L’Acadie est considérée comme unenation ou un ensemble de communautésnord-américaines où vivent et parlent enfrançais environ 300 000 Acadiens[1]. L'Acadie comprendgrosso modo le nord et l'est de la province canadienne duNouveau-Brunswick, des localités et des régions plus isolées auQuébec, sur l'Île-du-Prince-Édouard et enNouvelle-Écosse, ainsi que le nord-ouest duMaine auxÉtats-Unis. La communauté francophone deTerre-Neuve-et-Labrador, bien qu'ayant une origine différente des Acadiens, est parfois incluse dans cette définition. D'autres définitions, faisant presque toutes allusion à unterritoire, comprennent parfois laLouisiane et ses descendants acadiens — lesCadiens. Lesfrontières de l'Acadie restent floues, l'Acadie étant unenation sans reconnaissance explicite[2].
L'exode rural et l'anglicisation influencent toujours ladémographie de l'Acadie. Le rejet de l'assimilation a d'ailleurs une incidence importante sur lapolitique acadienne. L'Acadie n'a toutefois pas d'organisation politique propre, excepté au niveau local et dans certains domaines comme lasanté et l'éducation, tandis que laSociété nationale de l'Acadie en est la représentante officielle. L'économie de l'Acadie ne repose plus uniquement sur des activités traditionnelles comme lapêche et est en croissance depuis la fin duXXe siècle. Laculture de l'Acadie, fruit d'une longuetradition orale, est mise en valeur depuis les années 1960. L'Université de Moncton, qui a joué un rôle important dans son épanouissement, est également le principal établissement d'enseignement et de recherche. La population dispose en effet d'un vaste réseau de services publics de langue française, quoique peu accessibles dans certaines localités.L'Acadie nouvelle etRadio-Canada Acadie sont les principauxmédias. Les liens entre les différentes régions et la diaspora restent forts et sont favorisés par des événements comme leCongrès mondial acadien et lesJeux de l'Acadie.
Cette vision de l'Acadie est en fait la troisième définition[note 1] proposée par le géographe Adrien Bérubé dans les années 1970 afin d'illustrer le territoire de l'Acadie ainsi que sa perception[12], qui ont évolué au fil de l'Histoire[13] ; les trois autres définitions sont l'Acadie historique – un territoire plus vaste ayant cessé d'exister en 1763 –, l'Acadie généalogique – ayant accueilli les réfugiés de la Déportation des Acadiens à partir de 1755 – ainsi que l'Acadie prospective, la plus petite, constituée des communautés au N.-B. seulement, où se trouve la principale concentration de population[12]. L'existence de ladiaspora acadienne rend nécessaire d'autres définitions : l'Acadie du Nord fait ainsi référence à toutes les localités au Canada et enNouvelle-Angleterre, alors que l'Acadie du Sud fait référence à l'Acadiane, enLouisiane[c 1]. L'Acadie des terres et des forêts est un ensemble de régions éloignées de la mer, au N.-B., auMaine et auQuébec[14]. Par ailleurs, une « Cadie » ou « Petite Cadie » est une ville ou une région québécoise où vivent les Acadiens[15]. En Louisiane, « Cadie » est plutôt un synonyme de l'Acadiane.
Pays du monde comprenant des communautés de l'Acadie généalogique.
Principales régions acadiennes et cadiennes en Amérique du Nord.
Carte de l'Acadie juste avant le début de la guerre de la Conquête.
Carte de l'Acadie en 1754 avant la déportation.
L'Acadie des Maritimes et les régions acadiennes limitrophes (Gaspésie, îles de la Madeleine et Maine).
