En raison de la politique linguistique avant la chute duDerg, la langue est parlée enÉthiopie par une majorité de la population, soit commelangue maternelle — majoritairement par lesAmharas —, soit comme langue seconde ou véhiculaire.
Depuis l'entrée en vigueur de laConstitution de 1994, l'amharique a perdu son statut delangue officielle unique, l'article 5-1 affirmant la reconnaissance par l'État du même statut pour toutes leslangues éthiopiennes[4] ; toutefois, l'article 5-2 accorde à l'amharique le statut delangue de travail du gouvernement fédéral[4].
En dehors de l'Éthiopie, l'amharique est parlé par environ 2,7 millions de personnes vivant enÉgypte, enIsraël, àDjibouti, auYémen, auSoudan, auxÉtats-Unis, ainsi qu'enÉrythrée par une partie de la population ayant connu la période antérieure à l'indépendance en1993.
Il n'existe pas deromanisation standard de l'amharique, la graphie employée varie sensiblement selon les ouvrages et les langues. Il en existe cependant une transcription scientifique qui permet de rendre lescaractères ge'ez[c] de façon univoque. Elle exige des caractères spéciaux rarement disponibles sur les systèmes informatiques courants. On la rencontre donc peu en dehors des ouvrages de linguistique.
L'amharique s'écrit à l'aide de l'alphasyllabaire amharique, dérivé de l'alphasyllabaire éthiopien[5]. Plusieurs lettres ont été ajoutées aux 26 de base :
sept consonnes dont six palatales : ሸ (šä), ቸ (čä), ኘ (ñä), ዠ (žä), ጀ (ǧä), ጨ (č'ä) et le ኸ (hä). Les six consonnes palatales correspondant à des dentales, c'est un élément bien visible dans la graphie. Les six nouvelles consonnes ont aussi été insérées dans l'alphabet après les dentales.
Dentales
ሰ
ተ
ነ
ዘ
ደ
ጠ
Palatales
ሸ
ቸ
ኘ
ዠ
ጀ
ጨ
le ኧ (ä)
le ቨ (vä), utilisé pour les emprunts : ቪዛ (viza, visa)
un certain nombre de labio-vélaires.
Outre les ajouts, l'alphasyllabaire amharique se distingue par la prononciation identique de quelques lettres différentes :
Historiquement, ces sons ont été distincts[6]. Ainsi, አ (ʾ) et ዐ (ʿ) sont à l'origine uncoup de glotte et unepharyngale fricative sonore. Ces consonnes sont devenues des « porteurs de voyelles »[6].
Tout comme l'alphasyllabaire éthiopien, l'amharique se lit de gauche à droite. Les caractères sont séparés et n'ont pas de forme initiale, médiane, finale ou cursive, ou de différenciation majuscule - minuscule[7]. Chaque caractère se présente sous sept formes, appelées « ordres », correspondant à la voyelle[5]. Les ordres portent tous un nom enge'ez, indiqué entre parenthèses[8] :
ä (ግዕዝ,gəʼəz, « premier »)
u (ካዕብ,kaʼəb, « deuxième »)
i (ሣልስ,saləs, « troisième »)
a (ራብዕ,rabə(ʾ), « quatrième »)
e (ኃምስ,haməs, « cinquième »)
ə (ሳድስ,sadəs, « sixième »)
o (ሳብዕ,sabe(ʾ), « septième »)
La lecture ne présente en général pas de difficultés ; par exemple, le troisième caractère de la première ligne se lit « hi ». Néanmoins, certains éléments sont sujets de réflexions. L'alphasyllabaire amharique n'indique pas lesgéminations, ce qui peut prêter à confusion ; አለ peut se lirealä, « il a dit » ouallä, « il y a »[9]. Seul le contexte permet un choix. Dans la retranscription, la gémination est indiquée par un redoublement de la consonne. Un deuxième problème se rapporte au sixième ordreə, qui peut être la consonne suivie de la voyelle ou la consonne uniquement[9]. La connaissance du terme et de sa prononciation se révèle indispensable. Le mot ደንበር, « frontière » pourrait se liredänəbär, mais la lecture correcte estdänbär, la consonnen étant prononcée sans la voyelle. Le sixième ordre n'est presque jamais prononcé à la fin du mot. On dira, pour le mot ስንት, « combien »,sənt et nonsəntə. Une des rares situations où ce sixième ordre est prononcé est la récitation de la poésie. Enfin, les lettres suivantes sont lues avec una au premier ordre et non unä : ሀ (ha), ሐ (ha), ኀ (ha), አ (a) et ዐ (a).
