Alcide De Gasperi est le premier des quatre enfants de Maria Morandini et Amedeo De Gasperi, un officier de la police locale. Après lui sont nés Mario, qui devint prêtre, Marcella et Augusto.
En1904, il joua un rôle important au sein du mouvement des étudiants duTrentin qui réclamait la création d'unefaculté de droit de langue italienne. Des émeutes sont provoquées par des étudiants delangue allemande lors de l’inauguration de la faculté de droit àInnsbruck et De Gasperi passera alors 20 jours en prison. Cela aurait pu le pousser à s’allier à l’irrédentisme (Autrichiens du Sud qui veulent devenir Italiens), mais il n’est pas tenté par cette voie là. En 1905, il devintdocteur en philosophie etlettres.
Un mouvement pro-italien se forme autour de lui et il entre en1905 à la rédaction du journalVoce Cattolica (Voix catholique), qui prendra le nom deIl Trentino en, dont il assume la direction pendant une brève période et qui deviendra par la suite l’organe de presse du Parti populaire du Trentin pour les Italiens de cette région. Il écrivit une série d'articles dans lesquelles il défendait l’« italianité » (italianità) et l'autonomie culturelle du Trentin face aux tentatives de germanisation proposées par les forces politiques nationalistes duTyrol germanophone, mais il ne remettait pas en question l'appartenance à l'Autriche-Hongrie.
Lors des élections duparlement austro-hongrois du 13 et, il est élu député à la Chambre autrichienne dans les rangs de l’Unione Politica Popolare del Trentino (« Union politique populaire du Trentin ») ; sur 4 275 électeurs il obtint 3 116 voix. Ses discours défendent « l’italianité » de sa province. Le, il obtient un siège au parlement régional tyrolien d'Innsbruck. Son activité depropagande prit fin à la suite de l'attentat de Sarajevo qui déclencha laPremière Guerre mondiale et, après quelques hésitations, l'adhésion de l'Italie à laTriple-Entente (1915). Il va se dévouer au maintien de la paix en rencontrant leministre des Affaires étrangères italien. Mais la guerre va éclater et couper court à ses projets.Il Trentino fut pris par la censure et le numéro du ne comprenait, par provocation, que des pages blanches ; De Gasperi décida de suspendre les publications.
Durant la période où le gouvernement de Vienne resta inopérant (du au), De Gasperi se consacra surtout auxréfugiés de guerre. Vu ses activités humanitaires, il fut nommé délégué pour l'Autriche supérieure et pour laBohême occidentale au Secrétariat pour les réfugiés. Aussi, après le retour du Parlement, il continua à s'occuper de ce sujet, et il fit approuver une loi pour réguler le traitement qui leur étaient réservé. Entretemps, ses positions politiques changèrent et il devint un partisan du droit à l'autodétermination des peuples : en, il fut l'un des signataires d'un document commun aux représentants des Polonais, des Tchèques, des Slovaques, des Roumains, des Slovènes, des Croates et des Serbes, bref, de toutes les minorités de l'Autriche-Hongrie.
Au lendemain des traités de paix de 1919, le Trentin est attribué à l’Italie. Alcide De Gasperi devient donc italien ; c’est un « homme-frontière », comme beaucoup d’acteurs de la construction européenne. Il s’établit à Rome et poursuit son action politique. Il adhère auPartito Popolare (PPI), le parti catholique fondé par l'abbéLuigi Sturzo et qui sera l'ancêtre de la future Démocratie Chrétienne. En 1921, il devient député italien et préside le groupe politique duPartito Popolare. Il va voyager en Allemagne à cette époque.
En1922, il épouse Francesca Romani à l'église deBorgo Valsugana avec qui il eut quatre filles, dont une entra dans les ordres.
Initialement, il soutint la participation du PPI au début dugouvernement Mussolini en. En 1923 les membres du PPI tâchèrent de trouver un compromis sur laloi Acerbo[1], et De Gasperi tint un discours à laChambre des Députés le en expliquant son attitude envers cette loi[2]. Alors que Mussolini augmentait son pouvoir au sein dugouvernement italien, De Gasperi s'opposa aufascisme face aux changements qu'il apportait à laconstitution à propos du pouvoir exécutif et du système électoral. Il s'opposa aussi aux violences vis-à-vis des autres partis, notamment avec l'assassinat deGiacomo Matteotti. Le PPI se sépara et De Gasperi devint le secrétaire dugroupe antifasciste en. En 1926, dans un climat de violences manifestes et d'intimidations de la part des fascistes, le PPI fut dissous. Il fut arrêté à lagare de Florence le, avec sa femme. Au procès qui s'ensuivit il fut condamné à 4 ans de prison et à une amende.
