Aetius est cependant d'origine semi-barbare : sa mère est une Romaine noble et riche[2] dont le nom n'est pas connu ; son père, nommé Gaudentius, est un officier romain d'originescythe[réf. nécessaire], parvenu au rang très élevé demaître de la milice puis de comte d'Afrique.
Aetius est élevé à la cour impériale d'Honorius (395-423) (empereur d' Occident) àMilan (capitale de l'Empire Romain), puisRavenne (nouvelle capitale de l'Empire Romain), sous la direction du régentStilicon (fils lui-même d'un haut fonctionnairevandale et, d'aprèssaint Jérôme, d'une Romaine). Dès son enfance, il fait partie du groupe des prétoriens, c'est-à-dire des bureaucrates de la préfecture du prétoire[3].
Encore jeune, Aetius est envoyé pendant trois ans, entre405 et408, comme otage à la cour d'Alaric, roi desWisigoths installés commefédérés enMésie, puis à celle deRuga, roi desHuns[4], entre409 et412, où il devient un ami du jeune Attila, neveu de Ruga.
Aetius a su apprécier la supériorité des Huns au combat, il connaissait sans aucun doute leurs points forts mais aussi leurs points faibles. Plus tard, il saura employer des Huns parmi lestroupes auxiliaires pour lutter contre lespeuples germains qui menacent les empires d'Orient et d'Occident.
Dans le même temps, il réussit à se maintenir malgré la victoire à Ravenne du parti « anti-barbares » qui triomphe en éliminant le généralissimeStilicon, régent de l'empire d'Occident ().
Aetius recrute une forte armée hunnique, composée de près de 60 000 soldats et commandée par trois frères : Mundiueh, Uptar et Ruas[5]. Il est battu en 425 par le généralAspar, envoyé par Théodose II pour soutenir Valentinien[6]. Cette défaite met un terme à l'usurpation de Jean (qui est exécuté) ; Valentinien, neveu d'Honorius, déjà couronnéCésar par Théodose II le, devient Auguste le, sous le nom de Valentinien III. Comme il n'a que six ans, sa mère,Galla Placidia, est chargée de la régence et joue un rôle important même après la majorité de Valentinien, jusqu'à sa mort en450. L'armée de Huns recrutée par Aetius est licenciée. Aetius est épargné.
Aetius devient le gendre de Carpillon, ancien comte des domestiques et gouverneur du palais de Jean[7].
En426, Aetius est nommépréfet du prétoire desGaules parGalla Placidia, la mère de l'empereur (et régente étant donné le jeune âge deValentinien III) ; en428 il est nomméMagister militum per Gallias puis, en429, généralissime aux côtés deFlavius Felix. Il vit quelque temps à la cour impériale de Ravenne, la capitale.
Sa rivalité avec le généralBoniface, comme lui sénateur et favori de l'impératrice-régenteGalla Placidia, le conduit à comploter et à obtenir la disgrâce de Boniface. Ce dernier aurait réagi en appelant lesVandales d'Espagne enAfrique (429)[8], sur les terres de Carthage, permettant ainsi la constitution d'un royaume vandale très dangereux pour Rome.
Leur conflit aboutit en432 à une bataille près deRimini et à la mort de Boniface. Galla Placidia donne alors tous les pouvoirs aucomte Sébastien, son gendre, mais en433, Aetius, accompagné des renforts des nouveaux rois du peuplehun,Bleda etAttila, entre en Italie. Galla Placidia n'ayant pu trouver un appui du côté desWisigoths deThéodoric, Sébastien est déposé de son titre degénéralissime au profit d'Aetius. La seconde épouse ducomte Boniface,Pélagie, épouse Aetius ; le comte Sébastien se trouve alors totalement isolé à Ravenne et s'exile àConstantinople.
En432, Aetius devient pour la première foisconsul.
Aetius est le principal dirigeant (mais pas empereur) de l'empire à partir de433, mais il tourne son activité surtout vers la Gaule.
À la fin des années430, lesBurgondes du roiGondicaire, installés depuis411 comme fédérés dans la région deWorms, opèrent un mouvement vers le sud-ouest, atteignant la région deToul, où ils sont battus par Aetius et ses alliés Huns en436. Celui-ci accorde aux vaincus survivants un nouveau traité au terme duquel les Burgondes sont installés enSapaudia, territoire entre lesAlpes et leJura[9].
