Arrien (enlatin :Lucius Flavius Arrianus ; en grec : Ἀρριανός) est un écrivain grec de l'époque romaine, né àNicomédie vers85, mort après146. Fidèle d'Hadrien, il assuma de hautes fonctions administratives et militaires au sein de l'Empire romain. À la mort de l'empereur (138), il se retira àAthènes pour se consacrer à l'écriture. SonAnabase d'Alexandre est le récit antique le plus rigoureux que nous ayons des campagnes militaires menées parAlexandre le Grand. Arrien prit le surnom deXénophon, en hommage àXénophon, célèbre élève deSocrate. La plupart de ses œuvres portent d'ailleurs des titres d'œuvres de Xénophon (Anabase,Mémorables,Cynégétique...).
Né àNicomédie, alors capitale de la province deBithynie enAsie mineure, Arrien est un homme de culture et de langue grecques. Il vient d'une famille ayant obtenu la citoyenneté romaine peut-être auIer siècle; ses parents sont des notables, qui ont la citoyenneté romaine[1]. Il étudie le grec et le latin (nécessaire pour qui voulait faire carrière dans l'administration romaine), et suit le cursus classique des études : littérature, grammaire et rhétorique, philosophie[2]. Il s'initie tôt au culte deDéméter etKoré, déesses principales de Nicomédie, dont il est plus tardprêtre.
Vers 108, il se rend àNicopolis, ville d'Épire, région du nord-ouest de laGrèce, attiré par la réputation du philosophestoïcienÉpictète. Là, non content de suivre les cours de son maître, il se tourne vers la vie philosophique, comme le montre sans doute le qualificatif de « philosophe » qui est souvent accolé à son nom dans les citations de son œuvre[2]. Il prend en notes un certain nombre d'enseignements d'Épictète qui seront réunis dans un ouvrage intituléEntretiens ainsi que dans une sorte de résumé de ce livre, leManuel, tous deux nous étant parvenus — au complet pour le second, et les quatre premiers livres (sur huit) pour le premier[3]). Arrien se défend toutefois, au début desEntretiens, d'avoir voulu les publier :« [t]el qu’est ce livre (...), il est arrivé, je ne sais comment, devant le public, sans mon consentement et à mon insu[4]. » En outre, nous ne pouvons pas savoir quand Arrien a écrit ces deux livres ; on peut cependant dire que lesEntretiens on dû être rédigés avant 140, car nous savons qu'ils étaient connus en Grèce et à Rome vers cette date. Quant auManuel, il a sans doute été composé après lesEntretiens[5].
En Grèce, il se lie d'amitié avec le futur empereurHadrien, ce qui favorise son ascension politique.
Après cette étude de la philosophie, Arrien se lance dans une brillante carrière politique[2].
Il s'engage en tant qu'officier de cavalerie. Ayant ainsi effectué son service militaire, indispensable pour pouvoir postuler à des responsabilités administratives, il poursuit sa carrière politique sous les règnes deTrajan et Hadrien, devenantproconsul enBétique (Espagne), peut-être vers 123, puisconsul suffect en129-130[2]. Hadrien (dont il fut l'ami personnel) le nomme par la suite gouverneur deCappadoce, aux frontières de l'Empire, de 131 à 137[2]. Pour sécuriser la province, proche de l'empire rival desParthes, et assurer l'influence romaine sur lePont-Euxin (l'actuellemer Noire), il dispose de deux légions. En 134, il repousse l'invasion desAlains qui, sous leur roi Pharasurane, avaient attaqué la Médie parthe, puis l'Arménie, enfin la Cappadoce.
Vers la fin du règne d'Hadrien, il se retire àAthènes[6] et se consacre à l'écriture. Il estarchonte éponyme pour l'année145/46.
La date de sa mort ne nous est pas connue ; sans doute est-elle survenue durant le règne deMarc Aurèle (161-180)[6] .
Arrien, dont l'idéal était d'être le « nouveau Xénophon », a laissé une œuvre littéraire riche et abondante, qui témoigne d'un vif intérêt pour l'ethnographie et lagéographie (en particulier lePériple du Pont-Euxin et l'annexe de l'Anabase consacrée à l'Inde)[6]. Plusieurs de ses livres reprennent les titres de ceux de Xénophon ou contiennent des allusions à l'œuvre de ce dernier.
