Diplômé de l’université de Buenos Aires en 1983, il exerce comme juge assesseur dans la circonscription judiciaire fédérale deSan Isidro et fait ses premiers pas en politique sous l’égide d’Alberto Asseff, chef du Parti nationaliste constitutionnel, parvenant à se hisser à la tête de la section de jeunesse de ce parti.
Sous le gouvernement deRaúl Alfonsín, il occupe le poste de rapporteur-directeur et de sous-directeur des Affaires juridiques du ministère de l’Économie. Entre 1989 et 1995, il est à la tête de la Surintendance des assurances (Superintendencia de Seguros), organisme chargé de réguler et surveiller les activités d’assurance en Argentine. En 1996, il travaille, sous le mandat d'Eduardo Duhalde, comme fonctionnaire au gouvernement du district fédéral de Buenos Aires, d’abord comme président de Gerenciar S.A., puis comme vice-président du groupe bancaireBapro jusqu’en 1999. Il fonde le groupe Calafate, cercle de réflexion au nom duquel il appuie d’abord la candidature présidentielle de Duhalde en 1999, en tant quetrésorier, et ensuite celle deNéstor Kirchner en 2003, cette fois au titre de directeur de campagne. En 2000, il est élu à l’Assemblée législative de Buenos Aires, sous les couleurs de l’alliance électoraleAcción por la República(es) de l’ancien ministre de l’ÉconomieDomingo Cavallo.
Après la victoire de Kirchner, Alberto Fernández est nommé le chef de cabinet, fonction qu’il conserve après l’accession à la présidence, le, de celle qui avait été Première dame,Cristina Fernández de Kirchner. Sept mois plus tard, en, il démissionne en raison de la crise rurale consécutive à la hausse des prélèvements sur les exportations agricoles qui provoque unegrève patronale agricole de 129 jours.
Après sa démission, il devient opposant aukirchnerisme, défendant certes le mandat de Néstor Kirchner, mais critiquant les mesures prises par le gouvernement de son successeur Cristina Kirchner. Il participe en 2013 à la campagne duFrente Renovador(es) deSergio Massa, ancien chef de cabinet, pour la candidature de celui-ci à un siège dedéputé national, et en 2015, en faveur de sa candidature à la présidence. En 2017, Alberto Fernández s’engage comme chef de campagne deFlorencio Randazzo(es), ancien ministre de l’Intérieur, qui briguait alors un siège de sénateur national.
Avec Cristina Fernández de Kirchner comme vice-présidente et sous l’étiquette duFrente de Todos, il est éluprésident de la Nation argentine au premier tour de l'élection présidentielle de 2019, face au président sortantMauricio Macri. Son bilan est marqué par la légalisation de l'avortement, l'adhésion de l'Argentine auxBRICS et la poursuite de lacrise économique (inflation de près de 150 % à la fin de son mandat et un taux de pauvreté de plus de 40 %). Devenu très impopulaire, il n'est pas candidat à sa réélection et le libertarien d'extrême droiteJavier Milei lui succède.
Alberto Ángel Fernández voit le jour le àBuenos Aires, dans le quartier deVilla del Parque. Son père biologique est Alberto Oscar Pío Fernández (1915-1980), qu’il voit rarement. Celui-ci est le fils de Vicente Alberto Fernández Cruz (1886-1944) et Sara Catalina Cámara Carranza (1896-1953). La demi-sœur aînée d'Alberto Fernández est Marta Sara Fernández (1953)[1]. Son père adoptif, Carlos Galíndez, avec qui sa mère, Celia Pérez, s'était mariée en secondes noces et qu’il tient pour son véritable père, était juge fédéral et s’occupe d’élever l’enfant dès ses deux ans. Son grand-père, Manuel Galíndez, a été sénateurprovincial deLa Rioja sous l’étiquette de l’Union civique radicale (UCR)[2]. Il suit l’enseignement primaire à l’école República de Mexico jusqu’au5e degré, puis le reste à l’école publique Avelino Herrera[3]. À 14 ans, son ami Carlos López l’incite à étudier laguitare avec le chanteurLitto Nebbia, et Fernández réussira à composer quelques chansons et à se produire dans des estaminets tels queEl Corralón[4].
À l’issue de sesétudes secondaires au collège Mariano Moreno de sa ville natale, il fait des études dedroit à l’université de Buenos Aires (UBA), et obtient en 1983 son diplôme d’avocat avec une note moyenne de 7,80. Il est nommé professeur adjoint à la chaire dedroit pénal et deprocédure pénale, dont le titulaire était l’ancien procureur général fédéralEsteban Righi. Il est depuis 1985 enseignant à l’UBA, chargé du coursThéorie générale du délit et système pénal[5]. Il épouse Marcela Luchetti, avec qui il eut en 1995 un fils, Estanislao, mais dont il divorce en 2005[6]. Il vit depuis 2014 en couple avec lajournaliste etactrice Fabiola Yáñez[7].
Alors qu’il étudiait le droit, son oncle maternel Antonio Pérez, ancien photographe personnel deJuan Perón[8], l’exhorte à adhérer auParti nationaliste constitutionnel(es), fondé par Alberto Asseff en 1982, où Fernández joue un rôle très actif dans la section de jeunesse du parti, section dont il devient le président en 1983. Il s’y signale notamment commeorateur et comme concepteur de l’affiche de campagne en vue des élections présidentielles de 1983[9]. Cette même année, il s’affilia auParti justicialiste.
Dans la décennie 1980, Fernández est juge assesseur dans la circonscription judiciaire fédérale deSan Isidro, que dirigeait alors le jugeAlberto Piotti(es)[10]. Piotti est celui qui eut à connaître de l’affaire Puccio(es) impliquant une famille de San Isidro qui entre 1982 et 1985 assassina trois personnes et garda captive une quatrième[11]. Les accusés n’ayant pas d’avocat, l’État leur en assigne und’office, par tirage au sort, parmi les juges assesseurs. Il revient à Fernández de défendre Guillermo Fernández Laborde, ami de la famille Puccio, qui avoue avoir assassiné deux des victimes[12], et assure sa défense jusqu’à ce que l’accusé choisisse un avocat[10].
