Lesaulnes ouaunes (Alnus) forment un genre deplantes à fleurs de lafamille desbétulacées. Ce sont desarbres de l'hémisphère nord poussant sur les sols humides, Ils sont aussi nommésvergnes ouvernes.
Les aulnes sont des arbres de taille moyenne, pouvant atteindre 20 à (rarement)30 mètres, à feuilles caduques, croissant dans les bois humides ou marécageux, ou encore en bord de cours d'eau. Les fleurs sont organisées enchatons mâles et femelles. Les chatons femelles donnent naissances à desstrobiles ligneux de deux à trois centimètres de longueur, abritant les graines.Alnus glutinosa, l'aulne le plus commun en Europe de l'Ouest, se distingue par ses feuilles largement ovales, crénelées-dentées, et ses jeunes pousses printanières collantes au toucher[3].
Leurbois est léger, tendre et homogène. Il estimputrescible dans l'eau, mais non durable hors de l'eau. Il est employé notamment pour les pieux depontons. Il est d'une couleur rouge caractéristique puis rosée lorsqu'il est fraîchement coupé ou travaillé, mais cette couleur ne persiste pas, elle est dégradée par la lumière.
Leslenticelles nodulaires hypertrophiées pourraient avoir un rôle dans l'oxygénation des parties aériennes.L'aulne est, avec lesaule et certainspeupliers, l'une des espèces les mieux adaptées à l'eau. Ici il émerge de l'eau au bord du lac Bobięcińskie Wielkie en Pologne. Ces trois espèces sont aptes à recéper quand elles sont coupées par lecastor avec lequel elles ont coévolué.
Leur capacité d'enracinement profond dans leshorizons compacts ou asphyxiants des sols à engorgement temporaire, l'hypertrophie deslenticelles[4] et la présence d'unaérenchyme très développé, alimenté via des lenticelles localisées dans l'empattement, explique leur fréquence dans leszones humides, sur lesberges ou dans les forêtshygrophiles alluviales ditesripisylves, au bord desrivières ou autour desbras morts, où ils peuvent atteindre 25 à 30 m.
Certaines espèces sontubiquistes et poussent aussi en conditions plus sèches. Quels que soient les habitats où ils vivent, les aulnes sont surtout desespèces pionnièresintolérantes à l'ombre, à colonisation rapide des milieux perturbés (par les inondations, les tempêtes, les incendies, les glissements de terrain...) facilitée par ladispersion de leurs grainespar le vent etpar l'eau[5] et à croissance très rapide (grâce à leurs racines qui développent une association symbiotique avec des bactériesfixatrices d'azote, lesfrankias), comme lesbouleaux qui appartiennent à la même famille (Betulaceae), ou comme les Salicacées (saules, peupliers). Ils sont ensuite facilementsupplantés par des arbres plus compétitifs mais à colonisation plus lente comme les chênes et les frênes (forêts post-pionnières en Europe) ou les thuyas et les douglas (ouest de l'Amérique du Nord)[6].
L'aulne nourrit de nombreux champignons quand il devientbois mort ou sénescent, mais il peut aussi établir dessymbioses avec certaines espèces par l'intermédiaire de leursectomycorhizes. Un inventaire mycologique des peuplements d’aulnes en France (dit « projet Aulnaies ») a été lancé en- sur 63 sites dominés par l'aulne glutineux et deux par l'aulne blanc, par la Commission Environnement de laSociété mycologique de France. Lesaulnaies poussent toujours sur des milieux aux enjeux écologiques importants ; ce programme a cherché à identifier leurs champignons associés, et à donner de nouveaux moyens d'évaluer la valeur de ces boisements et de leur fonge souvent méconnue et négligée par les gestionnaires.477 espèces ont été identifiées sur ces 63 sites (soit environ 3,5 % de la diversité fongique nationale). Ces espèces ont été réparties comme suit, selon leur fréquence dans les aulnaies :24 espèces dominantes (espècesmycorhiziques des aulnes, dontRussula alnetorum(en) etAmanita friabilis),23 espèces caractéristiques,47 espèces occasionnelles,104 espèces assez rares,281 espèces rares et544 espèces exceptionnelles. Cette étude a montré que les espèces présentes sont principalement liées au niveau trophique, à l’acidité et à l’inondabilité de l'aulnaie (par exempleLactarius clethrophilus,Lactarius omphaliformis etCortinarius helvelloides sont associés au caractèreoligotrophe du site où malgré une diversité réduite leur présence révèle un intérêt patrimonial très élevé. À l'autre extrêmeGyrodon lividus, l'une des espèces mycorhiziques des aulnes, semble pouvoir être unbioindicateur des aulnaies dégradées par l'eutrophisation). Lessaprotrophes de l'aulne les plus courants en France sont des espèces banales et sans spécificité, alors que les mycorhiziens sont au contraire bien spécifiques[7].
