Cette page est trop longue et devrait être synthétisée ou scindée.
Cela peut poser des problèmes de chargement et rendre la lecture et la navigation inconfortables. Vous pouvez la raccourcir en résumant le contenu de certaines sections et en déplaçant leur contenu original vers des articles détaillésadmissibles, ouen discuter.
Né en réaction contre les dérives de l'industrialisation et la reproduction des anciens styles, c'est un mouvement soudain et rapide qui connaît un développement international. Le mouvement a connu des dénominations diverses selon les régions : Tiffany (d'aprèsLouis Comfort Tiffany) auxÉtats-Unis,Jugendstil[Note 1] ou Art nouveau en Allemagne,Sezessionstil en Autriche, Art nouveau ouNieuwe Kunst aux Pays-Bas,Art nouveau ou Stile Liberty en Italie[1], Art nouveau ouModernismo en Espagne (pour le second terme, plus spécifiquement en Catalogne),style sapin en Suisse,Modern en Russie. Le terme français « Art nouveau » s’est imposé notamment dans le monde anglo-saxon et hispanique, en même temps que la France, en lien avec la vague d’anglomanie qu’elle connaissait alors, a brièvement utilisé le termeModern Style[2] au début duXXe siècle[3].
On peut considérer que le mouvement Art nouveau, apparu au début des années 1890, atteint son apogée en 1905[4]. Quelques années avant laPremière Guerre mondiale, ce mouvement évolue vers un style plus géométrique, caractéristique du mouvement artistique dominant des années 1910 jusqu'aux années 1940 : l'Art déco[5].
AuXIXe siècle, à l'innovation, l’Art académique privilégie l'imitation de la tradition picturale et sculpturale européenne depuis la Renaissance ainsi que les modèles gréco-romains. Naissent alors tout au long du siècle des réflexions sur la création d'un art « moderne » plus en phase avec la société contemporaine. L'apparition d’un « art nouveau » s'inscrit dans cette volonté de renouvellement de l'art et de l'émancipation des modèles anciens[6]. On observe ainsi auXIXe siècle des précurseurs de l'Art nouveau.
Les planches dessinées parErnst Haeckel, comme cesradiolaires, seront source d'inspiration pour les artistes de l'Art nouveau.
Ernst Haeckel, avec la publication de nombreux livres scientifiques richement illustrés sur la faune et la flore, est considéré comme une des sources d'inspiration de ce mouvement artistique. Son travail a par exemple inspiré les grands lustres en forme de méduse deConstant Roux, pour lemusée océanographique de Monaco ou encore la porte monumentale de l'architecte françaisRené Binet, à l'Exposition universelle de 1900. Les artistes de l’Art nouveau feront souvent référence à son œuvre qui, pour Haeckel, ne visait que la reproduction du réel[7].
Viollet-le-Duc, gravure issue desEntretiens sur l'architecture.
Eugène Viollet-le-Duc est aussi un précurseur important de l'Art nouveau[8],[9],[10]. En effet, l'architecte combattait le classicisme antique qui monopolisait l’enseignement desbeaux-arts à Paris. À l’instar de l'art gothique qu’il étudiait pendant ses restaurations, il milite pour que « la logique de la nature soit le modèle à suivre »[11] en architecture. Il appelle à l’unité des arts ainsi qu'à l’abolition de la distinction entre art « pur » (ou architecture) et art « décoratif »[12].
De 1863 à 1872, Viollet-le-Duc écrit lesEntretiens sur l’architecture, un résumé de ses théories qu'il a voulu enseigner auxBeaux-Arts de Paris. CesEntretiens,« considérés comme fondateurs de l'architecture moderne, seront presque une bible pour des architectes tels queVictor Horta,Hector Guimard,Antoni Gaudi »[13].
Les milliers de dessins, notamment naturalistes, qui illustrent les ouvrages de Viollet-le-Duc seront aussi une source d’inspiration pour la future génération de jeunes architectes partout en Europe : « Nous avons tous copié les modèles de Viollet-le-Duc, même si neuf acheteurs sur dix de ses livres ne lisaient pas le français[14]. »
Si ce bandeau n'est plus pertinent, retirez-le. Cliquez ici pour en savoir plus.
Certaines informations figurant dans cet article ou cette section devraient être mieux reliées aux sources mentionnées dans les sections « Bibliographie », « Sources » ou « Liens externes »().
Les fondements théoriques du mouvementArts & Crafts, ainsi que les thèses deWilliam Morris, deJohn Ruskin (lequel influenceArthur Heygate Mackmurdo) ou deCharles Rennie Mackintosh, architecte du nouveau bâtiment de laGlasgow School of Art conçu de 1897 à 1909, définissent un nouvel art décoratif au Royaume-Uni. Ces théories se positionnent contre les« dérives de l'industrialisation » et de« l'assèchement créatif » qu'elle entraîne et prônent un retour à l'esprit desguildes médiévales, à l'étude du motif naturel[15], à l'emploi de formes épurées. Pour ces théoriciens une régénération de la société ne peut advenir sans la vérité des formes qui l'entourent et dont elle use.
Mais l'héritage Arts and Crafts sera renié par la génération des artistes avant-gardistes qui prônent un art intégré à l'industrie. Dans le mouvement Arts and Crafts, l’influence deRuskin est supplantée dès les années 1860 et 1870 par celle de Viollet-le-Duc. Si l'architecte Arts and CraftsCharles Eastlake admire son professeur, il est explicitement plus enthousiaste à l'égard de Viollet-le-Duc[16].
En Espagne, et notamment enCatalogne, le mouvement que l'on appelle « modernisme catalan » s'élabore durant les années 1870. Les artistes de ce mouvement sont à la recherche de nouvelles expressions formelles et ont la volonté de se situer dans une modernité d’envergure européenne. Il s'agit pour l’écrivainJoan Fuster de transformer« une culture régionale traditionaliste en une culture nationale moderne »[17].
Les prémices de l'Art nouveau se retrouvent dès 1871 dans les cours de la nouvelleÉcole provinciale d'architecture de Barcelone, alors dirigée parElies Rogent (1821-1897).« Admirateur et exégète des théories de Viollet-le-Duc, il obligera ses élèves à le lire »[18] :Gaudi,Lluis Montaner etPuig i Cadafalch, futures figures emblématiques du modernisme catalan.« Pour Gaudi lui-même, l’œuvre de Viollet-le-Duc a été presque l’unique instrument de la théorie de l’architecture… c’était sa bible architectonique »[19].
Ce mouvement présente des similitudes conceptuelles et stylistiques avec diverses variantes de l’Art nouveau qui se développent en Europe à la même époque. Il se singularise toutefois par plusieurs aspects comme son développement dans la continuité de larenaissance catalane (1833-1880) ainsi que le pressant besoin d’évolution et de rénovation politique et sociale. De plus, la naissance du mouvement se fait dans un contexte d'accroissement de la plupart des villes de Catalogne à un rythme effréné inconnu depuis laRenaissance : Girone, Tarragone, Reus, Sabadell, Terrassa, Mataro et surtoutBarcelone. Cette dernière, avec leplan Cerdà lancé en 1859, offrait1 100 hectares de terrains nus à l'imagination des architectes[20]. L'Art nouveau espagnol cherchait à créer un art national alors que d'autres pays d’Europe cherchaient à dépasser leurs frontières[22]. Dès 1886,Antoni Gaudí est le principal représentant des nouvelles tendances de ce mouvement, avec notamment lePalais Güell (1886-1890) orné de ferronneries et pinacles ouvragés, qui succède à sa période orientalisante initiée en 1883 (El Capricho,Casa Vicens) et précède leCollège Sainte-Thérèse de Barcelone (1888-1889) aux accents déjà modernes, puis le plein épanouissement de sa période naturaliste à la fin du siècle.
EnFrance, le propos se veut plus rationnel, moins tourné vers le passé et moins fermé aux matériaux nouveaux. Dans ses écrits théoriques, marqués par lerationalisme (Entretiens sur l'architecture, 1863-1872[23]), Eugène Viollet-le-Duc ne rejette pas le matériau moderne (lefer notamment) et veut au contraire lui donner une fonction ornementale et esthétique, à la manière des structuresgothiques duMoyen Âge. Paradoxalement, alors que Viollet-le-Duc est connu comme le chef de file français du mouvementnéogothique, c’est son enseignement qui préfigure le mieux la pénétration de l’Art nouveau en France, notamment le mouvementL'Art dans Tout né vers 1896 auquel appartientHenri Sauvage, lequel avait été« nourri aux écrits de Viollet-le-Duc ». En ce qui concerne Hector Guimard, il était« profondément un adepte de Viollet-le-Duc dans l’utilisation de la nature pour la décoration »[24] et il utilisera directement des dessins de Viollet-le-Duc pour certaines de ses œuvres comme ses édicules dumétro de Paris ou l'École du Sacré Cœur à Paris.