L'Acadie a unclimat tempéré de typecontinental humide, adouci par la proximité de l'océan Atlantique, ce qui donne des hivers longs, enneigés et pouvant être très froids[8],[21]. Le printemps et l'été sont courts alors que l'automne est long et plaisant, avec toutefois des nuits froides[8]. Deux masses d'air influencent le climat, soit de l'air froid en provenance du Nord-Ouest et de l'air marin chaud et humide en provenance du Sud-Ouest[8]. Le courant chaud duGulf Stream n'influence pas directement le climat mais sa rencontre avec les eaux froides ducourant du Labrador crée de vastes bancs debrume[21]. Deux régions comptent un climat très différent, soit le Nord-Ouest du Nouveau-Brunswick (Madawaska et Ristigouche) avec des hivers plus longs et des étés plus courts, ainsi que le Sud-Ouest de la Nouvelle-Écosse (Par-en-Bas et Baie-Sainte-Marie) avec un climat humide et tempéré avec des hivers pluvieux et peu d'extrêmes de températures[8].
Lesglaces sont présentes dans le golfe du Saint-Laurent. Elles prennent forme à la mi-janvier à l'Île-du-Prince-Édouard et au N.-B., au début février à Pomquet et Chéticamp ainsi qu'entre la mi-février et la mi-mars selon les secteurs à la péninsule de Port-au-Port[28]. Elles atteignent leur étendue maximale au début mars[28] et ladébâcle a lieu entre la mi-mars et la mi-avril selon les secteurs[29].
Le climat favorise la croissance des forêts[21]. Il y a un fort taux d'endémisme dans certaines parties du littoral, notamment à T.-N.-L. ; les espèces endémiques incluent l'aster du Saint-Laurent[34].
Le transport se fait surtout par automobile. L'hiver pouvant être rude, les gens utilisent unchauffe-moteur pour faciliter le démarrage de leur automobile[37]. L'hiver occasionne aussi d'importants coûts dedéneigement et de déglaçage[37]. Toutes les régions sont accessibles par la route, bien qu'il n'y ait pas d'autoroutes partout. La principale route est laTranscanadienne.
Charlottetown, Saint-Jean, Saint-John's, Halifax, Moncton et Clare comptent des réseaux de transport en commun par autobus. Seules certaines régions sont reliées par le réseau d'autobusMaritime Bus(en) ; des taxis longue distance desservent tout de même la Péninsule acadienne et Chéticamp. T.-N.-L. est reliée par traversier au Québec et à la N.-É. L'Île-du-Prince-Édouard est aussi reliée à la N.-É. par traversier. Lepont de la Confédération relie l'Île-du-Prince-Édouard au N.-B. Lachaussée de Canso relie l'île du Cap-Breton au continent. L'Acadie est partiellement desservie par le trainL'Océan, deVIA Rail Canada, reliant Halifax à Montréal. Le chemin de fer dessert aussi les communautés du N.-B. excepté la Péninsule acadienne. Les principaux ports acadiens sontcelui de Belledune etcelui de Dalhousie. La plupart des marchandises transitent toutefois par d'autres ports, notammentport d'Halifax et leport de Saint-Jean. Les principaux aéroports, offrant plusieurs liaisons internationales, sont l'aéroport international Stanfield d'Halifax, l'aéroport international du Grand Moncton et l'aéroport international de Gander. Chaque région dispose toutefois d'aéroports offrant des liaisons régulières.
C’est dans ce territoire qu’a commencé la colonisation du Canada par les Européens ; le secteur était appeléMi'kma'ki par lesMicmacs, Acadie par les Français etNova Scotia par les Britanniques[38].
Le territoire de l'Acadie est exploré vers l'an mil par lesVikings puis dès leXIIIe siècle par les pêcheurs européens attirés par lamorue.
Le nom « Acadie » aurait été utilisé pour la première fois sous la forme « Arcadie » en 1524 par l'explorateur italienGiovanni da Verrazano, au service deFrançoisIer de France[39]. Il désignait lapéninsule de Delmarva, près deWashington aux États-Unis, car la « beauté de ses arbres[a 2] » rappelait à l'explorateur cette région grecque (l'Arcadie) représentant un lieu idyllique pour les poètes[40]. Selon certains historiens, le nom proviendrait plutôt dumicmacalgatig « lieu de campement » ou dumalécite-passamaquoddy[39].
