L’alpinisme est une pratiquesportive consistant à effectuer des ascensions sur des terrains aux reliefs de typealpin.
L'alpinisme fait usage de techniques spécifiques et de savoir-faire qui permettent au pratiquant d'appréhender les risques inhérents à l'altitude et au milieu hostile dans lequel il évolue, qui se distingue ainsi du terrain habituel de larandonnée pédestre[1]. L'alpinisme se définit aussi comme une pratique sportive d'aventure ou de loisirs[1], contrairement aux ascensions à but religieux (pèlerinage) ou utilitaire (chasseurs,cristalliers, militaires).
Le terme « alpinisme » apparaît en 1877 dans une publication duClub alpin français pour désigner cette activité physique deloisirs en haute montagne. Il entre dansLe Nouveau Larousse illustré en 1898[4]. Si, par sonétymologie, l'alpinisme fait directement référence auxAlpes, premier site historique de ces activités, il s'étend aux activités similaires dans toutes les montagnes du monde. Le terme anglais plus ancien,mountaineering (« alpinisme »), ne fait pas référence aux Alpes mais dérive demountaineer (littéralement « montagnard ») qui prit aussi le sens de « grimpeur en montagne, alpiniste » dès 1803[5],[6]. Lenéologisme « montagnisme » n'est jamais utilisé[4].
Ultérieurement, d'autres termes apparaissent pour désigner la pratique de l'alpinisme dans d'autres massifs : lepyrénéisme pour les ascensions dans lesPyrénées, l'himalayisme pour les ascensions dans l'Himalaya et l'andisme pour les ascensions dans lacordillère des Andes, ainsi que quelques autres variantes peu usitées[7]. Le terme « alpinisme » conserve son sens global, quel que soit le lieu de pratique[6],[4].
Le pratiquant de ce sport est appelé « alpiniste ». D'autres termes le désignent : grimpeur, varappeur ou rochassier (spécialiste du rocher), glaciériste (spécialiste de la glace), ascensionniste[8], himalayiste[4]. Si l'alpiniste est un amateur expérimenté et autonome et qu'il pratique cette activité sans l'aide d'un guide professionnel, il peut être appelésans-guide. Dans le cas contraire, il devient le « client » qui fait appel, contre rétribution, aux services de professionnels : « porteur » (en France, profession disparue dès l'après-guerre[9]),aspirant-guide,guide ousherpa. Au sein d'une cordée, l'alpiniste peut être dénommé compagnon de cordée, partenaire ou équipier mais enalpinisme solitaire, il devient alpiniste « solo ». Le premier de cordée (ouleader) est celui qui choisit le cheminement et progresseen tête, suivi du ou des seconds de cordée. Les alpinistes peuvent aussi pratiquer en « réversible », étant alors premier de cordée à tour de rôle selon la difficulté des passages et leur expérience. Un chef d'expédition dirige une expédition composée de plusieurs alpinistes, amateurs et professionnels.
Une sortie d'alpinisme est également connue sous la dénomination « course »[10], quelle que soit sa durée ou sa difficulté.
Durant l'Antiquité gréco-romaine, l'Etna fait l'objet d'ascensions relativement régulières.Empédocle se serait donné la mort en sautant dans un de ses cratères, auVe siècle av. J.-C.[15]. L'anecdote est tenue pour une légende parStrabon, mais celui-ci nous apprend à cette occasion que le sommet était fréquemment visité[16]. L’empereurHadrien a gravi le volcan auIIe siècle[17].
Ces ascensions ne relèvent pas de l'alpinisme à proprement parler car elles n'opposent pas de difficultés techniques. On trouve par contre ces dernières dans la prise de places fortes souvent perchés sur des hauteurs[18].Salluste, dans laGuerre de Jugurtha, raconte comment les soldats romains prirent par effet de surprise une forteresseNumide, en 106 avant J.C., après avoir escaladé une cheminée rocheuse en usant de cordes pour s'assurer[19].
Dans unechronique médiévale duXIIIe siècle,Fra Salimbene rapporte que le roiPierre III d'Aragon a atteint le sommet dupic du Canigou en 1280. Il semble cependant que le monarque ne soit pas allé jusqu'au sommet du pic. En effet, le chroniqueur franciscain écrit que Pierre III vit au sommet un dragon sortant d'un lac. Outre son caractère épique, cette indication pourrait plutôt correspondre au lieu-ditles Estanyols (« les Étangs »), environ 500 mètres en contrebas[21].
Dans un autre style,Pétrarque inaugure le récit d'ascension dans la lettre qu'il adresse à son amiFrancesco Dionigi. Il y raconte avoir gravi lemont Ventoux, le, accompagné de son frère et de deux serviteurs, « poussé seulement par le désir de visiter un lieu renommé pour son altitude »[22].
En1492,Charles VIII de France, alors qu'il traverse leDauphiné, découvre lemont Aiguille, appelé alors « Mons Inascensibilis ». Il missionne son capitaine,Antoine de Ville, d'en tenter l'ascension. Ce dernier, accompagné de sept hommes dont un aumônier chargé de consigner l'exploit, atteint la prairie sommitale le 26 juin[24]. Pour franchir les difficultés, ils ont eu recours à des outils habituellement utilisées pour le siège des places fortes : échelles, cordes et crochets métalliques. Il s'agit de la première ascension mettant en œuvre des techniques d'escalade artificielle.
Avec la Renaissance apparaît, sous la plume du naturaliste suisseConrad Gessner, une approche de la montagne qui s'apparente davantage à celle des alpinistes modernes[25]. En1541, il écrit une lettre intitulée « Admiration pour la montagne » à son ami Jacques Vogel, dans laquelle il dit être décidé « chaque année à faire l'ascension de quelques montagnes, à la saison où les plantes sont en pleine floraison, pour les examiner et procurer à mon corps un noble exercice en même temps qu'une jouissance à mon esprit. » En août1555, il réalise l'ascension dumont Pilate pour lequel il rédige le premier livre consacré à une montagne,Descriptio Montis Fracti sive montis Pilati[26].
Avec lesiècle des Lumières, la montagne commence à susciter l'intérêt des classes éduquées en tant qu'objet, à la fois, de curiosité scientifique et de plaisir esthétique. En juin1741, l'aventurier britanniqueWilliam Windham et son amiRichard Pococke sont les premiers à réaliser pour leur plaisir l'ascension duMontenvers. Le récit enthousiaste qu'en donne Windham conduit de nombreux Anglais à intégrer la visite de laMer de Glace dans leurGrand Tour d'Europe, cet événement marque le début du tourisme alpin[27].
Deux Genevois,Horace-Bénédict de Saussure etMarc-Théodore Bourrit, ont été les moteurs de la conquête dumont Blanc. Le premier a proposé, en1786, une prime à celui qui gravirait la « montagne maudite », le second a multiplié les essais pour trouver une voie d'accès vers le sommet. Sous leur impulsion, les habitants deChamonix et deSaint-Gervais explorent plusieurs itinéraires, toutefois aucun ne permet de réaliser la course en une journée. Le 7 juin 1786Jacques Balmat, un chasseur de chamois et cristallier, est contraint, lors d'une tentative, de passer la nuit en montagne, il comprend ainsi que l'ascension peut être réussie en effectuant unbivouac. Le, avec le docteur chamoniardMichel Paccard, il parvient pour la première fois au sommet dumont Blanc[30]. Saussure, accompagné de 19 personnes, gravit le le point culminant de l'Europe. Le récit qu'il fait de son ascension lance le mouvement de l'alpinisme moderne[31].
