Frère jumeau de l'aéronauteJean Piccard (1884-1963), il est le père de l'océanauteJacques Piccard (1922-2008), le grand-père de l'aéronauteBertrand Piccard (né en 1958) et l'époux de Marianne Denis (1895-1980), petite-fille du minéralogiste et chimisteCharles Friedel et de sa première épouse née Emilie Koechlin[2].
Le àAugsbourg, il s'élève enballon libre dans la stratosphère avec son assistant, l'ingénieur suissePaul Kipfer, devenu pour ce fait citoyen d'honneur deBienne. Il atteint l'altitude de 15 781 mètres, qui fut homologuée comme record du monde[3].
C'est l'ingénieur belgeMax Cosyns, de l'université libre de Bruxelles, qui accompagne le professeur Piccard lors de sa seconde ascension stratosphérique le 18 août 1932.
Éclectique, Auguste Piccard conçoit aussi des engins pour plongées profondes, lesbathyscaphes. En1960, l'un d'eux, leTrieste, atteint la profondeur de 10 916 m dans lePacifique (son quatrième record du monde, obtenu à 76 ans). Enseignant à l'université libre de Bruxelles, il bénéficie de l'aide du FNRS,Fonds national de la recherche scientifique deBelgique, pour la construction de ses ballons et du bathyscaphe qui portent les initiales du FNRS. Dans la suite, la marine française, avec les ingénieursGeorges Houot etPierre Willm, s'associa au FNRS pour les expériences du premier bathyscaphe en haute mer. Plus tard, c'est la marine italienne qui prit le relais pour les expériences d'un nouveau bathyscaphe, leTrieste.
En1903, étudiant à la faculté de Philosophie II (sciences naturelles) à l’université de Bâle. Il y publie en1904 son premier travail scientifiqueNouveaux essais sur la sensibilité géotropique des extrémités des racines.
En1910, ingénieur diplômé, il obtient son doctorat, à la veille de laPremière Guerre mondiale.Auguste Piccard (dans les suspentes du ballon à droite), avec son frèreJean (à gauche), auxiliaires dans la troupe aéronautique suisse, 1914-1918[4].
Ces ascensions furent l'occasion de nombreuses expériences scientifiques. Auguste Piccard retourne en Suisse pendant laSeconde Guerre mondiale, puis reprend son poste à Bruxelles.
Dès1945, il conçoit le premier vaisseau des profondeurs, lebathyscaphe, et, en1948, il réalise la première descente en profondeur, au large deDakar, en compagnie deThéodore Monod.
En, avec son troisième bathyscaphe, leTrieste, piloté par son filsJacques Piccard, il bat le premier record de plongée en profondeur : 3 150 mètres, au large de l'Italie.
LeTrieste est un petitsous-marin sous lequel se trouve fixée une sphère détachable, en acier très épais, de deux mètres de diamètre, munie d'unhublot et de deux projecteurs : le bathyscaphe, alimenté parbatteries.
En 1954, Auguste Piccard s’installe àChexbres, où il meurt en1962 à l'hôtel Prealpina[6]. Incinéré, ses cendres sont dispersées enLausanne[7].
En1929, Auguste Piccard (qui a fait sonservice militaire en Suisse dans une unité d'aérostiers), alors professeur de physique à l'université libre de Bruxelles (ULB), remet un projet auFonds national de la recherche scientifique (FNRS) récemment créé à l'initiative du roiAlbert. Il consiste à explorer la stratosphère en ballon à gaz. Le projet, qui nécessite 400 000 francs belges, reçoit un accueil favorable. L'engin est immédiatement mis en chantier. Il consiste en un ballon sphérique de 14 130 m3 rempli d'hydrogène et une cabine sphérique de 2,10 mètres de diamètre. L'enveloppe du ballon est encoton peint en jaune (Chloramine FF d'IG Farben) pour absorber le rayonnement solaire. Complètement gonflé, à l'altitude maximum, c'est une sphère de 30 mètres de diamètre. La capsule sphérique, enaluminium de trois millimètres d'épaisseur, est munie de huit hublots de dix centimètres de diamètre et percée de deuxtrous d'homme de quarante-six centimètres de diamètre. Étanche, sa pression interne sera celle d'une altitude de 1 500 mètres. Elle est peinte en noir d'un côté, en blanc de l'autre afin de pouvoir réguler la température en changeant son orientation par rapport au Soleil grâce à unehélice externe. Elle est prévue pour deux aéronautes, l'équipement scientifique pour mesurer la pression, la température et lerayonnement cosmique, et le lest nécessaire à la navigation. Le ballon fut fabriqué par la sociétéA. Riedinger, Ballon-Fabrik AG d'Augsbourg ; la nacelle par lesÉtablissements Georges L'Hoir àLiège. Afin de survivre dans cette nacelle étanche, ledioxyde de carbone était absorbé par unappareil de type Dräger àchaux sodée, et l'équipage répandait régulièrement de l'oxygène liquide sur le sol de l'habitacle pour compenser son absorption (sous forme de CO2 par l'appareil).