Jacques Cartier rencontre lesMicmacs dès sa première exploration en 1534. Il faut tout de même attendre 1604 pour quePierre Dugua de Mons fonde l'Acadie. Accompagné d'environ 80 personnes dontSamuel de Champlain etJean de Poutrincourt, Dugua de Mons s'établit sur l'île Sainte-Croix, aujourd'hui située auMaine mais 36 personnes meurent duscorbut durant le premier hiver. La colonie est déplacée l'année suivante àPort-Royal au bord de labaie de Fundy, dans l'actuelle Nouvelle-Écosse. Le monopole commercial de De Mons est contesté en 1607 et il ramène tous les colons en France[41]. Aucun ne revient avant 1610. En 1613,Samuel Argall deVirginie s'empare de l'Acadie et chasse la majeure partie de la population. En 1621, le gouvernementanglais change le nom de la colonie en Nouvelle-Écosse et y fait venir les colonsécossais deWilliam Alexander en 1629. En 1631,Charles de la Tour est nommé lieutenant général de l'Acadie par la France et construit des forts au cap Sable et àSaint-Jean. L'Acadie est cédée à la France en 1632 par la signature dutraité de Saint-Germain-en-Laye, qui met aussi fin à la colonisation écossaise. Le gouverneurIsaac de Razilly déplace alors la capitale àLa Hève. En juillet 1632 au côté de Nicolas Denys le Commandeur Razilly quitte Auray (Bretagne) avec 3 missionnaires et 300 Hommes d’Élite dont les origines sont inconnues. Razilly s'intéresse plus au commerce maritime qu'à l'agriculture, ce qui explique ses choix d'établissements. Des missionnaires français participaient à la colonisation depuis 1613 et quelques églises de bois sont construites à partir de 1680. Après la mort de Razilly, survenue en 1636,Charles de Menou d'Aulnay de Charnizay ramène la capitale à Port-Royal et déclenche uneguerre civile contre La Tour, les deux se disputant la succession. D'Aulnay considère que l'avenir de l'Acadie passe par la production agricole et il parvient à faire venir quelques familles avant sa mort en 1650, rendant la colonie plus autonome. Le peuplement de l'Acadie se fait notamment à partir de 1636 sous le mandat des gouverneurs Razilly et de Menou d'Aulnay-Charnizay qui font appel à des colons recrutés de diverses régions duPoitou (Vienne,(Vendée,Deux-Sèvres), mais aussi d'Anjou, deSaintonge, d'Aunis, d'Île-de-France, deBourgogne ou duPays basque… mais leurs origines restent très difficiles à préciser puisque pour les migrants acadiens il y a peu de renseignements les concernant (lacunes : lieux de provenance, noms des parents) qui permettraient de confirmer leurs origines. EnTouraine ont été retrouvées les origines de Nicolas Denys né en 1603 à Tours ou en Anjou, celles de Guillaume Trahan et Pierre Martin originaires de Bourgueil et Montreuil-Bellay, entre autres.
La France et l'Angleterre entrent à nouveau en guerre et l'Acadie est conquise par les Anglais en 1654, avant d'être cédée à la France en 1667 par letraité de Bréda. L'Acadie est à nouveau conquise parWilliam Phips en 1690 puis retournée encore une fois à la France en 1697 par letraité de Ryswick. À partir de 1670, des habitants de Port-Royal fondent de nouveaux villages, dont les principaux sontBeaubassin etGrand-Pré[a 3].
L'Acadie, renommée Nouvelle-Écosse, est cédée au Royaume-Uni en 1713 par letraité d'Utrecht[42].