Alberto Fernández, à ce moment chef de cabinet, au côté deRaúl Alfonsín. Sous la présidence de ce dernier, Fernández travaille comme sous-directeur des Affaires juridiques au ministère de l’Économie.
En 1985, pendant le gouvernement deRaúl Alfonsín, Fernández est sous-directeur général des Affaires juridiques au ministère de l’Économie, sous la direction deJuan Vital Sourrouille(es)[13]. Il remplit la fonction d’assesseur auprès du Conseil de délibération (assemblée législative unicamérale, dite aussiLégislature) de la ville de Buenos Aires et de laChambre des députés[14].
En 1989, il est nommé surintendant des Assurances de la Nation (c’est-à-dire à la tête de l’organe fédéral de contrôle et de régulation des activités d'assurance en Argentine), poste qu’il occupera jusque 1995, soit six mois avant la démission du ministre de l’ÉconomieDomingo Cavallo[15]. Il est président de l'Association des surintendants des assurances d’Amérique latine entre 1989 et 1992, cofondateur de l'Association internationale des superviseurs d’assurances, négociateur pour l’Argentine lors duCycle d'Uruguay de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) et au sein du groupe Services financiers duMercosur, et expert en assurances de l’Association latino-américaine d’intégration (Aladi).
En 1996, sous le mandat d’Eduardo Duhalde, il est désigné président de la société Gerenciar Proyectos y Administración Sociedad Anónima, dépendant deBanco Provincia de Buenos Aires, qui offre des services de transparence dans les affaires. En 1997, ces entreprises, dont l’actionnaire et le gestionnaire était Banco Provincia, s’organisent enholding, le groupe Bapro, dont le premier président sera l’ancien titulaire de la banque,Rodolfo Frigeri(es)[16]. Fernández exerce entre le et le la fonction de vice-président, et, jusqu’à sa démission le, celle de l’un des directeurs[17].
En 1998, il est choisi commetrésorier de la campagne présidentielle d’Eduardo Duhalde pour l'élection présidentielle de 1999, où cependant celui-ci sera battu par le candidat de l'Alliance pour le travail, la justice et l’éducation,Fernando de la Rúa[17]. Durant cette même période, il fonde, conjointement avecCristina Fernández de Kirchner,Esteban Righi,Eduardo Valdés(es),Carlos Tomada(es) etJulio Bárbaro, entre autres, le groupe Calafate, cercle de réflexion s’autoqualifiant deprogressiste, destiné à faire barrage à la réélection du président alors en exercice,Carlos Menem[18], et qui appuya d’abord la candidature présidentielle d’Eduardo Duhalde, puis celle deNéstor Kirchner, lequel nomme alors Alberto Fernández directeur de campagne[19]. En 1999, il prend la direction du Programme de transparence dans les organisations publiques et privées de l’université de Buenos Aires[20].
En 1999, il estpré-candidat au poste de vice-chef de gouvernement de la ville de Buenos Aires, en tandem avecJorge Argüello(es), alors législateur deBuenos Aires[21], cependant la candidature duParti justicialiste perd le scrutin face à l’ancien ministre (fédéral) de la JusticeRaúl Granillo Ocampo(es)[22]. Aux élections provinciales de 2000, Fernández est élu législateur de Buenos Aires, sous la bannière de l’alliance électorale Acción por la República/Encuentro por la Ciudad, emmenée, au titre de candidat chef de gouvernement, parDomingo Cavallo, qui se classe deuxième avec 33,20 % des voix.
Cette section est trop longue. Elle pourrait gagner à être raccourcie ou répartie en plusieurs sous-sections. Il est également possible que sa longueur crée un déséquilibre dans l'article, au point d'en compromettre laneutralité en accordant à un aspect du sujetune importance disproportionnée.
Après la prise de fonction deNéstor Kirchner commeprésident de la Nation le, Fernández est nommé chef de cabinet[23], tandis que son siège à la Chambre législative (Législature) de la ville de Buenos Aires échoit à l’actriceElena Cruz(es), qui avait approuvé par ses déclarations la dictature militaire autodénommée « Processus de réorganisation nationale »[24] (Elena Cruz fera l’objet d’une requête d’exclusion à l’initiative de quelques fractions politiques, requête toutefois rejetée par 21 voix contre 10 et 13 abstentions, ce qui lui permet de prêter serment le et d’entamer son mandat[25]). Son vice-chef de cabinet était l’ancien titulaire de laCasa de la Moneda,Juan Carlos Pezoa(es)[26]. Le président Kirchner transféra vers les services du chef de cabinet le secrétariat aux Médias, dont l'entrepreneur de la publicité Enrique Albistur avait été nommé directeur[27]. Parmi les premières mesures prises par le gouvernement de Kirchner, on relève en particulier le renouvellement du personnel au sommet desForces armées, au moyen du limogeage de 75 % de ses membres[28], de même que des hautes instances de laPolice fédérale argentine(es), Fernández déclarant à cette occasion que le président souhaitait une « permutation générationnelle » (recambio generacional)[29]. En outre, il demande au Congrès national de permettre le jugement politique de membres de la Cour suprême de justice, indiquant « n’avoir pas l’intention de négocier quelque verdict que ce soit avec (le président de ladite Cour)Julio Nazareno(es) en échange de l’impunité »[30],[31]. Finalement, le, Nazareno démissionne avant que la Chambre des députés ne vote la requête de mise en jugement politique pour forfaiture dans l’exercice de sa fonction[32], et fut remplacé parEugenio Zaffaroni(es)[33].
En 2003, laville de Santa Fe est frappée par desinondations à la suite des crues durío Salado, ce qui nécessite d’évacuer quelque 150 000 personnes. Il est décidé d’octroyer des subsides et d’augmenter à 300pesos argentins les pensions et retraites des victimes[34]. En politique extérieure, Fernández déclare que « la politique extérieure argentine devait être ouverte au monde entier et prendre pour épicentre le Brésil »[35], et a un entretien avecHorst Köhler, alors président duFonds monétaire international, à qui il signifie que « l’Argentine [avait] rempli et dépassé les objectifs qu’elle s’était proposés et qui lui avaient été demandés par le FMI »[36].
