Pour l'historien Alex Bein, le terme fut utilisé pour la première fois (dans un seul article et de façon isolée), en 1860 par l'intellectuel juif autrichienMoritz Steinschneider dans l'expression « préjugés antisémites » (« antisemitische Vorurteile »), afin de dénoncer les idées d'Ernest Renan qui affuble les « peuplessémites » detares culturelles et spirituelles (la désignation des peuples duLevant sous ce terme remontait à 1781)[3]. Cette utilisation isolée a eu une postérité limitée.
Le mot « Antisemitismus » traduit ici par« antisémitisme » est introduit dans le discours politique en 1879 par le journaliste allemandWilhelm Marr. Rejetant le concept d'uneassimilation possible, il plaide pour uneexpulsion de tous les Juifs vers laPalestine. À la fin de sa vie, Marr finira par publier à Hambourg un essai final intituléTestament d'un antisémite, où il explique avoir rejeté la « misérable folie romantique du Germanisme »[4].
Le spécialiste dunégationnisme Gilles Karmasyn rappelle que c'est lejournaliste allemandWilhelm Marr qui invente véritablement le terme « Antisemitismus » dans le sens « d'hostilité aux Juifs », à l'occasion de la fondation d'une « ligue antisémite » en 1879[5] et non, comme il est parfois rapporté, dans sonpamphlet anti-juifVictoire dujudaïsme sur lagermanité considérée d'un point de vue non confessionnel, publié la même année mais où l'expression n'apparaît pas[6]. Le mot n'est pas issu des lexiques religieux mais se teinte descientisme en créant ce substantif en .isme pour stigmatiser les juifs sur de fallacieux critères derace et d'ethnie[7].
« S’il est vrai que chez lesphilologues et historiens la catégorie de Sémite réunit les Juifs et les Arabes, la fièvre antijuive de la fin de siècle (XIXe siècle) va utiliser le terme presque exclusivement pour les premiers »[8].
Après avoir traduit l'hostilité basée sur la religion puis sur la « théorie des races », le terme « antisémitisme » désigne toute manifestation dehaine, d'hostilité ou la discrimination à l'égard des Juifs[9] ou non-Juifs sympathisants[Note 1].
La traduction française d'Antisemitismus par « antisémitisme » apparaît, selon le dictionnaire Le Robert, en 1866, suivi de l'épithète « antisémite » trois ans plus tard. Toutefois, Karmasyn a mis au jour les traductions « antisémitique » et « antisémite » dans le journalLe Globe dès[10]. L'historienJules Isaac précise que le terme « antisémitisme » est par lui-mêmeéquivoque, alors que « son contenu […] est essentiellement anti-juif »[11]. W. Marr utilise en effet le mot « Semitismus » comme synonyme de « Judentum », lequel désigne indifféremment lejudaïsme, la communauté juive et lajudaïté.
Le terme « antisémitisme » peut paraître équivoque ou même « complètement inapproprié »[13], soit parce qu'il vise les autres populations delangue sémitique dont lesArabes[11], soit parce que les Juifs d'aujourd'hui ne seraient plus que très partiellement sémites[13].
En dépit de l'origine du terme « antisémitisme », forgé pour désigner l'hostilité revendiquée contre les personnes juives, leur culture, ou les institutions juives, ou perçues comme telles et nullement contre d'autres locuteurs delangues sémitiques, et qu'il est toujours employé dans ce sens, le terme est sémantiquement vague. Toutefois, avec l'apparition de l'« antisémitisme arabe »[14] pour désigner l'hostilité des Arabes envers les Juifs, alors que lemonde arabe est« lui-même sémite, l'expression devient aberrante et il faut revenir à l'idée d'antijudaïsme, sans référence désormais au "déicide" », selonEdgar Morin[15].
« L’antisémitisme historique d’abord, fondé sur les stéréotypes liés à l’argent […]. Il a toujours existé et on pourrait qualifier cet antisémitisme de populaire. Il y en a un deuxième, plus politique, dont parleNonna Mayer, lié aux évènements du Moyen-Orient et à la politique d’Israël, celui-là est plutôt repris par ce qu’on appelle l’islamo-gauchisme (la défense desmusulmans contre la politique d’Israël). Il y en a enfin un troisième, un antisémitisme identitaire, fondé sur l’illusion d’une pureté de la nation. Celui-là appartient plutôt à l’extrême-droite, c’est celui qui s’est manifesté contreAlain Finkielkraut quand on a entendu des choses comme “on est chez nous ici, rentre chez toi”. »
D'un point de vue encyclopédique, l'antisémitisme se manifeste essentiellement envers les personnes, mais peut se généraliser envers la communauté, la culture ou tout ce qui peut être perçu comme juif.
« Hostilité manifestée à la race juive et érigée parfois en doctrine ou en mouvement réclamant contre les juifs des mesures d'exception. »[24] ;
« Doctrine ou attitude systématique de ceux qui sont hostiles aux juifs et proposent contre eux des mesures discriminatoires. »[25] ;
« Hostilité contre les Juifs ; racisme dirigé contre les Juifs. »[26] ;
« Racisme dirigé contre les Juifs et tout ce qui est perçu comme juif »[27].
Définition de l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste (IHRA)
« L’antisémitisme est une certaine perception des Juifs qui peut se manifester par une haine à leur égard. Les manifestations rhétoriques et physiques de l’antisémitisme visent des individus juifs ou non et/ou leurs biens, des institutions communautaires et des lieux de culte. »
Si l'antisionisme ou l'antiisraélisme n'est pas explicitement mentionné dans cette définition de l'antisémitisme, celle-ci inclut d'une part les termes « institutions communautaires », et d'autre part dans ses exemples, les références à l'État d'Israël, tendant ainsi à s'écarter de son objet premier et permettant de qualifier d'infraction antisémite toute manifestation contre l'État d'Israël.
« Il est vain d'espérer de lalogique – c'est-à-dire l'expressionraisonnée d'un esprit éclairé », dès qu'il s'agit d'antisémitisme[Note 3] ;
L'apaisement est futile :« Ici, la règle du comportement humain est que céder aux exigences de l’ennemi ne suffit pas. Au contraire, adopter une position de faiblesse augmente encore leressentiment. Au lieu de faire disparaître l’hostilité, la soumission la stimule »[Note 4] ;
« L'antisémitisme est indépendant de son objet. Ce que les Juifs font ou omettent de faire n'est pas un facteur déterminant. L'impulsion provient des besoins des persécuteurs et d'un climat politique spécifique »[36],[37].
« Ici sur terre, tous les peuples se détestent les uns les autres et ensemble, ils détestent les Juifs »[38],Mark Twain.
Même si, dans son étymologie, le mot « antisémitisme » prend une tournureraciale et laïque, il est dès sa création utilisé pour qualifier tous les actes anti-juifs qui peuvent avoir lieu, quel qu'en soit le motif, ainsi que pour désigner les actes hostiles aux Juifs avant l'invention du terme « antisémitisme » auXIXe siècle[39].
On peut donc en distinguer plusieurs formes distinctes qui évoluèrent dans leur conception au cours de l'Histoire, qui ne sont d'ailleurs pas forcément complémentaires et ne s'appuient pas toujours sur les mêmes fondements. L'antisémitisme, dans son acception globale, n'est donc pas nécessairement une idéologieracialiste (qui ne se développe d'ailleurs que tardivement à partir duXIXe siècle) et, par conséquent, n'est pas toujours une forme deracisme[40].
René König mentionne l'existence d'antisémitismes sociaux, économiques, religieux ou politiques. Il avance que les formes diverses qu'a pris l'antisémitisme démontrent que « les origines des différents préjugés antisémites sont ancrés dans différentes périodes de l'Histoire ». Pour lui, les divers aspects despréjugés antisémites au cours des époques et leur distribution variable au sein des classes sociales « rend particulièrement difficile la définition des formes de l'antisémitisme »[41].
L'historien Edward Flannery distingue, lui aussi, plusieurs variétés d'antisémitisme[42] :
« l'antisémitisme nationaliste », citantVoltaire et d'autres penseurs desLumières qui attaquèrent les Juifs sur leurs supposéesarrogance etavarice[45] ;
« l'antisémitisme racial », exprimé par lenazisme[46].
Enfin, le documentariste Louis Harap distingue, quant à lui, l'antisémitisme « économique » de l'antisémitisme « politique », et fusionne ce dernier avec l'antisémitisme « nationaliste » au sein d'un« antisémitisme idéologique ». Il ajoute également un antisémitisme social[47], avec les propositions suivantes :
économique :« les Juifs sont des banquiers et desusuriers obsédés par l'argent » ;
social :« les Juifs sont socialement inférieurs » et doivent être tenus à l'écart du reste de la société dans desghettos et porter unsigne permettant de les distinguer deschrétiens, comme larouelle, latabula et leJudenhut auMoyen Âge, ou l'étoile jaune sous le régime nazi ;
Louis Harap définit l'antisémitismeculturel comme une« forme d'antisémitisme qui accuse les Juifs de corrompre une culture donnée et de vouloir supplanter ou de parvenir à supplanter cette culture »[48].
PourEric Kandel, l'antisémitisme culturel se fonde sur l'idée d'une « judéité » vue comme« une tradition religieuse ou culturelle qui s'acquièrent par l'apprentissage, à travers des traditions et une éducation distinctives ». Cette forme d'antisémitisme considère que les Juifs possèdent des« caractéristiques psychologiques et sociales néfastes qui s'acquièrent par l'acculturation »[49].
Enfin, les historiens Donald Niewyk et Francis Nicosia décrivent l'antisémitisme culturel comme une idée se focalisant sur la supposée « attitude hautaine des Juifs au sein des sociétés dans lesquelles ils vivent »[50].
Tract distribué àKiev avantle procès de Mendel Beilis, accusé de « meurtre rituel », recommandant aux parents chrétiens de veiller sur leurs enfants durant laPâque juive (années 1910).
Pour mieux lesstigmatiser et les identifier, plusieurs professions furent interdites aux « nouveaux chrétiens ». Et cela, bien que beaucoup de ces nouveaux chrétiens, instruits dans lareligion catholique depuis plusieurs générations, aient été sincères. Si bien que, dans les familles ibériques, l'usage vint de demander des « certificats de pureté de sang » contrôlés par l'inquisition avant de contractermariage, ou pour exercer telle ou telle profession. Nombre d'entre eux s'efforcèrent de fuir les territoires hispano-portugais et, une fois relativement en sécurité enFrance, enTurquie, auMaroc, auxPays-Bas ou enAngleterre à partir deCromwell, ils y redécouvrirent lareligion de leurs ancêtres. Ce fut le phénomène dumarranisme, porteur d'unemémoire secrète, souterraine, cachée, malgré la disparition dessynagogues, des textes, et l'impossibilité de suivre lesrites interdits. Les marranes, accusés de « judaïser en secret » gardèrent, pour certains d'entre eux, lamémoire de leurs origines, avant d'y revenir parfois, c'est-à-dire lorsque la situation le leur permettait. Nombre de descendants de marranes, ces chrétiens convertis de force, ont essaimé enEurope, avec des destins divers, et jusqu'enAmérique, ou même enAsie, où l'Inquisition continua à les poursuivre longtemps après leur départ du Vieux Continent, pour tenter de faire disparaître lejudaïsme.
En 2019 encore, lors de la cérémonie duVendredi saint dans la ville dePruchnik en Pologne, les habitants mettent en scène unprocès traditionnel public pour la trahison de Jésus parJudas « le traître » représenté eneffigie avec un long nez rouge, despapillotes et une tenue dejuif orthodoxe, que la foule doit bastonner puis pendre avant de le brûler (bûcher de Judas)[54].
Masque lugubre porté pour lesjudios de Pavon au Nicaragua (2010).