Durant cette période, le rôle des cartographes militaires doit aussi être mentionné. En 1828, le capitaine Durand, travaillant à la réalisation de lacarte de France dite d'état-major, réussit l'ascension duPelvoux (3 943 m) et identifie labarre des Écrins comme étant levéritable le point culminant du pays (laSavoie n'étant pas française alors)[34]. Si les officiers cartographes n'ont réalisé finalement que peu de premières d'importance, leur travail a permis aux alpinistes d'identifier et de mesurer l'altitude des sommets qui font l'objet de leur convoitise.
À partir des années 1850, l'alpinisme prend une ampleur nouvelle. Les « bourgeois éclairés » et les aristocrates venus de Grande-Bretagne, où la culture du sport est forte et l'accessibilité des Alpes facilitée par les chemins de fer, sont de plus en plus nombreux à s'élancer vers les sommets. Ils sont suivis par les Allemands, les Autrichiens, les Suisses et les Français. Les cimes alpines sont prises d'assaut et donnent lieu à une course aux premières dans un esprit de compétition sportive. Cette période a été appelée l'âge d'or de l'alpinisme (1854-1865) par l'alpinisteWilliam Auguste Coolidge.
Dans ce contexte, apparaissent les premiers alpinistes de renom, en majorité de nationalité britannique, telsFrancis Fox Tuckett,Edward Whymper,Albert F. Mummery,Frederick Gardiner, qui ont laissé leur nom lié à despremières importantes et à des sommets alpins prestigieux. Ces riches Anglais étaient le plus souvent accompagnés de guides suisses, français ou italiens, dont certains ont aussi accédé à une certaine notoriété, tels que lesMichel Croz, Auguste Balmat,Melchior Anderegg,Christian Almer,François Devouassoud. Certaines de ces cordées dépassent le cadre d'une relation d'employeur à employé, pour donner lieu à des amitiés traversant les frontières de classes[35].
L'équipement deHermann von Barth (1845-1876) : petit sac à dos avec une bouteille en verre, chaussures cloutées,crampons, bâton de marche.
Il existe déjà à cette époque des alpinistes femmes[36], tellesHenriette d'Angeville — une Franco-Suisse, deuxième femme à gravir le mont Blanc —,Meta Brevoort — une Américaine, tante de William Auguste Coolidge, ayant fait de nombreuses et illustres ascensions dans les Alpes dans les années 1860-1870 et ayant réalisé plusieurs premières féminines ; son nom a été donné à la pointe Brevoort, point culminant de laGrande Ruine dans le massif des Écrins — ouLucy Walker — une Britannique, première femme à avoir atteint le sommet duCervin.
Les « bourgeois éclairés » et aristocrates créent les premiers clubs alpins entre 1857 et 1874, d’abord en Angleterre (l'Alpine Club) puis en Suisse, en Italie, en Allemagne, en Autriche, en Pologne et enfin en France en1874. Le premier club d'alpinisme féminin, leLadies' Alpine Club, est créé à Londres en 1907 ; il fusionne avec l'Alpine Club de Grande-Bretagne en 1975. Ces clubs « définissent des usages en matière d’excursion, organisent les compagnies de guides, construisent des refuges, améliorent la qualité des hébergements, rédigent des notices scientifiques, inventent une littérature de voyage et réussissent ainsi à promouvoir, auprès de leurs contemporains, une forme de tourisme alpin à la fois cultivé et mondain »[17]. Les clubs continentaux ont plutôt une démarche d'aménagement de la montagne alors que les clubs britanniques ont une vision transfrontalière des Alpes qu'ils voient comme un terrain de jeu (ainsi l'ouvrage deLeslie Stephen en 1871 s'intitule-t-ilLe Terrain de jeu de l'Europe). L'Alpine Club publiePeaks, Passes, and Glaciers en 1859, le premier destopo-guides[37].
La course aux sommets a pu prendre aussi la forme d'une compétition internationale parfois mortelle, comme en témoigne la tragique tentative d'ascension hivernale duHaut de Cry, en 1864, impliquant l'AnglaisPhilipp Gosset,Louis Boissonnet et leur guideJohann Joseph Bennen[38].
Fin de la conquête alpine et premières ascensions difficiles
La majorité des sommets alpins présente des voies d'accès faciles ou peu difficiles qui constituent ce que l'on appelle leurvoie normale, c'est par elles qu'ont été réalisées la plupart des premières. Quelques montagnes n'offrent pas de telles solutions, leur ascension a conduit à l'ouverture des premiers itinéraires difficiles.
Albert F. Mummery marque un tournant dans la pratique de l'alpinisme. Après son succès à l'arête deZmutt au Cervin, en1879, il réussit en1881, à quelques jours d'intervalle, l'ascension de l'aiguille Verte par le versant de la Charpoua et leGrépon. Il recherche avant tout la beauté de la voie empruntée, sa difficulté technique et l'élégance du geste qu'elle entraîne, cette démarche le conduit à gravir les sommets par des variantes plus difficiles que la voie principale et à être un précurseur de l'alpinisme « sans guides »[42].
En1900, unGrand Prix olympique d'alpinisme est décerné durant lesJeux olympiques, comme l'atteste le programme officiel des épreuves au cours de l'exposition universelle de 1900. Il est attribué par le jury à l'exploit considéré commele plus important durant les quatre années précédentes en la matière.
Au début duXXe siècle, lesDolomites sont le théâtre de progrès décisif en termes de difficulté technique. Dans les années 1900,Tita Piaz,Angelo Dibona,Paul Preuss etHans Dülfer ouvrent des itinéraires dont la difficulté est aujourd'hui classée dans lecinquième degré[43]. La voie ouverte par Preuss en 1911 au Campanile Basso di Brenta, montée et redescendue ensolo intégral, témoigne du niveau et de la marge de ces alpinistes en escalade pure[44]. La raideur des parois gravies fait qu'une corde seule devient insuffisante pour garantir la sécurité des grimpeurs, on voit alors apparaître les premierspitons etmousquetons[45].
La génération suivante franchit encore un nouveau palier dans la difficulté avec ce que l'on a appelé lesesto grado (sixième degré).Emil Solleder et Gustav Lettenbauer ouvrent le bal à la face nord-ouest de laCivetta en 1925[46]. Les années trente, dans les Dolomites, sont l'âge d'or du sixième degré avec des grimpeurs commeEmilio Comici,Riccardo Cassin,Bruno Detassis,Raffaele Carlesso[47]. On peut citer, à titre d'exemples, les voies ouvertes dans les emblématiques faces nord desTre Cime di Lavaredo par Comici et Dimai à la Cima Grande (1933) et Cassin et Ratti à la Cima Ouest (1935).
Après avoir conquis tous les sommets des Alpes, l'étape suivante du sport alpin a été de les gravir par leurs faces les plus difficiles et par les voies les plus directes. Trois faces nord ont opposé à ce jeu des résistances remarquables qui leur ont valu d'être appelées parFritz Kasparek les "trois grands problèmes"[48]. Il s'agit des faces nord desGrandes Jorasses dans lemassif du Mont-Blanc, duCervin dans lesAlpes valaisannes et de l'Eiger dans lesAlpes bernoises. Elles ont toutes été gravies dans les années 1930, après de nombreuses tentatives et parfois des drames.