Le, il présente son premier rapport d’action politique devant leCongrès, en l’occurrence devant leSénat, sollicitant « un travail conjoint entre le gouvernement et le Parlement » afin de « construire un État intelligent »[37].
Le, la députéeElisa Carrió accuse le gouvernement d’exercer des« pressions sur la presse » dans le but d’empêcher que soit diffusé dans l’émission télévisée deJorge Lanata,Día D, un rapport sur de supposées irrégularités dans la gestion du PAMI (Programa de Atención Médica Integral, système de couverture sociale à l’intention des anciens combattants desMalouines), accusation rejetée par Fernández[38],[39].
Le, le Congrès approuve la loi budgétaire 2004, qui comportait la possibilité d’accorder désormais au chef de cabinet le pouvoir de restructurer certaines parties du budget, lesquelles cessaient ainsi de tomber sous le coup de la loi sur l’administration financière de l’État[40]. Le, Fernández, aux côtés du ministre de la Planification fédérale,Julio de Vido(es), annonce la résiliation du contrat de concession deCorreo Argentino (services postaux) au groupe Macri, au motif de non versement de sommes dues à l’État et à des créanciers privés[41].
En, en raison de la pénurie degaz naturel, le gouvernement argentin signe une convention avec laBolivie prévoyant l’importation de gaz en contrepartie de la suspension de l’exportation de gaz à des pays tiers, dont leChili[42]. Le président du Chili,Ricardo Lagos, critiqua cette décision, à quoi Fernández répliqua en signalant qu’il « y a beaucoup de confusion dans le gouvernement du Chili. Pour vendre du gaz au Chili, la loi argentine dit qu’il faut pourvoir d’abord à la demande intérieure, ce qui n’est pas le cas en ce moment »[43]. Finalement, le gouvernement argentin élabora un plan visant à augmenter la capacité de transport et de distribution de gaz naturel, à achever l’extension de lacentrale nucléaireAtucha II, et à créer l’entreprise publiqueENARSA (acronyme deEnergía Argentina S.A.)[44].
Le présidentNéstor Kirchner en concertation avec lechancelier (ministre des Affaires étrangères)Jorge Taiana et le chef de cabinet Alberto Fernández en 2007.
En, la production de la chaîne de télévision publiqueCanal 7 Argentina supprime de sa programmation les émissionsLos siete locos etEl refugio de la cultura, conduites respectivement par Cristina Mucci et Osvaldo Quiroga. À l’issue de la polémique qui s’ensuivit, Fernández reconnait que c'était une erreur et accepte que les deux émissions retournent à l’antenne[45], affirmant par ailleurs que « la culture est un sujet qui préoccupe, et grandement » le gouvernement[46].
Dans la nuit du, lepiquetero MartínOso (« ours ») Cisneros, du restaurantLos Pibes situé dans le quartierportègne deLa Boca, est assassiné par un délinquant protégé par la police fédérale[47]. En guise de protestation, despiqueteros de la fédérationTierra y Vivienda, dirigée parLuis D'Elía(es), occupèrent le commissariat 24 de la Police fédérale àLa Boca[48]. Le gouvernement de Kirchner opta pour une non-intervention policière dans les protestations sociales, eu égard au précédent dumassacre d’Avellaneda(es) en 2002. Face à la montée de l’agitation sociale, Fernández déclare : « Nous vivons dans un pays où les gouvernements et les gouvernants ont été systématiquement accusés de réprimer. Aujourd’hui, il s’est passé que le commissariat a été repris en mains et que l’ordre a été rétabli sans qu’il y ait eu répression, et voilà qu’on nous accuse à cause de cela »[49]. Le, despiqueteros attaquent avec du feu, des poteaux et des pierres laLégislature de Buenos Aires pour protester contre la réforme du Code du vivre-ensemble (Código de Convivencia) de la ville, sans que la police ne décide d’intervenir[50]. Pour Fernández, ces attaques étaient l’œuvre de « groupes d’ultra-gauche qui donnent des arguments à la droite qui réclame de la répression »[51]. Le, le ministre de la JusticeGustavo Béliz(es) dénonce l’existence de « mafias » voulant forcer son départ et accuse le secrétariat au Renseignement (Secretaría de Inteligencia, sigle SIDE) de manœuvres illégales et de corruption dans le cadre de ses opérations[52]. Kirchner finit par décider de suspendre de ses fonctions le commissaire en chef de la police fédérale Eduardo Prados, après qu’il fut avéré qu’il y avait des policiers armés le jour des protestations à la Législature[53], de même que le ministre de la Justice Gustavo Béliz[54].
Le, Nicolás Garnil, âgé de 17 ans, est enlevé alors qu’il se rendait à lamesse avec sa mère, María Susana, dans la localité de Beccar (faubourg nord-ouest de Buenos Aires)[55]. Garnil fut libéré dans la localité deGarín(es), après 20 jours de captivité, moyennant paiement de 65 000pesos argentins[56]. Au lendemain de la libération, Susana Garnil rédige unelettre ouverte, dans laquelle elle impute au président Kirchner l’augmentation de l’insécurité et réclamait des mesures[57]. Fernández rétorque à ces critiques, déclarant « qu’elles ne lui paraissaient pas heureuses. L’Argentine est ainsi faite qu’elle ne découvre la douleur que quand celle-ci la frappe »[58]. L’opposition qualifie ces paroles de plaisanterie et de marques d’un manque de sensibilité face à une question qu’il n’était pas à même de résoudre[59]. Finalement, Kirchner décide de transférer le secrétariat à la Sécurité intérieure vers la sphère de compétence du ministère de l’Intérieur[60].