Il combat aussi les Francs et les Wisigoths. Vers439-440,Avitus, préfet du prétoire des Gaules, négocie la paix avec le roi des WisigothsThéodoric Ier, auquel il donne la province deNovempopulanie. Aetius épouse en troisièmes noces une fille deThéodoric II pour sceller ce traité.
En435,Galla Placidia lui accorde le titre de patrice. En437, il devient pour la seconde fois consul.
Enfin, il chargeGoar, roi desAlains établis dans la région d'Orléans, de surveiller les Armoricains. Malgré une sévère répression, l'Armorique demeure quasiment indépendante.
Aetius est consul pour la troisième fois en446. La demande à l'aide que lui adressent lesBritto-romains reste lettre morte, selonGildas[10].
En 448, il est présent dans la région deTours pour réprimer unebagaude lorsque le chef desFrancs saliens,Clodion, met à sac la ville de Nemetacum (Arras) et envahit la région des plaines desAtrébates (l'actuelArtois). Avec son lieutenantMajorien, il se rend dans le Nord de la Gaule et attaque par surprise l'armée de Clodion près deVicus Helena[11]. Dans l'incapacité de réoccuper militairement les territoires perdus, Aetius renouvelle le statut defédéré àClodion, chef des Francs, et lui confirme l'administration d'un territoire autonome au sein de l'empire, autour de Tournai, que lesFrancs saliens sont chargés de protéger contre les autres barbares[12]. Ceux-ci s'installent dans l'empire, près du Rhin, en l'occurrence près du fisc impérial deTournai. C'est l'origine du futurRoyaume franc deClovis (après la chute de l'Empire Romain d'Occident) .
Les succès d'Aetius, bien que réels, sont fragiles, car ils sont dépendants de son alliance avec les Huns, qui peuvent rompre cette entente à tout moment[13].
Sangiban, roi desAlains, promet de livrer la ville d'Aurelianum (Orléans) à Attila. Aetius (appelé par l'évêque d'OrléansAignan) et ses alliés Théodoric etMérovée arrivent sous les murailles de la ville et surveillent Sangiban, suspect de trahison, et ses troupes. Ils mettent Sangiban au centre de la ligne de bataille contre les Huns, de façon à pouvoir l'empêcher de déserter. Ainsi les Alains essuient le poids principal de l'assaut des Huns, pendant que lesGoths peuvent déborder les Huns sur le flanc, et les mettent finalement en déroute[15],[16].
Ensuite, en juin ou septembre451, l'armée des Huns, renforcés des troupes de divers peuples germaniques soumis à Attila, notamment lesOstrogoths, rencontre une armée dirigée par Aetius, comprenant outre les éléments romains, de nombreux fédérés germaniques (Burgondes, Alains, Sarmates, Francs et Wisigoths) ; le lieu de la bataille dite deschamps Catalauniques est controversé (près deChâlons-en-Champagne ou près deTroyes).
Durant cette bataille, le roi des Wisigoths Théodoric Ier est tué (probablement de la main du roiostrogothValamir), son filsThorismond est proclamé roi sur le champ. Aetius en sort grand vainqueur. Thorismond souhaite poursuivre cette guerre contre les envahisseurs huns qui battent en retraite, mais Aetius l'en dissuade et lui conseille de rentrer àToulouse, sa capitale, pour régler la succession de Théodoric. Thorismond rentre à Toulouse avec ses troupes. Aetius utilise la même raison pour rapidement faire partir le roi des Francs[17].
À la fin de la bataille,« au milieu de son camp, Attila fait dresser un énorme bûcher. Le bruit court qu'il va s'y jeter vivant, plutôt que de subir la honte de la reddition, et peut-être incendier son camp. Mais Aetius ne donne pas l'assaut, et congédie ses alliés. Sans doute n'est-il pas mécontent du problème de succession chez les Wisigoths, potentiellement dangereux. »[18]
La victoire décisive des champs Catalauniques marque la fin des incursions hunniques en Gaule. Attila, ayant subi de lourdes pertes, peut repartir en franchissant le Rhin. Cependant, Aetius l'épargne et a peut-être été soupçonné d'avoir délibérément laissé la liberté à Attila, avec qui il s'était lié d'une certaine amitié lorsqu'il était, dans sa jeunesse, otage d'honneur chez les Huns. Par la suite, Attila saccage des villes enVénétie[18].
