Arouad (enarabe :ارواد),Rouad (en français),Arwad (en phénicien),Arados (engrec ancien :Άραδος),Aradus, Arpad, Arphad, Armada, Aruda, Irwada, Riwada,Antioche de Pieria (engrec ancien :Αντιόχεια της Πιερίας), est uneîle de lamer Méditerranée, la seule île habitée de laSyrie.
Image satellite d'Arouad avecTartous sur la côte syrienne à l'est.
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Arouad est située dans lamer Méditerranée, à trois kilomètres au large des côtes syriennes, en face de la ville deTartous. La ville moderne occupe toute l'île qui mesure20ha de superficie.
Cours de la forteresse ottomane d'Arouad. Cette forteresse a un moment servi de prison pendant le mandat français.Fragment de stèle trouvé à Arados,IVe siècle av. J.-C. Musée du Louvre
L'île est habitée dès leIIe millénaire av. J.-C. par une populationphénicienne. Sous contrôle phénicien, la ville est indépendante et on l'appelleArwad ouJazirat[réf. nécessaire] (qui signifie « île »). L'île, fortifiée par d'épaisses murailles, est un important centre commercial pour la vallée de l'Oronte et le grand commerce maritime. Son riche terroir et le commerce de lapourpre font sa prospérité.
Dès la campagne du roi assyrienTéglath-PhalasarIer, les sources cunéiformes attestent l'existence d'un territoire continental, qui devait sans doute assurer le ravitaillement de l'île et permettre l'enterrement des morts. Un sanctuaire deMelkart a été identifié sur la côte àAmrit, où se trouvait une source et un bassin consacré, et il était entouré de nécropoles. Arwad était une cité-état phénicienne, gouvernée par des rois et possédant aussi des organismes représentatifs des citoyens. Elle paie tribut àAssurnazirpal II et, en853 av. J.-C., son roi Mattanbaal I envoie 200 soldats à labataille de Qarqar (853 av. J.-C.) dans une coalition contreSalmanazar III. La réduction des territoires vaincus en province assyrienne (de Sumur) sousTeglath-Phalasar III semble couper Arwad de ses dépendances continentales. En701 av. J.-C., le roi d'Arwad Abdileti paie tribut àSennachérib et son successeur Mattanbaal II àAssarhaddon. Le roi Yakinlu se révolte contreAssurbanipal, mais il doit se soumettre au roi assyrien qui le remplace par son fils Azibaal.
La domination babylonienne sur les cités phéniciennes a succédé à la domination assyrienne. Les charpentiers d'Arwad étaient renommés dans le domaine de la menuiserie et des constructions navales et étaient employés à la cour deNabuchodonosor II, roi deBabylone.
Monnaie étalon d'Arados de la période perse
Cette cité passe ensuite sous la domination perse et met sa flotte de guerre à la disposition des rois des Perses. Ainsi, lorsqueXerxèsIer affronte les Grecs à labataille navale de Salamine en 480, la flotte d'Arwad est commandée par son roi Maharbaal. La cité commence à frapper monnaie vers440 av. J.-C.. À cette époque, Grecs et Phéniciens sont en relation, grâce aux comptoirs grecs installés sur la côte de Syrie du nord et sur lapérée d'Arados, mais aussi grâce aux voyageurs, artistes et savants[1]. Les artisans d'Arwad sont spécialisés en particulier dans lessarcophages en terre cuite, qu'on ne trouve nulle part ailleurs. Son dernier roi de la période perse, Gerashtart (en grec Gérostratos), monte sur le trône en 339. En 333, à l'arrivée d'Alexandre le Grand, il est en mer avec sa flotte pour soutenir le roi des PersesDarius III, mais son fils Abdashtart (en grec Straton) offre l'île d'Arwad et tout son territoire continental au conquérant grec[2].