Le, Fernández voyage en compagnie de la sénatrice et Première dameCristina Fernández de Kirchner pour l’Espagne, afin de s’y entretenir avec le président du gouvernement d'EspagneJosé Luis Rodríguez Zapatero et obtenir son appui face au FMI en vue de la renégociation de la dette privée alors en défaut de paiement[61]. Contre l’idée d’effacer la totalité de la dette envers le FMI, Fernández défendit son initiative et souligna « qu’il y a eu une décision très claire de faire baisser notre dette vis-à-vis des organismes internationaux et de ne pas le faire d’une façon irresponsable »[62]. Le, le ministre de l’ÉconomieRoberto Lavagna annonce que l’Argentine avait obtenu de la part des marchés financiers un taux d’adhésion de 76,07 % à la restructuration de sa dette. Fernández déclara que l’Argentine se trouvait devant « une occasion nouvelle » et que c’était là une preuve qu’on pouvait se tirer de situations critiques[63].
Le, l’entrepriseSouthern Winds, propriétaire de LAFSA (Líneas Aéreas Federales Sociedad Anónima(es)), est accusée de trafic de drogue, dans lequel seraient compromis Martín Varsavsky, des fonctionnaires de la compagnie, ainsi que le haut commandement de laForce aérienne argentine, avec à sa tête le brigadier-général Carlos Alberto Rohde. Ces circonstances portèrent l’État argentin à ne pas renouveler l’accord SW-LAFSA à sa date d’échéance en[64]. Fernández s’en prend à l’opposition, soulignant que « vouloir impliquer le gouvernement national dans cette affaire était une véritable aberration » et affirmant que le gouvernement « n’avait pas connaissance de ce qui se passait »[65].
Le, Fernández est élu président duParti justicialiste de Buenos Aires, avec en perspective une possible candidature comme chef du gouvernement de la capitale en 2007[66],[67].
Le, Kirchner fait placer également le secrétariat à l'Environnement et le secrétariat aux Sports sous la tutelle du chef de cabinet[68].
Le, la ministre de l'ÉconomieFelisa Miceli décide de suspendre de ses fonctions à l'Institut national de statistique et des recensements (INDEC) Clyde Trabuchi, directrice des statistiques, et Graciela Bevacqua, directrice desindices des prix à la consommation, cette dernière ayant aussi dans ses attributions la mesure de l’inflation[69]. L’opposition interprète cette décision comme une interférence dans l’organisme statistique et accusa le gouvernement d’exercer des pressions sur Bevacqua pour lui faire modifier le taux d’inflation[70]. Fernández attribue ces critiques à des « manœuvres politiques » et déclare que l’affaire « avait été manipulée dans sa présentation par [le journal]Clarín »[71]. Cependant, si l’inflation en s’élevait à 1,1 % selon l’INDEC, des mesures privées calculaient un taux de 2,1 %[72]. Des économistes comme Abel Viglione, de la Fondation d'enquêtes économiques lationaméricaines (FIEL), le députéClaudio Lozano(es), et Camilo Tiscornia, de la firme Castiglione y Tiscornia (C&T Asesores), s’accordaient à dire qu’il y avait bien eu des modifications dans la méthode utilisée pour mesurer l’inflation[73].
Le, à la suite d’une enquête du journaliste Claudio Savoia, la secrétaire à l’Environnement Romina Picolotti est accusée par le députéJosé Adrián Pérez(es) de « malversation de biens publics et de fraude »[74], d’irrégularités dans le recrutement de personnel et dans la gestion budgétaire, et plus spécialement d’avoir « embauché des membres de sa famille et des amis, avec des rémunérations dépassant les 8 000 pesos mensuels, de détourner des fonds vers la fondation ArgenINTA et de voyager en avions privés »[75]. Face à ces accusations, Fernández déclare que Mme Picolotti était une « fonctionnaire honnête et quelqu’un de bien », et que si irrégularités il y a, il serait « le premier à prendre des mesures »[76]. Le lendemain, Picolotti présenta un rapport de gestion à Fernández[77], après quoi celui-ci convoque une conférence de presse conjointement avec Picolotti, lors de laquelle il assure que « toutes les barbaries qui ont été dites sont fausses » et affirme qu’elles « sont une claire opération politique ». Il soutient que « sur le total des 306 nouveaux recrutés du mandat, 78 pour cent possède une formation universitaire » et justifia les nominations du frère de la fonctionnaire, Juan Picolotti, au poste de chef de cabinet du secrétariat, et de la cousine de Picolotti, Valeria Yaryez, comme coordinatrice sociale du bassin Matanza-Riachuelo, en alléguant que ces nouvelles recrues avaient de l’expérience dans le domaine environnemental. Concernant les rémunérations, il signala qu’il n’était pas fait état de salaires de 12 000 pesos ni de 25 000 pesos. Quant aux déplacements en avions privés, Fernández dit que Picolotti n’avait jamais utilisé ces services, et défend la dérivation de fonds budgétaires vers la fondation ArgenInta, soulignant que ces versements étaient « contrôlés par le Bureau de contrôle de la Nation et par le Commissaire aux comptes de la Nation, aucun de ces organismes n’ayant formulé d’observations »[78]. Ultérieurement, il accusa l’article de Savoia d’être plein d’« imbécillités », le travail de n’être qu’une « pseudo-enquête », et son auteur d’être un « pseudo-journaliste »[79]. Cependant, le Commissaire aux comptes de la Nation précise ensuite qu'il n’avait pas avalisé les recrutements, pour la raison qu'il n’avait jusqu’ici approuvé encore aucun rapport[80]. L'Association des entreprises journalistiques argentines (Adepa) fait paraître un communiqué où elle condamne les dires de Fernández à l’encontre de Savoia[81], pendant que le Foro de Periodismo Argentino (Fopea) publiait une requête publique à l’adresse de Fernández, réclamant de celui-ci une « rétractation immédiate et une demande d’excuses » à Savoia[82]. En, Romina Picolotti démissionne du secrétariat à l’Environnement, et en, la juge María Servini de Cubría engage sous l’inculpation d’« administration frauduleuse » une procédure judiciaire contre Picolotti, qui se voit infliger une amende de 450 000 pesos. Fernández déclare alors qu’il « ne connaissait pas le manège de la caisse noire » du secrétariat et que Picolotti « devait rendre des comptes de ses actes »[83].