Anabase ouExpédition d'Alexandre : description des campagnes militaires d'Alexandre le Grand, en sept livres. Arrien puise sa source dans lesMémoires d'Aristobule et dePtolémée ; il offre le plus fiable des récits antiques (encore conservés à nos jours) de la conquête de l'Asie[7],[8].
Indica : servant de livre VIII à l’Anabase, rédigé en dialecte ionien (le dialecte d'Hérodote), il est en partie inspiré du récit deNéarque et de laGéographie deStrabon, ainsi que du récit que fit l'ambassadeurMégasthène à la cour de l'empire deChandragupta Maurya. L'étude de Mégasthène, richement documentée et fournissant des données uniques sur l'histoire de l'Inde, nous est connue principalement par son résumé dans l’Indica. — voir 8° livre de l'Anabase.L'Inde, trad. P. Chantraine, Les Belles Lettres, 1927, 152 p[9],[8].
Histoire de la succession d’Alexandre : œuvre inspirée par le récit deHiéronymos de Cardia, connue seulement par un résumé dePhotius[10].
Guerre des Romains et des Parthes, en 17 livres, ouvrage recensé dans laBibliothèque dePhotios (codex 58), mais perdu (aucun fragment).
Histoire de laBithynie, sa région natale, des origines à l'annexion par Rome en75 av. J.-C., en huit livres, ouvrage recensé parPhotius (codex 93), et perdu.
Entretiens d'Épictète : transcription de l'enseignement oral du maître, organisée à l'origine en huit ou douze livres, dont seulement quatre nous sont parvenus. Il s'agit probablement des notes d'Épictète lui-même, et Arrien n'en est que l'éditeur.
Manuel (Enchiridion) : cet ouvrage, édité sous le titre deManuel d'Épictète, est un abrégé pratique desEntretiens, réalisé par Arrien[11].
Traité de tactique : exposé sur les anciennes formations tactiques grecques et macédoniennes (§ 2-32), puis sur les manœuvres de la cavalerie romaine (§ 33-44), l'infanterie romaine ayant fait l'objet d'un autre de ses écrits, perdu.
Périple du Pont-Euxin (en grec :Περίπλους Εὐξείνου πόντου ; en latinPeriplus Ponti Euxini): écrit en 131/132, après la mort de Cotys II du Bosphore, il s'agit d'une description de tout le littoral de lamer Noire (développement à partir d'un rapport d'inspection de la zone littorale enteTrébizonde etDioscurias, qu'il avait eu à rédiger en tant que gouverneur deCappadoce)[12].[lire en ligne (page consultée le 9 août 2023)]
Cynégétique : bref traité sur la chasse[13], complément à celui deXénophon.
Ordre de bataille contre les Alains (en grec :Έκταξις κατ' Αλανών; en latin :Acies contra Alanos): Quand Arrien était gouverneur de Cappadoce, celle-ci était en butte aux attaques de turbulents voisins : lesAlains, des barbares. N'étant pas en mesure de les affronter, il écrivit seulement un traité sur la manière dont il s'y prendrait pour les attaquer[14].Photiussignale[Où ?] qu'Arrien avait écrit un ouvrage plus général sur les Alains, dont ce fragment est peut-être extrait.
↑Au sujet des conditions de cette édition, voirIlsetraut etPierre Hadot,Apprendre à philosopher dans l'Antiquité, Livre de Poche, 2004.
↑Le Périple du Pont-Euxin :Texte grec et traduction française d'Henry Chotard (Paris, Durand, 1860). Et aussi : Arrien,Périple du Pont-Euxin, Texte établi et traduit par A. Silberman, Les Belles Lettres, CUF, Paris, 1995
↑Arrien (v. 95 - v. 175),La Cynégétique d'Arrien, dit Xénophon le Jeune / traduit et commenté par Tya Hillaud,Compiègne, librairies, imprimeries, papeteries Decelle,, 28 p.(lire en ligne).
Sophie Couraud-Lalanne, « Arrien philosophe stoïcien »,Ktèma : civilisations de l'Orient, de la Grèce et de Rome antiques,no 39,,p. 51-85(lire en ligne)