Un usage plus ancien est celui demalayo-polynésiens, mais aujourd’hui, l’expression « langues malayo-polynésiennes » ne désigne plus que l'une des branches de la famille austronésienne, quoique de loin la plus nombreuse (1 248 langues sur un total de 1 268 langues austronésiennes[1]). Parfois, on a aussi utilisé le terme de « nusantarien » (denusantara, ancien motjavanais signifiant « îles de l’extérieur », qui désignait à l'origine les îles de l’archipel indonésien autres que Java), ou encore celui d' « extra-formosien ».
Les Austronésiens sont arrivés à Taïwan depuis la Chine continentale et laculture de Hemudu, située dans labaie de Hangzhou vers -7000[2],[3]; cette culture présente des similarités avec les cultures insulaires de Taïwan. Plus anciennement encore, comme l'a montré linguistiquement Laurent Sagart, en exhibant aussi des corrélats archéologiques et génétiques, les Austronésiens devaient former une unité avec les populations proto-sino-tibétaines, dans un ensemble appelé « STAN », pour « Sino-Tibétain-AustroNésien ».
les langues thaï-kadai (qui a donné notamment le thaï), également issues de Taïwan.
Les proto-langues dont sont issues les familles linguistiques malayo-polynésienne et taï-kadai sont appelées respectivement le proto-malayo-polynésien (PMP) et le proto-kadaï ou AAK pour « Austronésien Ancêtre du Kadaï ». Elles sont issues d'un même groupe de langues appelé ECL pour « east coast linkage » parlé sur la côte est de Taïwan (voir ouvrage collectif interdisciplinaireThe peopling of East-Asia). Les langues thaï-kadai n'ayant été rattachées aux langues austronésiennes que récemment, elles ne sont pas encore toujours citées. Mais l'austronésien sans le thaï-kadai n'est pas monophylétique.
La plupart des habitants de l’Asie du Sud-Est insulaire (Indonésie,Philippines,Malaisie) parlent des langues austronésiennes. Les Austronésiens constituent aussi des minorités enBirmanie, auCambodge, enChine (île deHainan), àTaïwan, enThaïlande, auViêt Nam. Plus à l’est, les Austronésiens sont présents sur certaines côtes dePapouasie-Nouvelle-Guinée et dans toute l’Océanie, à l’exception notable de l’Australie. À l’ouest, on parle des langues austronésiennes àMadagascar et àMayotte. Les langues austronésiennes s’étendent ainsi sur une aire qui va de Madagascar à l’ouest à l’île de Pâques à l’est, et de Taïwan etHawaï au nord à laNouvelle-Zélande au sud. La génétique linguistique, qui vise à reconstituer la filiation à travers le temps d’un ensemble de langues apparentées entre elles, tend à situer à Taïwan le berceau de ces langues[4].
Les Austronésiens jouent un rôle crucial dans la diffusion de plusieurs cultigènes vers l’Afrique et l’océan Indien. Parmi ces plantes, lesbananes plantains (Musa AAB), letaro (Colocasia esculenta) et l’igname aquatique (Dioscorea alata) figurent parmi les premières espèces végétales qui auraient été introduites en Afrique de l'Est, facilitant ainsi le développement de l’agriculture dans des zones tropicales denses et humides[5].
Une étude génétique publiée en 2020 suggère que les racines profondes des locuteurs austronésiens sont originaires des populations néolithiques du sud de la Chine et datent d'au moins 8 400 ans[6],[7]. Une autre recherche interdisciplinaire associant notamment archéologie, ethnobotanique et linguistique a permis de reconstituer une diffusion géographique des langues austronésiennes et de techniques agricoles. Selon la théorie diteOut of Taiwan (« sortie de Taïwan »), il y a 6 000 ans (4000av. J.-C.), des habitants du littoral de laChine du Sud, cultivateurs demillet et deriz, commencent à traverser le détroit pour s'installer àTaïwan. Vers2500av. J.-C., ces langues et ces techniques se diffusent de Taïwan vers lesPhilippines (voirMigrations préhistoriques vers les Philippines), puis des Philippines versSulawesi etTimor et de là, les autres îles de l’archipelindonésien. Vers1500av. J.-C., un autre mouvement mène desPhilippines enNouvelle-Guinée et au-delà, les îles duPacifique. Enfin, autour de 500 av. J.-C., des Austronésiens colonisentMadagascar en provenance d'Indonésie.
Des inscriptions javanaises et des textes arabes montrent qu’auIXe siècle,Java, et sans doute d'autres parties de l'Indonésie actuelle, entretenaient des échanges commerciaux avec l'océan Indien et la côte est de l'Afrique. Ainsi un capitaine persan,Ibn Shahriyar, dans sonLivre des merveilles de l'Inde, rapporte le témoignage d’un marchand arabe du nom d'Ibn Lakis qui en 945, voit arriver sur la côte duMozambique« un millier d’embarcations » montées par desWaq-Waq qui viennent d'îles« situées en face de la Chine » chercher des produits et des esclavesZeng, c’est-à-direZenj, nom sous lequel les Arabes désignaient à l'époque les habitants de la côte est de l'Afrique.
La colonisation de grandes zones géographiques, telles que laMicronésie, laMélanésie et laPolynésie avec des îles souvent séparées par plusieurs centaines de kilomètres de haute mer, peut s’expliquer par l’emploi depirogues à balancier pouvant atteindre plusieurs dizaines de mètres de long et transporter familles et animaux domestiques. Il semble ainsi que les étapes chronologiques de la diffusion des populations austronésiennes d’abord aux Philippines et en Indonésie, puis dans les océans Pacifique et Indien, soient à mettre en corrélation avec l’évolution des moyens et des techniques de navigation (évolution de la voile et de la pirogue, invention du balancier,catamaran,prao, etc.).
La famille austronésienne est une famille de langues importante dans le monde représentant 4,5% de la population totale[9]. Cette famille se sépare en plusieurs sous-familles :
Les langues formosanes sont les langues aborigènes actuelles deTaïwan fragmentées en une vingtaine d’idiomes.
Les langues malayo-polynésiennes réparties en trois groupes :
le groupe malayo-polynésien occidental aussi appelé « groupe indonésien » est composé desPhilippines, del'Indonésie et deMadagascar.
le groupe malayo-polynésien central est composé d'environ120 langues parlées aux îlesMoluques et dans l'île deTimor, dont de nombreuses sont en voie d'extinction.
le groupe malayo-polynésien oriental divisé en deux sous-groupes de langues :
les langues océaniennes forment un sous-groupe de langues parlées dans les îles de l'océan Pacifique par moins de3 millions d'individus. Cette catégorie est à nouveau sous-divisée en trois ensembles de langues majoritaires :
les langues mélanésiennes,
les langues polynésiennes,
les langues micronésiennes.
les langues du sud de l'île d'Halmahera et de l'ouest de laNouvelle-Guinée. Ce sous-groupe contient environ40 langues parlées par moins de150 000 locuteurs.
↑Peter Bellwood,La dispersion des langues austronésiennes dansLes langues du monde, Paris, Bibliothèque Pour la Science,, 158 p.(ISBN978-2-84245-015-1)