Le, Fernández est nommé directeur titulaire en représentation de l’État au sein du directoire dePapel Prensa S. A., société produisant le papier pour la presse[84]. Le, Fernández désigneJorge Rivas(es), président du Parti socialiste de laprovince deBuenos Aires, comme vice-chef de cabinet[85].
Sous le mandat de Cristina Fernández de Kirchner (2007-2008)
De droite à gauche : la présidente élueCristina Fernández de Kirchner, le chef de cabinet Alberto Fernández, le ministre de la Planification Julio de Vido, et le futur ministre de l’ÉconomieMartín Lousteau, lors d’une réunion de cabinet pendant la transition présidentielle de 2007.
Alberto Fernández est nommé directeur de campagne pour la candidature présidentielle deCristina Fernández de Kirchner en vue des élections de 2007[86]. Le, Cristina Fernández, élue, succède à son mariNéstor Kirchner au poste de président de la Nation, et maintient Alberto Fernández dans ses fonctions[87].
Après le rejet par le Sénat de ce projet gouvernemental, des rumeurs circulent au sujet de la démission de Fernández[93], qui a lieu finalement le, pour « permettre à la politique de Cristina Fernández de Kirchner de s’oxygéner »[94],[95], par la voie d’une lettre où il dit souhaiter la rénovation du cabinet ministériel et qui se terminait par le mot « sincèrement », suivi de sa signature[96],[97]. Il est remplacé à son poste parSergio Massa, qui renonce à sa place d’adjoint à la municipalité deTigre[98].
Après sa démission, Alberto Fernández s’éloigne dukirchnerisme et en devient l'un des critiques, s’en prenant en particulier au discours « épique » de Cristina Kirchner, à certaines mesures prises, telles que lecarcan de change, et à des événements tels que latragédie ferroviaire de l’Once, tout en continuant de défendre la politique de Néstor Kirchner[14],[99]. En, il demande au gouvernement de « recourir à d’autres méthodes de mesure » de l’inflation et déclara qu’il était nécessaire de clarifier le travail de l’INDEC afin de « dissiper les doutes »[100]. En, il défend le projet des Kirchner, mais ajoute qu’il y avait lieu de « corriger les choses et de changer, pour redresser le cap dévié »[101]. En, Fernández accuse Cristina Kirchner de « faire pression sur les juges » et réclame des « politiques efficaces » contre la délinquance[102]. En 2012, deux ans s’étant écoulés depuis la mort de Néstor Kirchner, il qualifie sa présidence de « positive » et reproche à Cristina d’avoir « jeté par-dessus bord tout ce qu’avait fait Néstor »[103]. En 2013, il déclare que le projet gouvernemental de réforme de la justice constituait « une tentative de la subordonner au pouvoir exécutif »[104] et que ladémocratisation de la justice n’était qu’un « mensonge »[105].
Le, Fernández est écarté de la présidence du Parti justicialiste de Buenos Aires et remplacé par lelégislateur (membre de l’assemblée législative de Buenos Aires) Juan Manuel Olmos[106],[107]. En, il fait savoir qu’il se présenterait comme candidat à la présidence en 2011[108]. Après le décès de l’ancien présidentNéstor Kirchner le, Fernández déclare : « j’ai perdu un ami ; je ressens une douleur immense. Nous perdons le meilleur président de [notre période] démocratique »[109]. En, après la victoire de Cristina Kirchner auxélections primaires, Fernández se proclameoficialista, c’est-à-dire aux côtés du gouvernement en place, fait part de son intention d’être candidat présidentiel en 2015 et indique avoir « voté pour Cristina, en dépit de nos différends »[110]. Le, Alberto Fernández est interrogé par le journalisteMarcelo Longobardi(es) dans son émission deC5N(es)Longobardi en vivo, lorsque la diffusion télévisée est interrompue[111]. Fernández qualifie l’incident de « pénible » et prétend que la production de C5N avait reçu des « appels de fonctionnaires du gouvernement et un ordre de la part de la direction de la chaîne »[112].
Le, il fonde son propre parti, le Parti du travail et de l’équité (Partido del Trabajo y la Equidad,acronyme : Parte)[113]. Aux élections législatives de 2013, Fernández se présente comme candidat à un siège desénateur national pour la ville de Buenos Aires[114]. En 2013, il rejoint leFrente Renovador(es)[115], collabore en 2015 à la campagne électorale pour la candidature présidentielle deSergio Massa[116],[117],[118], et en 2017, il est nommé directeur de campagne pour la candidature de l’ancien ministre de l’IntérieurFlorencio Randazzo à un siège de sénateur pour Buenos Aires sous l’étiquette duFrente Justicialista Cumplir(es)[119],[120].
Dans le courant de 2018, Alberto Fernández revient aukirchnerisme, en lançant des appels à l’unité et au débat, et se faisant désormais le porte-parole de l’ex-présidenteCristina Kirchner[119]. En en effet, après dix années, il eut un entretien avec Cristina Kirchner, afin de rapprocher leurs positions. Il déclara à l’issue de la réunion : « J’ai pris cela comme des retrouvailles humaines plutôt que politiques, car chacun continue de penser ce qu’il pense »[121]. En, il accorde une interview au journalLa Nación, où il dit maintenir ses critiques, caractérisant le premier mandat de Cristina Kirchner comme « progressiste » et le deuxième comme une « gouvernance faible », mais aussi qu’il avait eu en face de lui « une Cristina plus réfléchie », et qu’un accord était possible avec l’ancien chef de cabinetSergio Massa[122].