Aux trois faces nord identifiées par Kasparek,Gaston Rébuffat en a ajouté par la suite trois autres, elles aussi très difficiles et gravies à la même époque : celles des Tre Cime dans les Dolomites, desDrus dans lemassif du Mont-Blanc et dupiz Badile dans lachaîne de la Bernina. La face nord du petit Dru est réalisée parPierre Allain etRené Leininger en 1935. Celle dupiz Badile est conquise parCassin, Ratti et Esposito, du 14 au, avec Molteni et Valsecchi qui moururent d'épuisement, l'un à la montée, l'autre à la descente[55].
Après laSeconde Guerre mondiale, tandis que le Tibet s'est fermé aux explorations occidentales, leNépal leur a ouvert ses portes. En 1950, uneexpédition française, à l'initiative deLucien Devies, part explorer la région, alors très mal connue, duDhaulagiri et de l'Annapurna, avec le projet de gravir une de ces deux montagnes. Le 3 juin 1950,Louis Lachenal etMaurice Herzog atteignent le sommet de l'Annapurna I (8 091 mètres) ; gravement gelés durant leur ascension, ils doivent leur survie à leurs compagnonsLionel Terray etGaston Rébuffat. Il s'agit du premier 8 000 à avoir été gravi et du seul qui l'a été lors de la première tentative, laquelle ne dura d'ailleurs que treize jours[58].
Edmund Hillary et Tenzing Norgay en 1953.
Après cette première, les grandes nations se lancent dans une course aux 8 000 au cours de laquelle va s'élaborer ce que l'on a, par la suite, appelé lestyle himalayen : des équipes successives d'alpinistes et de porteurs dressent un siège de la montagne, installant des camps de plus en plus avancés, reliés par des cordes fixes, approvisionnés en vivres et en oxygène, afin de pouvoir lancer un groupe dans l’assaut final. En 1953, uneexpédition britannique dirigée parJohn Hunt mobilise plus de 400 personnes, dont 362 porteurs, 20 guidessherpas et 4 500 kg de bagages pour tenter l'Everest. Le 23 mai, leNéo-zélandaisEdmund Hillary et le SherpaTensing Norgay se tiennent sur le toit du monde[59].
Le 3 juillet 1953, l'AutrichienHermann Buhl, porté par une expédition austro-allemande, atteint le sommet du Nanga Parbat par une ascension de haute difficulté, en seulement 41 heures, et sans apport d'oxygène. Le, après quatre tentatives et 70 jours d'assaut, une expédition italienne menée parArdito Desio parvient à porterLino Lacedelli etAchille Compagnoni au sommet du K2. La victoire fut ternie par une polémique violente entre les deux vainqueurs et le jeuneWalter Bonatti qu'ils accusèrent, à tort, d'avoir utilisé l'oxygène qui leur était destiné. Cinquante ans plus tard, leClub alpin italien donna raison à Bonatti qui, entre-temps, s'était imposé comme un des plus grands alpinistes par ses premières de très haute difficulté[60].
Lesannées 1960 poursuivent les efforts des décennies précédentes dans la maîtrise de la haute difficulté. Dans les Alpes, les grandes faces nord ayant été vaincues, l'élite alpine s'attache à les gravir à la mauvaise saison ; c'est alors le début de la vogue desascensions hivernales[61]. Dans l'Himalaya, les derniers hauts sommets sont conquis et des voies sont ouvertes par des itinéraires plus difficiles, comme la longue arête ouest de l'Everest gravie par Tom Hornbein etWilli Unsoeld en1963[62],[63].
Cette course à la haute difficulté conduit aussi à ce qui apparaît rétrospectivement comme des impasses, c'est l'époque de « l'alpinisme technologique », desdirectissimes réalisées à grand renfort d'escalade artificielle, qui culmine avec l'affaire ducompresseur hissé parCesare Maestri pour vaincre lecerro Torre en 1970[64].
Reinhold Messner en 1985.
Un vent de renouveau souffle sur le monde de l'alpinisme à la fin desannées 1960. Il est notamment incarné parReinhold Messner. Natif des Dolomites, il y a acquis, avec son frèreGünther, la maîtrise du septième degré en escalade rocheuse et a réalisé plusieurssolo impressionnants (dièdre Philipp-Flamm à la Civetta, face nord desDroites)[65]. Dans son livre,Le7e degré (1973), il milite pour uneescalade libre et dépouillée. Il envisage de transposer cette approche dans l'Himalaya pour y réaliser des ascensions avec des équipes légères, sans cordes fixes et sans oxygène. En 1975, il gravit avecPeter Habeler, sans porteurs d'altitude, ni camps préétablis, leGasherbrum I (ou Hidden Peak, 8 080 m)[66]. Par la suite, Messner a réalisé la première de l'Everest sans oxygène (1978, encore en compagnie d'Habeler)[67], puis il a montré que l'on pouvait gravir des 8 000 en solo (le Nanga Parbat en 1978, puis l'Everest en1980), enfin il est le premier homme à avoir réalisé tous les 8 000[68].
L'éclosion de ce que l'on a appelé lestyle alpin a constitué une révolution dans le monde de l'himalayisme. Les grimpeurs de la nouvelle génération y ont vu la possibilité de tenter des hauts sommets sans dépendre d'une expédition lourde, ainsi qu'un nouveau critère définissant la performance en alpinisme[69]. Au cours desannées 1970 et 1980, des alpinistes tels queDoug Scott ouPierre Béghin se sont illustrés en réalisant des ascensions remarquables en style léger.
Dans le courant des années 1970, l'escalade cesse d'être perçue exclusivement comme une composante de l'alpinisme, un moyen pour atteindre le sommet, elle devient une fin en soi sous la forme d'une discipline sportive autonome. Ce développement de l'escalade sportive a eu plusieurs conséquences en retour sur la pratique de la montagne. Tout d'abord, une discipline d'entraînements réguliers, voire une préparation de compétiteur, qui a pour effet de faire progresser le niveau technique des grimpeurs. Le7e degré est finalement accepté comme cotation des difficultés extrêmes[70]. L'éthique et la pratique de l'escalade libre se sont largement diffusées, accompagnées d'un mouvement de rejet des anciennes techniques d'ascension dites « d'escalade artificielle » faisant usage de pitons, cordes et étriers pour aider à la progression des alpinistes. Avec la culture de l'escalade libre, la corde et les points d'ancrage ne servent plus qu'à retenir le grimpeur en cas de chute[71].
Sous l'influence de ces nouvelles pratiques, le niveau des voies rocheuses augmente au cours des années 1980, à l'exemple des voies ouvertes parMichel Piola dans les Alpes[72]. Cela a aussi entraîné l'apparition de voies d'escalade entièrement équipées depoints d'ancrage permanents,pitons à expansion oubroches scellées, ce jusqu'en haute-montagne, ce qui a parfois suscité des polémiques.
L'alpinisme féminin a bénéficié de cette mutation. Des grimpeuses qui ont acquis en falaise un fort niveau technique réalisent des premières de haute difficulté en montagne, comme Catherine Destivelle qui ouvre en1991 une nouvelle voie dans la face ouest du Dru en solo ouLynn Hill qui a libéré la voie duNose surEl Capitan en1993[73].