Plus subtilement encore, comme depuis plusieurs siècles, dans le village de Pavon auNicaragua ou àCamuñas près deTolède en Espagne, un rituel « sauvage », (appeléPecados y Danzantes de Camuñas(es)) durant plusieurs jours lors de laFête-Dieu (Corpus Christi) célébrant l'Eucharistie, oppose le groupe depecados (péchés) portant un masque pourvu de cornes et d'un petit nez camus à celui desdanzantes (danseurs) appelés aussijudíos (juifs), portant un masque au long nez busqué, dans un tintamarre de percussions, de rugissements et d'agressivité. À leur tête, se trouvent unpecado mayor (péché majeur) appelé aussi « gueule de cochon » (bocagorrino) et unjudío mayor (juif majeur) se disputant le rôle du Bien et du Mal, qui interrogent encoreethnologues et exégètes[55],[53].
Dans la ville flamande d'Alost, lecarnaval voit défiler annuellement, avant lemercredi des Cendres, un char« représentant des juifs orthodoxes au nez crochu, entourés de rats et juchés sur des sacs d’argent ».
En 2013, un char ducarnaval d'Alost ressemblait à un wagon de train utilisé pour le transport les Juifs vers lescamps de la mort. « Une affiche sur le wagon montrait des politiciens belges flamands déguisés ennazis et tenant des bonbonnes présentées comme contenant duZyklon B », le poison utilisé pour exterminer les Juifs dans leschambres à gaz pendant laShoah[56]. En 2019, certainescaricatures représentent à nouveau« des Juifs orthodoxes avec des nez rouges crochus et des dents en or », assis sur des sacs d'argent, et sur l'épaule de l'un d'eux court un rat, mais devant les critiques, il est répondu que ces caricatures« ne sont pas contre les Juifs » mais protesteraient« contre l’augmentation du coût de la vie »[56].
L'antisémitisme économique(en) est caractérisé par l'idée queles Juifs produiraient des activités économiques nuisibles à la société, ou bien que l'économie deviendrait nuisible lorsqu'elle est pratiquée par ceux-ci[60].
Commissaire du peuple juif volant son pays, sans égard pour le soldat estropié et médaillé. Inscription : « Tout est à nous ! », justifie le Juif. Dessin paru enHongrie,Mi. Manno (1919).
L'historienDerek Penslar(en) explique que ces allégations s'appuient sur les imputations suivantes[62] :
les juifs« sont naturellement incapables d'exercer un travail honnête ».
les juifs« dominent une cabale financière cherchant à assujettir le monde ».
Penslar avance également l'idée que l'antisémitisme économique se distingue aujourd'hui de l'antisémitisme religieux, qui est lui « souvent feutré », alors qu'ils étaient liés jusqu'à maintenant, le second expliquant le premier[63].
« les juifs utilisent leur pouvoir au service de leur communauté »[70].
Finalement, lemythe du Juif et de l'argent est résumé par l'assertion suivante deGerald Krefetz(en) :« [les juifs] contrôlent les banques, la réserve monétaire, l'économie et les affaires — de la communauté, du pays, du monde »[71].
« On vous a dit sur les Juifs des choses infiniment exagérées et souvent contraires à l’histoire… Ce sont au contraire des crimes nationaux que nous devons expier, en leur rendant les droits imprescriptibles de l’homme dont aucune puissance humaine ne pouvait les dépouiller. On leur impute encore des vices, despréjugés, l’esprit de secte et d’intérêt les exagèrent. Mais à qui pouvons-nous les imputer si ce n’est à nos propres injustices ? Après les avoir exclus de tous les honneurs, même des droits à l’estime publique, nous ne leur avons laissé que les objets de spéculation lucrative. Rendons-les au bonheur, à la patrie, à la vertu, en leur rendant la dignité d’hommes et de citoyens[72]… »
Robespierre fait ici allusion aux mesures discriminatoires prises auMoyen Âge contre les Juifs, qui notamment les confinaient aux professions commerçantes. À peu près au même moment, avec une ironie mordante,Camille Desmoulins prolonge dansLes Révolutions de France et de Brabant en sous-entendant que les citoyens actifs relativement fortunés dont le nombre est assez restreint devraient en plus justifier du « prépuce »[73] :
« Ne serait-ce pas en effet le comble de l'absurdité si, avec la quittance du marc d'argent, il fallait encore justifier du prépuce ? »
L'antisémitisme économique n'est pratiquement pas évoqué dans l'ouvrage du Service national pour les relations avec le judaïsme de la Conférence des évêques de France paru en,Déconstruire l'antijudaïsme chrétien. Le mot n'apparaît qu'à la page 134, qui liste les différents registres de l'antisémitisme : religieux (antijudaïsme), racial,économique, culturel. Il est mentionnép. 140-141 que le documentLes Protocoles des sages de Sion« est encore édité et circule abondamment »[78].
Selon l'historienTal Bruttmann, le regain d'antisémitisme observé en France remonte au« début desannées 2000 », au moment où« les gens se sont retrouvés dans le monde virtuel », avec comme principaux« vecteurs de l’antisémitisme » les polémistesDieudonné etAlain Soral[79]. Des tensions se manifestent par ailleurs peu après sur la scène politique mais aussi historiographique, avecdiverses polémiques se croisant sur plusieurs lois mémorielles.
Unethéorie du « complot juif », qui aurait« inventé, organisé, profité massivement de l’esclavage » apparaît en Europe et« s’implantera en France » tout particulièrement,« propagée par des extrémistes tels qu’Alain Soral ou l’ancien saltimbanque Dieudonné »[80].
Selon cet« antisémitisme avéré », dénoncé par presse, historiens et intellectuels[84], les Juifs auraient implanté en 1654 ou 1655 l'industrie sucrière auxAntilles. Mais 20 ans auparavant, laCompagnie des îles d'Amérique avait signé en 1635 un contrat pour démarrer la production de sucre[85] avec un marchandrouennais[85], lui donnant en 1639 lemonopole du sucre enMartinique[86]. EnGuadeloupe, la compagnie lui avait également accordé desexemptions fiscales et autres avantages logistiques et financiers[86]. En 1642, unédit royal du 8 mars établit que 7 000 personnesblanches avaient déjà migré auxîles françaises depuis 1635[87] au bénéfice de la Compagnie des îles d'Amérique, autorisées à importer cette fois desesclavesnoirs. ÀSaint-Christophe, la plantation decanne à sucre du gouverneur dispose dès 1646 de plus de 100 esclaves noirs et 200 « serviteurs », c'est-à-dire desengagés blancs[88]. LemissionnairecarmeMaurile de Saint-Michel l'a visitée en 1646, écrivant à son retour que le sucre est déjà« la première marchandise de nos îles »[86] et vers 1650, elle emploie cette fois 300 esclaves et 100 engagés blancs[88].
L'interprétation deThe Secret Relationship déforme le récit deJean-Baptiste Du Tertre, publié en 1667, qui ne dénombre que sept à huitJuifs du Brésil arrivés en Martinique, en 1654, sans préciser leurs noms où s'ils possédaient des esclaves[87]. Le recensement de 1664, beaucoup plus fiable, dénombre en Martinique 22 Juifs, détenant 5 serviteurs blancs et en tout 20 esclaves[87]. Du Tertre reprenait le texte d'un autredominicain,ordre religieux pratiquant l'esclavage et tentant de récupérer ses concessions aux Antilles, où les carmes etjésuites lui ont été préférés en 1650. Les deux auteurs ont publié plus d'une décennie après les faits allégués et vivaient en 1654 en France. DesHollandais ont obtenu des concessions en Guadeloupe, mais bien après 1654 et ils « étaientprotestants et non juifs »[89]
Caricature antisémite deCharles Léandre représentant la supposée hégémonie de lafamille Rothschild, couverture du journalLe Rire (16 avril 1898).« Le bouc émissaire de l'Europe », dessin d'Abel Pann (1915).Tableau de 1935 expliquant ce qu'est un Juif d'après leslois de Nuremberg.
L'antisémitisme racial se définit comme la haine desJuifs en tant que groupe racial ouethnique plutôt que sur des fondements religieux[91]. Il considère que les Juifs sont unerace inférieure à celle de la nation dans laquelle ils vivent.
L'antisémitisme racial trouve des occurrences historiographiques dans un phénomène s'apparentant aux lois espagnoles de lapureté de sang(limpieza de sangre) quand, de 1501 jusqu'auXIXe siècle, lefiqh (jurisprudence islamique) desSaffavides de laPersechiite[92] interdit aux Juifs de sortir par temps de neige ou de pluie, de crainte d'une souillure par eux des éléments et que ces éléments ne souillent à leur tour un musulman[93]. De par leur « impureté » intrinsèque, ils ne peuvent pénétrer dans une boulangerie ou toucher ou acheter des fruits frais afin de ne pas contaminer le lieu ou les aliments. En France, l'ordre des Carmélites inscrit dans ses règlements auxXVIe et XVIIe siècles l'interdiction d'y accepter toute religieuse d'origine juive[92].
Il s'agit donc d'uneidéologielaïque prenant le relais du vieilantijudaïsme religieux et s'y substituant. Les nouvelles formes d'hostilité qui s'en manifestent sont donc détachées de toute connotation religieuse, du moins dans la représentation que se fait d'elle-même cette idéologie.
S'inspirant de Gobineau, le Roumain(en)Alexandru C. Cuza(en) considère les Juifs comme relevant d'une « race » biologiquement différente qui empoisonne son pays par sa simple existence, et souligne la base de son idéologie dans les enseignements de l'Église orthodoxe[96] ; ce nouveau type d'antisémitisme est appelé par l'historien Jean Ancel l'« antisémitisme raciste chrétien »[97].
Affiche antisémite etantisoviétique de lapropagande nazie, rédigée enlituanien (en haut : « Un Juif est votre ennemi éternel » ; en bas : « Qui a emprisonné des millions de personnes dans lescamps de travail ? Un Juif ! »), (1941).
L'antisémitisme politique se définit comme une hostilité envers les Juifs fondée sur leur supposée volonté de s'emparer du pouvoir au niveau national ou mondial, ou leur volonté de dominer le monde au travers d'un « complot international ».
Les Protocoles des Sages de Sion, un faux se présentant comme un plan de « conquête du monde » établi par des Juifs, sont généralement considérés comme le début de la littérature contemporaine de lathéorie du complot juif[100],[61].Daniel Pipes note que le document développe des thèmes récurrents de l'antisémitisme du complot :« les Juifs complotent toujours »,« les Juifs sont partout »,« les Juifs sont derrière chaque institution »,« les Juifs obéissent à une autorité centrale, les vagues Sages », et« les Juifs sont proches de réussir leur plan »[101].
Inscription : « Le Judaïsme tend à l'hégémonie mondiale ». Les Juifs étaient accusés par lesnazis de chercher à s'emparer du pouvoir à travers les partiscommunistes, lesyndicalisme ou l'anarchisme (1942).
Ce fait a également été repris par l'argumentaire nazi pour justifier l'existence d'uncomplot judéo-bolchévique visant à dominer l'Europe, et pour réprimer violemment les militants communistes. Les Juifs furent par ailleurs accusés, après laPremière Guerre mondiale, d'être les responsables de la défaite allemande. Ce mythe, nommé enallemandDolchstoßlegende (le « coup de poignard dans le dos »), fut une tentative de disculper l'armée allemande de la capitulation de 1918, en attribuant la responsabilité de l'échec militaire aux Juifs, mais aussi socialistes, auxbolcheviks et larépublique de Weimar.
Regardant d'un autre côté de la lorgnette politique, le socialiste allemand,August Bebel, disait de l'antisémitisme qu'il est « le socialisme des imbéciles »[107] – expression souvent reprise par ses amissociaux-démocrates à partir de 1890 et encore de nos jours[108],[107].
L'antisionisme :« Les juifs seraient haïssables parce qu’ils soutiendraient un mauvais État, illégitime et assassin »[21].
Lenégationnisme :« Les juifs seraient d’autant plus haïssables qu’ils fonderaient leur Israël aimé sur une souffrance imaginaire ou, tout au moins, exagérée »[21]. Ainsi, le 4 mai 1961 le député et vice-ministre des Affaires étrangères égyptien Hussein Zulficar Sabri avait disculpé Hitler du massacre des Juifs d'Europe en déclarant« les sionistes firent des promesses mais ne les tinrent jamais, pour obliger Hitler à commettre des crimes et créer une légende permettant d'aboutir, finalement, à la création de l'État d'Israël »[109].