Par ailleurs, certaines des œuvres décoratives de Viollet-le-Duc, comme ses fresques deNotre-Dame de Paris ou celles duchâteau de Roquetaillade, sont de parfaits exemples du lien de filiation entre le mouvement néogothique et l'Art nouveau.
Avant de se répandre en France, les principes formels d'une architecture spécifiquement dénommée « Art nouveau » sont définis àBruxelles à partir de 1892 avecVictor Horta,Henry Van de Velde etPaul Hankar, tous trois disciples de Viollet-le-Duc :« Victor Horta et Paul Hankar étaient profondément inspirés par les écrits de Viollet-le-Duc[25][réf. incomplète]. »
L'influence considérable de Viollet-le-Duc s'étend aux architectures les plus divergentes telles que celles d'un Henry van de Velde… Ses écrits s'avèrent très marqués par les idées du maître français[26].
À Bruxelles, il existe un milieu d'avant-garde à la recherche de nouveauté capable de faire pièce à l'historicisme triomphant. Un ensemble de mécènes et d'artistes connu sous le nom deGroupe des XX qui« répondait aux théories de Viollet-le-Duc »[27] organise à partir de 1884 des expositions regroupant des artistes refusés par les salons officiels. Ce groupe est peut-être le premier à intégrer au sein d'une exposition de peinture et de sculpture des objets d'art décoratif. Ce mouvement est très influencé par des penseurs et artistes anglais, tels queWilliam Morris,James Abbott McNeill Whistler ouAubrey Beardsley ainsi que par l'art japonais. Il poursuit la même activité après 1894 sous le nom deLa Libre Esthétique[28].
Le mouvement identifié en tant que tel est divisé en trois périodes, notamment parPaul Greenhalgh(en), historien de l'art britannique : une période d'apparition au grand public, très courte, entre 1893 et 1895 ; une période pendant laquelle le mouvement s'étend rapidement et prend place dans tous les milieux culturels, entre 1895 et 1900 et, enfin, un moment où le mouvement se stabilise, commence à faire des bilans sur lui-même et essuie de sévères critiques, avant de s'effacer durant laPremière Guerre mondiale[29].
Le mouvement en tant que tel naît et se développe dans toute l'Europe entre 1890 et 1895 avec une très grande rapidité. Il est ainsi très délicat d'identifier des initiateurs précis. Le fait que de très nombreuses disciplines s'emparent de ce nouveau catalogue de formes donne très rapidement l'impression aux contemporains qu'ils assistent à l'émergence d'un mouvement artistique à part entière englobant tous les aspects de la vie[30].
Paul Greenhalgh identifie la phase initiale du mouvement entre 1893 et 1895, autour de quatre évènements se déroulant surtout dans de grandes capitales,Londres,Bruxelles etParis.
L'évènement initiateur est la publication dans leno 1 de la revueThe Studio des dessins d'Aubrey Beardsley en 1893. Ce jeune illustrateur présente pour la première fois un style de dessin qui sera caractéristique de l'Art nouveau, et il devient instantanément le centre d'intérêt des avant-garde des deux côtés de l'Atlantique[31].
La même année, àBruxelles,Victor Horta achèvel'hôtel particulier d'Émile Tassel, première réalisation architecturale Art nouveau aboutie[32]. Horta exploite le premier la ligne courbe, symbole entre tous de ce mouvement. La fluidité des espaces fait écho aux courbes végétales qui investissent ferronneries, mosaïques, fresques et vitraux, éléments tant structures qu'ornements, dans la plus parfaite ligne d'Eugène Viollet-le-Duc. Horta conçoit un édifice inédit avec des meubles qui correspondent au rythme des murs et de l’architecture ; il dessine les motifs des tapis, conçoit les meubles : c'est la naissance d'un « art total ».
L'année suivante, toujours dans la capitale belge,Henry Van de Velde publie un pamphlet,Le Déblaiement d'Art, dans lequel il prend du recul sur les évolutions artistiques contemporaines et fustige avec fougue le monde de l'art institutionnalisé. Cette réflexion est la première intellectualisation de deux idées fortes de l'Art nouveau : la valeur des arts décoratifs aux côtés des arts dits nobles et l'importance de l'harmonie générale dans tout travail de décoration[32].
Le dernier évènement, qui clôt la phase initiale du mouvement, est l'ouverture à Paris en 1895 du magasin et centre d'exposition « Maison de l'Art nouveau » parSiegfried Bing qui popularise le style dans la capitale et le fait connaître au grand public[33],[34].
En France, on utilise concurremment le termeModern Style pour faire référence au rôle initiateur joué par l'Angleterre[33] oustyle Nouille, dénomination populaire. AvecArt nouveau, il existe les expressionsstyle Guimard[Note 2],style de Glasgow[Note 3],[37]. Les personnes critiques envers ce courant artistique emploient volontiers les termesstyle métro,style Maxim's,style ténia[38] ouYachting style, comme le nommeEdmond de Goncourt en comparant les présentations de Bing à l'Exposition universelle de 1900 à des cabines de bateau[37].
En Angleterre, ce mouvement est également connu sous le terme deArts and Crafts movements, même si les personnes qui emploient cette expression l'utilisent pour désigner un mouvement plus large[33].
En Allemagne, on emploie soitStudio-stil en référence à la revueThe Studio qui a popularisé le mouvement soitJugendstil, du nom d'une autre revue défendant l'Art nouveauJugend. Les Allemands emploient également les termesBelgischestil ouVeldeschstil en référence à la Belgique ou àHenry Van de Velde[33]. Apparaissent également outre-Rhin les expressionsLilienstil (style lys) ouWellenstil (style vague)[37].
En Italie, en Espagne ou en Amérique latine, le terme destyle Liberty est employé en référence aux magasins du même nom qui importent des produits de ce mouvement[33].
La phase d'extension et de maturité du mouvement se situe entre 1895 et 1900. Ce style se répand dans toute l'Europe, chaque ville ou pays adaptant le mouvement artistique à ses propres caractéristiques et considérations locales[39].
Lors de l'exposition universelle de 1900 à Paris, le vitrail des apôtres deJózef Mehoffer a été récompensé par une médaille d'or. L'Art nouveau était ainsi arrivé dans l'art sacré.
Entre 1900 et 1914, l'Art nouveau s'est imposé et il commence à faire l'objet de débats, de discussion, de critiques[39]. Dès 1900, de nombreux critiques d'art s'attaquent à ce mouvement. Ils reprochent notamment de laisser obstinément de côté l'un des principes des arts décoratifs qui veut que l'ornementation d'un objet doit être subordonné à sa fonction. Dès l'exposition universelle de 1900,Charles Genuys, critique àLa Revue des arts décoratifs soulève ce point entre autres[41]. L’Art nouveau est également violemment attaqué par les mouvements nationalistes, à partir des années 1904-1905 au cours desquelles les associations d’extrême droite française condamnent notammentHector Guimard. Ces mouvances n'hésitent pas à employer la même rhétorique que pour les juifs, accusant ces artistes d'être contre la nation et de devoir être éliminés[6].
Par ailleurs, les créateurs authentiques sont vite rattrapés par le succès d'une mode dont ils sont les inspirateurs et qui triomphe à partir de l'exposition universelle en 1900, notamment dans une bimbeloterie envahissante qui ternit pendant longtemps la mémoire de l'Art nouveau. À partir de 1910, les salons des arts décoratifs sont inondés d'objets quelconques, reprenant des styles anciens et ne laissant plus de place aux objets Art nouveau, que le public délaisse[42]. De fait, la production d'objets Art nouveau après la Première guerre mondiale se poursuit avec un certain succès de nombreuses années, mais ceux-ci sont la plupart du temps de simples copies n'intégrant aucune nouveauté ni créativité[43].
Le déclin de l'Art nouveau se constate notamment par l'éloignement d'une partie de ses créateurs, lesquels se reportent vers d'autres styles (dès 1905-1906) qui, eux, se maintiennent. Par ailleurs, comme les représentants les plus influents de ce courant sont dispersés dans toute l'Europe, ils ne peuvent pas élaborer de système formel, ni s'inscrire au sein d'une institution officielle qui aurait légitimé et porté le mouvement[44].