Triomphant, rentrant avec un énorme butin, il est assez rapidement victime des jalousies que ses victoires suscitent et des craintes de la famille impériale quant à ses ambitions et sa capacité à devenir empereur romain par coup d'État.
Aetius rédige des mémoires, surtout destinées à son fils Gaudentius Flavius. Il veut laver son honneur et rétablir la vérité, selon lui déformée par ses détracteurs qui voient en lui un traître et un « Hun romanisé ».
Le, il meurt poignardé de la main de l'empereur Valentinien III.
Procope relate que, d'un Romain à qui Valentinien demandait s'il avait bien fait, il reçut cette réponse : « Je ne sais si vous avez bien ou mal fait, mais je sais que de la main gauche vous vous êtes coupé la droite »[20].
Aetius est vengé six mois plus tard par deux membres de sa garde personnelle,Optila et Thraustila, qui assassinent l'empereur Valentinien III.
Jean Barbeyrac,Recueil historique et chronologique des traitez répandus dans les Auteurs Grecs & latins & autres monumens de l'antiquité, dans Jean Rousset de Missy, « Supplément au corps universel diplomatique du droit des gens », 1739.
David Coulon,Aetius, Presses universitaires du Septentrion, Villeneuve d'Ascq, 2000, 350 pages,(ISBN2-284-03464-0). Thèse de doctorat sous la direction de Michel Rouche.
Gilbert Sincyr,L'Épopée d'Aetius, dernier général de la Rome antique, Dualpha, coll. « Vérités pour l'histoire », Coulommiers, 2006, 318 p. [(ISBN2-915461-89-9)].
Pierre Michon,L'Empereur d'Occident, Fata Morgana, 1989 (réédition : Verdier, 2007) : un récit de fiction dont le narrateur est Aetius (et qui reprend aussi l'histoire dePriscus Attale).
Ilbéric de Féride,Aétius, le dernier Romain, Edilivre.com, 2009.
José Gomez-Rivera,Flavius Aetius : Le Dernier Conquérant, publié en 2004 : Aetius, Galla Placidia et Stilicon sont des personnages centraux de ce roman historique.
Michael Curtis Ford,L'épée d'Attila,Thomas Dunne Books, 2005, où apparaissent Aetius, Attila et Théodoric.
Marcel Brion,Attila roi des Huns 434-453, Éditions Texto : Aetius est fidèlement décrit dans son duel face à Attila et Valentinien et ses favoris. Roman historique.
Anonyme,Rozemire ou l'Europe délivrée, 1657 : Les personnages principaux sont en partie inventés et en partie réels (Aetius, Attila, Gaudentius). Roman précieux.
Aetius apparait dans les planches de la BD publiée en 2019 par les éditionsGlénat et lesÉditions du Cerf :Léon le grand, défier Attila (scénario deFrance Richemond, dessin de Stefano Carloni, couleurs de Luca Merli) dont l'action se déroule en452 lorsqu'Attila et sa horde de huns menaçaient de pillerRome.
↑« Vers ce tempsGizéric, roi des Wandales, fut appelé en Afrique par Boniface, qui, étant tombé dans la disgrâce de Valentinien, ne trouva le moyen de se venger de l'empereur qu'au détriment de l'empire. », Jordanès,Histoire des Goths, chap. 33.
↑Sapaudia a donné « Savoie », mais les territoires ne correspondent pas strictement.
↑Jean-ChristopheCassard,« ChapitreI. Ce peuple étrange que la mer apporta… », dansLes Bretons et la mer au Moyen Âge, Presses universitaires de Rennes(ISBN978-2-86847-296-0,lire en ligne),p. 15–71.
« Cette même année448 […]Majorien et Aetius se jetèrent sur les Francs saliens de Clodion qui se trouvaient […] au bord d'une rivière appelée alors l'Elnone, près duvicus Helena, aujourd'hui laScarpe, éloignée de la cité de Tournai d'une soixantaine de kilomètres. […] Aetius rétablit lefoedus antérieur en laissant Tournai à Clodion qui fut probablement reconnu chef de troupes romaines. »