En 2018, après une rencontre avec Cristina Kirchner, il réintègre lekirchnérisme[121]. Le, Cristina Kirchner valide sa candidature à la présidence de la Nation dans la perspective de l'élection présidentielle de 2019, sous la bannière de l’alliance électorale Front de tous. En matière de politique intérieure, Alberto Fernández préconise de réviser les verdicts rendus dans les affaires de corruption contre d’anciens fonctionnaireskirchnéristes[123], de renégocier les accords conclus entre leFonds monétaire international et le gouvernement deMauricio Macri[124], dedépénaliser l’avortement[125], de créer cinq nouveaux ministères (des Sciences, de la Santé, du Travail, du Logement et de la Femme), de réguler le capitalisme nomade, de dédollariser les tarifs des services publics, et de supprimer les prélèvements sur les exportations[126]. En politique extérieure, il appuie une sortiedialoguée de la crise politique en cours auVenezuela, dit vouloir réviser l’accord Mercosur-Union européenne, et prône un rapprochement avec leBrésil, lesÉtats-Unis et laChine[127].
En, il est nommé membre de la Commission d’action politique duParti justicialiste[128]. Le, Cristina Kirchner présente son livreSinceramente à la Foire du livre de Buenos Aires, présentation au cours de laquelle elle remercie Fernández de lui avoir donné l’idée d’écrire un livre où elle évoquerait sa vie et sa présidence[129],[130].
Le, Cristina Fernández de Kirchner annonce sa formule électorale, composée d’Alberto Fernández comme pré-candidat à la présidence, et d’elle-même comme pré-candidate à la vice-présidence, en vue desélections primaires, préalables à l’élection présidentielle proprement dite[131]. Le, Fernández indique son intention de réviser les sentences prononcées à la suite de l’enquête judiciaire pour corruption contre d’anciens fonctionnaires du gouvernement kirchnériste[123]. Le premier rassemblement électoral de sa campagne présidentielle a lieu dans laprovincepatagonienne deSanta Cruz, où il côtoya la gouverneureAlicia Kirchner, belle-sœur de l’ancienne présidente[132]. Le, il a une entrevue avec l’ancien président de la République orientale d'Uruguay,José Mujica, qu’il nomma « un vieil ami », et avec le candidat à la présidence uruguayenne au nom du gouvernement en place,Daniel Martínez[133].
Le, Fernández est admis au centre médical Otamendi, à l’origine pour un simple contrôle médical[134], mais y resta finalement 48 heures en raison d’une infection pulmonaire[135]. Le, Alberto Fernández et Sergio Massa parviennent à un accord en vue de former une alliance appelée Frente de Todos[136]. L’accord conclu, Massa retire sa candidature présidentielle et annonce qu’il se présentera au titre de premier candidat à un siège dedéputé national pour laprovince de Buenos Aires[137]. Le, Fernández rencontre le directeur du Département de l’hémisphère occidental duFonds monétaire international (FMI) Alejandro Werner, et réclama une « reformulation » de l’accord obtenu entre le FMI et le gouvernement deMauricio Macri[138]. Le, il rend visite à l’ancien président brésilienLula da Silva, emprisonné pour corruption etblanchiment d'argent[139].
Le chercheur Christophe Ventura indique :« Le Frente de Todos propose une renégociation de la dette, une implication plus forte de l’État dans la régulation et l’investissement économiques, une consolidation du marché intérieur argentin passant par une redistribution plus accrue des revenus et le développement de la production nationale. Ce programme est inspiré par une visionkeynésienne contre la doxanéolibérale symbolisée par Mauricio Macri. Pour autant, ce n’est pas un programme révolutionnaire et Alberto Fernandez ne souhaite ne pas se mettre à dos le patronat et les acteurs financiers mondiaux, afin de ne pas subir d’attaques spéculatives sur la dette et la monnaie nationales »[140].
Le, il remporte la première place aux élections primaires de 2019, avec 47,61 % des voix, contre 32,12 % pour le président sortantMauricio Macri[141].
Le, il est élu président au premier tour avec 48,24 % des voix, contre 40,28 % pour Mauricio Macri[142].
Les rapports d'Alberto Fernández sont tendus avec leprésident brésilienJair Bolsonaro, qui refuse de se déplacer pour son investiture, l'accusant de vouloir créer une« grande patrie bolivarienne » à la frontière et de s’apprêter à provoquer une fuite des capitaux et entreprises brésiliennes[144]. Les États-Unis lancent un avertissement au gouvernement argentin, déclarant :« Nous voulons savoir si Alberto Fernández va être un avocat de la démocratie ou un apologiste des dictatures et des caudillos de la région, que ce soit Maduro, Correa ou Morales »[145].Donald Trump décide d'augmenter les taxes sur les exportations d’acier argentin[146].
Prenant ses fonctions dans un contexte de forte crise économique (taux de pauvreté de 40 %, récession de 3,1 % pour l'année 2019, inflation de 55 %), Alberto Fernández annonce une série de mesures d'urgence économique : hausse des impôts pour les plus fortunés et la classe moyenne, avantages fiscaux pour les plus démunis, gel des tarifs des services publics pendant six mois, instauration d'une taxe de 30 % sur l'achat de devises étrangères ou encore hausse des taxes sur le secteur de l’agriculture. Le gouvernement lance également un plan de lutte contre la faim via la distribution de bons alimentaires pour plus de deux millions de personnes[147],[148] et le salaire minimum bénéficie d'une augmentation[146].
Le Parlement vote un projet de loi visant à restructurer la dette du pays auprès des instances internationales, qui s'établit à 91 % en 2019[149]. En mars 2020, afin de réduire le déficit public, le gouvernement augmente les taxes sur les exportations de soja de trois points, les passant de 30 à 33 %, pour les producteurs de plus de 1 000 tonnes de soja par an[150]. Dans le même temps, les taxes sur les exportations de ceux produisant moins de 1 000 tonnes (soit près de 75 % des producteurs) sont plafonnées à 30 %. Cette décision provoque un mouvement social de protestation et de grève de la part de quatre fédérations patronales, qui suspendent la commercialisation de leur production[151].