Toutefois, cette vision est l'héritière d'unehistoriographie qui, pendant un temps très important, a peu étudié la fin de ce mouvement. La vulgate de l'histoire de l'art a longtemps considéré que les mouvements artistiques postérieurs ont rompu radicalement avec l'Art nouveau. Il ne faut toutefois pas omettre que de nombreux artistes pleinement membres du mouvement ont d'eux-mêmes et très progressivement fait évoluer leur pratique et que les nouveaux artistes s'inscrivent, la plupart du temps volontairement, dans la continuité des avant-gardes précédentes[43].
Vitraux des martyrs (1898-1899) par J. Mehoffer à Fribourg, Suisse.
Les treize vitraux deJózef Mehoffer à Fribourg couvrent une période allant de 1896 à 1936. Ils ont une importance qui dépasse le simple intérêt local. Ils sont remarquables du fait que, entre autres, ils traduisent des tendances stylistiques qui vont de l'historicisme auréalisme, avec des signes du style moderne, en passant par l'Art nouveau. Le cycle fribourgeois se distingue également parce qu'il a influencé le développement de l'art du vitrail monumental qui – après avoir suscité un regain d'intérêt dans la première moitié duXIXe siècle – se trouvait encore au stade expérimental à l'époque de la création des vitraux de Mehoffer[45].
L'utilitarisme généré par laGrande Guerre puis la reconstruction des régions dévastées portent un coup fatal au goûtmodern style, dès lors généralement déconsidéré. Ses détracteurs, qui ne désarment pas, l'ont toujours tenu pour futile ; il est désormais suranné aux yeux du grand public. L'Art déco lui avait succédé qui, dans sa version colossale des années 1930, en était devenu la négation.
Dès 1926, on commence même à en démonter les réalisations, à commencer par certaines stations demétro parisien, par exemple les stationsPlace de l'Étoile etPereire. Par nécessité et manque d'intérêt pour ce style, les démolitions s'accélèrent après laSeconde Guerre mondiale jusqu'aux années 1970, lors desquelles une prise de conscience en Belgique comme en France permet finalement d'épargner les constructions survivantes puis de les protéger et enfin de les restaurer.
L'Art nouveau est un mouvement artistique d'une extrême richesse, qui ne s'est pas déployé de la même manière selon les lieux, les moments et les techniques. Ce mouvement se reconnaît toutefois à un certain nombre de caractéristiques communes, même si tous les artistes n'ont pas exploité les mêmes thèmes ni intégré les mêmes influences.
La grande variété inhérente au mouvement Art nouveau empêche d'isoler un nombre fini de thèmes explorés par les différents artistes mais certains d'entre eux sont fondamentaux : la femme, la nature, les lignes courbes et l'asymétrique.
L'image de la femme est extrêmement présente au sein de la production artistique Art nouveau. Que ce soit en femme éthérée et mystérieuse, en femme symbole de la nature, en femme active et pleine de vie ou en femme fatale, mâtinée d'érotisme, ce thème est récurrent dans la grande majorité des tendances, des lieux et des mouvements internes.
L'image de la femme fatale est déjà très présente dans lalittérature fin-de-siècle. Ainsi, lenu féminin est traditionnellement limité aux scènes mythologiques et il est très codifié, expurgeant ainsi toutérotisme. De nombreux artistes Art nouveau s'en emparent et l'utilisent en n'hésitant pas à rompre avec l'image académique de la femme. Ils réinterprètent ainsi lesSalomé, lessphinges et autres mythes similaires[46].
L'image de la femme est également importante dans le mouvement Art nouveau pour son aspect naturaliste. Un grand nombre d'artistes montrent les femmes actives, fortes et maîtresses de leur destin, là aussi à rebours des codes classiques des représentations réalistes de la femme[46]. L'époque est celle de l'émergence des femmes de théâtre célèbres, de chanteuses à succès et de courtisanes. Les femmes artistes ont les faveurs des peintres et sculpteurs Art nouveau, qui voient dans ces femmes l'exemple des femmes fascinantes qu'ils se plaisent à imaginer et représenter[47].
En tant qu'objet scientifique en plein essor, la nature représente à la fin duXIXe siècle la modernité. Modèle de beauté parfaite, la nature est donc largement exploitée comme thème par le mouvement Art nouveau, mais en dépassant lenaturalisme traditionnel. Si les artistes Art nouveau sont nombreux à sortir des ateliers pour aller voir la nature de plus près, ils s'emparent également largement de nombreuses publications scientifiques qui décrivent et représentent le plus précisément possible la faune et la flore pour non pas en reproduire l'image le plus fidèlement possible, mais pour en trouver une forme esthétique nouvelle. D'ailleurs, un certain nombre de créateurs Art nouveau ont fait des études scientifiques et publient dans des revues universitaires[49]. Ainsi, cette idée de dépasser les représentations traditionnelles de la nature en exploitant avant tout les formes proposées par la faune et la flore apparaît très tôt via le mouvementArts and crafts et est théorisée par plusieurs figures du mouvement telsOwen Jones ouHenry Van de Velde. Les artistes s'emparèrent largement de l'ouvrage d'Ernst HaeckelFormes artistiques de la nature qui, publié entre 1899 et 1904, est pour eux comme un immense répertoire de formes. Josef Maria Olbrich déclare ainsi :« Qu'y a-t-il de plus propre à éveiller en nous des sentiments de vie que les lignes suggestives des longues antennes d'une méduse qui ondule dans l'eau ? »[50].
L'exploitation de la nature est pour nombre des premiers artistes Art nouveau également un rejet des thèmes traditionnels historicistes de l'art (scènes de guerre, portraits d'hommes célèbres, scènes religieuses, de la mythologie grecque ou romaine), tout autant que de leur forme[50].
Malgré la volonté affichée de rompre avec le passé, les artistes de ce mouvement ne rejettent pas entièrement les héritages du passé. En revanche, ils les mélangent avec d'autres influences, absentes des styles qui les ont précédés. Par exemple, l'Art nouveau viennois procède parfois à un emprunt au classicisme en réintégrant la mythologie dans ses œuvres. Ou encore laCasa Milà en Espagne, qui mélange à la fois archaïsme (baroque) et modernisme, dont l'inspiration est puisée dans la nature et le style byzantin.
Inspirés par les planches desencyclopédies et ouvrages illustrés médicaux, d'anatomie, de zoologie, d'entomologie,ornithologie, debotanique ou par observation directe, notamment lors des études d'anatomie des écoles d'art, plusieurs artistes « nouille » ont intégré à leurs œuvres les éléments observés. Les efflorescences végétales très décoratives leur sont communes et on trouve chez Gaudi ou chez Guimard la présence de pièces en forme d'ossements (manifeste pour certains montants des stations dumétro parisien).
Ces artistes ont baigné dans un flot d'images imprimées qui touchaient pour la première fois toutes les couches sociales. Les illustrations des livres d'anticipation d'Albert Robida ou deJules Verne ont introduit un nouvel imaginaire et la figuration de machines de science-fiction ou d'inventions récentes dans des décors dantesques ou exotiques se retrouve dans la créationmodern style.
Comme d'autres artistes inspirés par des civilisations lointaines et très différentes, les membres de l'Art nouveau ont été nombreux à être inspirés par l'art asiatique, japonais notamment, ou islamique. En cette fin de siècle, des images et des œuvres arrivent de ces contrées et surprennent les Européens, qui s'emparent des formes et thèmes utilisés[51]. L'exposition universelle de Paris en 1867 les ayant révélées aux Français comme à d'autres Européens, lesestampes japonaises envahirent les intérieurs bourgeois, et même rapidement bien des logis urbains modestes (japonisme).
Dans la veine de la redécouverte des anciennes civilisations européennes, de nombreux artistes Art nouveau s'emparent des motifs et formes des images qui leur parviennent. Cela concerne surtout les civilisationsceltiques ouVikings[52].
Même si les artistes tenant de l'Art nouveau critiquent les excès de l'historicisme duquel ils veulent s'extraire, cela ne signifie pas qu'ils rejettent indifféremment les formes des styles antérieurs. Ainsi, il se retrouve de nombreux exemples, mêlés de manière plus ou moins complexe à leur propre style, de réemploi de motifs gothiques[53], renaissance, classiques[54] et même rococo dans leurs œuvres[55]. Le rejet du classicisme formel, l'inspiration naturaliste et la rupture des lignes droites qui en est le corollaire au profit d'ornements contournés et une certaine (sur)abondance décorative, avaient conduit auxXVe siècle à l'évolution du gothique vers leflamboyant et auXVIIe siècle duclassicisme vers lebaroque puis lerococo en un mouvement comparable. En ce sens, l'Art nouveau estbaroque.
