L'affaire Hugues de Lincoln concerne un petit garçon anglais (°1247 - † août1255) dont la disparition provoqua uneaccusation de meurtre rituel contre les Juifs, ce qui entraîna le massacre d'une vingtaine d'entre eux enGrande Bretagne. Cette accusation reste infondée mais ses conséquences se sont fait sentir jusqu'auXXe siècle.
Le jeune garçon a disparu le et son corps a été découvert dans un puits un mois plus tard. SurnomméLittle Saint Hugh,canonisé par l'Église catholique, il a été célébré localement le.
Peu de temps après la disparition de l'enfant, le 1255 àLincoln[2], fils d'une femme nommée Béatrice, son corps est retrouvé le, couvert d'immondices, dans une fosse ou un puits appartenant à un Juif du lieu dénommé Copin (ou Koppin, Jopin), grâce aux accusations de la mère et du juge et officier du roi,John de Lexinton(en)[3].
Le Juif Copin de Lincoln avoua sous latorture qu'il avait tué l'enfant, après la promesse faite par John de Lexinton de lui laisser la vie sauve s'il avouait. Dans sa confession, il déclara que c'était l'habitude chez les Juifs decrucifier un enfant chrétien chaque année. Copin fut exécuté par pendaison après avoir été traîné par un cheval à travers la ville[4], et l'histoire se serait terminée là si une série d'événements n'avait coïncidé avec la disparition de l'enfant.
Six mois plus tôt environ, le roiHenri III avait vendu à son frère Richard,comte de Cornouailles, ses droits sur la taxe des Juifs. Ayant perdu cette source de revenu, il décida qu'il avait droit à l'argent des Juifs s'ils étaient condamnés pour crime. En conséquence, environ quatre-vingt-dix Juifs furent arrêtés et détenus à laTour de Londres, accusés d'avoir été impliqués dans ce meurtre rituel.
Dix-huit d'entre eux furent pendus - c'était la première fois que le gouvernement civil prononçait une condamnation à mort pour « meurtre rituel » - et le roi Henri eut donc la possibilité de se saisir de leurs biens. Les autres furent graciés et libérés, probablement parce que Richard, qui y voyait une menace contre ses propres sources de revenus, était intervenu en leur faveur auprès de son frère, comme le firent desfranciscains[5].
L'historien Gavin I. Langmuir utilise des termes durs accusant John de Lexinton d'avoir influencé le roi Henry pour qu'il traitât aussi sévèrement les Juifs de Lincoln[6].
Le moinebénédictin,Matthew Paris, historien médiéval anglais, raconte l'histoire de Hugh, jeune garçon enlevé par des Juifs lors d'une fête. Après l'avoir kidnappé, les Juifs le mettent au secret et le nourrissent de lait et autres sucreries, pendant qu'ils préviennent la communauté juive habitant les autres localités d'Angleterre afin qu'elle soit présente le jour du sacrifice de l'enfant. Ils élisent alors un Juif pour prendre la place dePonce Pilate, qui décide des différentes tortures à infliger à l'enfant, rappelant celles subies parJésus-Christ[5].
Pendant ce temps, lacathédrale de Lincoln commençait à tirer profit de l'épisode : Hugues était considéré comme unmartyr chrétien et les lieux associés à sa vie devenaient le but de pèlerinages. Promue par le doyen de la cathédrale, une légende à son sujet prit de l'ampleur, recevant le soutien de la culture populaire, et l'histoire devint sujet de poésie et de folklore. Même 150 ans plus tard,Geoffrey Chaucer, dans sesContes de Canterbury, fait référence à Hugues de Lincoln dansLe Conte de la Prieure[4]. Ces éléments récurrents augmentèrent l'antijudaïsme et la cruauté dans le traitement des Juifs, qui menèrent à leur expulsion en 1290[5].
Le jeune garçon est surnomméLittle Saint Hugh pour le distinguer desaint Hughes de Lincoln (dit également d'Avalon).
Ancien emplacement du reliquaire du Petit saint Hugues. Des légendes mensongères rapportant des histoires de « meurtres rituels » de petits garçons chrétiens par les communautés juives étaient courantes dans toute l'Europe au Moyen Âge et même beaucoup plus tard. Ces faux bruits ont coûté la vie à un grand nombre de Juifs innocents. Lincoln avait sa propre légende et la prétendue victime a été enterrée dans la Cathédrale en 1255. De telles histoires ne font pas honneur à la chrétienté et ainsi nous prions : Seigneur, pardonnez ce que nous avons été, corrigez ce que nous sommes, et amenez-nous à ce que nous devons être.
Des édifices religieux portent son nom comme l'église Saint-Hugues de Lincoln.
En 1975 le groupe anglais de folk-rockSteeleye Span a enregistré une version du « Petit saint Hugues » dans son albumCommoner's Crown. Dans la chanson, le meurtrier est « une lady gay » qui est « habillée de vert ».