Lacompétition des victimes : Les juifs commettraient« un troisième et dernier crime qui les rendrait plus détestables encore et qui consisterait, en nous entretenant inlassablement de la mémoire de leurs morts, à étouffer les autres mémoires, à faire taire les autres morts, à éclipser les autres martyres qui endeuillent le monde d’aujourd’hui et dont le plus emblématique serait celui des Palestiniens »[21].
Pour l'historienBernard Lewis, le « nouvel antisémitisme » représente la « troisième vague » ou la « vague idéologique » de l'antisémitisme, les deux premières vagues étant l'antisémitisme religieux et l'antisémitisme racial[110]. Il estime que cet antisémitisme prend ses racines en Europe et non dans le monde musulman, l'islam n'ayant pas la tradition chrétienne d'exagérer la puissance juive. L'obsession moderne vis-à-vis des Juifs dans lemonde musulman est donc un phénomène récent qui dérive du Vieux-continent[111]. L'émergence dans certains établissements scolaires de ce nouvel antisémitisme serait donc liée à une montée ducommunautarisme islamique et à ladiabolisation de l'État d'Israël[112],[113],[114],[115].
Les critiques du concept de « nouvel antisémitisme » arguent quant à eux qu'il mélange l'antisionisme et l'antisémitisme, qu'il donne une définition trop étroite de la critique faite àIsraël et trop large de sadiabolisation, ou encore qu'il exploite l'antisémitisme dans le but de faire taire le débat sur lapolitique israélienne[116]. PourNorman Finkelstein, par exemple, le « nouvel antisémitisme » est un argument utilisé périodiquement depuis les années 1970 par des organisations telles que laLigue antidiffamation (équivalent américain de laLICRA) non pour combattre l'antisémitisme, mais plutôt pour exploiter la souffrance historique des Juifs et le traumatisme de laShoah dans le but d'immuniser Israël et sa politique contre d'éventuelles critiques »[117]. Pour appuyer cette thèse, il cite le rapport de 2003 de l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes qui inclut, dans sa liste d'activités et de croyances antisémites, des images dudrapeau palestinien, le support à l'OLP, ou la comparaison entre Israël et l'Afrique du Sud du temps de l'apartheid[118]. Finkelstein soutient par ailleurs que les dérives de l'antisionisme vers l'antisémitisme sont prévisibles et non spécifiques aux Juifs : leconflit israélo-palestinien contribue au développement de l'antisémitisme tout comme lesguerres du Vietnam et d'Irak ont contribué à la montée de l'antiaméricanisme dans le monde.
La difficulté de dessiner une frontière précise entre antisémitisme etantisionisme est illustrée par le fait que l'essayisteAlain Soral — condamné par la justice pour injure raciale, provocation et incitation à la haine raciale[119] — et l'humoristeDieudonné — dont la condamnation pour démonstration de haine et d’antisémitisme en France a été confirmée par laCour européenne des droits de l'homme[120] — sont accusés par les médias et une partie de la classe politique française de se dissimuler derrière la critique dusionisme et du pouvoir supposé d'unlobby juif pour diffuser des idées antisémites[121],[122]. Soral,plusieurs fois condamné pour ses propos, se défend de ces accusations en affirmant ne pas fustiger ce qu'il nomme les « Juifs du quotidien » — ou la communauté juive dans son ensemble —, ou encore lescourants spirituels du judaïsme, mais faire la critique de la « domination d'une élite communautaire juive organisée » en France et aux États-Unis ; de la politique israélienne en Palestine ; ainsi que des valeurs de ce qu'il nomme la « philosophie talmudo-sioniste », perçue par l'essayiste comme une lecture « belliqueuse » et « racialiste » de laTorah. Alain Soral avance, par exemple, que si un « Juif spiritualiste » traduit dans l'expression biblique de « peuple élu » unealliance entre Dieu et un « peuple choisi », invité à devenir un modèle demoralité pour les autres peuples, un « Juifracialiste » y lirait une preuve de la supériorité raciale et divine des Juifs sur le reste de l'humanité[123].
La définition de l'antisémitisme adoptée par leParlement européen ne mentionne pas explicitement l'antisionisme[31]. Toutefois, l'un des exemples d'antisémitisme qui l'accompagnent est le suivant :« Refuser au peuple juif son droit à l'autodétermination par exemple en affirmant que l'existence d'un État d'Israël est une entreprise raciste »[31].
Pour sa part, le sociologueShmuel Trigano considère que « l'usage courant qui est fait du mot " juif " dans le discours public relève souvent d'une véritablepathologie »[124].
Selon les textes religieux hébraïques composés au fil des siècles et en voie de fixation vers leIer siècle av. J.-C.[125], l'oppression desJuifs en tant quepeuple a existé de longue date : ils présentent le peuple hébreu se constituant dans sa résistance contre l'oppression desÉgyptiens. Les textes relatent ensuite les attaques répétées auxquelles le peuple juif doit faire face pour préserver son indépendance et le caractère singulier de sa foi.
Pour les historiens contemporains, ces éléments n'ont pas de valeur historique etJules Isaac ne relève ainsi aucune « trace authentique, incontestable de l'antisémitisme prétendu éternel »[126] jusqu'auIIIe siècle av. J.-C. Selon les travaux deLéon Poliakov, le phénomène remonte cependant bien aumonde gréco-romain, particulièrement à l'Égypte ptolémaïque[127]. La nature précise de l'hostilité dont les juifs sont alors l'objet, particulièrement àAlexandrie, théâtre de luttes factieuses, fait toutefois encore l'objet de débats[128],[129].
Les premières expressions historiquement attestées de la « haine contre les juifs » se trouvent rassemblées dans leContre Apion, un ouvrage de l'historien juif et citoyen romainFlavius Josèphe qui rassemble vers la fin duIer siècleapr. J.-C. uneanthologie des textes d'auteurs de l'Égypte gréco-romaine, parmi lesquels des détracteurs des Juifs, particulièrementalexandrins[136]. Ainsi, dès leIIIe siècle av. J.-C.,Manéthon propose une sorte de « contre-Exode » qui propage des fables à leur encontre, notamment celle suivant laquelle lesHébreux auraient été deslépreux chassés d'Égypte. Ces accusations, infamantes alors, sont néanmoins à contextualiser dans le cadre des tensions communautaires qui opposent à Alexandrie notamment lesjuifs hellénisés aux Égyptiens dont leculte animal est l'objet d'une véritable répulsion par les premiers[137]. Au-delà de l'hostilité sur une base religieuse qui relève de l'antijudaïsme, l'association de critères physiques trace peut-être les contours d'une forme d'antisémitisme antique[138].
Les violences généralisées contre les juifs n'apparaissent que sous la domination romaine. AuIer siècleapr. J.-C. lesJuifs d'Alexandrie réclament auprès des autorités romaines ledroit de cité auquel les Grecs alexandrins s'opposent. Les tensions communautaires dégénèrent, lacommunauté juive est l'objet de persécution par lepréfet d'ÉgypteFlaccus et la ville est le théâtre d'une crise inter-ethnique en 38 qui se traduit par deviolentes émeutes contre les juifs, qui seraient qualifiées aujourd'hui de « pogroms »[139]. Les affrontements intercommunautaires deviennent monnaie courante et un nouveau pogrom se déroule en 66, sous les ordres deTiberius Julius Alexander, lui-même d'origine juive[140].
Portrait d'Alexandre le Grand sur untétradrachme d'argent émis parLysimaque (297-281 av. J.-C.)
Alexandre le Grand (356 -323av. J.-C.) est l'initiateur de la présence juive àAlexandrie d'Égypte, en tant que fondateur de cette ville. L'un de ses généraux, qui lui succède comme souverain en Égypte,PtoléméeIer, fait venir des Juifs pour peupler la nouvelle cité[141]. LaCœlé-Syrie se trouvant sous influenceLagide jusqu'à la5e guerre de Syrie. À Alexandrie, ils forment uneentité politique séparée : ils occupent deux quartiers sur cinq de la ville hellénistique, ils sont responsables devant une juridiction spécifique, l'ethnarque, s'occupant de commerce, ils édifient rapidement de grandes fortunes (ce qui fait dire qu'ils sont avides d'or) : ils se voient confier plusieursfermes des impôts par lesLagides durant leIIIe siècle[142]. Formant des communautés fermées, en lien les unes avec les autres à l'échelle dumonde méditerranéen, ils doivent non seulement faire face à l'animosité populaire : animosité contre le percepteur, contre leur richesse mais aussi des prêtres et desphilosophes : LeStoïcienApollonius Molon les accuse d'anthropophagie rituelle, lesSophistes leur reprochent de falsifier des textes grecs, ce qui, selon le journalisteBernard Lazare, semble ne pas être sans fondement[143].
AuIer siècle av. J.-C., les Romains occupent laterre d'Israël et soumettent les Juifs. Si les Romains détruisirent lesecond temple de Jérusalem, on ne peut parler initialement d'antisémitisme, puisque les Romains appliquaient le même procédé (répression des causes de désordre public) à nombre depeuples conquis. Néanmoins en,Cicéron, dans un procès célèbre[144], décrit le judaisme comme unebarbarasuperstitio, incompatible donc avec la Majesté du peuple romain.
Les Romains sont dans l'ensemble asseztolérants en matière religieuse, n'exigeant pas des populations conquises qu'elles abandonnent leurscultes, mais ils sont heurtés, comme une bonne part de l'Antiquitépolythéiste, par l'aniconisme des Juifs. Après lasacralisation de l'Empereur, le refus de ceux-ci de sacrifier àson culte, que lejudaïsme rejette absolument, selon le principe de l'exclusivismemonothéiste, est incompréhensible pour la plupart despeuples de l'Antiquité (sauf par leszoroastriens). Par ailleurs, les autorités romaines ne peuvent appliquer l'Interpretatio romana au judaïsme, ce qui était une cause de tension.
L'attitude répressive des Romains est également exprimée parTitus écrasant laJudée lors de lapremière guerre judéo-romaine (entre66 et73) et surtout parHadrien changeant le nom romain de « Judée » de cette partie de province que les rebelles juifs nomment « Israël » dans leurs monnaies, en celui de « SyriaPalestina» (ou terre desPhilistins)[145], ce qui pourrait dénoter une orientation vers l'antijudaïsme dans une guerre de maintien de l'ordre dirigée contre des rébellions juives. Lors de la persécution deschrétiens dans l'empire romain, ceux-ci avaient d'abord été considérés comme une faction juive, lespremiers chrétiens dontJésus et lesapôtres, étant juifs.Suétone rapporte que« les juifs » fomentaient des troubles« à l'instigation d'un certain Crestus » (souvent lu Cristos), mais juifs et chrétiens furent ensuite progressivement distingués les uns des autres notamment en raison de l'existence duFiscus judaicus (impôt pour les Juifs[146]) et de la réaction dessynagogues qui rejetèrent de plus en plus les juifs reconnaissant Jésus commeMessie biblique et refusant lacirconcision[147].
« Car vous, frères, vous êtes devenus les imitateurs des Églises de Dieu qui sont en Jésus-Christ dans la Judée, parce que vous aussi, vous avez souffert de la part de vos propres compatriotes les mêmes maux qu’elles ont souffert de la part des Juifs. Ce sont ces Juifs qui ont fait mourir le Seigneur Jésus et les prophètes, qui nous ont persécutés, qui ne plaisent point à Dieu, et qui sont ennemis de tous les hommes, nous empêchant de parler aux païens pour qu’ils soient sauvés, en sorte qu’ils ne cessent de mettre le comble à leurs péchés. Mais la colère a fini par les atteindre. »
— 1Th 2:14-16
Il écrit pourtant dans l'épître aux Romains (Rm 11) que les Juifs sont « chers à Dieu », en précisant notamment (Rm 11:28-29) :« Ils sont aimés à cause de leurs pères. Car Dieu ne se repent pas de ses dons et de son appel. »
Paul était juif lui-même, ce qui peut aussi expliquer une plus grande liberté de ton quand il s'adresse directement à eux (1Th), que lorsqu'il en parle aux Romains convertis (Rm).