D'autres disciplines se sont développées de façon autonome, leski de randonnée, tout d'abord, avec les compétitions deski alpinisme ou le ski de pente raide par desskieurs extrêmes, telsJean-Marc Boivin,Pierre Tardivel, ou encore le surfeurMarco Siffredi[74]. De la même manière, l'escalade sur glace a progressé avec le développement de la pratique, du matériel et des compétitions de cascade de glace et son équivalent sur rocher, ledry-tooling.
Passage équipé d'échelles etcordes fixes sur la voie normale de l'Everest, 2005.
Enfin, la médiatisation de l’escalade, notamment en France, celle de personnages tels quePatrick Edlinger, ainsi que l'engouement pour les sports dits « à risques » et pour les activités de pleine nature ont eu pour effet d'amener un nombre croissant de pratiquants en montagne. La conséquence négative de cet engouement a été l'augmentation des déchets abandonnés sur de nombreux sites et sommets, mais aussi refuges et itinéraires d'accès, principalement dans les lieux les plus célèbres comme le Mont Blanc ou l'Everest[75],[76]. La problématique écologique fait l'objet d'une prise de conscience généralisée particulièrement médiatisée : lapollution due à l'alpinisme devient un sujet d'inquiétude pour les pratiquants, soucieux pour eux-mêmes et pour les futures générations, auquel les autorités ainsi que les alpinistes eux-mêmes tentent de remédier.
À partir des années 2000, les diverses pratiques en alpinisme prennent une forme de plus en plus technique et approfondie. Cette tendance est soutenue par des méthodes d'entraînement sportif plus modernes (planification et suivi,salle d'escalade) et des avancées technologiques (matériel plus léger, électronique, prévision météorologique)[77]. On trouve ainsi des alpinistes « athlètes » capables de grandes performances physiques ou bien de réalisations à un niveau technique extrême. En conséquence, les itinéraires qui représentaient la limite de ce qu'il est possible de gravir en haute montagne sont réalisés en style léger et en escalade libre. Le symbole de cette évolution se trouve dans les voies Maestri au Cerro Torre : alors que l'authenticité de l'ascension de1959 était mise en doute et que les moyens de celle de1970 étaient contestés, les versants où elles se déroulent sont parcourus, entre2005 et2012, en usant de moyens conformes à l'éthique sportive et en libre[78].
La performance en alpinisme s'exprime, au début du nouveau millénaire, dans des formes renouvelées. Certains, commePatrick Berhault, se lancent dans des enchaînements interminables[79]. D'autres réalisent des solo improbables, comme celui Hansjörg Auer dansÀ travers le poisson à la Marmolada en 2007[80]. Enfin, une nouvelle génération d'alpinistes accède à la notoriété en pulvérisant les horaires d'ascension, commeKílian Jornet etUeli Steck qui a gravi, en2015 la face nord de l'Eiger en2 h 23[81].
De manière exceptionnelle, l'alpinisme est pratiqué malgré des handicaps physiques. CommeErik Weihenmayer, qui est, en 2001, la première personne aveugle à gravir l'Everest[82], ou encoreHari Budha Magar qui, en 2017, devient le premier double amputé au-dessus du genou à escalader un sommet à plus de 6 000 m (pic Mera, 6 476 m)[83].
La montagne étant un milieu potentiellement dangereux, il convient de préparer sa course avant d'entreprendre une ascension. Les alpinistes commencent par collecter des informations sur les sommets qu'ils convoitent. Pour cela, ils disposent decartes et detopo-guides. Il existe, sur chaque montagne, plusieurs itinéraires[86]. Celui qui consiste à atteindre le sommet en exploitant les lignes de faiblesse de la paroi pour choisir le cheminement le plus facile est désigné sous le nom de « voie normale »[87]. Plus sportive et engagée, une ascension peut aussi être un exercice de haute volée qui recherche la difficulté dans des itinéraires (faces surplombantes, faces nord dans l'hémisphère boréal) comportant parfois un point de non-retour au-delà duquel toute retraite est problématique voire compromise, nécessitant de la part des grimpeurs un solide équilibre moral et nerveux[88].
Les alpinistes se renseignent ensuite sur les conditions présentes dans l'itinéraire choisi. Ils peuvent avoir recours aux bulletins météo, aux informations diffusées par lesgardiens de refuges, les clubs et bureaux des guides locaux, ainsi qu'aux comptes-rendus de sorties disponibles sur internet. Une fois ces informations réunies, ils sont en mesure d'évaluer si leur cordée possède actuellement le niveau physique, mental et technique pour réaliser cette ascension dans de bonnes conditions[86].
La phase de préparation permet aussi d'anticiper les problèmes susceptibles de survenir et les moyens d'y faire face. Il faut, pour cela, se renseigner sur la possibilité de contacter dessecours, identifier des échappatoires en cas de mauvaises conditions, d'horaire non tenu ou d'accident. Il est aussi utile d'avoir à disposition des itinéraires de repli plus faciles, un objectif de substitution permet d'éviter que la cordée s'obstine dans un itinéraire dangereux[89].
Enfin, durant la préparation, les alpinistes réunissent l'équipement nécessaire pour faire face aux conditions météo, se nourrir, surmonter les difficultés techniques et assurer leur sécurité.
Dans les Alpes, en raison d'un fort maillage routier et de la présence de remontées mécaniques, il est possible d'effectuer certaines ascensions « à la journée ». Cette stratégie nécessite néanmoins pour les alpinistes d'être très sûrs de leurs capacités à réaliser la voie, à estimer et tenir l'horaire. Les courses d'envergure, qui nécessitent parfois plus d'une journée d'ascension, s'accompagnent d'une ou plusieurs nuits en montagne. Dans les massifs les plus fréquentés, il existe desrefuges de montagne, gardés ou non, qui permettent de dormir et, selon leur taille, de se restaurer avant ou après la course.
Si les alpinistes ne souhaitent pas dormir en refuge, ou s'il n'y en a pas à proximité de leur itinéraire, ils doivent organiser unbivouac au départ, voire, pour les courses longues, au milieu de la voie, si possible à l'abri des intempéries, dans une anfractuosité du rocher ou sur une plateforme naturelle[90]. Dans une paroi rocheuse très raide sans zone de repos (big wall), les grimpeurs installent une plateforme artificielle (portaledge) sur laquelle il est possible de s'allonger et de s'abriter sous une toile[91]. Pendant l'ascension, ce matériel est rangé dans un sac de hissage (du genre sac marin qui contient également la nourriture, le matériel de bivouac, etc.) qui pend dans le vide, relié au grimpeur par une corde et qu'il hisse une fois arrivé au relais[92]. Très physique, l'opération est répétée autant de fois qu'il y a de longueurs dans la voie.
Dans les régions où les montagnes sont éloignés des infrastructures, les alpinistes doivent organiser une expédition afin de pouvoir gravir les sommets. Il leur faut transporter les vivres et le matériel pour dresser des camps successifs, y compris le long de la voie d'ascension pour les plus hauts sommets[93]. Lorsque les camps d'altitudes sont reliés par des cordes fixes, installés et approvisionnés par des guides et sherpas, on parle d'une ascension réalisée enstyle himalayen. À l'inverse, lorsque les alpinistes progressent continûment en transportent eux-mêmes leur matériel, on parle d'ascension réalisée enstyle alpin[94]. Dans les sites les plus fréquentés de l'Himalaya, comme l'Everest, les tours opérateurs montent des expéditions commerciales appuyées sur descamps de base et des équipements d'altitude installés pour la saison[95].