Ce dernier, assoupli par une lettre de la reineAnne, permet aux Acadiens de quitter la Nouvelle-Écosse sans conditions[43]. Au même moment, la France tente de les attirer à l'île Royale, qui a remplacéPlaisance comme centre de commerce français dans le golfe du Saint-Laurent, ainsi qu'à l'île Saint-Jean, qui doit servir de colonie agricole[43]. La plupart des Acadiens décident tout de même de rester sur place, en raison des conditions de vie difficiles de ces deux îles[43]. Par contre, les Anglais sont encore peu nombreux en Nouvelle-Écosse et tentent d'empêcher les Acadiens de la quitter, car il n'y a pas encore d'agriculteurs anglais et ils craignent que les relations commerciales des Acadiens contribuent à la puissance de l'île Royale[44]. En outre, les Français changent rapidement de stratégie, en supposant que les Acadiens empêcheraient une colonisation britannique s'ils restent en Nouvelle-Écosse[44].
Les Français construisent laforteresse de Louisbourg sur l'île Royale à partir de 1720, ce qui assoit leur contrôle sur la région, au même moment où une importante immigration deFrance et deTerre-Neuve grossit la population de l'île[45]. Lors de laguerre de Succession d'Autriche, les Français tentent sans succès de reprendre la Nouvelle-Écosse[46]. Les Britanniques prennent Louisbourg en 1745[46]. Une importante expédition militaire françaiseExpédition du duc d'Anville tente de reprendre la Nouvelle-Écosse en 1746, mais une tempête tue la moitié des hommes et disperse les bateaux[47]. Une expédition terrestre reprend tout de même lesMines en 1746, mais est rapidement expulsée par les Britanniques[47].
En 1748, letraité d'Aix-la-Chapelle redonne l'île Saint-Jean et l'île Royale à la France, ce que les Britanniques considèrent comme un affront[48]. Ils décident alors de changer de stratégie et d'en finir avec la présence française, y compris acadienne[48]. C'est ainsi que 2 000 colons fondentHalifax en1749[48]. En 1749, les Acadiens doivent prêter serment d'allégeance au roi d'Angleterre. Leur refus entrainent des persécutions, puisqu'en 1755, le Conseil de Nova Scotia décide de retirer leurs droites sur leurs terres[9].
Les Acadiens conservent depuis un certain temps une attitude neutre et leur exode se poursuit vers les régions limitrophes de la Nouvelle-France. Les Britanniques tentent encore de leur faire prêter serment d'allégeance[49] et, en 1761, les Français déclarent rebelle tout Acadien refusant de prêter allégeance au roi de France[50]. Entre 1751 et 1754, les deux puissances construisent plusieurs forts en préparation de la guerre[50].
En 1755, le gouverneur de la Nouvelle-Écosse,Charles Lawrence, fait prendre lefort Beauséjour aux mains des Français et commence la déportation des Acadiens[50]. Jusqu'en 1763, les territoires limitrophes de la Nouvelle-Écosse sont annexés et les Acadiens déportés vers laNouvelle-Angleterre[51]. De nombreux autres réussissent à s'enfuir vers leCanada ou l'île Saint-Jean (actuelleÎle-du-Prince-Édouard) ou encore se cachent chez lesAmérindiens[51]. Plusieurs colonies refusent ces prisonniers, qui sont ensuite déportés vers l'Angleterre ou ramenés en Nouvelle-Écosse[52]. L'île Saint-Jean est presque vidée de sa population en 1758. Les deux tiers sont déportés en France[53] alors que les autres se réfugient à larivière Ristigouche ou au Québec[54]. Les réfugiés d'Angleterre sont expatriés enFrance en 1763[55]. Des Acadiens se réfugient àSaint-Pierre-et-Miquelon, mais sont presque tous à nouveau déportés en 1778[56]. Plus de la moitié des Acadiens meurent durant cette période[52].