Une première tentative de décollage est effectuée le, mais lamétéo se gâte pendant les préparatifs et le projet doit être reporté.
Auguste Piccard et Paul Kipfer arborant leur « casque » en osier (1930).Caricature de Piccard par Van Schaik.
La seconde tentative a lieu à Augsbourg, le. Le départ est prévu pour 5 heures 30, juste avant le lever du Soleil, mais, à la suite d'une erreur, le ballon part un peu avant 4 heures, peu de temps après l'embarquement d'Auguste Piccard et de son coéquipier, Paul Kipfer. Rapidement, les ennuis s'accumulent : ils doivent réparer l'appareil à oxygène qui a été endommagé lorsque le vent s'est levé pendant la nuit. De même, ils éprouvent des difficultés à fermer un orifice qui a été déformé lorsque la cabine a été chahutée. Celle-ci n'est plus étanche et perd l'oxygène nécessaire à leur survie dans la stratosphère. À 4 heures 25, moins d'une demi-heure après le décollage, ils ont atteint l'altitude de 15 500 mètres. Ils sont montés à 555 mètres par minute, 33 kilomètres par heure ; avec les ennuis qu'ils ont rencontrés, ils n'ont pas eu le temps de faire beaucoup de mesures durant l'ascension. Mais ils sont les premiers êtres vivants qui ont accédé à la stratosphère. Les études scientifiques commencent. Il fait calme, l'air est limpide, le ciel est bleu foncé, tirant vers le violet. Ils lâchent encore un peu de lest et approchent les 16 000 mètres (le record sera homologué à 15 781 mètres). À 6 h 35, ils s'aperçoivent que la commande de la soupape qui devait leur permettre de redescendre en libérant de l'hydrogène s'est coincée à cause d'un cordage qui aurait dû être libéré au décollage, ils vont devoir attendre la baisse de température de la nuit pour redescendre. Plus tard, c'est le système qui devait permettre de réguler la température à l'intérieur de l'habitacle en présentant le côté sombre ou le côté clair au Soleil qui tombe en panne, et la température monte dangereusement ; ayant emporté trop peu d'eau, ils risquent ladéshydratation. C'est finalement à 21 h, après 17 heures de vol, qu'ils atterrissent sains et saufs, à 1 950 mètres d'altitude, sur le glacier de Gurgl, près deSölden auTyrol (environ46° 49′ 49″ N, 10° 59′ 34″ E). Après une nuit passée près de la nacelle, ils rejoindront les habitants du village partis à leur recherche. Leur retour à la civilisation est triomphal et Auguste Piccard recevra la Légion d'honneur.
Préparations d'un vol stratosphérique en 1932.Préparations d'un vol stratosphérique en 1932.Préparations d'un vol stratosphérique en 1932.
Ascension stratosphérique en ballon pressurisé (d'après Popular Science)
Une nouvelle cabine légèrement modifiée est construite chez le même Georges L'Hoir à Liège ; le ballon est le même. Cette fois-ci, la cabine est entièrement peinte en blanc, ils préfèrent avoir trop froid que trop chaud. Afin de bénéficier de meilleures conditions atmosphériques, le décollage a lieu dans une cuvette, àDübendorf, près deZurich. Les Suisses organisent le départ. Ils embarquent 6 tonnes de lest. Le décollage s'effectue sans problème, le, à 5 h 07, emportant Auguste Piccard et son assistantMax Cosyns[9],[10]. L'altitude maximum (16 201 mètres au baromètre, 16 940 mètres selon desthéodolites au sol[11]) est atteinte à 10 h 40 du côté dulac des Quatre-Cantons. À midi, ils amorcent la descente au-dessus de laBernina. Ils se posent en Italie près deMonzambano, près deDesenzano, un peu avant 17 heures. La mission a été « nominale ».
La pénible arrivée d'Auguste Piccard à Monzambano, le, après son second vol stratosphérique.
Le ballon sert une troisième fois le, avec à son bordMax Cosyns et Nérée Van Der Elst. Il part deHour enBelgique et se pose dans la région deLjubljana, àŽenavlje(en), près deMurska Sobota enYougoslavie (aujourd'huiSlovénie), après un vol record de 1 800 kilomètres, atteignant une altitude de 15 500 mètres[12]. L'enveloppe, devenue trop poreuse et dont la toile commence à se craqueler, ne sera plus utilisée ; elle prendra feu lors d'une tentative de conversion enmontgolfière (avec Max Cosyns, le).
BaptiséFNRS 2, sa sphère fut construite par lesUsines Émile Henricot àCourt-Saint-Étienne (Belgique).Max Cosyns était codirecteur de l'expédition, ce qui provoqua quelques tensions. Auguste Piccard ne fit qu'une plongée à -25 mètres, le, avecThéodore Monod près de l'île deBoa Vista auCap-Vert (où il rencontraJacques-Yves Cousteau). Les flotteurs sont endommagés lors d'un essai inhabité à -1 400 mètres le (profondeur atteinte, 1 380 mètres). La mer étant devenue houleuse, ils ne peuvent vider les réservoirs et embarquer le submersible à bord duScaldis. Ils tentent de le remorquer, mais il n'est pas prévu pour cela.