L'équipement des alpinistes commence par leursvêtements qui doivent leur permettre d'évoluer dans de bonnes conditions malgré un milieu qui peut s'avérer difficile. L'habillement se compose de trois couches : une première épaisseur de sous-vêtements synthétiques évacuant la transpiration, une deuxième épaisseur isolante avec des textiles de typepolaire, veste en duvet naturel ou synthétique, une troisième épaisseur permettant de se protéger du vent et de la pluie avec des vestes de typeGore-Tex. Lesgants évitent le refroidissement et l'engourdissement des mains, ils doivent permettre la manipulation du matériel[96]. Les chaussures d'alpinisme, familièrement appelées « les grosses », sont des chaussures montantes renforcées, leurs semelles sont rigides afin d'améliorer la précision en escalade et la marche aveccrampons, elles sont pourvues de débords permettant l'utilisation de crampons automatiques ou semi-automatiques. Sur neige et glacier, desguêtres assurent l'étanchéité des chaussures et protègent le bas des pantalons[97].
Lorsque l'alpinisme ne se pratique pas ensolo, les partenaires sont généralement reliés par unecorde, dont le rôle est d'amortir et d'arrêter une éventuelle chute[98]. Cette corde est attachée aubaudrier qui enserre le bassin de l'alpiniste. Sur un terrain glacé, les alpinistes portent sous leurs chaussures des crampons dont les pointes en acier pénètrent dans la glace[99]. Pour leur équilibre, ils s'aident d'unpiolet (voire deux piolets selon la difficulté de l'ascension) tenu à la main et dont le bas du manche comporte une pointe. En milieu vertical, la lame située en haut du manche du piolet sert à la traction[100]. Pour assurer leur progression dans ce milieu vertical, la corde est passée régulièrement dans despoints d'ancrage :piton,coinceur,sangle ou encorecheville à expansion placés manuellement ou à demeure dans le rocher[101]. Si la paroi est recouverte d'une couche de glace suffisamment épaisse, unebroche à glace permet l'assurage en se vissant dans la glace[102]. Lesdégaines, constituées de deuxmousquetons reliés par une sangle, jouent le rôle de connecteur entre le point d'ancrage et la corde[103]. Lesystème d'assurage est un appareil relié à la corde, au niveau du baudrier, pour contrôler le défilement de la corde lors de l'assurage ou de ladescente en rappel.
Enfin, pour amener leur équipement en montagne, les alpinistes ont besoin d'unsac à dos, de préférence compact et confortable. Il doit contenir unelampe frontale, un briquet, un couteau, de la crème solaire, le matériel d'orientation (carte,boussole,GPS ousmartphone), une couverture de survie, unetrousse de premiers secours, quelques vêtements de rechange (chaussettes, tee-shirt, gants, une petite veste chaude en polaire ou doudoune), ainsi que de quoi se nourrir et s'hydrater[104]. En cas de bivouac, les alpinistes peuvent être amenés à emporter, en outre, un duvet, un petittapis de sol et unréchaud, éventuellement un kit de réparation sommaire avec pince multifonction, ruban adhésif et fil de fer peut rendre de grands services[105].
La pratique de l'alpinisme suppose la connaissance d'un large éventail de techniques pour progresser et se protéger. Il est nécessaire, afin de ne pas perdre de temps et d'assurer sa sécurité, de savoir les mettre en œuvre de façon adaptée au terrain sur lequel évolue la cordée.
Si le terrain est facile et selon leur aisance, les deux membres de la cordée peuvent progresser ensemble « àcorde tendue » afin de gagner du temps sur l'horaire de la course, en particulier en terrain« montagne »[106]. Ils utilisent alors un encordement court pour éviter de prendre la corde dans les rochers et de faire tomber des pierres, le reste de la corde étant contenu sous forme d'anneaux de buste. Les grimpeurs s'assurent en passant la corde derrière des reliefs rocheux (écailles, béquets), soit en posant des protections (anneaux de sangle,coinceurs) que le second retire au fil de sa progression, on parle d'assurage « en mouvement »[107].
Lorsque la cordée rencontre un passage plus difficile mais ponctuel et peu élevé, elle peut rallonger la longueur de corde suffisamment pour que le premier grimpeur franchisse l'obstacle, tandis que le second l'assure en faisant passer la corde derrière sa taille, après s'être soigneusement calé dans les rochers, on parle d'assurage « à l'épaule » ou « à l'ancienne »[107].
Protections utilisées en terrain rocheux :coinceurs à came (ditsfriends),coinceurs à câble (ou bicoins), sangles, pitons et marteau.
Quand les difficultés rocheuses deviennent plus importantes et continues, la progression s'effectue en« tirant des longueurs » dont le nombre varie avec la hauteur de l'obstacle rencontré. Lorsque le grimpeur de tête a terminé une longueur, il installe un « relais »[108] sur une plateforme plus ou moins exiguë selon la configuration de la paroi. À ce relais, le grimpeur se sécurise en s'attachant au rocher et fait monter son compagnon de cordée. Arrivé au relais, le second se sécurise à son tour et se prépare à assurer à nouveau son leader qui poursuit sa progression. Dans une cordée de deux grimpeurs, le second peut aussi enchaîner et passer en tête à son tour, ce qui évite des manipulations de matériel et de corde fastidieuses et chronophages. Dans ce cas, on parle de cordée réversible (grimper en réversible)[109].
Entre chaque relais, celui qui grimpe en tête aura pris soin de poser des protections (ou points d'assurage) qui permettront d'enrayer une éventuelle chute[106]. Ces protections sont fixées soit à des points d'ancrage naturels sur le rocher (béquets,lunules, trous), soit grâce à du matériel posé par le leader et qui se verrouille dans les anfractuosités du rocher (coinceurs à câble,hexagonaux ouà cames), soit en plantant des pitons dans les fissures du rocher. Un piton bien posé donne un son métallique clair de plus en plus aigu lorsqu'il est frappé. Un bruit sourd et grave indique au grimpeur un mauvais verrouillage du piton qui doit faire l'objet de toutes les précautions quant à son utilisation[110]. Ce matériel est récupéré par le second de cordée, fonction ingrate car un piton bien verrouillé dans une fissure réclame souvent plus d'efforts physiques pour le récupérer que pour le placer. Un piton peut être abandonné, solution préférable à un acharnement à grands coups de marteau qui peuvent affaiblir le piton et le rendre inutilisable ou pire, dangereux pour les cordées qui suivront. Dans de nombreuses voies classiques, fréquemment répétées, il n'est pas rare que les passages difficiles soient équipés à demeure de pitons, spits ou broches, ce afin d'éviter la détérioration du rocher due à la pose et au retrait répétitifs des pitons, cela permet aux grimpeurs de progresser avec un matériel plus léger[111].