Après la signature duTraité de Paris en 1763, les Acadiens se déplacent vers les Antilles, en France, en Louisiane et au Québec, mais surtout en Nouvelle-Écosse[57]. 12 000 immigrants de laNouvelle-Angleterre se sont déjà établis dans les anciens villages acadiens et la loi interdit aux Acadiens de s'établir en communautés trop nombreuses[57]. Ils ont alors la possibilité de s'établir sur certaines terres qui leur sont réservées parmi les anglophones ou plutôt de fonder de nouveaux villages dans les recoins éloignés de l'ancienne l'Acadie, soit l'île du Cap-Breton, l'Î.-P.-É. ou le territoire qui deviendra le N.-B. en 1784, ce que la plupart font[57]. Parmi tous les anciens villages du cœur de l'Acadie, les seuls n'étant pas réservés aux anglophones sontPobomcoup et la rive gauche desTrois-Rivières[57] ainsi queBeaubassin, bien que ce dernier accueille très peu d'Acadiens. Les exilés s'établissent au fur et à mesure àHalifax et au bord dudétroit de Canso puis dès 1767 à laBaie-Saint-Marie, àTousquet et à Pobomcoup et, à partir de 1780, àChéticamp etMargaree[57].
Près de la moitié des Acadiens de France se rendent enLouisiane en 1785, pour des raisons apparemment fortuites[53].
Un groupe d'Acadiens deSaint-Malo s'établit auxîles Malouines en 1764. La plupart quittent l'archipel dans les années suivantes mais il semble que quelques familles aient laissé des descendants sur ces îles ainsi qu'àMontevideo, enUruguay[58].
Au début duXIXe siècle, les Acadiens tentent surtout de combler leurs besoins élémentaires[a 3]. Toutes leurs ambitions et leurs activités sont ainsi liées à leur survie[a 3]. Aucune institution n'est proprement acadienne. L'Église est la seule institution française et le clergé catholique vient du Québec ou de France[a 3]. Seuls quelques villages possèdent une école et l'éducation est dispensée par de rares enseignants, pour la plupart des maîtres itinérants[a 3]. Il n'y a pas de journal francophone, ni même demédecins ni d'avocats ou declasse moyenne[a 3].
Les Acadiens se reconnaissent dans l'intrigue du poèmeÉvangéline (1847), de l'AméricainHenry Longfellow, alors queLa France aux colonies : Acadiens et Canadiens (1859), deFrançois-Edme Rameau de Saint-Père, un Français, leur permet de découvrir leur histoire dans leur langue[61].
L'agriculture de subsistance est toujours la norme et les techniques évoluent lentement mais certaines régions parviennent à diversifier leurs cultures et même exporter despatates[66]. Lechemin de fer se développe à partir de 1850 ; il fait surtout la richesse des anglophones mais représente tout de même une bonne opportunité pour les Acadiens[67]. DesAméricains relancent l'industrie despêches au moment où les terres agricoles viennent à manquer[68]. Certains Acadiens ouvrent d'ailleurs de petites usines et même des commerces dès 1856[69]. L'exploitation forestière devient florissante dans laPéninsule acadienne, auMadawaska ainsi que dansClare, où elle profite de laconstruction navale[70] ; la concession de terres à une compagnie de chemin de fer près deSaint-Léonard en 1878 entrave toutefois l'expansion du Madawaska[67].
François-Xavier Lafrance ouvre en 1854 àMemramcook le premier établissement d'enseignement supérieur de langue française, le Séminaire Saint-Thomas[a 3]. Il doit fermer ses portes en 1862 mais il est rouvert deux ans plus tard par des prêtres de la Congrégation de Sainte-Croix et devient leCollège Saint-Joseph[a 3]. Le premier journal francophone,Le Moniteur acadien, est fondé en 1867 àShédiac[a 3]. D'autres journaux suivront, dontL'Impartial, fondé en1893 àTignish etL'Évangéline, qui fut le plus durable, publié de 1887 à 1982[a 3]. Les communautés religieuses féminines qui s'établissent en Acadie y jouent un rôle essentiel dans l'éducation et les soins de santé[a 3]. Les sœurs de la Congrégation de Notre-Dame, deMontréal, ouvrent des pensionnats à l'Île-du-Prince-Édouard[a 3]. En 1868, les Sœurs de Saint-Joseph prennent la direction dulazaret de Tracadie et s'établissent aussi àSaint-Basile où leur pensionnat deviendra plus tard leCollège Maillet[a 3].