La cité passe alors sous domination grecque. Sous lesSéleucides, la cité possède un atelier monétaire qui émet des monnaies au nom d'Alexandre jusqu'en 301. Selon certains historiens, elle serait renomméeAntioche de Pieria parAntiochosIer. Elle inaugure une nouvelle ère civique en 259, date à laquelle la royauté traditionnelle disparaît : la ville devient donc cité libre, indépendante du royaume séleucide, et adopte les institutions grecques, avec un corps civique (démos), uneboulè et unegérousia. C'est une concession d'Antiochos II, accordée en échange d'une alliance politique et d'une aide[3]. L'hellénisation des Phéniciens à l'époque hellénistique est rapide, à en juger par l'onomastique et par la langue parlée, ce qui est le cas de tous les magistrats d'Arados. La ville possède d'ailleurs un gymnase, symbole même du mode de vie hellénique et du goût pour les concours athlétiques. Dans l'arrière-pays, Arados gère, à la fin de l'époque hellénistique, le sanctuaire deZeusBaitokaikè[4].
À l'époque romaine, Arados soutientPompée contreJules César puis résiste farouchement àMarc Antoine venu en Syrie pour y trouver de l'argent[5]: la ville refuse de livrer un Ptolémée[6], met à mort les envoyés de Marc Antoine et se rallie auxParthes[7]. Arados est assiégée en-38 par les troupes de Marc Antoine, et doit se rendre, après avoir longuement résisté à la famine et aux épidémies[5]. Les monnaies émises en 35-34 à l'effigie de Marc Antoine et deFulvie, sa première épouse, ou de Marc Antoine et deCléopâtre, marquent la fin de son indépendance. La ville ne se relèvera jamais complètement de ces événements[5].
Monnaie frappée en la cité d'Arados
L'île est mentionnée deux fois dans laBible (1Maccabées, XV, 22-24.). Elle est également mentionnée dans leRoman pseudo-clémentin, écrit judéo-chrétien qui relate les voyages de l'apôtrePierre.
Lors desCroisades, l'île est prise par lesTempliers qui y construisent une forteresse et y installent une force permanente placée sous le commandement du maréchal de l'ordreBarthélemy de Quincy. Ils y restent jusqu'en1302 où ils sont vaincus par lesMamelouks, faisant de l'île le dernier territoirecroisé.Cette chute est une des causes du projetRex Bellator (Raymond Lulle, 1305)
En 1945, la France souhaitait conserver l'ile Rouad (Arouad), et y lancer des travaux pour édifier une base militaire, dans un cadre géopolitique, pour conserver une position militaire dans la région, garder une influence culturelle, ce qui impliquait le départ des pêcheurs locaux.À la suite de pressions des États-Unis, l’île est cédée par la France sans condition à la Syrie, à la fin de 1945, décision confirmée en 1946.
L’île est majoritairement habitée par des musulmans sunnites[10].
↑Christophe Mommessin,La marine française et la résolution de la question d'Orient (1797-1922) : de la puissance navale à l'action clandestine, Tolbiac Editions,,p. 165-185.
Jean-Paul Rey-Coquais,Arados et sa pérée aux époques grecque, romaine et byzantine, Éditions Geuthner, Paris 1974.
Josette Elayi et Mohamed R. Haykal,Nouvelles découvertes sur les usages funéraires des Phéniciens d'Arwad, Éditions Gabalda, Paris 1996.
Josette Elayi,Histoire de la Phénicie, Éditions Perrin, Paris 2013.
Marie-Ange Calvet-Sebasti, " Une île romanesque : Arados ", dansLieux, décors et paysages de l'ancien roman des origines à Byzance, éd. B. Pouderon, CMO 34, Maison de l'Orient et de la Méditerranée, Lyon, 2005,p. 87-99.
Josette Elayi et Alain G. Elayi,Arwad, cité phénicienne du nord, Éditions Gabalda, Paris 2015.
Josette Elayi,Arwad, une île syrienne à la dérive, Éditions Glyphe, Paris 2018.