L'art symboliste a une influence importante sur de nombreux artistes Art nouveau, surtout en France. C'est ainsi que de nombreuxpostimpressionnistes,pointillistes,synthétistes ou membres du groupeNabi se retrouvent pleinement dans la mouvance Art nouveau[56],[57].
C'est à partir d'idées et d'idéaux communs que naquit l'aspiration à un style homogène qui trouverait son expression non pas dans l'uniformité, mais dans la diversité[58]. L’Art nouveau contient l’acceptation des différences de genre et d’esprit entre les êtres, il procède d’une très grande générosité de pensée. Ainsi dans la même ville, Bruxelles, trois architectes de renom ont pu cohabiter :Paul Hankar,Henry van de Velde etVictor Horta. Plutôt que de s’enfermer dans un style, les artistes ont avant tout la volonté de trouver de nouvelles manières de s’exprimer[4].
L’Art nouveau apparaît un peu partout au même moment. L'historienMario Praz parlera de « déflagration », « d'explosion de la jeunesse ». Ce courant est le fait d'une génération d'artistes, souvent jeunes (Hector Guimard a moins de trente ans lorsqu'il dessine lemétro parisien), et qui sortent de leur tour d'ivoire pour prendre en main le décor de la vie. L'objectif est de rompre avec l'exploitation des styles du passé, afin de proposer une alternative à unhistoricisme officiel qui empêche le renouveau des formes. Le terme allemandJugendstil signifie explicitement « style de la jeunesse ».
L’Art nouveau vient en réaction à l’obligation de faire ce qui est convenable, codifié. Ainsi, la lecture de labaronne Staffe, qui a écrit un traité des bonnes mœurs pour faire l’éducation des classes moyennes, permet de mieux comprendre la société de 1900 : tout y apparaît codifié, de la longueur du voile de deuil à la carte de visite en passant par le type de chapeau… Ces règles seront insupportables aux artistes de la mouvance Art nouveau, tout comme celui-ci paraîtra insupportable, en tant qu'art non convenu, dans lequel il est impossible de se repérer par rapport aux styles et aux conventions de l’époque[4]. Dans l’Art nouveau, il y a liberté de jouer, de s’amuser, d’être non conventionnel : c'est un art sonore, joyeux, musical, ce n’est pas un art du silence, de l’austère[7].
Plus encore, la sensualité et l’érotisme de l’Art nouveau font scandale. S'il porte une charge érotique manifeste, la sensualité des formes végétales comme la sur-utilisation de l’image de la femme dans le répertoire ornemental sont intimement liés à ce sentiment de vie que les artistes cherchent à restituer dans le décor quotidien[4].
Émile Gallé est un artistenaturaliste qui s'inspire de la nature en la stylisant très peu, il utilise ses formes dans les décors et dans les dessins de ses meubles. D’autres artistes vont plus loin et restituent dans les formes qu’ils inventent le sentiment de la sève qui circule dans le monde végétal. Naissent ainsi des formes qui suggèrent plus un organisme en croissance qu’un modèle précis. C'est par exemple le cas deGuimard, deGaudí et de certains artistes allemands, commeAugust Endell, qui partent de la nature pour évoluer vers un phénomène d’abstraction[4].
Les artistes vont créer des formes originales, inédites, inventer un vocabulaire nouveau tout en tenant compte de la possibilité de les reproduire industriellement. C'est une réaction à la fois contre une industrialisation mal pensée, tout en intégrant cette volonté de modernité. Avec l'utilisation des matériaux nouveaux et des moyens de production modernes, l'un des buts poursuivis, pour lequel il a échoué, était de s’adresser au plus grand nombre.
C'est dans cette optique que les anciens matériaux, comme le bois ou la pierre, ont été élégamment mariés avec les nouveaux, comme l'acier ou le verre. Pour chacun d'eux, des artistes ont poussé leurs recherches à l'extrême pour en tirer le meilleur parti. C'est ainsi que les pâtes de verre multicouches, les rampes d'escalier à entrelacs de ferronneries, les meubles aux ondulations de bois ont permis de mettre l'art à disposition de tous, pour un coût abordable, tout en gardant une volonté d'innovation formelle, inspirée de la nature. Cet art est tout de même lié à de nombreux mécènes et se propage dans un premier temps dans un milieu élitiste bourgeois.
Les clients sont nombreux pour les vases Gallé, dans lesmilieux mondains parisiens, entre 1896 et 1899. Mais, très vite, le succès populaire notamment dans le domaine de l’affiche, en fait quelque chose qui manque de classe et l’Art nouveau sera assez vite assimilé à l’émergence des classes moyennes. Très vite dévalué, puis mis en cause par lesnationalistes, il devient totalement inexistant dans les milieux supérieurs en quelques années. Au contraire, dans les classes moyennes françaises, l’Art nouveau a une très longue durée, et se prolonge jusque dans les années 1920, comme en témoigne l’Exposition des Arts Décoratifs de 1925, où son influence est encore sensible[6].
À Paris,Samuel Bing, marchand d'art, ouvre en 1895 une galerie : laMaison de l'Art nouveau. Précurseur français du mouvement, qui sera baptisé, comme son magasin, l'Art nouveau, Bing expose des designers, telsVan de Velde, Colonna oude Feure. À la même époque, la construction d'un immeuble, leCastel Béranger, rend célèbre, malgré les critiques, son architecteHector Guimard ; le « style Guimard » est aujourd'hui indissociable des entrées du métro parisien, réalisées en fonte industrielle. Toujours dans la même période, au milieu desannées 1890, Hector Guimard conçoit et dirige en tant qu'architecte la réalisation de lavilla Berthe, aussi connu sous le nom de La Hublotière, auVésinet, et par ces réalisations, pose les bases de l’Art Nouveau en France, tout en affirmant un langage architectural singulier[59],[60].
ÀNancy, c'est autour d'Émile Gallé, verrier et ébéniste, qu'est créée en 1901 l'École de Nancy. Par ce courant résolument novateur,Nancy s'affirme comme la capitale de l'Art nouveau en France. Des verriers, ébénistes, architectes ou ferronniers de renom en étaient membres. À titre d'illustration, un immeuble aujourd'hui monument historique, sis au 22, rue de la Commanderie, à Nancy, est le fruit de la collaboration entre l'ébéniste et ferronnier d'artEugène Vallin, le verrierJacques Gruber et l'architecteGeorges Biet[61]. Parmi les architectes nancéiens, citons encoreÉmile André, membre du comité directeur de l'école de Nancy avec, à son actif, une douzaine d'immeubles Art nouveau dans cette ville.
Carte postale illustrant l'entrée des Magasins Réunis de Nancy à l'angle de la rue du Faubourg Saint Jean et de la rue Victor Poirel.
Tout comme Samuel Bing à Paris,Eugène Corbin à Nancy joua un rôle primordial dans la diffusion des préceptes de l'École de Nancy tels que les avait promulguésÉmile Gallé. En effet, laMaison des Magasins Réunis, grand magasin nancéien dont Corbin était propriétaire, permirent de diffuser commercialement les oeuvres créées par les artistes locaux en les faisant éditer dans les ateliers de production[62]. Ainsi, les broderies deJacques Gruber furent vendues sur les étals du grand magasin, tout comme le mobilier spécialement créé pour les Magasins Réunis parMajorelle et dessiné par l'architecteLucien Weissenburger[62]. En outre, Eugène Corbin encouragea la création artistique à travers la promotion de concours organisés dès 1905 en collaboration avecVictor Prouvé, alors président de l'École de Nancy[62]. Ces concours visaient à renouveler et à diffuser les principes de l'Art nouveau et ils permirent à des artistes commeHenri Suhner, lauréat d'un des concours, de voir attribuer à son projet une place d'honneur sur les stands des Magasins Réunis[62]. De mêmeReims, ville reconstruite après laPremière Guerre mondiale, peut être considérée comme une ville de l’Art nouveau tardif[6]. EnAlsace-Moselle, on remarque la présence duJugendstil (équivalent germanique de l'Art Nouveau) dans l'architecture, du fait de l'annexion allemande, notamment àStrasbourg et àMetz.