Uneclasse moyenne se forme à partir des années 1860[a 3]. Bien que leCollège Saint-Joseph et leCollège Sainte-Anne contribuent à la formation d'une élite instruite, l'Acadie compte au moins quatre catégories d'élite[a 3]. Les deux plus en vue sont leclergé et les membres desprofessions libérales, soit les avocats, les médecins et les notaires[a 3]. De plus, même si les agriculteurs et les commerçants acadiens ne bénéficient pas d'un capital considérable comme leurs homologues anglophones, bon nombre d'entre eux réussissent tout de même à se distinguer[a 3].
Lesconventions nationales acadiennes sont tenues de manière intermittentes à partir de 1881 dans différentes localités[a 3]. Elles sont des tribunes publiques qui permettent à la population de parvenir à un consensus sur des projets importants comme la promotion du développement agricole, l'éducation en français et la mise en place d'un clergé catholique acadien[a 3].
Au moins trois communautés religieuses sont constituées entre 1881 et 1925[a 3]. Les couvents dirigés par ces religieuses contribuent de façon indéniable à améliorer l'éducation des Acadiennes et à rehausser la vie culturelle de la collectivité[a 3]. Ces communautés fondent également les premiers collèges pour jeunes filles en Acadie[a 3].
À cette époque, quelques femmes parviennent, par la voie des journaux, à exprimer leurs opinions sur des questions importantes[a 3]. Elles abordent aussi les droits de la femme, notamment le droit de vote et l'accès à l'éducation[a 3].
La période nationaliste est caractérisée par une importante évolution économique, représentée par l'intégration complète des Acadiens dans le processus d'industrialisation et d'urbanisation canadien[a 3]. Bien que l'exode rural soit moins prononcé en Acadie qu'ailleurs au Canada, nombreux sont ceux qui s'établissent àMoncton, àYarmouth, àAmherst et dans les villes de laNouvelle-Angleterre, où les hommes travaillent dans des usines et les femmes dans des filatures[a 3].
Certains membres de l'élite acadienne se méfient d'une telle évolution, qui risquerait selon eux une assimilation à la majorité anglo-saxonne[a 3]. De 1880 à 1940, des mouvements de colonisation cherchent à freiner l'exode de la population, à détourner les Acadiens de l'industrie de la pêche, qui appartient en majeure partie à des compagnies étrangères, et à aider les familles à faire face aux conditions difficiles de laGrande Dépression. Lemouvement coopératif, en particulier lemouvement d'Antigonish des années 1930, permet enfin aux pêcheurs exploités pendant des générations de travailler de façon autonome[a 3].
Certaines différences régionales se manifestent aussi. La communauté acadienne du N.-B., plus importante et plus sûre d'elle-même, prend l'initiative de parler au nom de tous les Acadiens[a 3].
Durant les années 1950, les Acadiens deviennent de plus en plus présents dans l'économie, la politique et la culture des provinces maritimes[a 3]. La préservation des valeurs et de la culture à domicile facilite la mise sur pied d'un système d'éducation francophone, en particulier au Nouveau-Brunswick[a 3]. La vitalité de la culture acadienne ainsi que son originalité face aux cultures canadiennes anglaises et américaines réduit les effets de l'assimilation et aident les Acadiens à être reconnus en tant que minorité dans les Maritimes[a 3].
Durant les années 1960, lemouvement souverainiste du Québec et l'opposition au bilinguisme dans l'Ouest ont un impact partout au Canada[a 3]. Les Acadiens sont alors divisés mais surtout ignorés entre les deux camps. En février 1968, les étudiants de l'Université de Moncton manifestent pour instaurer le bilinguisme dans la ville et dénoncer le mépris des anglophones à leur égard. Ils se heurteront à l'indifférence du maire et leur entreprise fera long feu. Cet épisode de l'histoire acadienne est relaté dans le documentaireL'Acadie, l'Acadie?!? deMichel Brault etPierre Perrault, qui feront le voyage de Montréal pour filmer les événements et interroger les protagonistes au sujet de la condition acadienne. On y constate un militantisme vigoureux chez certains, mais un défaitisme non dissimulé chez d'autres, notamment chez des vieux qui ont été élevés dans la soumission par l'Église catholique et chez des jeunes qui déclarent qu'ils envisagent de déménager au Québec. La survie de la culture acadienne n'est pas assurée malgré les victoires remportées au fil du temps[a 3]. Néanmoins, ils peuvent faire des progrès en vue de préserver leurs droits[a 3].