L'orthographe est également peu compliquée, encore en raison de la nature de l'alphasyllabaire. Un questionnement existe autour du choix dans les lettres prononcées de manière identique. Celles-ci portent d'ailleurs des noms spécifiques pour bien les distinguer[6]. La lettre est nommée en référence à un mot dans lequel on l'emploie. Ainsi, on parle du ንጉሡ ፡ ሠ,nəgusu sä, ce qui signifie « le sä de nəgus », c'est-à-dire celui employé pour écrire le mot « nəgus ».
les deuxsä :
ሰ : እሳቱ ፡ ሰ,əsatu sä. On utilise cette lettre pour écrire le mot እሳት,əsāt en ge'ez etəsat, en amharique : « feu ».
ሠ : ንጉሡ ፡ ሠ,nəgusu sä, utilisée pour le mot ንጉሥ,nəgus, « roi » en ge'ez et en amharique.
les troish, lus avec une voyellea au premier ordre, strictement identique au quatrième :
ሀ : ሃሌታው ፡ ሀ,halletaw ha. ሃሌታ,hālletā signifie « chanter alléluia » en ge'ez.
ሐ : ሐመሩ ፡ ሐ,hameru ha. ሐመር,ḥamar, « bateau » en ge'ez.
ኀ : ብዙኀኑ ፡ ኀ,bəzuhanu ha. ብዙኃን,bəzuḫān, « beaucoup » en ge'ez.
ጸ : ጸሎቱ ፡ ጸ,sʼälotu sʼä. ጸሎት,sʼalot, en ge'ez etsʼälot, en amharique : « prière ».
ፀ : ፀሐዩ ፡ ፀ,sʼähayu sʼä. ፀሐይ,sʼaḥay, en ge'ez etsʼähay, en amharique : « soleil ».
Le choix d'un caractère ne modifie en rien la prononciation. Toutefois, la décision d'écrire avec une lettre au lieu qu'une autre renvoie généralement à l'étymologie ge'ez[10], défendue par les traditionalistes. Un exemple est celui du mot ንጉሥ,nəgus, qui s'écrit avec lesä ሠ et non ሰ. Pour ce terme, l'écriture d'origine est généralement respectée et connue, ce qui n'est pas toujours le cas. Il y a des débats entre traditionalistes sur les étymologies afin de justifier le choix d'un caractère.
Alphasyllabaire amharique
ä*
u
i
a
e
ə
o
ʷä
ʷi
ʷa
ʷe
ʷə
h
ሀ*
ሁ
ሂ
ሃ
ሄ
ህ
ሆ
l
ለ
ሉ
ሊ
ላ
ሌ
ል
ሎ
ሏ
h
ሐ*
ሑ
ሒ
ሓ
ሔ
ሕ
ሖ
ሗ
m
መ
ሙ
ሚ
ማ
ሜ
ም
ሞ
ሟ
s
ሠ
ሡ
ሢ
ሣ
ሤ
ሥ
ሦ
ሧ
r
ረ
ሩ
ሪ
ራ
ሬ
ር
ሮ
ሯ
s
ሰ
ሱ
ሲ
ሳ
ሴ
ስ
ሶ
ሷ
š
ሸ
ሹ
ሺ
ሻ
ሼ
ሽ
ሾ
ሿ
q
ቀ
ቁ
ቂ
ቃ
ቄ
ቅ
ቆ
ቈ
ቊ
ቋ
ቌ
ቍ
b
በ
ቡ
ቢ
ባ
ቤ
ብ
ቦ
ቧ
v
ቨ
ቩ
ቪ
ቫ
ቬ
ቭ
ቮ
ቯ
t
ተ
ቱ
ቲ
ታ
ቴ
ት
ቶ
ቷ
č
ቸ
ቹ
ቺ
ቻ
ቼ
ች
ቾ
ቿ
h
ኀ*
ኁ
ኂ
ኃ
ኄ
ኅ
ኆ
ኈ
ኊ
ኋ
ኌ
ኍ
n
ነ
ኑ
ኒ
ና
ኔ
ን
ኖ
ኗ
ñ
ኘ
ኙ
ኚ
ኛ
ኜ
ኝ
ኞ
ኟ
ʾ
አ*
ኡ
ኢ
ኣ
ኤ
እ
ኦ
ኧ
k
ከ
ኩ
ኪ
ካ
ኬ
ክ
ኮ
ኰ
ኲ
ኳ
ኴ
ኵ
h
ኸ
ኹ
ኺ
ኻ
ኼ
ኽ
ኾ
w
ወ
ዉ
ዊ
ዋ
ዌ
ው
ዎ
ʾ
ዐ*
ዑ
ዒ
ዓ
ዔ
ዕ
ዖ
z
ዘ
ዙ
ዚ
ዛ
ዜ
ዝ
ዞ
ዟ
ž
ዠ
ዡ
ዢ
ዣ
ዤ
ዥ
ዦ
ዧ
y
የ
ዩ
ዪ
ያ
ዬ
ይ
ዮ
d
ደ
ዱ
ዲ
ዳ
ዴ
ድ
ዶ
ዷ
ǧ
ጀ
ጁ
ጂ
ጃ
ጄ
ጅ
ጆ
ጇ
g