S'il existe des maisons de campagne d'inspiration Art nouveau, elles sont souvent commanditées par les mêmes personnes qui font construire leur hôtel particulier, ou hôtel de rapport, en plein cœur de la ville. L'Art nouveau inspire bien sûr l'architecture de nombreux immeubles parisiens, mais surtout celle, parfois très soignée, de nombreuses villas anciennes enmeulière, construites pour la plupart au début duXXe siècle, et que l'on peut découvrir en périphérie de Paris, notamment dans les villes de banlieue duVal-de-Marne, de l'Essonne et de laSeine-Saint-Denis. Celles-ci se caractérisent par leurs audaces en fer forgé, leurs décors de briques et de faïence, leurs pignons et parfois leurs petites tours. C'est dans ces banlieues que des architectes français expérimentent de nouveaux matériaux et de nouveaux styles inaugurant l'Art nouveau qui, par opposition à l'académisme, se veut total.
S'il est relativement polymorphe, l'Art nouveau concerne avant tout l’architecture et les arts du décor. Cerapprochement entre les arts majeurs etmineurs[63] fait partie du combat qu'auraViollet-le-Duc avec les Beaux-Arts de Paris dès l’année 1854[64]. Les connexions entre le mouvement et les arts dits nobles tels la peinture ou la sculpture sont plus éloignés et si des influences croisées apparaissent de manière évidente, elles ne permettent pas de parler d'un style Art nouveau en peinture etsculpture[Information douteuse] pourtant des chapitres entiers sont consacrés à la sculpture Art nouveau dans des ouvrages de référence[65].
Une partie des origines des réalisations Art nouveau en architecture vient des théories de Viollet-le-Duc qui, très tôt, utilise des formes nouvelles pour dépasser les styles anciens et surtout postule (sans la tester) la possibilité d'ériger des structures portantes en acier pour la recouvrir de maçonnerie. Cette nouvelle technique permet de penser différemment la construction des bâtiments par la suppression des ouvrages de renforcement obligatoires dans l'architecture traditionnelle tels les plafonds voûtés et les arcs-boutants. Cette idée est reprise lors de la période Art nouveau par tous les grands architectes du mouvement,Louis Sullivan,Victor Horta,Francis Jourdain ouAuguste Perret[67].
Le premier architecte véritablement Art nouveau estVictor Horta. Il emprunte résolument la voie de l'acier au sein de ses constructions ; mais, contrairement à la norme adoptée par ses contemporains qui les cachent, il décide de montrer les structures en acier, de les intégrer hardiment à l'ensemble décoratif du bâti. Ce parti-pris à rebours des habitudes fait sensation et devient une marque de fabrique, qu'il porte au plus haut point avec laMaison du Peuple commandée par leParti ouvrier belge, achevée en 1899[67]. Mais le programme de l'architecture Art nouveau est tout entier contenu dans la première construction de Horta, l'hôtel Tassel. Édifiée en 1892, cette construction surprend l'ensemble de la profession, car elle porte l'architecture bien au-delà des arts décoratifs pour toucher à un domaine beaucoup plus large[68].
L'hôtel Tassel a un retentissement important, bien au-delà des frontières belges. Ainsi à Paris de nombreux architectes sont conquis par cette nouveauté et s'en inspirent plus ou moins largement. Le personnage emblématique de l'architecture Art nouveau dans la capitale française estHector Guimard qui adjoint les courbes caractéristiques du mouvement naissant à son propre style, déjà original[69]. Toutefois, il est une exception car la plus grande partie des constructions Art nouveau parisiennes est l'œuvre de professionnels peu célèbres, surtout pour des magasins et restaurants telMaxim's ou labijouterie deGeorges Fouquet[70]. En France, la principale ville dans laquelle ce style se développe estNancy où il s'insère dans le développement local d'un puissant mouvement artistique et industriel[71].
Le projet artistique de Victor Horta est très fréquemment utilisé de manière partielle, mêlé d'inspiration plus classique. Ainsi,Charles Plumet mélange des éléments Art nouveau à des bâtiments de styleXVIIIe etJules Aimé Lavirotte avec des immeubles somme toute classiques dans leur structure générale[69].
Les architectes qui reprennent le plus intégralement possible les fondamentaux Art nouveau sont peu nombreux. On peut citer en FranceXavier Schoellkopf avec la maison de la chanteuseYvette Guilbert[69].
L'Art nouveau en architecture est également le prétexte pour faire preuve d'une grande capacité d'invention, tout en dépassant les formes initiales. Ainsi, lavilla Jika deLouis Majorelle édifiée parHenri Sauvage à Nancy est construite dans un mélange d'architecture médiévale fantasmée et de formes typiquement Art nouveau[71].
L'Art nouveau a également laissé de nombreuses œuvres dans les villes deNancy etBruxelles qui furent des centres de développement de ce mouvement. Également,Rīga contient la plus grande concentration d'Art nouveau enEurope.
Si ce bandeau n'est plus pertinent, retirez-le. Cliquez ici pour en savoir plus.
Certaines informations figurant dans cet article ou cette section devraient être mieux reliées aux sources mentionnées dans les sections « Bibliographie », « Sources » ou « Liens externes »().
La conception du meuble de l'Art nouveau fait revivre l'artisanat : il est le style du concepteur individuel, remettant en son centre le travail de l'artiste et éloignant celui de la machine. L'innovation majeure dans le domaine de la décoration intérieure se situe dans la recherche d’unité. Toutefois, le style n’échappe pas à certains parallèles avec la tradition, en particuliergothique,rococo etbaroque ; le gothique servit ainsi de modèle théorique, le rococo d’exemple dans l’application de l’asymétrie, et le baroque de source d’inspiration en matière de conception plastique des formes. De son côté, l’art coloré du Japon, par son traitement hautement linéaire des volumes, contribua également massivement à l’émancipation de l’Art nouveau de l’asservissement à la symétrie des ordres grecs.
Le bois prenait des formes étranges et le métal, à l’imitation des entrelacements fluides de la nature, devint tortueux. En effet, le style est très largement basé sur l’observation de la nature, non seulement en ce qui concerne l’ornement, mais aussi d’un point de vue structurel. Des lignes vitales, sensuelles et ondoyantes, irriguent la structure et en prennent possession. Chaises et tables semblent modelées dans une matière à la mollesse caractéristique. Partout où cela est possible, la ligne droite est bannie et les divisions structurelles sont cachées au bénéfice de la ligne continue et du mouvement. Les plus belles réussites de l’Art nouveau, au rythme linéaire marqué, relèvent d’une harmonie qui les rapproche de l’ébénisterie duXVIIIe siècle.
C’est à Nancy que les affinités entre rococo et Art nouveau apparaissent de la manière la plus convaincante. Moins fascinant, mais faisant partie des personnalités artistiques les plus en vue de l’époque,Louis Majorelle (1859-1926) est le deuxième chef de file du courant Art nouveau à Nancy. Les travaux d’incrustation de Gallé étaient le point fort, en variant beaucoup les motifs, en allant du végétal aux inscriptions littéraires à contenu symbolique. Typique pour la production de ce maître est la transformation d’éléments structurels en tiges ou en branches se terminant en fleurs. Contrastant avec l’école de Nancy, l’Art nouveau parisien est plus léger, plus raffiné et austère. Les motifs d’inspiration naturelle présentent un degré de stylisation plus grand, parfois même une certaine abstraction, et apparaissent de manière marginale.
Lemobilier urbain et la décoration urbaine ont joué un rôle essentiel dans la création d'une atmosphère esthétique cohérente et harmonieuse dans les villes influencées par l'Art nouveau. Les bancs publics, souvent ornés de lignes courbes, de motifs floraux et de détails ornementaux, offraient non seulement un endroit pour se reposer, mais embellissaient également les places et parcs urbains, ajoutant une touche d'élégance au paysage urbain. Par exemple, les célèbrescolonnes Morris à Paris, conçues par l'architecte françaisGabriel Davioud, présentent des motifs floraux et des détails sculpturaux caractéristiques de l'Art nouveau[73].
Les lampadaires de rue, avec leurs designs inspirés de la nature, contribuaient non seulement à l'éclairage public, mais aussi à la beauté des rues, avec des feuilles, des fleurs et des oiseaux incorporés dans leurs styles Art nouveau. Même des éléments fonctionnels tels que les grilles de ventilation et de protection étaient transformés en œuvres d'art avec des motifs complexes et encore des motifs floraux, complétant l'architecture de la ville. Les fontaines publiques et les sculptures urbaines, caractérisées par des formes organiques et des détails ornementaux, fournissent de l'eau potable. Un exemple emblématique est celui desfontaines Wallace à Paris, conçues par le sculpteur françaisCharles-Auguste Lebourg, qui incorpore des éléments de l'Art nouveau dans leur design élégant et fonctionnel[74].