Dans les années 1970, la situation économique de la péninsule acadienne.est particulièrement difficile. Le taux de chômage atteint parfois 19,5 %. Certaines communautés comptent jusqu’à 30 % de personnes bénéficiaires des minima sociaux. En outre, pour les personnes disposant d'un emploi, les conditions de travail sont souvent mauvaises et source de blessures, tandis que les salaires sont généralement assez bas. C’est ce qui conduit les employés de l’usine Cirtex à déclencher une grève qui dure 13 mois[71].
Ces remous mènent à la fondation duParti acadien, de la revue de gaucheL’acayen, de conseils régionaux d’aménagement et du Front de libération de l'Acadie. le Parti acadien, qui comporte une importante tendancemarxiste, entend dans un premier temps défendre la décolonisation des francophones des Maritimes, mais s'oppose également à la politique d’aménagement territorial du gouvernement, qui consiste à dégarnir les régions au profit des villes afin de simplifier l’administration des services. Les militants marxistes favorisent plutôt le développement régional par l’ouverture de jardins communautaires, de comptoirs alimentaires et de coopératives. Progressivement, la lutte des classes prend le pas sur celui de la décolonisation ; la question de l’affirmation acadienne devient secondaire à la lutte globale contre le capitalisme. Ces militants sont notamment très impliqués lors de la crise du hareng, en 1979, marquée par l’opposition des petits pêcheurs côtiers aux pêcheurs hauturiers, ils font des grèves tournantes, bloquant l’accès aux quais[71].
Si plusieurs crises récurrentes secouent les années 1980 – secteurs de la pêche, de l'agriculture et de l'industrie forestière – et que le chômage et les disparités régionales sont toujours importants, les industries desmines et de latourbe prospèrent alors que l'économie de l'Î.-P.-É. se diversifie[77]. Le gouvernement fédéral décentralise certaines activités et les Acadiens y sont favorisés à l'embauche par leurbilinguisme[78]. Le Conseil économique du Nouveau-Brunswick est mis sur pied en 1979 et l'Agence de promotion économique du Canada atlantique est fondée en 1988 ; lacoopération demeure importante dans l'économie mais de plus en plus d'Acadiens entrent dans la fonction publique ou les professions libérales[77]. Letaux d'emploi est plus que triplé entre 1961 et 1986 – de 17 % à 59 % – alors que letaux de chômage passe de 20 % en 1986 à 10-14 % en 1999[78]. Lerevenu, composé à 22 % de transferts fédéraux, correspond à 66 % de la moyenne canadienne en 1986 mais l'économie de l'Acadie n'est désormais plus en retard sur celle des régions anglophones[78].
Langue maternelle dans les provinces des Maritimes.
Majorité francophone, moins de 33 % d'anglophones
Majorité francophone, plus de 33 % d'anglophones
Majorité anglophone, plus de 33 % de francophones
Majorité anglophone, moins de 33 % de francophones
Données non disponibles
En 2001, il y avait 276 355 francophones dans lesprovinces maritimes[a 4], pour la plupart Acadiens[6]. En comptant les personnes anglicisées, il y aurait en tout 500 000 Acadiens dans les provinces de l'Atlantique[84]. Pourtant, selon le recensement 2001 deStatistique Canada, ce pays comptait 96 145 Acadiens en 2001[b 1]. Ce nombre est à prendre en considération, car de nombreux Acadiens s'identifient par exemple comme Canadiens ou Français dans le recensement. De plus, l'option Acadien ne figurait pas à l'origine sur le recensement, bien que le nombre de personnes s'identifiant ainsi est en forte hausse depuis1986[85]. En effet, même au Québec des nombres surprenants de québécois indiquent leur origine ethnique comme « canadienne » au recensement[86].