Dans la pratique, le pouvoir romain devenu chrétien sait utiliser les deux attitudes en fonction de ses intérêts du moment. Dans un premier temps, l'antijudaïsme est d'ordre spirituel : la religion officielle véhicule l'idée que le judaïsme peut être intrinsèquementpervers. Lespremiers chrétiens étant juifs, ils rejettent leur ancienne religion.
Par ailleurs, la continuité de l'existence des Juifs (« Ancien Israël ») aux côtés de la nouvelle religion (« Nouvel Israël ») est perçue comme la négation factuelle de l'authenticité du messageévangélique. Elle remet en cause lathéologie de la substitution, d'où leharcèlement envers les Juifs. Une partie duclergé et des théologiens les présentent comme unpeuple déicide, coupable collectivement de la mort deJésus de Nazareth. Les Juifs sont alors considérés comme destinés àse convertir au christianisme et, sous cette condition seulement, à participer à laParousie.
L'historien pointe ainsi certainsPères de l'Église« appliqués à traîner leurs adversaires dans la boue »[149] ; par exemple,Jean Chrysostome (Adversus Judaeos) crée le mythe antisémite d'une « cupidité » des Juifs[150]. À cette période,« par la volonté de l'Église, [le Juif] est devenu l'homme déchu ; on pourrait déjà dire l'homme traqué »[151].
Auhaut Moyen Âge, ainsi que le montreBernhard Blumenkranz, la population chrétienne paraît généralement coexister avec les juifs sans grand problème. Parfois même, elle les soutient. Lorsque le juif Priscus est tué àParis, en 582, par Pathir, devenu chrétien depuis peu, Pathir doit se réfugier avec ses domestiques dans l'église de Saint-Julien-le Pauvre. Il réussit à s'enfuir, mais l'un de ses serviteurs est sauvagement tué par la foule[152].
Cependant, dès 633, leIVe concile de Tolède publie, parmi ses décisions, le canon 57 à propos des juifs :
« Au sujet des juifs, le Saint Concile a prescrit que nul désormais n'utilise la violence pour faire des conversions… Mais ceux qui ont déjà été obligés de venir au christianisme…du fait qu’il est sûr que recevant les sacrements divins et baptisés ils ont eu la grâce, qu'ils ont été oints du chrême et qu'ils participent de la chair et du sang du Christ, ces hommes-là, il importe de les obliger à conserver leur foi, même s'ils l'ont reçue de force[153]. »
« Exécution des Hébreux » lors de lapremière croisade, illustration d'uneBible moralisée (ap. 1250).
Au cours du haut Moyen Âge, les juifs ne jouissent pas des mêmes droits que les chrétiens[source insuffisante]. Toutefois, les expulsions ou menaces d'expulsion proviennent avant tout duclergé et rarement du souverain. AuXe siècle, le papeLéon VII, répondant à l'archevêque de Mayence qui lui demande s'il faut contraindre les juifs au baptême ou plutôt les expulser, lui recommande de leurprêcher, mais de ne pas les obliger au baptême, tout en les menaçant de l'exil s'ils ne se convertissent pas[154].
Au début duXIe siècle, un mouvement que rapporteRaoul Glaber annonce de futures persécutions. Ce mouvement aurait éclaté en France et en Italie pour répliquer à une prétendue collusion entre juifs et lesultanAl-Hakim. Les juifs d'Orléans auraient prévenu le sultan que s'il ne détruisait pas leSaint-Sépulcre, les chrétiens viendraient conquérir son royaume[155].
Le juif qui vit en marge de la société chrétienne peut désormais être considéré comme un être maléfique. Quand, en 1020, le jour duvendredi saint, un tremblement de terre détruit Rome, les juifs en sont rendus responsables. La persécution est le fait tout à la fois du pouvoir civil et religieux[156]. L'Église imposa peu à peu aux autorités civiles la relégation des Juifs au ban de la société. Ils vivent souvent reclus dans desghettos. L'aboutissement de cette évolution fut lesmassacres perpétrés par la population chrétienne dans toute l'Europe, quels qu'en soient les motifs originels allégués (croisades,épidémies de peste,rumeurs de meurtres rituels d'enfants chrétiens…).
Nombre de professions furent interdites aux Juifs. Ils furent exclus de toute fonction administrative, et surtout descorporations demétiers, desguildes et des confréries religieuses. Il leur était interdit de posséder des terres pour les cultiver. Ils vivaient donc dans lesvilles où ne leur restaient comme possibles activités que celles qui étaient précisément interdites auxchrétiens. Si bien qu'ils furent repoussés de presque tous les métiers, et contraints principalement de s'orienter vers lecommerce et le prêt àintérêt, souvent interdit aux chrétiens d'Occident et auxmusulmans. On attribue à l'interdiction par lesévêques du prêt à intérêt àRome, une part de responsabilité dans lacrise économique qui se termina par sa chute.Constantinople n'eut pas ces scrupules et accueillit nombre deJuifs chassés d'Espagne qui contribuèrent largement à la réussite de l'Empire ottoman.
La répression et lesexpulsions des Juifs concernent avant tout l'Angleterre, la France et l'Empire germanique, car l'Espagne connaît un décalage d'un siècle par rapport à ces pays tandis qu'en Italie, les relations judéo-chrétiennes restent bien meilleures[156].
Les Juifs au Moyen Âge, huile sur bois (121,5 × 171,5 cm),K. Ooms,Anvers (1890).
AuMoyen Âge, les Juifs donnèrent à l'Europe de nombreux savants, et furent destraducteurs et importateurs des textes anciens,grecs en particulier, qu'ils traduisirent, commentèrent et permirent ainsi à l'Europe de les découvrir. Ils traduisirent également à partir de lalangue arabe, lors de la grande période de l'Espagne andalouse (Al-Andalus) où les échanges entre intellectuels juifs et musulmans atteignirent leur plus haut niveau lors de laConvivencia. Cette époque fut aussi celle de la traduction des textes d'Aristote (1120-1190), qui mobilisa des équipes composées de confessions des religions monothéistes, àTolède, et dans quatre villes d'Italie (Pise,Rome,Palerme,Venise). Elle fut à l'origine de laRenaissance duXIIe siècle.
D'après l'écrivain et historien du judaïsmeAndré Chouraqui,« Si leur sort fut souvent peu enviable, il convient de dire cependant qu'ils [les Juifs] furent relativement mieux traités par l’Islam que par la Chrétienté : jamais les Musulmans ne commirent rien qui rappelât les excès de l’Inquisition, de l’Expulsion d’Espagne, ou, dans l’Europe moderne, l’horreur des camps de concentration et des fours crématoires »[160]. En effet, les Juifs vivant enterre d'islam furent souvent sujet à unemarginalisation et une perception négative, parfois à des persécutions, mais également, pour certains, à une relative intégration au sein du tissu politique et administratif[161].
Les relations entre juifs et musulmans lors de l'émergence de l'islam
La position de Mahomet à l'égard dujudaïsme est de considérer certainesprescriptions mosaïques comme étant en réalité coraniques et que les textes saints ont été falsifiés par les Juifs.
Ainsi, le prophète de l'islam prêche-t-il aux Juifs que l'islam est la véritablereligion révélée à l'ensemble desprophètes du judaïsme, tandis que les saintes écritures juives, à savoirla Bible, ont étéfalsifiées par des religieux juifs puis chrétiens au fil des années. LeCoran, selon lesmusulmans, vient rectifier ces falsifications[164]. Pour ce qui est de l'Alliance scellée avec lepeuple d'Israël, celle-ci devient étendue à l'islam, bien que le livre des musulmans ne fasse pas mention d'une alliance exclusive auprès d'Isaac mais désigne, sans le nommer, l'un des fils d'Abraham comme promis àl'immolation[165].
Toutefois, lors de la signature de laConstitution de Médine, le prophète de l'islam scelle l'intégration à part entière des juifs au sein de laOumma, la communauté de croyants, garantissant ainsi le respect de la liberté des juifs à pratiquer leur religion[166].
L'essor de l'islam, dès610, permet dans un premier temps au judaïsme oriental de s'émanciper de lachrétienté triomphante, notamment du fait du retour en force progressif de l'empire byzantin[160].
Ladhimma, condition de « protégé », est le statut civique que les législateurs islamiques décernent aux « gens du Livre », dont font partie les Juifs, dans les terres musulmanes[160]. C'est un statut decitoyen de seconde zone : ils avaient le droit de pratiquer leur religion, d'accéder à la propriété et disposaient d'une autonomie juridique. En contrepartie, ils devaient s'acquitter d'unecapitation (al-djizîa) et étaient soumis à toutes sortes de restrictions et d'humiliations[171],[Note 6]. Ils ne pouvaient monter à cheval, bâtir de nouvellessynagogues ou de maisons plus hautes que celles de leurs voisins musulmans. Parfois, les Juifs devaient porter des vêtements permettant de les distinguer de la population[160].
Les conditions de vie des Juifs en terre musulmane étaient dures, les réduisant le plus souvent à un état misérable[172],[161]. Dans la vie quotidienne, ils étaient considérés avecmépris, supposéslâches etperfides, éléments de dissolution ducorps social[173],[174]. Il arrivait toutefois que parfois des fonctions administratives ou financières leur soient confiées en raison de leur compétence[175].
« Les hommes des Lumières qui préparèrent la Révolution française méprisaient tout naturellement les Juifs : ils voyaient en eux les survivants de l’obscurantisme médiéval, les odieux agents financiers de l’aristocratie. Leurs seuls défenseurs déclarés en France furent les écrivains conservateurs qui dénoncèrent l’hostilité envers les Juifs comme « l’une des thèses favorites duXVIIIe siècle » (J. de Maistre). »
« Or les juifs sont sans aucun doute la race la plus forte, la plus résistante, et la plus pure qui existe actuellement, ils savent s'imposer… grâce à certaines vertus dont on aimerait faire des vices, grâce surtout à une foi résolue. C'est un fait que les juifs s'ils le voulaient pourraient dès maintenant exercer leur prépondérance et même littéralement leur domination sur l'Europe, c'est un fait qu'ils n'y travaillent pas et ne font pas de projet en ce sens. Ils aspirent à s'établir enfin quelque part où ils soient tolérés et respectés[180]. »
Dans lemonde moderne, avec le développement des grandsÉtats européens, certains banquiers juifs comme lesPéreire ou la dynastie desRothschild ont joué un rôle important dans le financement du développement industriel et de grands projets nationaux (chemins de fer) de leur pays. Cette place est assortie de privilèges, comme l'anoblissement. Les raresJuifs concernés deviennent en quelque sorte des « hors-caste » : ce n'est pas une exclusion de la communauté (même si ces privilèges y suscitent des jalousies), mais l'intégration de ces Juifs privilégiés dans la sociétégoïe les préserve parfois des mesuresdiscriminatoires qui frappent l'immense majorité de leurs coreligionnaires, et cela rompt sporadiquement ce qu'Hannah Arendt nomme la « communauté de destin » (Schicksalsgemeinschaft)[181]. Dans l'ensemble, les Juifs riches bénéficient de cette manière d'une protection politique (ce qui est fréquent dans leur histoire, comme on le voit au début de l'islam qui protégea parfois les Juifs et en fit des administrateurs), qu'il s'agisse desJuifs de Cour, ou de certains financiers duXIXe siècle.
Titre de la peinture deJames Tissot :Conspiration des juifs (1886-94).
L'écrivain françaisOctave Mirbeau ou l'AllemandBismarck, qui tenaient des propos antisémites dans leur jeunesse, y renonceront plus tard[182]. Par la suite,des antisémites[Qui ?] l'accuseront d'être « à la solde des Juifs ».