Dans les courses de neige, la technique essentielle à maîtriser est l'usage descrampons et l'ancrage dupiolet. Les crampons peuvent être plantés à plat (cramponnage à dix pointes), de façon frontale (cramponage pointe avant) ou mixte en fonction de la raideur de la pente. L'utilisation de crampons nécessite un apprentissage afin d'éviter qu'ils se prennent dans le pantalon et provoquent une chute. Le piolet peut être utilisé comme une canne, en ramasse, en traction ou pour tailler des marches, il sert aussi à enrayer une glissade à condition que l'alpiniste se soit correctement entraîné à cela[112].
Sur la neige, les alpinistes progressent dans la grande majorité des cas à corde tendue, la distance entre les membres de la cordée variant selon la nature du terrain : encordement long sur un glacier plat et crevassé dans le but d'éviter la chute des deux alpinistes dans une crevasse, encordement court avec anneaux de buste sur des pentes de neiges raides afin de retenir une éventuelle glissade[113]. Le franchissement decrevasses peut nécessiter de tirer une longueur afin de parer une éventuelle chute due à l'effondrement d'un pont de neige[114].
À l'instar de l'escalade en rocher, il devient nécessaire de tirer des longueurs lorsque la paroi est plus raide et les difficultés plus soutenues. Cela se produit notamment lors de la remontée de couloirs, ou degoulottes en glace ou enmixte (glace et rocher). Dans ce cas, les techniques et le matériel (piolets traction, crampons à pointes avant) de l'escalade glaciaire sont mobilisés. La pose de protections par le grimpeur de tête peut s'avérer délicate : glace mince et vitreuse, placages (fines couches de neige déposées dans les faces nord par les intempéries et rafales de vent), etc. On utilise, dans ce cas, desbroches à glace de longueurs et de modèles différents selon les caractéristiques de la glace et qui permettent de fixer des mousquetons. Si du rocher est présent sur l'itinéraire, il est possible de poser des protections d'escalade rocheuse (pitons, coinceurs). Afin d'économiser le matériel, il arrive aussi que les alpinistes réalisent avec leurs broches des lunules de glace, appeléesAbalakovs, aux relais ou pour poser un rappel[115].
Certaines longueurs peuvent comporter alternativement un passage en glace puis en rocher. Afin de ne pas perdre de temps à chausser et déchausser les crampons, les alpinistes peuvent franchir les passages en rocher crampons aux pieds (à l'aide des pointes avant) et utilisent les piolets qu'ils verrouillent dans les fissures (technique dudry-tooling)[116].
Pour progresser rapidement dans les ascensions d'envergure longues (Everest) ou techniques (Eiger), les alpinistes utilisent descordes fixes qu'ils remontent à l'aide de poignéesJumar. Ces cordes fixes, qui sécurisent les passages difficiles, sont installées à demeure ou en fonction des besoins par les équipeurs[117].
La cordée idéale d'un point de vue sécurité et rapidité est la cordée de deux alpinistes s'ils sont de niveau équivalent. Il est courant de croiser des cordées de trois membres (un leader et deux seconds) pour les ascensions en neige comme en rocher. Pour les ascensions faciles à dominante neige, les cordées peuvent compter jusqu'à quatre membres sous la direction d'un guide ou d'un leader expérimenté[118].
La sécurité d'une cordée ne se limite pas à la seule quantité de matériel utilisée. Elle se manifeste aussi par son niveau technique, sa capacité à tenir un horaire, à « lire » le terrain (sens de l'itinéraire en paroi ou sur unglacier), à interpréter les signes avant-coureurs d'un changement de météo[119] ou des conditions en altitude (état de la neige, risque de chutes de pierres, etc.). Un minimum de connaissances en orientation est nécessaire pour mener à bien la plupart des courses en montagne[120].
Nécessaire de sécurité sur glacier : ancre à neige, sangles, mousquetons, broches à glace, poulie, bloqueur mécanique, crochet à Abalakov, mousquetons, cordelettes pour autobloquants.
Paradoxalement, les voies les plus faciles sont considérées comme étant les plus dangereuses car elles se déroulent généralement sur un terrain fracturé, parfois délité, propice aux chutes de pierres. Par ailleurs et contrairement à une idée reçue, la descente est la phase de la course en montagne où la probabilité d'un accident est la plus importante (relâchement de l'attention, fatigue, euphorie, etc.)[121]. Atteindre un sommet ne signe pas la fin de la course et la descente, parfois technique (succession derappels alternant avec des séquences de désescalade), n'est pas à négliger et nécessite une concentration de tous les instants. Par ailleurs, la dégradation des conditions au fil des heures (ramollissement de la neige sous l'effet du soleil favorisant les glissades, dégel provoquant les chutes de pierres, etc.) est un facteur aggravant[119].
Une cordée autonome ne doit pas seulement connaître les techniques de progression, il lui faut aussi maîtriser les manœuvres de sauvetage et de réchappe. En cas de chute en crevasse, la victime doit être capable d'effectuer une remontée sur corde, si cela n'est pas possible, son compagnon doit savoir construire unmouflage afin de la sortir[122]. Les alpinistes doivent aussi pouvoir se replier face à des difficultés trop importantes, de mauvaises conditions, ou en cas d'accident[123]. Pour cela, il est nécessaire de connaître les différentes formes de rappels sur neige (champignon de neige, corps mort), glace (Abalakov) ou rocher (béquet, sangles, pitons).
Leréchauffement climatique affecte les massifs et la haute montagne n'échappe pas à la métamorphose : fonte des glaciers, éboulements, écroulements des parois. Certaines courses sont désormais impraticables compte tenu du danger permanent auquel s'exposent les alpinistes qui modifient leurs habitudes : abandon d'itinéraires légendaires, fréquentation d'autres secteurs de grimpe, décalage de la saison d'alpinisme, réouverture partielle ou contournement d'itinéraires affectés par les écroulements[124].
Les alpinistes ont assez tôt ressenti le besoin d'un système de cotation des ascensions afin de d'évaluer les performances et anticiper la difficulté des répétitions. Plusieurs échelles ont été proposées jusqu'à ce que s'impose, dans les Alpes, celle créée par l'alpiniste allemandWillo Welzenbach en 1925. Elle classe les itinéraires selon six degrés de difficulté allant de « facile » (F) à « extrêmement difficile » (ED), le premier degré étant celui où apparaît la nécessité d'utiliser les mains, et le sixième la limite supposée des possibilités humaines. En 1979, l'UIAA reconnaît l'existence d'un septième degré ouvert, par la suite, un huitième et neuvième degrés ont été admis pour des escalades uniquement rocheuses, comportant des longueurs en libre au-dessus du septième degré[125]. Ces niveaux peuvent être précisés par les mentions « inf » et « sup », ou +/-. Pour les ascensions en haute altitude glaciaires ou mixtes, la cotation maximale reste ED+, ce qui conduit à un tassement des cotations. On voit alors apparaître, d'abord chez les alpinistes britanniques, les notations ouvertes ED1-ED2-ED3-ED4-ED5. Les degrés de l'échelle de Welzenbach étendue constituent ce que l'on appelle la « cotation alpine globale ».
La cotation d'ensemble ne donne néanmoins qu'une information incomplète : une voie courte, sans engagement, mais comportant des passages d'escalade difficiles, peut être cotée de la même façon qu'une course ne présentant pas de tels passages, mais longue et éprouvante. Pour cette raison, la cotation alpine globale est précisée par une cotation des difficultés techniques et, parfois, une cotation d'engagement[126].