Un accord de rééchelonnement de la dette argentine est signé le 3 mars 2022 avec leFonds monétaire international pour éviter undéfaut de paiement sur un prêt de 57 milliards de dollars accordé en 2018 par l'institution financière. L’accord impose une réduction desdéficits publics, une hausse destaux d’intérêt et des coupes significatives dans les subventions à l'énergie[152]. Le président argentin assure qu'aucune mesure d’austérité ne sera prise sur le plan social : « tous les droits de nos retraités seront préservés » et « aucune réforme du droit du travail » ni de « privatisation d’entreprises publiques » ne sont envisagées[153]. L'aile gauche de la coalition péroniste duFrente de todos, dont la vice-présidente Cristina Fernandez de Kirchner, conteste cet accord, affirmant dans une lettre ouverte qu'il signifie « non seulement la déroute du peuple qui va souffrir des conséquences de ce pacte mais aussi une douloureuse déroute politique », et plaide pour plus de dépenses sociales face à un taux de pauvreté de 37 %. Selon ses opposants, le document s’appuie sur plusieurs hypothèses obsolètes dans un contexte national et international hautement inflationniste qui, dès le départ, ne permettra pas d’atteindre l’objectif de croissance pour pouvoir rembourser. L'accord est finalement ratifié par leSénat et laChambre des députés[152].
Les organisations sociales et syndicales, dont le soutien au gouvernement s'est réduit à mesure que se détériore la situation économique et sociale, manifestent pour exiger des mesures contre l'inflation galopante et la pauvreté, notamment l'instauration d'unrevenu universel[154],[155].
Dans le cadre de son déplacement à laCOP26 de Glasgow de novembre 2021, Alberto Fernández propose la création d'un mécanisme de conversion de dettes en investissements environnementaux, pour aider les pays pauvres dans leur transition écologique. Les pays concernés pourraient ainsi annuler une partie de leur dette souveraine à condition d'investir les sommes économisées dans la lutte contre lechangement climatique[156].
L'Argentine renoue avec la croissance en 2021 (+10,4 %) après trois années de forte récession, le taux de chômage passe de 13 % en 2020 à 7 % en 2022 et la pauvreté recule de 5 points en un an (42 % à 37 %). En revanche, l’inflation annuelle dépasse les 60 %[157], étant alimentée par la guerre en Ukraine. Pourtant, l’Argentine n'est en rien dépendante du blé ukrainien : le pays est le huitième exportateur mondial, mais les fabricants se sont alignés sur les prix à l’international, à la hausse. Dès la mi-mars, Alberto Fernández décide de mener une « guerre contre l’inflation » et annonce plusieurs mesures, comme la création d’un fonds destiné à subventionner le prix de la farine, et des « prix surveillés » sur les produits de première nécessité[158].
Un an après son investiture, le 11 décembre 2020, la Chambre des députés vote en faveur d'un projet de loi prévoyant la possibilité d'avorter jusqu'à la quatorzième semaine (131 voix pour, 117 contre), ce qui était l'une des promesses d’Alberto Fernández, devenu le premier président argentin ouvertement favorable à lalégalisation de l'avortement. Le projet est ensuite transmis au Sénat pour son approbation définitive[159]. Le 30 décembre, le Sénat adopte le projet de loi avec 38 votes pour et 29 votes contre (une abstention), faisant de l'Argentine le quatrième pays d'Amérique latine à approuver l'IVG sans conditions aprèsCuba (1965), leGuyana (2006) et l'Uruguay (2012)[160]. Dans le même temps, le gouvernement crée une allocation destinée à soutenir les mères de famille pendant leur grossesse et les trois premières années de l’enfant, afin notamment de réduire le nombre d’avortements pour raisons économiques[161]. Il crée par ailleurs un ministère du Droit des femmes et promulgue une nouvelle loi portant sur l’éducation sexuelle dans les écoles[162].
Le début du mandat d'Alberto Fernández coïncide avec le déclenchement de lapandémie de Covid-19.
Fernández réagit tôt face à l'épidémie, décrétant la fermeture totale des frontières le, la suspension des cours pour tous les élèves le 16, puis le confinement des habitants du pays à partir du[163]. Certains prisonniers sont libérés pour désengorger les prisons et y limiter la propagation du virus, ce qui suscite une controverse dans le pays[164].
Le gouvernement met en place une série de mesures économiques — construction de huit hôpitaux d’urgences modulaires, augmentation des aides aux familles pauvres, aux retraités, aux chômeurs et aux femmes enceintes sans ressources financières, plafonnement des prix des médicaments et de 50 catégories de produits de première nécessité, aide financière aux petites entreprises[165] — pour réduire l’effet du confinement sur l’économie[163]. Plus de 220 000 entreprises ont demandé à l'État un soutien financier pour éviter la faillite[166]. Toutefois, dans un pays où plus d'un tiers des emplois sontinformels et où près de 4 millions de personnes vivent dans desbidonvilles, la quarantaine fait craindre une hausse de la pauvreté[163]. Selon Felipe Bosch analyste du Groupe d’études géopolitiques de l’École normale supérieure, « moins de 10 % des habitants de ces quartiers ont accès aux services de base, comme l’eau courante ou un système d’évacuation des eaux usées. Dans un contexte de crise, il est quasi impossible de suivre toutes les recommandations sanitaires[167]. » Le groupe péroniste au Parlement dépose un projet de loi pour créer un impôt, payé une fois, qui s'appliquerait« à environ 200 personnes et 200 entreprises » les plus riches du pays. Il permettrait de récolter 2,5 milliards de dollars. Les fonds récoltés seront utilisés« pour du matériel médical, de la nourriture pour les plus vulnérables »[166].
L'Argentine signe en décembre 2020 un accord avec laRussie prévoyant la livraison de dix millions de doses du vaccinSpoutnik V.