« Les cléricaux se trouvant dans le camp antisémite, les socialistes français se déclarèrent finalement contre la propagande antisémite au moment de l’affaire Dreyfus. Jusque-là, les mouvements de gauche français duXIXe siècle avaient été ouvertement antisémites. »
Mais ce caractère international fut interprété également dans le sens d'uncomplot (dont lafamille Rothschild, installée enFrance, enAutriche, enAngleterre, aurait été lesymbole), alors qu'il est lié en réalité à la plus grande importance chez les Juifs de lafamille par rapport à lanation. Aussi les antisémites ont-ils projeté sur les Juifs des catégories de pensée qui sont étrangères à ces derniers.
« Confettis antijuifs », Paris (1899).
Par la suite, au cours duXIXe siècle, l'influencefinancière desJuifs diminue fortement, et c'est à ce moment de leur histoire où les Juifs ne sont presque plus influents économiquement en ce qui concerne les affaires politiques, que naîtra cettehaine virulente les accusant d'intentions qu'ils n'ont jamais réalisées quand ils l'auraient pu, et qu'ils n'étaient de fait plus capables de réaliser, même au cas où ils l'auraient voulu. En revanche, c'est à ce moment que les Juifs obtiennent des postes en nombre plus importants, dans l'administration par exemple, ce qui sera encore une fois jugé comme une menace (« France enjuivée »). Ces accusations ne sont pas seulement des contre-véritéséconomiques etpolitiques, mais elles ignorent également cette tendance fréquente chez les Juifs à l'assimilation, à la dissolution même de la communauté juive d'un pays, tendance freinée soit par un regain d'hostilité à leur égard, soit par une politique d'État visant à conserver le statut de Juif, eu égard à son utilité indiquée plus haut. Paradoxalement, on reproche aux Juifs leur particularité, leur « isolement sociétal ». Et on les réprime lorsqu'ils entament des processus d'ouverture, d'assimilation à la société environnante. Au moment où l'antisémitisme explose enEurope et s'organise (vers 1870, après plusieurs vagues au cours duXIXe siècle), les Juifs n'ont donc plus la même importance, et l'existence même de l'identité juive est en passe de disparaître, sans que la cause en soit une volonté délibérée de détruire leurculture.
Caricature antisémite autrichienne sur une affiche électorale du parti chrétien-social àVienne (1920).
L'organisation de l'antisémitisme commence donc dans les années 1870-1880. EnGrande-Bretagne, l'afflux des réfugiés juifs originaires deRussie, où se multiplient lespogroms durant les années 1880, finit par provoquer des émeutes antisémites àLondres, cependant isolées et réprimées par la police[Note 7]. EnAllemagne, les propos antisémites commencent à avoir du succès avecStöcker, et avecSchönerer enAutriche, où la virulence de l'antisémitisme est plus grande du fait de l'opposition de la communauté allemande alors prépondérante contre l'État : lepangermanisme y est particulièrement exacerbé, et les Juifs sont, on l'a vu, associés à l'État dans ce genre depropagande (le mouvement autrichien apparaît ainsi comme la véritable préfiguration dunazisme). C'est à partir desannées 1880 que l'antisémitisme européen recourt de plus en plus systématiquement à l'image imprimée, comme en témoigne l'exposition « Dessins assassins » duMémorial de Caen (France) en 2017 et 2018, réalisée à partir de la collection d'antisemitica du diamantaireArthur Langerman[186],[187].
Un trait caractéristique de l'antisémitisme, à ce moment de son histoire, est son caractère supranational, ce qui peut apparaître paradoxal. Le fait est cependant que lespartis antisémites allemands et autrichiens se présentant comme des partis au-dessus des partis (donc des partis qui ont vocation à contrôler totalement l'État, à incarner lanation), se réunissent en congrès internationaux, et c'est à ce niveau qu'ils ont l'ambition de lutter contre les Juifs, qui sont alors le seul élément de dimensioneuropéenne. En somme, les antisémites imitent les Juifs tels qu'ils les imaginent, et projettent de prendre le « pouvoir occulte » qu'ils leur attribuent.
L'agitation antisémite n'est toutefois pas durable, et il n'y a pas d'intensification constante de cetteidéologie jusqu'à l'avènement dunazisme. AinsiStefan Zweig nota-t-il que la période 1900-1920 sembla unâge d'or pour lesJuifs, au point que les précédentes agitations contre ces derniers ne semblaient plus qu'un mauvais souvenir.
Affiche antisémite en Allemagnenazie, avec unSA en premier plan. « Allemands ! Défendez-vous ! N'achetez pas chez les Juifs ! » (1933).
Les analyses deHannah Arendt à ce propos, soulignent l'absence de contenu de la notion de « droits de l'homme » en l'absence d'unÉtat pour les faire valoir et les appliquer à unenation donnée. Avec les persécutions nazies, les droits de l'homme sont en effet apparus après-coup, comme étant équivalents aux « droits des peuples » dans le système de l'État-nation. Les peuples sans État (celui de leur nation) se trouvèrent là démunis, privés de tous droits, et en tant qu'« hommes », leurs droits n'étaient garantis nulle part par aucune institution[188].
En France comme ailleurs, des écrivains ont vivement pratiqué et encouragé l'antisémitisme :Charles Maurras, lesFrères Goncourt,Octave Mirbeau[189],Édouard Drumont avec son pamphletLa France juive (1886),Robert Brasillach,Louis-Ferdinand Céline à l'époque où l'Europe sombra dans lefascisme. Maurras donna à ses écrits une forme doctrinale, qui s'est développée dans le courant de l'Action française entre 1899 et 1939, et fut condamnée à deux reprises par leVatican (en 1914 et en 1926)[190] ; cette doctrine rejetait lesracines juives du christianisme. Mais à l'inverse, d'autres écrivains, parfois catholiques commeLéon Bloy, soutiennent le rôle historique et religieux du peuple juif et sa qualité. Bloy écrit dans ses mémoires que« quelques-unes des plus nobles âmes que j'ai rencontrées étaient des âmes juives. La sainteté est inhérente à ce peuple exceptionnel, unique et impérissable »[191].
D'après le philosopheYeshayahou Leibowitz[194], seul cet enseignement du mépris, inhérent selon lui aumessianisme chrétien du Sauveur dégageant l'homme du « joug de laTorah et desmitsvot », explique que les populations et les élites dirigeantes européennes aient laissé faire et souvent réalisé elles-mêmes[195] l'assassinat des Juifs d'Europe pendant laSeconde Guerre mondiale. Le parcours de l'historienDaniel Cordier, tel qu'il l'a raconté, illustre cela : né dans un milieu ultra-nationaliste, ultra-catholique, antisémite et anti-républicainmaurrassien, on lui enseigne que le peuple juif est déicide, puis, après avoir rejoint laFrance libre en 1940, il évolue au contact de diverses personnalités de laRésistance commeRaymond Aron,Jean Moulin etStéphane Hessel, et surtout, en arrivant à Paris en mars 1943, lorsqu'il a le choc de voir un grand-père et son petit-fils portant l'étoile juive, ce qui lui inspire une honte immense et la « prise de conscience de la réalité criminelle » de ce que signifient les discours antisémites ; dès lors, sa doctrine est faite : « le peuple juif est le symbole de la Résistance, résistance aux persécutions, […] résistance à l'extermination. Aucun peuple n'a mérité avec une telle ténacité d'avoir une patrie et de vivre en paix selon sa loi »[196].
Lalimpieza de sangre (pureté du sang) se développe enEspagne après ledécret de l'Alhambra (1492) et l'expulsion des Juifs d'Espagne (à la même date). Pour obtenir certaines charges honorifiques, exercer certaines professions, entrer dans certains ordres religieux, il est nécessaire de prouver qu'aucun ancêtre n'était juif oumusulman : laReconquista terminée,Grenade prise par lesrois catholiques, il s'agit à présent de reconstruire l'identité nationale espagnole. Ce statut n'est progressivement adopté par lesarchevêchés que dès la fin desannées 1520. En pratique, lalimpieza est reconnue à un seuil de trois générations ; au-delà, il est quasi-certain que l'ancêtre ait du sangjuif oumusulman, étant donné le métissage de l'Espagne médiévale. La reconnaissance de lalimpieza de sangre se fait par enquête de l'Inquisition, surdénonciation : enquête par définition longue, et coûteuse. Ainsi, qui sort de ce filet se trouve lavé de tout soupçon, mais généralement ruiné.
D'autre part, moins de dix ans plus tard, lathéorie du complot juif international est diffusée principalement parLes Protocoles des Sages de Sion (1901), un autrefaux fabriqué par le RusseMatveï Golovinski pour le compte de la police secrète de laRussie tsariste (l'Okhrana)[61]. LesProtocoles sont unpamphlet qui décrit les prétendus plans de conquête du monde par lesJuifs. Ce faux fut utilisé par lesnazis comme instrument depropagande et figure en bonne place parmi les prétextes invoqués pour justifier la persécution des Juifs et leurextermination, laShoah. Ce faux a été réactualisé ces dernières années en forme de série télévisée populaire (Le Cavalier sans monture), diffusée dans quelques chaînes diffusant en languearabe, particulièrement durant le mois deRamadan où les familles musulmanes se réunissent le soir pour leftar[197],[198],[61],[199]. La « plupart des écrivains et des journalistes égyptiens ont soutenu la diffusion de la série » mais elle est toutefois « dénoncée par des intellectuels et des éditorialistes du monde arabe »[61],[198].
Particulièrement après la Seconde Guerre mondiale, entre les années 1960 et 2000, outre ceux dumonde arabe[200],[201] qui connaît le plus grand nombre de traductions au monde en arabe[202], de très nombreux pays éditent et rééditentLes Protocoles des Sages de Sion[61],[198] : France, Espagne, Pologne, Grande-Bretagne, Italie, Mexique, Argentine, Brésil (et autres pays sud-américains)[203], Inde, Iran, Russie,États-Unis[204],[205], Australie, Colombie, Inde, Bulgarie, en hongrois, en grec, en slovène, en grec, en polonais, en japonais[206], en roumain, en croate…
L'ouvrage d'un docteur Celticus publié par la Librairie antisémite de larue Vivienne à Paris en 1903, permet au lecteur de savoir reconnaître un Juif au moyen de ses nombreuses tares commentées[207].
Historiquement, leMandat britannique fut un facteur majeur qui permit l'établissement d'un « foyer national juif » en Palestine. Selon lenouvel historienTom Segev, assez paradoxalement, le soutien initial des Britanniques au projet sioniste tient principalement à l'idée que les « Juifs contrôlent le monde » et que leCommonwealth se verrait récompensé en les appuyant ;Chaim Weizmann, parfaitement conscient de ce sentiment, aurait su l'utiliser pour faire avancer sa cause[210].
Quoique laShoah soit souvent présentée comme une des causes de la fondation de l'État d'Israël, l'évolution duYishouv sous le mandat britannique infirme ce point de vue. Ainsi que le rappelle Tom Segev, avant laSeconde Guerre mondiale les« bases sociales, politiques, économiques et militaires de l'État-à-venir étaient déjà fermement en place ; et un sens profond d'unité nationale prévalait. (…) [même si] le choc, l'horreur et le sentiment de culpabilité ressenti par beaucoup généra un sentiment de sympathie envers les Juifs en général et le mouvement sioniste en particulier » après la Shoah[213].
Après la Seconde Guerre mondiale, des Juifs passent à l'offensive et attaquent la présence britannique pour obtenir l'indépendance, notamment par des actions sanglantes organisées par l'Irgoun et leLehi. Les Britanniques dépêchent alors en Palestine près de 100 000 soldats avec à leur tête le généralBernard Montgomery, qui avait maté laRévolte arabe de 1936, et le généralEvelyn Barker,antisioniste et pro-arabe convaincu. Des dérives antisémites se produisirent alors. Le général Barker ordonne ainsi aux soldats britanniques de ne plus fréquenter les établissements juifs, y compris les restaurants, parce que« le meilleur moyen de punir les Juifs était de les frapper au porte-monnaie, ce que cette race déteste particulièrement »[214]. Le 29 juin 1946, il organise l'opération Agatha avant de participer à laguerre civile de 1947-1948.