Il est relâché en 1928 grâce à l’action de l’évêque de Trente auprès duroiVictor-Emmanuel III qui collabore avec Mussolini. S'ensuit une période de difficulté économique et d'isolement moral. Il trouva un emploi modeste à laBibliothèque du Vatican en automne 1928 grâce à l'aide deCelestino Endrici et de quelques-uns de ses amis du l'ex-PPI. L'engagement - comme employé adventice - vint après la signature desAccords du Latran en 1929.
À ce poste, il étudia et observa les événements politiques italiens et internationaux, ainsi que l'histoire duparti chrétien centriste enAllemagne et les théories économiques et sociales au sein des différents courants de la culture catholique européenne.
En 1945, Alcide De Gasperi devint président du conseil des ministres, le dernier duroyaume d'Italie. Durant ce gouvernement laRépublique fut proclamée et il devint de fait le premier chef de gouvernement de l'Italie républicaine, et il mena un gouvernement d'unité nationale, qui dura jusqu'auxélections générales de 1948.
Le 1946 un référendum fut organisé pour savoir si l'Italie resterait unemonarchie ou deviendrait unerépublique. Le conseil des ministres (qu'il préside) proclama la république avant que laCour de cassation ne publie les résultats définitifs du référendum des 2 et : la voie républicaine obtint 54 % des voix. Il prit donc provisoirement la tête de l'État et par conséquent les fonctions qui étaient alors exercées par le roiHumbert II d'Italie lui furent transmises.
Le il intervient à Paris lors de laconférence de paix, où il contesta les conditions difficiles infligées à l'Italie par le traité. Une de ses réussites en politique étrangère est l'accord De Gasperi-Gruber avec l'Autriche en 1946 qui fit de sa région, le sud du Tyrol, une région autonome.
En il effectue un voyage auxÉtats-Unis desquels il obtient uneaide financière et matérielle, et où il promeut l'image de la nouvelle République, inaugurant ainsi le retour de l'Italie sur la scène internationale. À l'occasion, il devint le troisième italien à être honoré d'uneticker-tape parade àNew York, et il sera le seul à en répéter l'expérience, en1951.
Dans une Italie accablée par vingt ans de dictature fasciste et usée par la Seconde Guerre mondiale, De Gasperi affronta les négociations de paix avec lespuissances victorieuses, en réussissant à réduire les sanctions au désarmement militaire, et en évitant la perte de territoires frontaliers comme leHaut-Adige et leVal d'Aoste. Il chercha à résoudre à l'avantage de l'Italie le problème de la souveraineté deTrieste et de l'Istrie, mais il eut moins de chance en ce qui concerne cette dernière.
Il conclut des accords avec les puissances occidentales pour financer la reconstruction et la reprise économique de l'Italie.
La situation précaire du pays, qui s'améliorait trop lentement, et les privations, provoquaient le mécontentement des ouvriers et une agitation syndicale. Les protestations s'amplifièrent en raison des inondations duPô de1951[4], dont lesdigues avaient cessé d'être entretenues depuis le début de la guerre. Ces inondations firent beaucoup de victimes dans les zones agricoles des provinces deRovigo etFerrare. En1952, par peur d'une victoire électorale descommunistes et dessocialistes en Italie, leVatican suggéra, puis imposa, une alliance électorale d'importance dans la perspective des élections municipales àRome.
LeSaint-Siège n'aurait pas accepté que la ville, siège de la chrétienté, soit administrée par un maire socialiste. De Gasperi s'opposa résolument à une coalition avec ladroite. Ceci provoqua unincident diplomatique avec le Vatican qui perturba De Gasperi. En 1952,Pie XII refusa de recevoir De Gasperi au Vatican à l'occasion du trentième anniversaire de ses noces avec Francesca Romani.
Il conserva le poste de chef du gouvernement jusqu'en août1953, après l'échec de la loi électorale, dénommée par ses adversaireslegge truffa («loi escroquerie») même pour l'effet perturbateur de son processus d'approbation au Sénat[5].
Il était convaincu de la nécessité d'uneintégration européenne et critique vis-à-vis de l'entrée de l'Italie dans l'OTAN, il aurait préféré la création d'uneCommunauté européenne de défense, laquelle était cependant assujettie au haut commandant de l'OTAN.
En, Alcide De Gasperi répond favorablement à l’appel deSchuman et donne tout de suite son plein appui au projet de mise en commun ducharbon et de l'acier. Selon lui, la place de l’Italie est dans laCECA, il y voit aussi un enjeu bénéfique à l’image de son pays. Il rêve d’unefédération européenne, non seulement dans le domaine du charbon et de l’acier, mais dans tous les domaines. Il se lie d’amitié avec Robert Schuman. En1952, il est lauréat duprix international Charlemagne.
↑Une polémique existe sur la graphie correct du nom de famille, selon certains ce seraitDegasperi : thèse inattaquable d'un point de vue historique, comme le prouve leregistre paroissial de Pieve Tesino. Le politicien lui-même signait Degasperi comme le montre par exemple la copie originale de l'accord Degasperi-Gruber. Cependant la tradition tend à maintenir l'usage de la graphieDe Gasperi.