ገ
ጉ
ጊ
ጋ
ጌ
ግ
ጎ
ጐ
ጒ
ጓ
ጔ
ጕ
t'
ጠ
ጡ
ጢ
ጣ
ጤ
ጥ
ጦ
ጧ
č'
ጨ
ጩ
ጪ
ጫ
ጬ
ጭ
ጮ
ጯ
p'
ጰ
ጱ
ጲ
ጳ
ጴ
ጵ
ጶ
ጷ
s'
ጸ
ጹ
ጺ
ጻ
ጼ
ጽ
ጾ
ጿ
s'
ፀ
ፁ
ፂ
ፃ
ፄ
ፅ
ፆ
f
ፈ
ፉ
ፊ
ፋ
ፌ
ፍ
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ፏ
p
ፐ
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ፔ
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ፖ
ፗ
* Au premier ordre, les lettres ሀ, ሐ, ኀ, አ et ዐ sont lues avec une voyellea identique au quatrième ordre.
Selon leDictionnaire historique de la Bible, il aurait commencé à supplanter leguèze en Abyssinie, vers l’an 1300, et on le parlait vers 1900 dans presque toute cette région. Les missionnaires catholiques furent les premiers qui essayèrent de traduire en amharique des parties de l'Écriture ; mais leurs travaux n’ont jamais été imprimés[11]. La Bible fut traduite pour la première fois, en entier, de 1810 à 1820, parAsselin de Cherville, consul de France au Caire, aidé d’un vieillard appelé Abou-Roumi. Sa traduction fut achetée par laBible Society, et revue par J. P. Platt, qui fit paraître les Évangiles (1824), et le Nouveau Testament complet (1829). L’Ancien Testament parut en 1840, et une éditioncomplète de la Bible, en 1842. LaBible Society a publié en 1875 une édition nouvelle, revue par le Dr Krapf, avec le concours de plusieurs Abyssiniens[12].
De nos jours, l'amharique est la langue majoritaire des Éthiopiens, dont 27 millions en langue maternelle. En comptant les Éthiopiens qui le parlent en seconde langue, plus de 50 millions d'Éthiopiens savent sans doute parler l'amharique sur 85 millions d'habitants.
↑Le recensement de 2007 effectué par l'Agence Centrale des Statistiques recense en Éthiopie 29,33 % de la population nationale de locuteurs d'amharique en tant que langue maternelle. L'Organisation des Nations unies estimant la population éthiopienne en 2015 à 99 391 000, on obtient le nombre de 29 156 000 ; un nombre très proche des 28 506 600 en 2015 donné par Joshua Project, auquel est ajouté les locuteurs vivant en dehors de l’Éthiopie (308 000) pour un total de 28 907 000 toujours selon Joshua Project (Ethnologue donnant quant à lui 211 600 locuteurs en dehors de l'Éthiopie en 2007). 29 156 000 + 308 000 = 29 464 000 en 2015.