Résumant les différents motifs de se retirer de Palestine, dont les principales étaient le coût, l'impossibilité de résoudre le conflit entre Juifs et Arabes, et la mort inutile de soldats britanniques,Hugh Dalton,chancelier de l'Échiquier, écrivait au Premier ministreAttlee que la présence britannique« expose nos garçons, pour aucune bonne raison, à des expériences abominables et nourrit l'antisémitisme à une vitesse des plus choquantes »[215],[216].
En 1947, les dirigeants arabes sous-estimèrent la capacité des Juifs à mener une guerre, ce qui fut une des causes de la victoire israélienne de laGuerre de Palestine de 1948. Lenouvel historienIlan Pappé attribue cette faiblesse notamment à leurantisémitisme, notant toutefois que le roiAbdallah de Jordanie était quant à lui conscient de la puissance réelle duYichouv[217].
En URSS, se développe unepseudo-science, lasionologie, qui sous couvert d'antisionisme, reprend certains des mythes de l'antisémitisme comme la puissance financière et le contrôle des médias.
L'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes (EUMC)[218] a publié en mai 2006 un document de travail sur l'antisémitisme dans l'Union européenne des quinze États membres de 2001 à 2005. L'EUMC s'est donné pour tâche« d’observer le développement historique de l’antisémitisme, d’identifier le contexte social qui donne essor à la haine des agresseurs, mais aussi d’écouter avec sensibilité les peurs des communautés juives ». Le rapport conclut que, dans de nombreux pays l'augmentation des incidents antisémites est le fait plus demusulmans au Danemark, en France[Note 8], en Belgique[Note 9] que de l'extrême-droite. Ce serait moins le cas aux Pays-Bas[Note 10], en Suède[Note 11] ou en Italie[Note 12]. L'EUMC estime que« les événements au Moyen-Orient, les activités et le discours de l’extrême-droite et jusqu’à un certain point de l’extrême-gauche peuvent influer sur le nombre d’actes antisémites »[Note 13].
Si« les études montrent que lesstéréotypes antijuifs ont peu changé, les manifestations publiques d’antisémitisme dans la politique, les médias et la vie quotidienne ont changé récemment, surtout depuis le déclenchement de l’Intifada Al-Aqsa en ».
Concernant l'antisionisme, l'EUMC note que :« En Europe, « l’antisémitisme secondaire » et l’utilisation de l’antisionisme comme un moyen de contourner le tabou antisémite dominent parmi les extrêmes gauche et droite. Lerévisionnisme et lenégationnisme sont devenus un élément central du répertoirepropagandiste des organisations d’extrême-droite dont l’antisémitisme forme un élément central dans leur formation ».
C'est bien cette convergence entre antisionisme et antisémitisme qui amène une trentaine de familles juives à quitter, en 2009,Malmö enSuède après des incidents antisémites dont l'incendie d'unesynagogue[219],[220],[221].
Angela Merkel prononçant un discours dénonçant l'antisémitisme (14 septembre 2014).
En 2014, la presse internationale rapporte une augmentation des incidents antisémites dans le monde, liée à l'opération Bordure protectrice. AinsiUSA Today signale-t-il des incidents antisémites dans plusieurs pays européens (Allemagne,Angleterre,Italie,Belgique,France) et enTurquie[222]. Ces incidents sont déplorés par lesecrétaire général des Nations unies,Ban-Ki-Moon qui dénonce « la flambée d'attaques antisémites, notamment en Europe, en lien avec les manifestations concernant l'escalade de la violence àGaza » et estime que « le conflit auProche-Orient ne doit pas fournir un prétexte pour une discrimination qui pourrait affecter la paix sociale n'importe où dans le monde »[223]. EnAllemagne, la chancelièreAngela Merkel dénonce l'antisémitisme lors d'une manifestation à laporte de Brandebourg, àBerlin : « La vie juive fait partie de notre identité et de notre culture »[224].
Les chiffres les plus récents deStatistique Canada révèlent qu'en 2016, c'est la communauté juive qui était la plus fréquemment visée par des crimes haineux contre une religion dans ce pays[225]. Steve McDonald, directeur des politiques au Centre consultatif des relations juives et israéliennes, considère que« L’antisémitisme vise directement les juifs, mais il ne concerne pas que les juifs et ce n’est pas un problème juif »[225].
Une vaste enquête européenne d'Eurobaromètre[226] dont les résultats parviennent en janvier 2019, révèle que la moitié des Européens considèrent que l'antisémitisme est un problème dans leur pays, particulièrement influencé par leconflit israélo-palestinien et en hausse ces cinq dernières années. Des disparités de perception se dégagent parmi les habitants de l'Union des 28 pays : selon le pays et ses composantes démographiques ou selon l'appartenance religieuse et l'entourage des sondés. En cela, la France arrive parmi les pays en tête des inquiétudes face aux manifestations de haine du juif (insultes, profanation de cimetières, agressions verbales ou physiques…). L'ONG bruxelloise Contribution juive pour une Europe inclusive (CEJI), estime que le problème de l'antisémitisme trouve une de ses racines dans l'éducation où les Juifs sont seulement évoqués à travers la Shoah et jamais à travers les rôles importants et positifs qu'ils ont joués en Europe[227].
En parallèle ou en écho, le rapport du ministère israélien de laDiaspora dénonce la hausse des attaques antisémites de par le monde, à travers son rapport annuel publié en janvier 2019. En France, cette hausse s'élève à 69 % pour 2018 et en Grande-Bretagne, elle« atteint un record historique ». Si lesnéo-nazis prennent une part grandissante dans cette responsabilité,« les attaques antisémites dans la rue et sur la Toile (…) sont pour 70 % "de nature anti-israélienne" »[228].
Le et avant de quitter son poste, Ban Ki-Moon fait le bilan de son mandat à l'ONU et constate que« des décennies de manœuvres politiques ont créé un nombre disproportionné derésolutions, rapports et comités contre Israël » (68 résolutions contre Israël et 67 concernant tout le reste du monde entre 2006 et 2017[Note 14]) ; il ajoute :« Au cours de la dernière décennie, j'ai dit que nous ne pouvons pas avoir un parti pris contre Israël à l'ONU »[229]. Néanmoins, depuis 2007, Israël reste le seul pays au monde dont les violations présumées desDroits de l'homme sont régulièrement discutées dans le cadre d'un point permanent unique inscrit à l'ordre du jour (qui en compte dix) duConseil des droits de l'homme à l'ONU, auquel laSuisse demande[Note 14] en 2017 que ce point 7 soit supprimé afin de ne plus« soutenir la mise aupilori systématique d'un seul pays » ; cette demande est rejetée en 2018[230].
Ainsi, l'ONGUN Watch dont la mission première est d'assurer que l'ONU respecte sa propreCharte et que les Droits de l'Homme soient accessibles à tous, s'inquiète régulièrement du systématisme desrésolutions onusiennes contre Israël[231],[232] et de l'irrationalité de certaines conclusions des commissions contre l'État hébreu[233], qui rejoignent les« accusations moyenâgeuses d'empoisonnement des puits »[234]. Aussi, l'ONG dénonce-t-elle précisément l'incitation à la haine, à l'antisémitisme et au terrorisme[235] contre Israël ou les Juifs par de nombreux employés et enseignants palestiniens de l'agenceUNRWA financée par l'ONU qui leur a pourtant délivré un « Certificat d'éthique »[236].
Le,Antonio Guterres, premier secrétaire général de l'ONU à participer à l'Assemblée plénière duCongrès juif mondial, déclare que« la forme moderne de l’antisémitisme est de nier l’existence de l’État d’Israël »[237]. Néanmoins, il ne reconnaît pas de lien associatif entre l'antisémitisme contemporain et l'isolement d'Israël[238]. Cet avis n'est pas partagé par l'historienYakov Rabkin qui appelle justement à dissocier les Juifs et Israël. Selon lui, lapolitique d'Israël à l'égard des Palestiniens peut bien être à la source d'une violence antijuive en Europe, du fait d'une confusion fallacieuse qui s'est installée dans les esprits[239].
PourGérard Rabinovitch, dans le cas de blagues sur les Juifs, certaines ne seraient rien d'autre que : « une pique à caractère antisémite dans lesquelles l’accent est mis sur la malhonnêteté, l’avarice, la saleté, la cupidité »[243][pas clair].[pertinence contestée]
Le président de l'Autorité palestinienneMahmoud Abbas est critiqué par plusieurs organisations de lutte contre l'antisémitisme et les historiens spécialisés, qui l'accusent denégationnisme et de minimiser le nombre de victimes du génocide[244].
Mahmoud Abbas publie en 1984 (re-publié en 2011) un livre intitulé en français(en)La Relation secrète entre le nazisme et le sionisme, lors de ses études à l'université Patrice Lumumba àMoscou où il avait soutenu une thèse à ce sujet[245], dans lequel il accuse les sionistes d'avoir eux-mêmes tué un grand nombre de Juifs durant laShoah, en partenariat avec lesnazis, ce qui les rendrait responsables à égalité de la Shoah[245],[246]. Dans son livre, Abbas émet également des doutes quant à l'existence deschambres à gaz, citant à l'appui le négationnisteRobert Faurisson[247],[248]. Une enquête mondiale sur lanégation de la Shoah, publiée par David S. Wyman Institute for Holocaust Studies en 2004, décrit le livre comme « niant la Shoah »[249].
Dans une interview accordée à l'agence de presse palestinienne Ma'an en 2013, Mahmoud Abbas soutient sa thèse de doctorat concernant la relation entre le sionisme et le nazisme et déclare qu'il« défie quiconque pouvant nier que le mouvement sioniste avait des liens avec les nazis avant la Seconde Guerre mondiale »[250],[251].
En décembre 2017, il accuse à nouveau les Juifs de« contrefaire l'histoire et la religion », d'être des maîtres de lafalsification et avance que leCoran affirme que les Juifs« falsifient la vérité »[254].
Le, lors d'un discours à l'occasion d'une session duConseil national palestinien, qu'il qualifie de« leçon d'histoire », il déclare que la cause principale de l'extermination de six millions de Juifs durant laShoah n'était pas l'antisémitisme, mais« le comportement social, l’usure et les activités financières des Juifs européens ». Selon lui, les Juifs auraient choisi de se laisser tuer plutôt que d'émigrer vers laPalestine mandataire. Il affirme également qu'Hitler aurait facilité l'établissement d'unfoyer juif en Palestine à la suite d'un accord financier, l'accord d'Haavara, avec l'Anglo-Palestine Bank. Il nie en outre qu'il y aurait eu despogroms contre des communautés juives ayant vécu dans les pays arabes et musulmans[255],[256],[257],[258].
Le, le diplomate palestinienSaeb Erakat réagit au nom de l'Autorité palestinienne aux condamnations internationales, de l'Union européenne et de l'ONU[259],[260],[261], se disant« choqué » par ce qu'il qualifie« d'attaque orchestrée par Israël dans le monde pour accuser le président Abbas d'antisémitisme »[262].
Le 4 mai de la même année, à la suite de la vague de condamnations internationale, Abbas présente ses excuses et déclare qu'il respecte lafoi juive, condamne l'antisémitisme et la Shoah[263].
« Les Juifs sont des gens que l'on déteste encore plus depuis Auschwitz. À cause d'Auschwitz »,Imre Kertész[264].
Outre l'antisémitisme sanglant qui réapparaît en Europe et aux États-Unis dans divers attentats (Toulouse,musée juif de Belgique,Hypercasher,Pittsburgh…), on constate un retour aux accusations moyenâgeuses de propagation des épidémies : le,Antonio Guterres, secrétaire général de l'ONU, déplore la montée de l'antisémitisme dans le monde, liée à lapandémie de COVID-19. Il dénonce les accusations contre les Juifs d'avoir créé le virus dans une tentative de domination du monde. Pour lui,« l'antisémitisme est la forme la plus ancienne, la plus persistante et la plus enracinée de racisme et de persécution religieuse dans notre monde »[265],[266].