Les principales espèces d'aulnes ne sont pas considérées comme menacées, mais les aulnaies qui avaient notamment été conservées pour la production d'uncharbon de bois apprécié pour lespoudreries ont fortement régressé, au profit de la culture de peupliers (populiculture) ou du drainage des zones humides pour leur mise en culture, en pâture ou pour leur urbanisation.
Ensemble des espèces incluses dans le genreAlnus selonGBIF(18 avril 2022)[10] :
Le genre est divisé en trois sous-genres :
Sous-genreAlnus
Arbres à bourgeons pédonculés, chatons mâles et femelles produits en automne mais restant fermés pendant l'hiver, pollinisant à la fin de l'hiver ou au début du printemps, environ 15 à 25 espèces, dont :
Arbustes à bourgeons ramifiés non pédonculés, chatons mâles et femelles produits à la fin du printemps (après l'apparition des feuilles) et se développant et se pollinisant ensuite, une à quatre espèces :
Couleur du bois d'Aulne glutineux fraîchement coupé.
Les caractéristiques acoustiques de l'aulne en ont fait un des bois les plus prisés dans lalutherie, et notamment dans la fabrication deguitares haut de gamme, comme le corps de laFenderStratocaster.
Les fruits d'aulnes sont aussi utilisés enaquariophilie pour leurs capacités à réduire lepotentiel hydrogène de l'eau, ainsi que leurs branches en tant que décoration.
Le bois de l'aulne est un bonbois de chauffage. Il fournit une chaleur très vive en brûlant et était donc très recherché par les boulangers. Aupays basque, les aulnes étaient coupés en juillet, tronçonnés et fendus en bûches. Le temps de séchage de ces bûches permettait de les utiliser avec un maximum de rendement énergétique au moment de la chauffe desalambics dedistillation de l'eau-de-vie domestique.
Comme son bois ne pourrit pratiquement pas dans l'eau, s'il est à l'abri de l'air et de la lumière, on l'utilise pour faire des ponts de fortune dans le cas de franchissement de ruisseaux par un chemin de terre formé aubulldozer : on coupe quelques troncs d'aulnes proches, qui sont étendus l'un à côté de l'autre dans le ruisseau, dans l'axe d'écoulement des eaux, et ces troncs sont ensuite recouverts de terre pour faire le passage, l'espace entre les troncs d'aulne permettant à l'eau de s'écouler. Son imputrescibilité à l'état immergé explique que les pilotis de Venise sont fabriqués en bois d'aulne dès leXIIe siècle (en bois de chêne, d'orme et de mélèze à partir duXVe siècle)[13].
Sculptures en bois d'aulne.Statue médiévale en bois d'aulne
Le bois d'aulne, bien homogène, se tourne et se sculpte facilement. On en fait des ornements de meubles, des maquettes pour l'industrie (surtout avant l'apparition des simulations numérique 3D) et on en faisait autrefois des sabots, des manches de brosse, des jouets, et des ustensiles de ménage. Les bouteilles deChartreuse étaient vendues autrefois dans des boites cylindriques tournées dans du bois d'aulne.
Sontannin a fait utiliser son écorce entannerie, et enteinturerie etchapellerie (production d'une couleur noire quand l'écorce est mélangée à des sels de fer).
