoravides en 1110[7], Avempace devientvizir à Saragosse, auprès deIbn Tifilwit[8] de 1114 à 1116, avant que ce dernier ne périsse dans une opération militaire contre les chrétiens en 1118. Avempace a été très proche d'Ibn Tifilwit : il lui rédigea unéloge panégyrique et des poèmes[9]. En 1118,Saragosse est conquise parAlphonseIer, on pense qu'Avempace n'a pu quitter la ville et qu'il a été emprisonné[10]. Mise à part cette période de détention qui est rapportée dans une lettre à son ami Ibn al-Imâm, où il explique qu'il a entrepris la rédaction d'un traité philosophique, aucune information n'est disponible sur sa vie entre 1118 et 1136[10]. Il aurait été emprisonné une seconde fois, accusé d'hérésie, parIbrahim b. Yusuf b. Tashufin. Les motifs réels pourraient être l'inimitié qu'il inspirait à des savants jaloux[9]. Il aurait été libéré grâce auqadi Ibn Rushd, le grand-père d'Averroès[8]. Il reste ensuite dans le cercle du pouvoiralmoravide et continue d'exercer une charge de vizir auprès de Yaḥyà ibn Yûsuf Ibn Tâshufîn[8]. On le sait simplement àSéville en 1136 avec son disciple Abû l-Ḥasan Ibn al-Imâm al-Ansari[8].
On dit qu'il fut empoisonné par son rival Abu l-‛Ala’ Ibn Zuhr, père d'Avenzoar, mais ce fait paraît peu probable[8],[9].
L’œuvre majeure de ses écrits philosophiques politiques estLe Régime du solitaire (Tadbir al-mutawahhid). Dans cet ouvrage il décrit la cité idéale pour en faire le modèle de l'individu[9]. Il ne considère pas que les cités existantes puissent être corrigées selon le modèle idéal[9].
Il prolonge la réflexion d'al-Farabi sur la cité idéale en se demandant ce que doit faire le sage qui vit dans une société imparfaite. Le contexte d'intolérance religieuse dans lequel vit Ibn Bajja n'est sans doute pas étranger à ce questionnement[11]. Alors qu'al-Farabi suggère que le sage doit s'exiler pour trouver des conditions plus favorables à l'exercice de la philosophie, Ibn Bajja recommande au philosophe de rester, mais en se retirant dans une vie consacrée à la méditation[8]. La place du philosophe dans une société qui n'est pas idéale, c'est l'isolement à l'intérieur de cette cité[11].
Il est inspiré des écrits d'Aristote comme de nombreux savants de son temps. Si Avempace conserve certains concepts de la vision d'Aristote dans la description de la vie et du fonctionnement de la cité, il a une démarche différente. Tout d'abord il a une attitude "insulaire", c'est-à-dire qu'il pense le monde à l'écart ; l'idéal philosophique est pour Avempace incompatible avec la vie en cité à l'inverse de la pensée grecque antique où la cité est la finalité de la pensée.
À travers cet isolement, il ne souhaite pas être en rupture avec la société, mais il refuse plutôt de rentrer dans une classe sociale qui réduirait son horizon de pensée et le priverait de liberté. Avempace cherche dans cet ouvrage à décrire le bon gouvernement ; il reprend la division aristotélicienne des sciences de gouverner à travers l'éthique (gouvernement de soi), la gestion d'un bien domestique et la politique (gouvernement de la cité). Il est très critique envers la deuxième partie de la bonne gouvernance, c'est-à-dire les biens domestiques, ces derniers sont perçus comme incapables, par Avempace, de se fondre dans la vie de la cité. Il critique les intérêts des clans qui font passer leurs propres intérêts avant ceux de l’État. Il est aussi critique par rapport à un manque de convictions profondes de la part de la population qui n'a que des aspirations purement matérialistes, notamment les descendants de la noblesse. Il prône aussi un pouvoir plus légaliste et vertueux qui ne s'appuie pas sur la ruse et la force.
Sa vision pessimiste des choses est assez intéressante, car il est un homme de pouvoir qui est comme dégoûté de son époque qu'il juge décadente. Il ne faut pas oublier qu'il a été plusieurs fois victime de complots de cours qui l'ont conduit à être emprisonné à deux reprises.
Averroès lui doit sa théorie de l'immortalité de l'âme. Notamment dans saLettre d'adieux, Ibn Bajja avance que l'âme n'est pas immortelle dans son individualité.Albert le Grand s'attachera à réfuter cette doctrine[12].
Il rejette lemysticisme d'al-Ghazali : pour lui, la raison est la seule voie vers la vérité[13].
Il élabore une théorie d'inspirationnéo-platonicienne, selon laquelle l'âme n'atteint la félicité qu'en s'élevant graduellement dans la connaissance. Mais cette ascension a un caractère intellectuel plutôt que spirituel. Son degré ultime est l'union avec l'Intellect agent[8], qui émane de Dieu[14].
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↑Grant, Edward (1996). Planets, Stars, and Orbs: The Medieval Cosmos, 1200-1687. CUP Archive.(ISBN9780521565097)
↑Ibn Haldun,Al Muqaddima (Prolégomènes), Sousse, Dar al-Ma'arïf,,p. 342-343.
↑a etbʻAbd al-RaḥmānBadawī,Histoire de la philosophie en Islam, J. Vrin,(lire en ligne)
↑abcdefg ethD. M. Dunlop. « Ibn Badjdja » inThe encyclopædia of islam, vol. 3,p. 728.
↑abcdef etgJosép PuigMontada,« Ibn Bâjja [Avempace] », dansThe Stanford Encyclopedia of Philosophy, Metaphysics Research Lab, Stanford University,(lire en ligne)