Pour le rabbinDelphine Horvilleur, les agressions antisémites des années 2010 viennent « a priori, de mondes très différents » : desdjihadistes commeMohammed Merah enmars 2012 à Toulouse, du « gang des barbares », des slogans en marge des manifestations de « gilets jaunes », dessuprémacistes américains blancs comme àPittsburg ounoirs comme dans lafusillade de Jersey City, des profanateurs de stèles en Alsace[276]. Elle ajoute que pour les suprémacistes comme pour l'extrême gauche, les Juifs confisqueraient quelque chose au « vrai peuple ». L'affaire Sarah Halimi lui paraît « emblématique » : « l'arrêt de la cour d'appel décrit Traoré comme un « baril de poudre » et l'antisémitisme comme « l'étincelle » ». Delphine Horvilleur se demande pourquoi, ces dernières années, l'antisémitisme « permet » le passage à l'acte et fait étincelle. Elle conclut alors que « dans le refus de penser plus globalement le phénomène, on a renforcé la solitude des Juifs »[276].
AOslo, le, des militants pro-palestiniens attaquent une manifestation demandant pour Israël "le droit de se défendre", en présence de représentants duParti du progrès (extrême droite) mais aussi duKristelig Folkeparti (démocrate-chrétien)[277], conduisant à 31 arrestations, lors desémeutes d'Oslo en 2008 et 2009. Six ans après, en février 2015, pour témoigner de leur "dégoût devant l'antisémitisme après les attentats meurtriers à Copenhague et à Paris commis par des terroristes djihadistes" quelques semaines avant, les photos d'une "manifestation spectaculaire des jeunes musulmans norvégiens se tenant la main autour d'une synagogue" font le tour du monde[278]. Au même moment,Muhammad Ali Chishti, qui en 2009 expliquait lors d'un meeting pour la Palestine "détester les juifs et les gays"[278], affirme dans une interview au quotidien norvégien "Verdens gang" regretter ses propos tenus six ans auparavant, même s'il continue à "critiquer la politique d'Israël"[278].
En France, la docteure en histoire Valeria Galimi a documenté l'"antisémitisme de rue" desannées 1930[279] et c'est seulement laGuerre de Gaza de 2014 qui le voit ressurgir pour la première fois[280], sous forme de violences devant une synagogue selon la presse[281] ou plusieurs selon d'autres sources[282],[280], ou depillages à Sarcelles, événements qui seront régulièrement rappelés au cours des sept années suivantes[283],[284]. La première manifestation en soutien auxPalestiniens, le 13 juillet 2014[284], autorisée, réunit 7000 personnes selon la police[282]et se disperse vers 17h[281]. Vers 17h30[282],[281], des participants et des groupes de défense juifs se "sont affrontés", avant de s'accuser "mutuellement d'avoir allumé la mèche", dans des récits reconstitués par la presse trois jours après[281], l'avocatArno Klarsfeld ayant alerté dansLe Monde le jour-même, sans avoir encore de détails[280].
La version des premiers mentionne la fermeture dumétro Bastille, obligeant des manifestants à se rendremétro Voltaire par larue de la Roquette, reliant les deux stations[281], qui héberge au numéro 84, à un demi-kilomètre dumétro Bastille, laSynagogue Don Isaac Abravanel, où 400 personnes sont réunies pour une journée de prières pour la paix en Israël[281]. En passant devant, les manifestants auraient reçus insultes et projectiles[281] de militants de laLigue de défense juive (LDJ) et duBetar venus protéger la prière[281], comme semblent l'indiquer témoignages et images vidéos[281]. Le récit de ces derniers mentionne au contraire plusieurs centaines de manifestants marchant en direction de la synagogue en criant "Israël assassin" et "À mort les juifs"[281],[285] et tentant de pénétrer dans la synagogue[281]. Des manifestants sont arrivés "avec des foulards palestiniens noués sur la tête et des bâtons"[281], témoigne un riverain trois jours après àFrance 24[281], média qui publie la photo d'une "échauffourées" mélant une trentaine de personnes au pied du bâtiment plutôt que devant une entrée[281]. La police arrive après 18h30 pour les séparer et par prudence n'évacue les 400 fidèles restés dans la synagogue, très inquiets[281], que vers 20h45[281]. "Aucun incident" n'avait été signalé jusque là, mais un groupe de manifestants a, peu avant, dû renoncer à aller en direction d'une autre synagogue, située elle aussi à un demi-kilomètre du mêmemétro Bastille fermé, au 25 ruerue des Tournelles[281], proche dumétro chemin vert. Ce groupe a en effet été "rapidement détourné par les forces de l’ordre à coup de gaz lacrymogènes"[281]. Le lendemain, cependant, un communiqué du premier ministreManuel Valls parle de violences « aux abords des synagogues »[282].
Les organisateurs modifient le parcours des manifestations suivantes, pour les prévenir et en rendent le gouvernement responsable[286]. La suivante a lieu cette fois dans le quartier parisien deBarbès[284]au seul appel duNouveau Parti anticapitaliste (NPA). Elle est interdite puis autorisée après un recours en justice[284] et réunit jusqu'à près de 3000 personnes à 15 h30[287]. Des "heurts ont opposé certains manifestants aux forces de l'ordre", avec "une quinzaine de policiers blessés"[284], scénario qui se reproduit le lendemain pour deux autres manifestations, cette fois définitivement interdites, de laLigue de défense juive (LDJ) et des pro-palestiniens, toutes deux àSarcelles (Val d'Oise), à l'issue desquelles une vingtaine de personnes sont placées en garde à vue: en plus de violences contre les policiers et le mobilier urbain, "des scènes de guérilla urbaine" sont observées par un syndicat de policiers[287] :très nombreux commerces et bâtiments pillés, brûlés ou "mis à sac"[288], dont une épicerie casher déjà "visée par un attentat à la grenade en septembre 2012"[289] par le groupe terroriste dit de "Cannes-Torcy", démantelé peu après. Certaines informations erronées du site duFigaro sont corrigées par la suite, comme celle d'une synagogue "en partie incendiée" et d'un "commissariat attaqué"[290],[291].
Finalement, le 23 juillet, une cinquième manifestation, d'un "Collectif national pour une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens", cette fois autorisée[284], se "passe globalement dans le calme"[284], avec entre 15000 et 250000 participants[284]. Trois hommes, âgés de 21 et 28 ans, sont condamnés à de la prison, entre six et dix mois pour leur participation à l'émeute, un quatrième avec sursis, et un mineur à une amende, mais aucun pour « antisémitisme ». Trois autres sont condamnés avec sursis pour leur participation à une émeute à Paris le même jour. Le terme «émeute» n'a jamais été utilisé par la police ou les procureurs[292].
Les 7 et 8 novembre 2024, lors d'une rencontre pour un match de football de l'UEFA Europa League au stade Johan Cruyff Arena à Amsterdam, aux Pays-Bas, entre le club israélien Maccabi Tel-Aviv et le club néerlandais Ajax Amsterdam, desaffrontements ont lieu en marge de la rencontre.
Avant les affrontements, un chauffeur de taxi est blessé et lynché par deshooligans duMaccabi Tel-Aviv. L'organisation néerlandaiseMRWN(nl) porte ainsi plainte contre les supporters du club israélien pour une vingtaine de faits de violences, en se basant sur des preuves en images[293]. Parmi les faits, figurent l'agression de femmes portant lehijab ou unkeffieh palestinien[294].
Pendant les affrontements, entre 20 et 30 personnes, principalement des supporters et hooligans israéliens, sont blessées, dont cinq sont brièvement hospitalisées[19]. Un supporter israélien a raconté qu’après le match, il avait été attaqué par un groupe de20 personnes à l’extérieur d’un casino. Ces derniers l’auraient interrogé sur sanationalité, et lorsqu'il a refusé de montrer son passeport, ils l’ont battu, le laissant inconscient avec deux dents cassées. Une autre supportrice israélienne a expliqué qu’elle était restée cachée dans son hôtel jusqu’à ce qu’il soit sûr d’en sortir. Un autre fan a rapporté qu’il semblait que des personnes attendaient les supporters du Maccabi à la gare.« Nous avions vraiment peur, même pour aller à l’aéroport », a-t-il confié[295].
Depuis quelques années, la montée de l'antisémitisme sur les réseaux sociaux interpelle notamment les milieux académiques[296]. Dès 2021, des articles sont publiés sur ce thème. L'ONU s'en inquiète également et appelle à combattre l'antisémitisme sur les réseaux sociaux[297].
En octobre 2021, un rapport publié par des organisations européennes révèle qu'Instagram et TikTok sont utilisés pour répandre des contenus antisémites auprès de jeunes. L'antisémitisme auprès des jeunes publics prend la forme de théories du complot et s'intensifie fortement pendant la pandémie. Le nombre de recherches dans Google de l'expression «nouvel ordre mondial», une théorie du complot antisémite, a atteint son plus haut niveau depuis 15 ans en mars 2020[298].
Après le 7 octobre 2023, l'antisémitisme sur les réseaux sociaux s'intensifie et semble difficile à juguler[305]. Il en va de même dans les universités et dans les rues européennes où les manifestations deviennent « décomplexées ».
Logo de la campagne d'UNITED pour la « Journée internationale contre le fascisme et l'antisémitisme », le (début du pogrom de lanuit de Cristal).
En 1993, les chefs d'États membres du Conseil de l'Europe établissent la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (CERI) et décident de mettre en œuvre une politique commune de lutte contre le racisme, la xénophobie et l'antisémitisme[306]. À la suite de la croissance de l'antisémitisme en Europe, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe adopte en 2007 la résolution 1563 « Combattre l'antisémitisme en Europe » qui met l'accent sur le danger immense de l'antisémitisme et demande aux États membres de mettre systématiquement en œuvre une législation criminalisant l'antisémitisme et les autres discours de haine[306]. Elle leur demande aussi de condamner toutes les formes de négation de l'Holocauste[306].
En 2008, c'est l'Union européenne qui adopte la décision-cadre 2008/913/JHA concernant la lutte contre le racisme et la xénophobie[306]. En vertu de cette décision,Viviane Reding, commissaire européenne chargée de la justice, demande, lors de la Journée internationale de commémoration de l'Holocauste en 2014,« à tous les États membres de l’UE d'agir afin de transposer intégralement la décision-cadre de l’UE et de garantir son application sur le terrain »[307].
1939 : décret-loiMarchandeau du 21 avril 1939, modifiant la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Il réprime l'excitation à la haine raciale ou religieuse. Le décret-loi Marchandeau sera abrogé le 27 août 1940 par le gouvernement de Vichy[310] ;
1994 : leNouveau Code Pénal, publié le, a créé de nouvelles infractions et renforcé la répression des délits racistes (l'étendant aux personnes morales) ;
2019 : le président de la République,Emmanuel Macron annonce la mise en œuvre de la définition de l'antisémitisme de l'Alliance internationale pour la mémoire de l'holocauste (IHRA)[311] adoptée par leParlement européen[Note 15] et, au 2 décembre 2019 par quinze états membres de l'Union européenne dont l'Allemagne et le Royaume-Uni[313]. Une résolution en ce sens est adoptée par l'Assemblée nationale à l'initiative deSylvain Maillard, députéLREM, le 3 novembre 2019[35] puis par leSénat le 5 octobre 2021[314]. Elle s'appuie sur la résolution du Parlement européen contre l'antisémitisme du[315],[31] et fait référence à la définition « opérationnelle » et « non contraignante » de l'antisémitisme de l'IHRA[316] :« L’antisémitisme est une certaine perception des Juifs qui peut se manifester par une haine à leur égard. Les manifestations rhétoriques et physiques de l’antisémitisme visent des individus juifs ou non et/ou leurs biens, des institutions communautaires et des lieux de culte ».
En, leConseil de l'Europe a ouvert à la signature le Protocole additionnel à la convention sur lacybercriminalité. Le, le ministre français des Affaires étrangères a ainsi présenté au Conseil des ministres un projet de loi autorisant l'approbation de ce protocole additionnel.