Enfin, lecharbon d'aulne était utilisé autrefois pour la poudre à canon, conférant une meilleure qualité à l'explosif.
Plusieurs espèces d'aulnes sont utilisées comme arbres d'ornement et parfois d'alignement, du fait de leurs silhouettes caractéristiques, de leur forte rusticité et de leur croissance très rapide tout en gardant un gabarit modéré. En Europe, l'usage des espèces autochtones est limité par leur fort besoin en eau, on utilise ainsi fréquemment des espèces introduites qui tolèrent les conditions urbaines plus sèches tout en ayant un feuillage luxuriant, comme l'aulne de Corse et l'aulne de Spaeth.
Attesté vers 1200 sous la formeausne « bois d'aune »[14]; en 1268-71aune, arbre[15]; vers 1314 aulne[16].
Les termesvergne ouverne et leurs variantes sont les noms génériques de l'arbre dans le Sud de la France et au Piémont (Italie), où le dialecte local se rapproche de l'occitan et du franco-provençal. Il procède duceltique (gaulois)*uerno- non attesté mais probable ou du radical gaulois *vern- comparable aubretongwern, aucorniquegwern, augalloisgwern et à l'irlandaisfern[17].
La carte linguistique du termeaune pour le domaine gallo-roman montre son implantation au nord d'une ligneLoire-Vosges. Le sud est le domaine des formes issues du gaulois*uerno-.Aune procède partiellement du latinalnus de même sens, lui-même issu d'un indo-européenalisa ouelisa (terme relatif à l'eau, à la pluie, au marécage) que l'on retrouve dans l'anglais alder et l'allemand erl[18]. Le latinalnus, tandis qu'il se heurtait au sud au domaine au substrat gaulois*uerno-, s'implantait au nord grâce à sonhomophonie avec lesuperstratvieux bas francique*alisa[19]. Frings a démontré que le vocabulaire francique du nord de la France, ayant été essentiellement apporté par les Francs du nord-ouest,alnus est entré en contact non pas avec le francique*alira, forme en usage chez les Francs du sud-est dans les régions de laMoselle et duMain, mais avec*alisa, en usage dans les régions de laMeuse, de l'Escaut et du cours supérieur duRhin (cf.moyen bas allemand etmoyen néerlandaiselse), ce qui expliquerait la forme d'ancien françaisausne, si ces n'est pas seulement graphique[20]. Le maintien du substrat*uerno- dans ledomaine d'oc s'explique peut-être par le fait que l'aune, plus fréquent dans ce territoire plus souvent marécageux que dans le nord, a pu y conserver plus facilement sa dénomination primitive[20].
L'hypothèse d'un croisement entre l'ancien bas francique*alira et les noms d'arbres en-inus tels quefraxinus >Frêne,carpinus >charme[21] est peu vraisemblable, d'autant qu’aune a de nombreux correspondants en Italie du Nord. D'autre part, il semble difficile de faire dériveraune du latinalnus sans aucune influence étrangère[22],[23]. Son homophonie partielle avec le francique*alisa n'a pu que favoriser son implantation[20].
On peut également reconnaître l'aulne dans de nombreuxpatronymes qui évoquent originellement des hommes habitant près d'un bois d'aulnes qui indique souvent la présence d'unesource d'uncours d'eau bordé de ces arbres. Si les noms d'une douzaine d'arbres figurent, tels quels ou sous une forme dérivée, dans les 1 000 patronymes les plus fréquents en France, l'aulne est à l'origine de six noms propres les plus portés :Delaunay,Launay,Delannoy d'une part,Lavergne,Vernet,Vergne d'autre part[28].
Pour les anciensBretons, l'aulne était l'arbre de l'union avec lesGaëls. Il faisait partie du bosquet sacré desdruides[réf. nécessaire]. Chez les Grecs et les Romains, l'aulne était l'arbre de la mort[réf. nécessaire].
↑Les graines légères sont munies de bourrelets de liège qui permettent de flotter dans l'eau (parfois plus de12 mois) avant de germer le long des berges descours ou desétendues d'eau, au gré des crues, ce qui donne naissance à des peuplements linéaires.