L’Argentine a été le premier pays à accueillir les essais cliniques à grande échelle du laboratoirePfizer. Des négociations sont aussitôt entreprises pour l’achat de 13,2 millions de doses, dont 1 million avant la fin de l’année 2020[168]. En juin 2021, 11 millions sur 45 millions d'Argentins ont été totalement vaccinés. Les négociations pour l’achat de vaccins Pfizer-BioNTech n’ont pas abouti. Le directeur de Pfizer Argentine, Nicolas Vaquer, évoque des blocages législatifs devant les députés qui lui opposent qu’il n’y a pas eu de problème avec les autres laboratoires et "que l’Argentine a permis à Pfizer de faire des essais cliniques sur son territoire en août 2020"[169]. Les conditions posées par Pfizer, qui exigeait que la loi argentine soit amendée pour s’assurer une solide immunité juridique en cas d’effets nocifs du vaccin et même en cas de négligence, de fraude ou de malveillance, ont été rejeté par le gouvernement argentin. D'après leBureau of investigative Journalism, le laboratoire Pfizer aurait manié « l’intimidation » et le « harcèlement de haut niveau » dans ses négociations avec des gouvernements latino-américains, notamment l'Argentine[168].
En accord avec la Constitution, Alberto Fernández est éligible pour un second mandat. Plombé par l'aggravation de la crise économique qui voit son taux d'impopularité grimper à 70 % dans les sondages d'opinions, il est également remis en cause dans les milieuxkirchnéristes qui font pression pour qu'il laisse la place à une nouvelle personnalité bénéficiant d'une meilleure image lors de l'élection présidentielle d'octobre 2023. Il finit ainsi par annoncer le ne pas être candidat à sa réélection[170].Javier Milei,député et dirigeant duParti libertarien (PL) et de la coalitionLa liberté avance (LLA), arrive largement en tête desprimaires, et l'emporte au second tour l'élection présidentielle face au candidatpéroniste et ministre de l'Économie,Sergio Massa, avec 55,7 % des suffrages exprimés.
Le bilan économique de son gouvernement est jugé « particulièrement catastrophique » avec plus de 140 % d'inflation, 40 % de taux de pauvreté, une croissance en berne, des réserves de labanque centrale au plus bas et un énorme déficit du budget de l'État[171],[172]. Ayant hérité d'une économie en crise, le gouvernement attribue ces difficultés au poids d’une dette colossale contractés auprès duFonds monétaire international pendant la présidence de son predecesseurMauricio Macri, qui a limité sa marge de manœuvre, ainsi qu'à des événements externes, tels que lapandémie de Covid-19, les conséquences de laguerre en Ukraine sur le prix de l'énergie ou une sécheresse historique aux effets dévastateurs sur une économie très dépendante du secteur agricole[173]. La renégociation de l'accord avec le FMI, en échange de nouvelles mesures d'austérité, a conduit à une crise politique avec sa vice-présidente Cristina Fernandez de Kirchner et l'aile gauche des péronistes, qui se sont opposés à ce choix. Sa vice-présidente a défendu une vision politique plus marquée à gauche, impliquant davantage de dépenses publiques, tandis qu'Alberto Fernandez, qui se décrit comme un « libéral progressiste », a porté un projet plus centriste, fondé sur des principes de discipline budgétaire[174].
Alberto Fernández s'est engagé dans des différends avec des utilisateurs sur Twitter avant sa présidence, dans lesquels ses réactions ont été considérées comme agressives ou violentes par certains[175],[176],[177]. Des tweets le montrent répondant à d'autres utilisateurs avec des jurons tels quepelotudo (argot argentin pour « couillon »)[178],[179],pajero (« branleur »)[180],[176] ethijo de puta (« fils de pute »)[181],[182]. Il a également appelé le candidat à la présidentielleJosé Luis EspertPajert, un jeu de mots entre son nom de famille et l'argot argentin pour « branleur »[179].
Le 9 juin 2021, lors d'une conférence de presse aux côtés du Premier ministre espagnolPedro Sánchez à la Casa Rosada, le président argentin déclare : « Je suis un européiste. Je suis quelqu'un qui croit en l'Europe […]. Les Mexicains descendent des Indiens, les Brésiliens sont sortis de la forêt vierge, mais nous, les Argentins, nous descendons de bateaux, et c'étaient des bateaux qui venaient de là-bas, d'Europe. Et c'est ainsi que nous avons construit notre société ». Face à la polémique qui suit cette déclaration jugée raciste sur les origines des Argentins, Mexicains et des Brésiliens, Alberto Fernández présente des excuses publiques[183].
Le 6 août 2024, Alberto Fernández est accusé de coups et menaces, ainsi que deharcèlement psychologique par son ancienne compagne Fabiola Yañez, qui fut Première dame d'Argentine durant sa présidence[184]. Le 14 août, Le parquet fédéral argentin requièrent, l'inculpation de Alberto Fernandez pour « coups et blessures avec circonstances aggravantes »[185]. Il est notamment accusé d’avoir assené un coup de pied dans le ventre de son ex-femme alors qu’elle était enceinte de leur enfant, Francisco[186].
Cette plainte est révélée dans le cadre d'une enquête pour corruption contre l’ex-président. Celui-ci est visé dans une affaire de malversation de fonds présumée pendant sa présidence, liée à des contrats d’assurances pour différents ministères ou organismes d’Etat[184].
Juicio a la impunidad (1985), en collaboration avec Mona Moncalvillo etManuel Martin.
Defensa de la democracia: Nuevo enfoque sobre la represión de los delitos que atentan contra el orden constitucional (1985), en collaboration avecAlberto Piotti(es).
Autoría y participación criminal (1987), en collaboration avec Jaime Malamud Goti.
Elementos de derecho penal y procesal penal (1988), en collaboration avecEsteban Righi, Luis Pastoriza et Enrique Bacigalupo.
Derecho penal: la ley, el delito, el proceso, la pena (1996), en collaboration avecEsteban Righi.
Pensado y escrito. Reflexiones del presente argentino y dilemas de una sociedad fragmentada,Barcelone, Ediciones B,.
Políticamente incorrecto. Razones y pasiones de Néstor Kirchner, Barcelone, Ediciones B, Grupo Zeta,, 304 p.(ISBN9789876272681).
↑« Los primeros años de Alberto Fernández: Villa del Parque, las guitarras y la política, en el origen del candidato »,Diario Clarín,(lire en ligne, consulté le)