La cotation technique des passages rocheux reprend lescotations des voies d'escalade libre. Il existe plusieurs systèmes issus des traditions locales, en France, la difficulté est exprimée par un chiffre de 3 à 9 accompagné des lettres a, b, c (exemple 7b)[127].
Lacotation pour l'escalade artificielle est signalé par un A (« artificielle ») suivi d'un chiffre allant de 1 à 6 et indiquant la difficulté de placement et la résistance des points de progression, A1 correspondant à des points en place et résistant à une chute, A6 à une longueur dans laquelle aucun point, y compris le relais, ne résiste à une chute[127].
L'escalade glaciaire utilise les qualificatifs de l'échelle de Welzenbach allant de F (« Facile ») à D (« difficile »), au-delà, elle introduit une cotation allant de 1 à 7, à laquelle on peut ajouter +/-, ainsi que les mentions X pour un risque d'écroulement et R pour de la glace mince. Les sections mixtes sont indiquées par la lettre M suivie d'un chiffre de 1 à 8[127].
Les glaciéristes ont introduit une cotation indiquant le « sérieux » de la course, c'est-à-dire la longueur, l'engagement et les risques rencontrés, formulée en chiffres romains de I à VII[127]. Cela permet de créer une cotation à double entrée, sérieux et difficulté technique, qui a été reprise par plusieurs topo-guides.
Depuis l'ouvrage d'Emil Zsigmondy,Les Dangers de la montagne (1886), les alpinistes ont coutume de distinguer dangers « objectifs » (dont l'origine est imputable aux conditions ou à l'environnement) et dangers « subjectifs » (dont l'origine est imputable à l'individu)[128]. Cette notion a été diffusée en France parGaston Rébuffat[88] et elle est encore communément utilisée dans l'analyse des risques liés à la pratique de l'alpinisme.
Exercice de sauvetage d'une victime d'avalanche.
Les dangers objectifs sont d'origine naturelle, comme les chutes de pierres, deséracs, les ruptures de corniches, lesavalanches et les orages. Ce sont des phénomènes sur lesquels l'alpiniste a très peu de prise mais qui sont, en partie, prévisibles[129].
Les dangers subjectifs sont d'origine humaine, ils proviennent de l'inadaptation des alpinistes à leur environnement. Ils peuvent découler d'erreurs de jugement, comme la mauvaise appréciation d'une situation conduisant à s'exposer à des dangers objectifs, le mauvais choix de l'itinéraire, la mauvaise utilisation du terrain (ex : prise non testée en escalade), la mauvaise utilisation du matériel (dont équipement déficient ou usagé) ou l'absence de consultation des prévisions météorologiques. La cordée peut aussi se mettre en danger par manque d'entraînement, de condition physique ou d'expérience relativement à la course choisie. Des défaillances psychologiques, comme la panique ou à l'opposé l'excès de confiance en soi, conduisent aussi à se mettre en péril. Ces dangers peuvent être prévenus par la préparation de la course et la formation continue des alpinistes[130].
Les conséquences des accidents évoluent du stade bénin à celui de mortel :
le dévissage d'une paroi rocheuse ou glaciaire (risque important en cas de mauvaise assurance, qualité de la neige ou du glacier dégradée, difficulté de l'itinéraire sous-estimée) entraîne des traumatismes divers (entorses,luxations,fractures,traumatismes crâniens etabdominaux,hémorragies) ;
la chute dans une crevasse (à la suite d'un encordement inadapté à la progression sur glacier, inattention, rupture du pont de neige) entraîne des traumatismes divers et unehypothermie due au contact prolongé avec la glace ;
l'avalanche, la chute de séracs, la chute de pierres causent respectivement l'asphyxie (par inhalation de particules, aérosols), l'écrasement (blocs de glace), et des traumatismes divers ;
lafoudre cause l'électrocution, des brûlures, l'état de choc, la surdité, la sidération.
Les conditions éprouvantes (altitude, froid, vent, ensoleillement) dans lesquelles évoluent les alpinistes les exposent à des risques pathologiques spécifiques qui peuvent évoluer du stade bénin à celui de mortel dans certains cas.
Le froid, en association avec le vent, un habillement inapproprié ou le stress, entraîne l'onglée, desgelures et l'hypothermie[131].
La baisse de la pression atmosphérique en altitude met l'organisme enhypoxie, faute d'acclimatation et d'une montée progressive, les alpinistes s'exposent aumal aigu des montagnes (MAM) qui, dans ses formes sévères, peut déboucher sur desœdèmes pulmonaires oucérébraux[132].
Un état de forme ou un entraînement inadapté à l'effort fourni, ainsi que l'affaiblissement de l'organisme face aux agressions des éléments naturels sans réconfort (repos, chaleur, boisson, nourriture) ou protection suffisante (vêtements, tente, igloo, refuge) débouche sur l'épuisement. Pour l'éviter l'alpiniste doit se ménager des pauses, se nourrir et s'hydrater régulièrement[133].
Le rayonnement solaire est plus intense avec l'altitude, il est encore accru par le pouvoir réfléchissant de la neige. Il provoque, faute de protection adéquate, descoups de soleil et l'ophtalmie des neiges[134].
La pratique régulière de l'alpinisme peut aussi, comme cela est le cas dans d'autres sports, déboucher sur des pathologiques chroniques dues à l'usure de l'organisme :
Lespays développés ayant une tradition alpine ancienne sont dotés desecours en montagne héliportés. Les alpinistes doivent être formés et équipés pour contacter et informer les secouristes[135]. Il leur faut ensuite préparer l'évacuation du blessé (dropping zone sécurisée)[136].
Il arrive néanmoins fréquemment que l'on ne puissent pas contacter les secours (absence de réseau téléphonique) ou que ceux-ci ne puissent pas intervenir (mauvais temps), c'est pourquoi la cordée doit être formée et équipée pour apporter despremiers soins, aménager un abri (trou à neige,igloo) ou évacuer un blessé[137].
Historiquement, l'Europe est le berceau de l'alpinisme sportif. Ainsi, lesAlpes etPyrénées ont été systématiquement explorées par les grimpeurs. Durant l'hiver, des massifs d'altitude plus modeste, comme leMassif central ou lesmonts Grampians, peuvent aussi donner lieu à des courses d'alpinisme. LesAlpes scandinaves proposent des ascensions rocheuses en été, ainsi que des couloirs et cascades de glace durant la saison froide. LeCaucase, quant à lui, est une région particulièrement riche, avec dix massifs englacés entre 4 000 et 5 000 mètres d'altitude. Ces nombreux glaciers et traversées remarquablement longues ont été le terrain de prédilection des alpinistessoviétiques[138].
Lecontinent africain possède plusieurs montagnes de plus de 5 000 mètres d'altitude (Kilimandjaro,mont Kenya,mont Stanley) sur lesquelles peuvent se pratiquer l'alpinisme rocheux, ainsi que des courses de neige. Mais celles-ci, comme l'emblématiqueDiamont Couloir au mont Kenya, souffrent du réchauffement climatique[139]. Pour le reste, l'Afrique intéresse surtout les alpinistes pour ses escalades rocheuses (Hoggar,monts Hombori).