Même les enseignes commerciales et les signalisations adoptent le style Art nouveau, avec des lettres stylisées et des éléments décoratifs, offrant une expérience visuelle cohérente et attrayante en naviguant dans la ville. Dans l'ensemble, ces éléments n'étaient pas seulement fonctionnels, mais représentaient également des expressions artistiques enrichissant la vie urbaine, reflétant les idéaux de beauté, d'harmonie et d'intégration de l'art dans la vie quotidienne si chers au mouvement Art nouveau[75].
Si ce bandeau n'est plus pertinent, retirez-le. Cliquez ici pour en savoir plus.
Certaines informations figurant dans cet article ou cette section devraient être mieux reliées aux sources mentionnées dans les sections « Bibliographie », « Sources » ou « Liens externes »().
Des couvertures de livres aux illustrations de revues, des affiches publicitaires aux panneaux décoratifs, de la typographie de presse aux cartes postales, l’Art nouveau a laissé sa trace.
Dans le cadre du renouveau de l'estampe dans les années 1880, soutenu notamment parAuguste Lepère et sa revueL'Estampe originale (1888-1895) illustrée parHenri de Toulouse-Lautrec ouPierre Bonnard qui s'inspirent dujaponisme, l'un des précurseurs du nouveau graphisme a étéJules Chéret. Fils d'untypographe, il suit des cours à la Petite École, futureÉcole nationale des arts décoratifs, et développe une nouvelle technique plus économique pour la reproduction de la lithographie en couleurs et plus adaptée à la reproduction de masse de l'affiche publicitaire. En outre, il a amélioré la nature esthétique du manifeste, en lui fournissant des motifs décoratifs, le transformant en un art décoratif de forme autonome. Il a été appelé « le père de l'afficheBelle Époque », et a inspiré et encouragé d'autres artistes à explorer le genre.
Des nombreux auteurs qui s’y adonnèrent, le plus influent étant sans conteste le TchèqueAlfons Mucha. Ses créations gagnèrent une renommée internationale, grâce à la délicatesse de ses dessins qui incluaient le plus souvent la figure féminine comme figure centrale, enveloppée par des arabesques d’éléments naturels et soulignée de lignes rappelant la mosaïque ou le vitrail. Son style, principalement utilisé dans les œuvres à caractère commercial, fut imité par les illustrateurs de son époque. Ce fut, par exemple, le cas deGaspar Camps, surnommé le Mucha catalan.Aubrey Beardsley fut l'un des plus originaux artistes Art nouveau, malgré l’irrévérence érotique et la polémique issue des thèmes qu’il choisit d’illustrer en noir et blanc pour l'édition, la ligne tant sinueuse qu'anguleuse qui délimite des plages sombres sur un fond blanc, évoquant la gravure érotique japonaiseShunga. D’autres affichistes célèbres sontPrivat Livemont,Koloman Moser,Charles Rennie Mackintosh,Eugène Grasset,Franz von Stuck,Cesare Saccaggi ou encoreRamon Casas qui est un artiste dumodernisme catalan.
En typographie, de nombreuses créations de caractères se font dans l’esprit de l’Art nouveau, avec, entre autres,Eugène Grasset,Ernest Lessieux etGeorge Auriol (policesAuriol,Française légère) en France, Otto Weisert (police Arnold Böcklin, 1904) en Suisse…
« En raison de son influence ambiguë et souvent très marginale sur les beaux-arts, il est beaucoup plus difficile d'étudier l'Art nouveau dans ce domaine que dans les autres disciplines. Le mouvement correspond plus à une recherche de lignes qu'au domaine de la peinture au sens traditionnel du terme, aussi s'incarna-t-il davantage dans des réalisations plastiques que sur la surface plane »[76]. Ainsi, de nombreux éléments propres au mouvement Art nouveau sont expérimentés par des peintres avant-gardistes avant d'être repris par des artistes d'autres disciplines. Les caractéristiques les plus significatives communes à la peinture de l'époque et constitutives de l'Art nouveau sont :
Il n'existe donc pas réellement d'école de peinture Art nouveau, mais le mouvement est si protéiforme, il touche tant à tous les aspects des représentations graphiques qu'il a une influence sur un grand nombre d'artistes et d'écoles, quelle que soit leur orientation finale[76].
À la fin des années 1880, la recherche d'un dépassement de l'impressionnisme pousse de nombreux peintres a« réagir contre la conception illusionniste de la forme et contre la dissolution de la ligne et de la surface qui en résulte »[76]. Initiées par deux associations d'artistes novateurs,les Vingt de Bruxelles et laSociété des artistes indépendants à Paris, les écoles de peinture européennes de la fin du siècle empruntent beaucoup au mouvement Art nouveau, que ce soit lessymbolistes, lespréraphaélites anglais, lesexpressionnistes allemands, lesNabis et lesFauves[76].
Si ce bandeau n'est plus pertinent, retirez-le. Cliquez ici pour en savoir plus.
Certaines informations figurant dans cet article ou cette section devraient être mieux reliées aux sources mentionnées dans les sections « Bibliographie », « Sources » ou « Liens externes »().
Si ce bandeau n'est plus pertinent, retirez-le. Cliquez ici pour en savoir plus.
Certaines informations figurant dans cet article ou cette section devraient être mieux reliées aux sources mentionnées dans les sections « Bibliographie », « Sources » ou « Liens externes »().
L’art de la joaillerie a été revitalisé par l’Art nouveau, la principale source d’inspiration étant la nature. Cette rénovation fut complétée par la virtuosité atteinte dans le travail de l’émail et des nouveaux matériaux, tels que l’opale et autresgemmes. L’intérêt généralisé porté à l’art japonais et l’enthousiasme grandissant pour les différentes techniques de la transformation du métal, jouèrent un rôle considérable dans les nouvelles approches artistiques et les thèmes d’ornementation.
Durant les deux siècles précédents, la joaillerie fine s’était centrée sur lespierres précieuses, particulièrement sur lesdiamants. La préoccupation du joaillier consistait principalement à former un cadre adapté, afin que la pierre resplendisse. Avec l’Art nouveau, un nouveau type de joaillerie voit le jour, motivé et dirigé par le concept du dessin artistique, ne donnant plus l’importance centrale du bijou à la pierre sertie.
Les joailliers deParis etBruxelles furent les principaux instigateurs de ce revirement, donnant un nouveau souffle qui se traduira rapidement par une large renommée du style Art nouveau. Les critiques français contemporains étaient unanimes : l’art de la joaillerie traversait une transformation radicale, et le joaillier et maître verrierRené Lalique se trouvait en son centre. Lalique glorifia la nature dans ses créations, amplifiant son répertoire pour y intégrer des éléments peu conventionnels — citons les libellules et herbes — inspirés par les dessins de l’art japonais.
Les joailliers désiraient se démarquer tout en inscrivant ce nouveau style dans une tradition, puisant leur inspiration dans laRenaissance, pensons notamment aux bijoux en or émaillé et sculpté. On voit réapparaître à cette période des techniques anciennes remises au goût du jour, telle que la technique duplique-à-jour, qui permet d'obtenir des bijoux traités en cloisonné et émail translucide, semblable à du vitrail miniature[77]. De très nombreux joailliers de la période en firent usage, commeRené Lalique,Henri Vever ou encore Eugène Feuillâtre. Dans la majorité des créations émaillées, les pierres précieuses cédèrent leur place prédominante, les diamants étant relégués à un rôle subsidiaire en combinaison avec des matériaux moins habituels comme le verre modelé, l’ivoire et la corne. La perception du métier de joaillier évolue, considéré par ses créations comme artiste et non plus comme artisan.
Long collier dit sautoir. La mode est au bijou fantaisie (laiton, verre, corail…).
Émile Gallé, un des grands maîtres verriers du mouvement Art nouveau.
Dans le domaine de laverrerie, la France connaît une révolution artistique dès les années 1880. Cette évolution importante s'ouvre au grand public via l'expositionLa pierre, le bois, la terre et le verre qui a lieu à Paris en 1884. Cette exposition présente les deux pionniers du mouvement,Eugène Rousseau, inspiré par lejaponisme, etEugène Michel[78]. Cette nouvelle vague est immédiatement rejointe par celui qui deviendra le symbole de la verrerie Art nouveau :Émile Gallé[79].