Ce protocole négocié à la demande de la France, demande aux États de criminaliser la diffusion de matériel raciste et xénophobe par le biais desystème informatiques afin d'« améliorer la lutte contre les actes de nature raciste et xénophobe commis par le biais desystèmes informatiques, en harmonisant ledroit pénal » français et européen. Les comportements visés :
la diffusion de matériel raciste et xénophobe ;
la diffusion d'insultes et menaces motivées par des considérations racistes et xénophobes ;
Comme indiquée dans la sectiondéfinitions, plus haut, le Parlement européen a adopté le une résolution recommandant aux pays membres d'adopter la définition de l'antisémitisme proposée dans cette résolution[31].
Garçon brandissant une pancarte : « Nous sommes les tueurs des Juifs »,Téhéran (Iran), 6 janvier 2020
Différentesthéories sociologiques tentent d'expliquer les causes de l'antisémitisme. Il existe deux approches principales : une première qui étudie les discriminations, les mythes et l'idéologie et une seconde qui étudie la mobilisation anti-juive, la violence et la persécution. D'autres approches théoriques expliquent aussi l'antisémitisme : l'une étudie l'interaction des Juifs avec la société occidentale parfois décrite comme hégémonique, une autre met en cause un phénomène de xénophobie universelle, et une autrenéo-marxiste etfonctionnaliste qui suppose que l'antisémitisme est un outil de laclasse dominantecapitaliste pour orienter l'agression contre les étrangers, et ainsi détourner l'attention des injustices[324].
Yves Chevalier, se réfère auxthéories des foules pour expliquer l'antisémitisme. Il citeGustave Le Bon pour qui les foules connaissent seulement les sentiments violents et extrêmes etErnst Simmel pour qui l'individu moderne a tendance à submerger son moi dans la foule pour« décharger ses tendances destructrices précipitées par ses frustrations »[327].Michel Wieviorka met en cause la désintégration de la raison et des valeurs universelles, au sein de l'identité communautaire[328].Léon Poliakov, met en évidence dans la société moderne d'un phénomène de « causalité diabolique » qui s'exprime dans les théories complotistes et serait le résultat d'une laïcisation des superstitions religieuse[329].Pierre-André Taguieff quant à lui note que l'analyse anthropologique met en évidence une reproduction des idéaux du racisme, de manière automatique et infralogique, au sein des structures familiales[330].
SelonChristian Delacampagne, le problème provient de la culture occidentale qui serait fondamentalement intolérante, et note l'existence d'un racisme systématique et rationalisé au sein des sociétés occidentales. Selon son opinion, le problème provient de l'Occident qui éprouve le besoin de se détruire et de détruire l'Autre[331].
Certains mettent en avant le caractèreuniversel du racisme, des réactions de peur et du refus de l'étranger, qui seraient des réactions « instinctives » de l'homme[326]. D'autres mettent en avant que le racisme peut servir à masquer la réalité de la lutte des classes. soit en justifiant l'exploitation et l'injustice, ou bien en attribuant la responsabilité de l'oppression à une « race » étrangère : les Juifs, pour les antisémites. Selon cette analyse : « l'antisémitisme est le socialisme des imbéciles »[326].
En temps de crise les Juifs sont pris enboucs émissaires : « victime sacrificielle », et les autorités religieuses, économiques ou politiques, qui sont souvent responsables des abus peuvent exploiter ce phénomène social[327].Yves Chevalier, décrit ce processus d'émissarisation, comme une technique de mobilisation des masses en vue d'objectifs socio-politiques qu'il fait remonter à l'antijudaïsme religieux, qui fut popularisé jusqu'au point de faire partie de la société occidentale[327].
Michael Marrus décrit trois niveaux d'antisémitisme, un extérieur, avec antipathie antijuive souvent modérée. Un second défensif et hostile, plus intense et instable, qui se manifeste dans les troubles d'origine économiques et politiques. Le troisième niveau, est quant à lui fanatique[327].
D'un point de vuepsychologique, le préjudice de l'antisémitisme, est étudié comme lié à unevulnérabilité personnelle. L'explicationcognitiviste lie l'antisémitisme à une généralisation ou un apprentissage erroné (comme pourAlice Miller qui se penche sur l'éducationviolente) tandis que l'hypothèse deTheodor W. Adorno, y voit un lien avec lapersonnalité autoritaire. Une explication alternative, y voit le résultat du conflitinter-groupe(en) dont les Juifs font partie[324].Morris Janowitz etBruno Bettelheim décrivent les attaques contre le hors-groupe parprojection de ses propres défauts ou insuccès comme étant des manifestations irrationnelles et d'évasion en lien avec le mouvement dynamique de l'individu au sein de la structure sociale[332]. PourNathan Ackerman etMarie Jahoda, la fonction de l'antisémitisme à travers différents mécanismes psychologiques comme la projection, la négation, la substitution de l'agressivité et larationalisation, permet la réduction de sentiments d'anxiété mais ils précisent que ce rôle joué par l'antisémitisme est possible du moment qu'il soit adopté par laculture de l'individu[333]. Comme étude récente, l'étude de Dario Padovan et Alfredo Alietti de 2017, conclut que l'autoritarisme et l'ethnocentrisme sont des facteurs corrélés à l'intolérance des Juifs[334].
D'un point de vuepsychanalytique, lespeurs et l'hostilité de la personne antisémite sontexternalisées,déplacées etprojetées sur uneminorité vulnérable[324]. Ainsi, il serait un individu obsédé par le besoin de nier sa proprecastration, donc ses limites, et donc sa mort. Mais il s'apparente également aunévrosé grave qui désireinconsciemment, régresser à la formation duje : « vers le corps de la mère ». Les Juifs seraient choisis commeboucs émissaires, du fait que leur différence seraitangoissante pour le raciste, qui est confronté à la fragile image detoute-puissante à laquelle il s'identifie[326]. Une autre perspective se focalise sur lahaine dupère chez leschrétiens, qui voient les Juifs, comme une image déformée de leur propre père, par projection de leur ancien conflit et de leurs tendances réprimées. Les Juifs seraient assimilés à des adeptes du Père, et non du Fils ou du retour de la Mère. De plus, dans l'imaginaire enfantine chrétien, l'image des Juifs peut servir comme une représentation refoulée « dumal »[327].
De plus, certains insistent que lahaine serait primitive, et donc l'antisémitisme ferait partie de cette « haine généralisée »[335].Jean-Bertrand Pontalis voit dans le racisme, au moins dans ses manifestations extrêmes, comme uneparanoïa collective. Il affirme que l'angoissexénophobe provient d'uneangoisse du huitième mois, l'autre est associé au « mauvais objet » et l'individu « expulse dans l'autre », la contradiction interne, la violence et le pulsionnel[336]. Face à lanévrose de la peur de perdre son intégrité individuelle, le raciste identifie celle-ci à l'intégrité de son groupe ethnique et souffre de cette image imparfaite. PourAshley Montagu, l'agressivité, comme énergie affective nécessite un objet pour se décharger, et la culture permet ainsi sans blâme social, de prendre comme objet desminorités ethniques et des « races maudites ». Ainsi, le raciste antisémite, par projection, assimile sa victime juive à sa propre agressivité et par exemple un homme avec des impulsions sexuelles contrariées, détestera ses victimes à qui il prêtera par exemple « une sexualité excessive, bestiale et donc menaçante pour notre humanité » et un autre avec un sentiment démesuré de culpabilité, détestera ses victimes, par exemple sous prétexte que ceux-ci sont « excessivement légalistes, respectueux de conventions vieillottes et ennemis de toute vie spontanée »[326].
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Histoire de l'antisémitisme, série documentaire en 4 épisodes de 53 minutes chacun, RéalisationJonathan Hayoun, Productrice Simone Harari Beaulieu, France, diffusionARTE, 2022[4],[339],[340],[341],[342].
↑« Le mépris de l'Arabe pour le Juif détermine le comportement du colonisateur, tel un véritable code d'intégration. Le joug séculaire des Arabes, qui a pesé durement sur eux, écrit en 1917 unaumônier militaire auMaroc (…), a exercé sur eux une sorte de compression. Cette attitude humble et craintive, au lieu de leur concilier toutes les sympathies (…) ne leur vaut souvent que des avanies de la part des Arabes et de quelques fonctionnaires français subalternes qui (…) s'imaginent qu'il est de bonne politique de montrer publiquement son mépris pour les Juifs. Plus le sujet juif se fait humble, plus il démontre son indignité. Plus il s'efface, plus il est effacé. (…) L'infériorité incorporée du dominé ouvre la voie à la violence ». Cité parGeorges Bensoussan,Juifs en pays arabes,coll. « Texto »,Éditions Tallandier, 2012 & 2021, chap. « Une condition de colonisé »,p. 234-235.
↑En 1942,Edith Stein,carmélite, est déportée et assassinée avec d'autres chrétiens d'ascendance juive à la suite des protestations de l'épiscopat catholique et dusynode deséglises réformées néerlandais auprès de l'envahisseur allemand contre les mesures discriminatoires touchant les juifs ; cf. John K. Roth,"Good news" after Auschwitz?: Christian faith within a post-Holocaust world, éd. Mercer University Press, 2001,p. 66extrait en ligne ; à titre d'exemple, on peut également citer, en France, le poète et peintreMax Jacob, déporté en 1944 ; cf. Christine van Rogger-Andréucci,Max Jacob : acrobate absolu, éd. Champs vallon, 1991,p. 178,extrait en ligne.
↑L'exemple le plus célèbre, et sans doute le plus grave, est celui des émeutes de 1888 à Londres, qui prennent pour prétexte les crimes deJack l'Éventreur àWhitechapel, quartier à forte population juive, et l'inscription anonyme selon laquelle« les Juifs ne seront pas accusés en vain » [de ces meurtres].
↑(en)EUMC :« In some countries – e.g. France and Denmark – the NFPs concluded that there is indeed evidence of a shift away from extreme right-wing perpetrators towards young Muslim males ».
↑(en)EUMC :« In Belgium the NFP concludes with regard to perpetrators of antisemitic acts that they are mainly found in the context of political-religious movements, who spread antisemitic ideas among groups of youngsters with Arabic-Islamic origins ».
↑a etb« en… il avait…été décidé… que la situation des droits de l'homme dans les pays du monde serait traitée sous différents points de ⟨l'⟩ordre du jour. Par contre, la question d'Israël et de la Palestine est discutée au point 7, créé spécialement à cet effet. La situation qui prévaut dans tous les autres pays est, quant à elle, examinée aux points 4 et 10. Dans la pratique, le point 7 fait à chaque fois l'objet d'un à deux jours de discussions, tandis que le Conseil n'accorde que quelques heures de son temps à la situation dans le reste du monde. Ainsi, depuis, il a adopté 68 résolutions contre Israël, et 67 concernant tout le reste du monde.Vu la situation réelle des droits de l'homme dans le monde, la Suisse… ferait bien… de proposer au Conseil de supprimer ce point 7, qui vise spécifiquement Israël. Il devrait lui tenir à cœur de promouvoir le respect des droits de l'homme en général, plutôt que de soutenir la mise au pilori systématique d'un seul pays. »,Le Parlement suisse, septembre 2017.
↑Voir la« Définition de l'antisémitisme », surAlliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA). Si l'antisionisme n'est pas explicitement mentionné dans cette définition de l'antisémitisme, elle inclut dans ses exemples« Refuser au peuple juif son droit à l'autodétermination par exemple en affirmant que l'existence d'un État d'Israël est une entreprise raciste ». Cette définition a été adoptée par leParlement européen le[312]
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↑À l'image desconversions qui ont eu lieu auMoyen Âge et à laRenaissance, l'antisémitisme était à ce moment fondé sur l'appartenance religieuse des juifs au judaïsme. Les conceptions raciales « modernes » se développent quant à elles au cours duXIXe siècle avec les penseursracialistes eteugénistes, comme il est développé plus bas.
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