L'Asie est le continent des plus hautes montagnes, les quatorzesommets de plus de 8 000 mètres d'altitude appartiennent tous à l'ensemble montagneux que l'on désigne par « aire Hindu Kush-Himalaya » (HKH), laquelle comprend les chaînes de l'Himalaya, duKarakoram, de l'Hindou Kouch et duPamir. Les alpinistes sont loin d'avoir épuisé le potentiel de courses de cette immense région[140].
Les régions polaires offrent des défis intéressant les alpinistes par leurs conditions extrêmes (massif Vinson,mont Ross), mais aussi par la qualité de leurs parois (Tasermuit Fjord auGroenland).
Compagnie des guides et accompagnateurs de Pralognan-la-Vanoise (2015).
Le métier deguide de haute montagne est apparu dès les origines de l'alpinisme moderne et il s'est développé avec celui-ci. Lacompagnie des guides de Chamonix fut fondée en 1821. Toutefois, la profession est longtemps restée non encadrée. Leclub alpin français a proposé les premières formations et diplômes de guides, mais le premier diplôme national n'a été mis en place qu'en 1948 à la suite de la création de l'École nationale de ski et d'alpinisme (ENSA)[142].
En France, l'obtention dudiplôme d'État de guide de haute montagne passe, tout d'abord, par un examen probatoire, puis des stages de formation qui confèrent au candidat le diplôme provisoire d’aspirant guide. Après deux années d'exercice, la réalisation d'une liste de courses et de nouveaux stages, l’aspirant est confirmé en tant que guide de haute montagne. Un recyclage, organisé par leSyndicat national des guides de montagne (SNGM), est également obligatoire tous les 6 ans, afin de garantir la capacité des guides à poursuivre l’exercice de leur profession[143]. Le Diplôme d'État autorise l'encadrement rémunéré des activités d'alpinisme, d'escalade, deski de randonnée ethors piste, decascade de glace, devia ferrata, derandonnée, deraquette à neige et decanyonisme. Certaines de ces activités peuvent être couvertes par les diplômes d'accompagnateur en moyenne montagne, demoniteur de ski alpin ou demoniteur d'escalade, mais avec des limitations quant à leur pratique en haute montagne.
Au niveau international, il n'existe pas de cadre juridique définissant le statut de guide de haute montagne. Toutefois, les principales associations de guides sont regroupées au sein de l'Union internationale des associations de guides de montagne (UIAGM/IFMGA)[144], celle-ci préconise un schéma de formation et de validation que les associations membres mettent en œuvre pour délivrer leurs diplômes[145].
Lerefuge du Goûter, un des 125 refuges et chalets gérés par la FFCAM.
L'Alpine Club britannique, fondé en 1857, fut la première organisation regroupant, sous la forme d'unclub de gentlemen, des amateurs d'ascensions et de tourisme alpin[146]. Cette structure a été ensuite imitée dans d'autres pays où l'on a vu apparaître desclubs alpins nationaux qui, à leur tour, ont donné naissance à des sections locales. Les clubs alpins accueillant un nombre croissant de pratiquants, des associations plus élitistes, telles leclub alpin académique italien ou legroupe de haute montagne, se sont formées pour réunir des alpinistes de haut niveau[147]. En 1932, l'Union internationale des associations d'alpinisme (UIAA) a été fondée pour rassembler les différentes associations nationales.
Il existe, en France, deux fédérations gérant les activités de montagne. La première, créée en 1942, s'est tout d'abord appelée la Fédération française de la montagne (FFM), avant de prendre le nom deFédération française de la montagne et de l'escalade (FFME), en 1987, à la suite de sa fusion avec la Fédération française de l'escalade (FFE)[148]. Le Club alpin français, fondé en 1874, ne s'est organisé en fédération qu'en 1996, tout d'abord sous le nom de Fédération des clubs alpins français, puis sous celui deFédération française des clubs alpins et de montagne (FFCAM) en 2005[149]. La FFME et la FFCAM forment des cadres bénévoles (initiateurs) susceptibles d'organiser des sorties d'alpinisme, d'escalade, de ski de randonnée, de cascade de glace, de canyonisme, de raquette de neige et de randonnée pédestre. Elles gèrent aussi des infrastructures, notamment des falaises d'escalade sportive et desrefuges de montagne. Enfin, elles promeuvent la pratique du haut niveau par le biais de compétitions sportives et de groupes d'excellence.
Depuis sa naissance, l'alpinisme a été le sujet de nombreuses publications ainsi que d'œuvres artistiques et culturelles.
Jusqu'aux années 1950, le « roman de montagne » était la principale forme de lalittérature d'alpinisme. Les rares périodiques étaient restreints au cercle des pratiquants sous forme de revues de clubs alpins (Montagne et Alpinisme, Club alpin français, 1905)[150],[151]. Après les années 1950, les ouvrages publiés sont principalement des manuels techniques, destopo-guides et des récits de course. Apparaissent ensuite les périodiques qui prennent la forme de magazines sportifs généralistes ou spécialisés, en vente libre, rédigés par des journalistes et dédiés à un plus large public[152]. Aujourd'hui, la vulgarisation de l'alpinisme s'effectue aussi parinternet sous la forme desites,blogs,forums permettant le partage immédiat de l'information. En février 2021, l'ouverture en hivernale d'une voie dans laface ouest des Drus en quatre jours par une équipe dugroupe militaire de haute montagne a été intégralement retransmise en direct sur internet[153].
Au cinéma, la pratique de l'alpinisme est souvent rattachée augenre du « film de montagne », et plus spécifiquement du « film d'ascension » (Bergfilm) ou « film d'alpinisme ». Ces films apparaissent en Europe dans les années 1920, centrés sur les pratiques britanniques ou celles des pays germanophones. Ils furent très présents jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, mais ils ont quasiment disparu depuis. Ces films partagent quelques caractères communs : une représentation spécifique de l'environnement de la haute-montagne ou des éléments reconnus (figure de l'alpiniste, du guide, paysage de glace, etc.) ou encore un « climat dramatique mêlée d'héroïsme et de pathos », inspiré par le roman de montagne. Ce genre cinématographique apparaît notamment à la suite d'œuvres du réalisateur allemandArnold Fanck :Der Berg des Schicksals (1924),Der Heilige Berg (1926)[154], etc. La représentation de l'alpinisme peut aussi revêtir un caractère spectaculaire, jusqu'à la caricature ou la parodie, excepté le cadre grandiose (Cliffhanger, 1993)[155].
Dès leXIXe siècle, laphotographie illustre les activités d'alpinisme. C'est aussi un moyen d'améliorer la connaissance du territoire et de figurer la montagne en représentationromantique. Des alpinistes, photographes amateurs, se démarquent comme W. F. Donkin, V. Sella ou le FrançaisPaul Helbronner (1871-1938). À partir des années 1920 se développe la « photographie d'escalade » prenant pour sujet principal les pratiquants, à des fins pédagogiques (techniques) ou de spectacle. Après la Seconde Guerre mondiale, la photographie couleur est diffusée auprès du grand public par des revues à grand tirage ; les photographies d'alpinisme et d'escalade privilégient l'image sportive et deviennent progressivement indissociables du sponsoring[156].
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P. Bourdeau, « L'Alpinisme dans le massif des Écrins pendant l'Occupation (1940-1944) »,in P. Arnaud, T. Terret, J. Saint-Martin, P. Gros (Eds.),Le sport et les Français pendant l'Occupation, Vol. 1, Paris, L'Harmattan, 2002, p. 325-334.
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