Émile Gallé révolutionne l'art de la verrerie durant ses vingt années d'activité, autant par l'immense inventivité des formes déployées que par le travail sur de nouvelles techniques et des combinaisons de techniques inédites. Il est connu ainsi pour ses « verreries parlantes », sur lesquelles il inscrit desvers. Son inspiration de prédilection est la nature, que ce soit via la botanique ou l'entomologie. Il bénéficie dès ses premières productions d'un immense succès critique et public[80]. Rapidement, des imitateurs voient le jour et satisfont une demande croissante pour ce type d'objets décoratifs. Certains présentent de belles réussites artistiques, tels les frèresAuguste etAntonin Daum, qui s'associent pour certaines réalisations avecLouis Majorelle, ou lesfrères Muller[81].
À l'étranger, la verrerie Art nouveau se développe largement enBohême. Une des entreprises majeures de ce mouvement est la verrerieJohann Loetz(de).« La verrerie Loetz se caractérise à l'origine par des formes asymétriques qui combinent des couleurs opaques rehaussées de finitions texturées » ; elle est également connue pour des verres iridescents aux incrustations d'or, proche de la production deTiffany, ou l'application aux vases d'anses aux formes graciles et grimpantes[84]. Outre la verrerie Loetz, les quelques autres sociétés à travailler ce style ne le font que de manière superficielle et pour une petite part de leur production : Ludwig Moser und sohn,Meyr's Neffe(de) ou la Glasfabrik Blumenbach[85].
En Scandinavie et en Russie, peu d'entreprises se lancent dans la fabrication d'objets de style Art nouveau. En Suède, les entreprises Kosta et Orrefors, en Russie, la manufacture de verre de la cour tsariste, procèdent à quelques imitations Art nouveau, bien après les débuts du mouvement en Europe de l'Ouest[87].
Les verriers du Royaume-Uni sont très peu réceptifs à la stylistique Art nouveau, préférant les motifs classiques ou mythologiques. Seules les sociétés Thomas Webb & Sons et Stevens & Williams, domiciliées àStourbridge, osent timidement quelques réalisations aux motifs floraux, tout en restant assez conventionnels[87].
En Amérique du Nord, la production d'objets en verre est dominée par Tiffany. Celui-ci, tout en réalisant toujours des gammes d'objets conventionnels, se tourne vers des thèmes floraux proches de l'Art nouveau européen. La mise au point d'un procédé de fabrication industriel nouveau lui permit de développer un commerce à destination des classes moyennes, étant ainsi en phase avec l'une des aspirations des artistes Art nouveau. On peut citer également la sociétéSteuben Glass Works(en) (àCorning) et Philip Julius Handel (dans leConnecticut). L'immense succès de Tiffany incite de nombreuses compagnies à l'imiter, et à poursuivre même lorsque le mouvement s'essouffle dans les années 1920 et 1930[88].
La première période de ce mouvement, entre 1895 et 1904, voit apparaître des bâtiments colorés, plein de courbes, fantaisistes et même facétieux. Par la suite, ils évoluent vers des formes plus épurées et un retour à la tradition. L'exemple le plus significatif de cette école est lamaison d'Adolphe Stoclet àBruxelles, réalisé par Hoffmann entre 1904 et 1911, et qui à elle seule expose une grande partie du savoir-faire des artisans viennois[89].
Si Nancy et Paris concentrent à elles deux la majorité de l'Art nouveau architectural en France, de nombreuses villes abritent plusieurs réalisations de cette époque et de ce style.
ÀParis, comme ailleurs en France, mais en plus foisonnant, l'Art nouveau se développe à la suite de deux mouvements majeurs de la société française : l'espritfin de siècle, esthétisant et décadent et dont les initiateurs sont les poètesRimbaud,Verlaine,Baudelaire ouGautier et le triomphe du modèle social bourgeois sous l'Empire et surtout laTroisième République[90]. L'Art nouveau spécifiquement parisien est défini par les réalisations d'Eugène Gaillard etGeorges de Feure, qui mettent en avant au-delà d'autres motifs les arabesques élégantes et la féminité[91].
Le mouvement artistique Art nouveau s'exprime dans la capitale dans tous les arts et se déploie pleinement dans tous les aspects de la vie quotidienne, architecture, orfèvrerie, ébénisterie et arts visuels. De nombreux artistes telHector Guimard ne se limitent pas à tel ou tel aspect mais explorent leurs idées au travers des réalisations très variées[92].
Paris découvre l'Art nouveau essentiellement grâce aux efforts et au talent de dénicheur deSiegfried Bing. Celui-ci, mécène et revendeur passionné d'objets d'art ouvre en 1895 une galerie appeléeMaison de l'Art nouveau qui fait connaître tout autant les productions d'un très grand nombre d'artistes du mouvement qu'il ne popularise le terme auprès du grand public. Bing investit également une forte somme pour aménager le pavillon de l'Exposition universelle, dont il confie la décoration de la façade àAndré Arfvidson, et qui lui assure, à lui tout autant qu'à l'Art nouveau, une très large renommée[91].
Lampe à décor de prunellier, Émile Gallé, c. 1900, 76 cm, pâte de verre avec monture en bronze,Zurich,galerie Katharina Bütteker.
Nancy a accueilli à partir de 1871 de nombreux lorrains qui souhaitaientrester Français, après l'annexion d'une partie de laLorraine par l'Empire allemand. L'Art nouveau y devient le moyen d'expression d'un régionalisme revendiqué.
Émile Gallé,Daum Frères,Jacques Gruber et bien d'autres, créent le 13 février 1901 l'associationÉcole de Nancy, aussi appelée Alliance Provinciale des Industries d’Art[93]. L'association se définit comme une« sorte de syndicat des industriels d'art et des artistes décorateurs, [qui] s'efforce de constituer en province, pour la défense et le développement des intérêts industriels, ouvriers et commerciaux du pays, des milieux d'enseignement et de culture favorables à l'épanouissement des industries d'art[94] ». Présidée parÉmile Gallé et vice-présidée parLouis Majorelle,Antonin Daum etEugène Vallin, l'École de Nancy rassemble de nombreux industriels d'art, architectes et artistes qui ont à cœur d'améliorer le cadre de vie de leur époque par la création d'un art nouveau inspiré de la nature[93].
Les productions des industries d'art nancéiennes, à l'instar de celles de laverrerie Daum, sont ainsi majoritairement ornées de motifs floraux et/ ou végétaux. Pour réaliser ces œuvres, les ouvriers d'art s'appuient sur des modèles tels que l'Encyclopédie florale d'Henri Bergé[96].
PourKlaus-Jürgen Sembach, lamaison de l'ingénieur Tassel incarne toute la complexité de l'Art nouveau :« Les éléments rationnels et artistiques sont parvenus à une symbiose où ne prédomine aucun des deux éléments. » L'utilisation des structures d'acier permet d'assurer la transparence, concept central dans l'œuvre d'Horta, et donner une illusion d'espace dans une ville où les parcelles constructibles sont étroites[97].
L'artiste le plus célèbre de Bruxelles estHenry van de Velde, sans doute grâce à son talent dans lemarketing personnel. Il commence sa carrière par la construction de sa propre maison, lavilla Le Bloemenwerf, sans formation de design ou d'architecture.
Cette section est vide, insuffisamment détaillée ou incomplète.Votre aide est la bienvenue !Comment faire ?
En Suisse, sous l'impulsion deCharles L'Eplattenier, une variante locale de l'Art nouveau s'attache à évoquer la végétation propre aux régions montagneuses du Jura. Il s'agit dustyle sapin visible dans la région de La Chaux-de-Fonds. Lemusée des beaux-arts de cette ville conserve un important ensemble de meubles, peintures, ainsi que de créations horlogères.
À l'opposé des autres tendances de l'Art nouveau en Europe, les artistes, en Catalogne et en Hongrie, cherchent à créer ou à mettre en valeur une architecture nationale réelle ou supposée. LorsqueLluis Domènech i Montaner déclarait, en 1878 :« Le mot de la fin sur toutes ces discussions sur l’architecture, la question centrale de toutes ces critiques tourne autour de l'idée d’une architecture moderne nationale. »
L’Art nouveau en Catalogne est donc l’occasion comme l’écrit l’écrivain catalanJoan Fuster de créer « une culture nationale moderne. Elle s’exprime notamment à travers l’architecture, spécifique à l’Art nouveau catalan et spectaculaire dans l’espace urbain comme à Barcelone où s’exprime « la libération des couleurs et des formes »[98] :
Si ce bandeau n'est plus pertinent, retirez-le. Cliquez ici pour en savoir plus.