Les prochains bathyscaphes sont d'une conception différente. Ils ne sont plus mis à l'eau à vide sur le lieu de plongée, à cause de la difficulté et des risques de l'opération (transbordements, remplissage et vidange d'un liquide hautement inflammable en pleine mer) ; ils sont remorqués, réservoirs remplis, jusqu'au lieu de plongée. Faute de budget, les expériences continuent avec l'aide de la marine française qui prend à sa charge le budget des essais en haute mer. Basé àToulon, et rebaptiséFNRS 3, le bathyscaphe effectue des plongées à plus de 4 000 mètres[13].
Les deux "pilotes d'essai" du Bathyscaphe sont, à cette époque, deux officiers-ingénieurs de laMarine Nationale, Pierre Willm et le CdtGeorges Houot. Ils établiront un record de profondeur au large deDakar le 15 février 1954, atteignant la cote -4050 m[14].
C'estJacques Piccard qui déniche un financement du côté deTrieste en Italie, d'où le nom de baptême de ce second bathyscaphe : leTrieste. Doté d'une nouvelle cabine, forgée, fabriquée àTerni près deRome, il est d'une conception légèrement différente, plus navigable. La coque est fabriquée par lesCantieri Riuniti dell'Adriatico àMonfalcone près deTrieste. Les réservoirs d'essence sont remplis à terre et il est remorqué jusqu'au lieu de plongée. Un puits permet d'accéder à la sphère. Une plongée record à 3 150 mètres d'Auguste et Jacques Piccard aura lieu du côté dePonza, dans lamer Tyrrhénienne, le.
De nouveau, pour une question de budget, leTrieste est acquis par les Américains et basé àSan Diego. Il est doté d'une nouvelle sphère plus résistante et construite parKrupp avant d'effectuer la plongée record.
À 18 heures, ils remontent enfin, mais pendant cette plongée de 10 heures, ils ont eu tout le temps d'étudier l'eau et ses principales caractéristiques :radioactivité,température, etc.
Jacques-Yves Cousteau dans son livrele Monde du Silence corrobore la réputation de « savant distrait » qui inspira Hergé pour son personnage : installé dans la sphère dubathyscapheFNRS II lors d'un essai, Piccard avise une horloge murale mécanique arrêtée. En bon suisse, il entreprend de la remonter et de la mettre à l'heure, ignorant que l'horloge en question servait de dispositif de sécurité destiné à larguer le lest de sécurité en grenaille de fonte au bout d'un temps déterminé. Modifié, le dispositif se déclenche alors que le bathyscaphe est encore pendu à la grue duScaldis, et largue plusieurs tonnes de grenaille dans l'eau, manquant de peu un plongeur et retardant le premier essai de plusieurs jours[19].
Ses deux premières capsules stratosphériques ont été construites par un fabricant de tonneaux de bière en métal : les EtsGeorges L'Hoir àAngleur près deLiège[20]. Les EtsG. L'Hoir en firent un argument publicitaire pour leurs tonneaux. Bien plus tard, en 2016, les exploits d'Auguste Piccard et de son filsJacques Piccard seront mis en scène dans un clip publicitaire pour lecognac « Hennessy »[21].
Auguste Piccard avait du répondant face aux médias[22] : s'étant posé sur un glacier, les journalistes lui firent remarquer que c'était dangereux de s'aventurer dans la stratosphère sans matériel de montagne : il répondit qu'il n'avait pas non plus de smoking, au cas où il aurait atterri sur le palais des festivals de Venise. En 1960, on lui annonce qu'il vient à 76 ans, de battre son quatrième record du monde : il répondit alors « Si vous le dites, je veux bien l'accepter. Mais dites-moi donc à quoi ça sert tous ces sacrés records du monde ? ». Enfin lors de la plongée record, les médias américains voulurent que leur drapeau soit plus haut que le drapeau suisse. Piccard laissa faire, et remarqua ensuite que le drapeau suisse avait plongé plus profond.
↑Jacques-Yves Cousteau et Théodore Monod atteignent 2 100 mètres dans la fosse de Toulon ; Georges Houot et Pierre Willm battent le record de l'époque avec 4 050 mètres, le.
↑Jacques Yves Cousteau,le monde du silence, Paris, Hachette / Éditions de Paris,, 240 p.(ISBN9782010026362)
↑Dans les ateliers occupés actuellement par la société Drytec.
↑TimNudd, « Droga5 Beautifully Tells One of History's Most Incredible Father-Son Stories for Hennessy: Reaching for heaven and earth with the Piccards »,Ad Week,(lire en ligne).
↑« Auguste Piccard, Explorer, Is Dead. Auguste Piccard Is Dead at 78. Stratosphere and Sea Explorer »,The New York Times,(lire en ligne)