Certaines informations figurant dans cet article ou cette section devraient être mieux reliées aux sources mentionnées dans les sections « Bibliographie », « Sources » ou « Liens externes »().
En Hongrie,Ödön Lechner (1845-1914), s'inspirait de l'architecture indienne et syrienne, récupérait et intégrait les éléments et techniques de construction et de design traditionnels hongrois. Suivant un style différent, le Groupe des Jeunes (Fiatalok), qui incluaitKároly Kós et Dezső Zrumeczky, s’inspira de ses méthodes et créa un autre style trouvant ses racines dans l'architecture de Transylvanie. Cette démarche fait clairement écho à la réutilisation dunéomudéjar, puis à la récupération des techniques traditionnelles par les architectes catalans pour créer un art national.
Si dans l'un et l'autre des cas, ces démarches aboutirent à des tendances originales, d'autres artistes s'inspirèrent des autres mouvements.
EnHongrie, l'Art nouveau, appelé sur le modèle deVienne laSécession hongroise, avait pour ambition de créer un style national avec pour particularité l'utilisation d'éléments issus de traditions rurales hongroises et de l'art d'Asie, continent d'origine, pensait-on, desMagyars. On peut citer l'architecteÖdön Lechner, dont les céramiques devinrent sa signature,Béla Latja,Aladár Árkay,Károly Kós etIstván Medgyaszay.
Dans les années 1930, lessurréalistes ont une part très active dans la réhabilitation de l’Art nouveau.Salvador Dalí publie un article dans la revueMinotaure, organisme de diffusion de la pensée surréaliste, qui s'intitule « De la beauté terrifiante et comestible du Modern style ». Cet article est illustré par les photographes les plus modernes, commeBrassaï, à qui Dalí commande un reportage sur les entrées du métropolitain nocturne de Guimard. Un autre reportage est commandé àMan Ray pour les architectures de Gaudí.André Breton partageait cette appréhension de l’Art nouveau à la manière de Dalí qui évoque les « formes libidineuses de l’Art nouveau ». Mais surtout Dalí y voit un formidable moyen de lutte contreLe Corbusier, car l’Art nouveau présente une architecture onirique, érotique et beaucoup plus proche du rythme de l’homme[4].
À la même époque, Dalí découvre l'œuvre du peintreClovis Trouille — il se présentait comme un « rescapé de 1900 » —, qui l'enthousiasme par son absence d'autocensure et ses références récurrentes à l'Art nouveau. C'est aussi au cours de ces années 1930 que le designer finlandais,Alvar Aalto, conçoit des formes sinueuses, libres et expressives, évocatrices des créations les plus abstraites de l'Art nouveau[100].
La chaise Escargot, deCarlo Bugatti, préfigure la chaise Floris deGünter Beltzig, ou encore la célèbrePanton Chair, créée en 1959 par le DanoisVerner Panton, et devenue depuis un grand classique de la décoration contemporaine. Quant aux créations deCarlo Mollino, dans les années 1950, elles rappellent les ossatures du mobilier deGaudí[100].
La parution des premiers grands ouvrages traitant de l’Art nouveau se fait à la fin des années 1950, avec Johnny Watser. Rétrospectivement, ce sont surtout les reproductions des affiches qui ont séduit et le matériel Art nouveau devient accessible aux gens qui font dudesign. Les motifs seront repris dans les années 1960 par les jeunes artistes graphistes designers. Deux dates expliquent cette connaissance : l'organisation en 1963, auVictoria and Albert Museum de Londres, d'une exposition Mucha et, en 1966, une exposition consacrée au dessinateurAubrey Beardsley, deux évènements essentiels dans la redécouverte de l'Art nouveau.
En 1966, le sculpteurFrançois-Xavier Lalanne renoue avec le projet de l'Art nouveau de saisir la nature pour améliorer le cadre de vie de l'homme moderne. Cette même année apparaissent àSan Francisco les premières affichespsychédéliques dont les graphistes reprendront certains thèmes de l'Art nouveau tels que la chevelure, le paon ou les formes féminines[100].
Entre les années 1980 et 1990, le très nombreuses institutions muséales ont recherché et acquis des éléments Art nouveau. Elles ont consacré à ce mouvement de nombreuses expositions et rétrospectives. Enfin, de nombreux ouvrages parus montrent l'intérêt que le public porte à l'Art nouveau sur cette période[101].
Cet ouvrage présentera, dans un format original, des reproductions de qualité des œuvres les plus marquantes de l’expositionL’Art nouveau, la révolution décorative, accompagnées des textes de Paul Greenhalgh, commissaire de l’exposition et spécialiste de l’Art nouveau.
ExpositionAlphonse Mucha,Musée du Luxembourg, 12 septembre 2018 - 27 janvier 2019. Artistetchèque de renommée internationale, Alphonse Mucha reste indissociable de l’image du Paris 1900. « Sa célébrité lui vient surtout de ses élégantes affiches d’un style très affirmé, emblématique de l’Art Nouveau ».
ÀParis, bientôt un nouveau musée consacré àHector Guimard, maître de l’Art Nouveau en France. À la fin de l'année 2027, un musée inédit ouvrira ses portes à Paris. Au cœur duXVIe arrondissement, l'hôtel Mezzara deviendra leMusée Guimard, l'unique lieu dédié au maître de l'Art Nouveau en France (voir liens externes).
↑Le lustre, de création contemporaine, fait écho aux planches dessinées parErnst Haeckel qui influencerontConstant Roux et les premiers acteurs de l'Art nouveau.
↑Sophie Legras, « Eugène Viollet-le-Duc : 5 rénovations très controversées »,Le Figaro Culture,(lire en ligne).
↑Roland Recht,Viollet-le-Duc et Gottfried Semper : leurs conceptions du patrimoine monumental, Université de Strasbourg, Revue germanique internationale,(lire en ligne),p. 155-168.
↑Rossella Froissart Pezone,L’art dans tout - Les arts décoratifs en France et l’utopie d’un Art nouveau, Paris, CNRS éditions,(ISBN9782271062819).
↑Claire Lingenheim,Art Nouveau et industrie, Académie de Strasbourg,(lire en ligne[PDF]).
↑Hortensia von Roda,Die Glasmalereien von Józef Mehoffer in der Kathedrale St. Nikolaus in Freiburg i. Ue., Berne, Benteli (no 7),(ISBN3-7165-0969-8), « Résumé (en français) »,p. 185.
↑a etbL'École de Nancy, Art nouveau et industrie d'art: exposition, Nancy, Musée des beaux-arts, 19 mai-3 septembre 2018, Somogy éditions d'art Musée de l'École de Nancy,(ISBN978-2-7572-1382-7)
Roger-Henri Guerrand, historien du quotidien et de la culture, a écrit le livre de référence sur l'art nouveau, réédité, complété et actualisé par Thierry Paquot. A elle seule, la préface de Louis Aragon justifie l'achat et la lecture de l'ouvrage.
Françoise Dierkens et Jos Vandenbreeden,Art nouveau en Belgique. Architecture et intérieurs, Éditions Racine, coll. « Architecture en Belgique », 1991,226 p.(ISBN978-2873860141).
Pierre et François Loze,Belgique Art Nouveau. De Victor Horta à Antoine Pompe, Eiffel Éditions, Bruxelles. 1991,216 p.(ISBN2-930010-05-3), D/1991/5298/5.
Louis Meers,Promenades Art nouveau à Bruxelles, Bruxelles,éditions Racine, 1995.
Franco Borsi,Victor Horta, Éditions Marc Vokar, 1970.
Franco Borsi et Paolo Portoghesi,Victor Horta, J.M.Collet,, 414 p.(ISBN978-2873670498)..
Sylvain Mikus,Octave Gelin, un architecte entre Art nouveau et Art déco, Études marnaises, Société d'agriculture, commerce, sciences et arts de la Marne, 2009.
François Loyer,Paul Hankar, La naissance de l'Art nouveau, Bruxelles,Archives d'architecture moderne, 1986, 478 p. ; édition espagnole :Paul Hankar. Diez anos de Art Nouveau, Madrid, Ministerio de Obras Publicas y Transportes, 1993.
La Belle Époque en couleur - Des photographies colorées pour tous : telle était l’idée du photochrome, procédé inventé à Zurich à la fin du XIXe siècle.