Les Acadiens représentent ainsi 15,6 % de la population totale des provinces de l'Atlantique, comparativement à une proportion de 22,6 % de francophones au Canada[a 4]. Les francophones représentent 32,9 % de la population au Nouveau-Brunswick, 4,2 % à l'Île-du-Prince-Édouard et 3,8 % en Nouvelle-Écosse[a 4].
Le fort taux d'Acadiens au Nouveau-Brunswick s'explique par lacroissance démographique et l'indice de continuité linguistique, qui est le rapport entre le nombre de personnes utilisant le français et le nombre de personnes ayant le français comme langue maternelle[a 4]. Le nombre de francophones a augmenté de 12,4 % au Nouveau-Brunswick entre1961 et2001, alors qu'il diminuait de 14 % en Nouvelle-Écosse et de 28,8 % à l'Île-du-Prince-Édouard[a 4].
L'indice de continuité linguistique varie fortement d'une région à l'autre. Il est ainsi de 92 % au N.-B., 58,2 % en Nouvelle-Écosse et 49,8 % à l'Île-du-Prince-Édouard[a 4]. Dans des régions comme leMadawaska canadien et laPéninsule acadienne, où la proportion de francophones dépasse 95 %, le taux d'assimilation est inférieur à 1 %, parfois même négatif, c'est-à-dire que des personnes de langue maternelle anglaise ou autre parlent français à la maison[a 4]. Par contre, des régions ayant un faible taux de francophones comme l'Île-du-Prince-Édouard (9 %) ont un fort taux d'assimilation, 68 % dans ce cas[a 4].
En 2006, le français est utilisé régulièrement ou toujours par 46,9 % des travailleurs des communautés de l'Île-du-Prince-Édouard[87], par 90,5 % au Nouveau-Brunswick[88], par 41,7 % en Nouvelle-Écosse[89] et par 31 % à Terre-Neuve-et-Labrador[80].
Plusieurs communautés acadiennes restent tout de même minoritaires. Le cas le plus connu estMoncton, où les francophones ne représentent que 33 % de la population[b 2].
De plus, le poids des francophones baisse de manière constante dans les Maritimes, y compris auNouveau-Brunswick. En se basant sur le critère de la langue maternelle, leur poids est ainsi passé de 35,9 % de la population de cette province en 1951, à 32,4 % à 2016 (et même à 31,8 % selon le critère de la première langue officielle parlée, qui inclut également les allophones utilisant le français en premier). Selon l'expert Ilyes Zouari, spécialiste du monde francophone, les Acadiens duNouveau-Brunswick devraient avoir unindice synthétique de fécondité (ISF) de 2,7 enfants par femme, soit environ le double du niveau actuel (un des plus faibles au monde), afin de pouvoir maintenir leur poids au niveau provincial à long terme. Et ce, puisqu'il convient de tenir compte d'une immigration désormais importante et très majoritairement anglophone (à plus de 80 %, l'immigration étant gérée par un gouvernement principalement anglophone), du taux d'assimilation des Acadiens à chaque génération (environ 20 %, et particulièrement dans le sud-est) et du taux d'assimilation des immigrés francophones (censés pourtant renforcer la population de langue française de la province). À défaut d'atteindre ce niveau de fécondité, la création d'uneprovince acadienne, regroupant les territoires acadiens du Nouveau-Brunswick, serait alors inévitable selon ce même expert[90],[91].
Tout comme les Acadiens sont minoritaires dans certaines localités, l'Acadie compte aussi sesminorités. LesMalécites et lesMicmacs sont d'ailleurs implantés sur le territoire depuis environ l'an-500[92], soit deux millénaires avant la fondation même de l'Acadie. Les premières nations deBouctouche,Burnt Church,Eel River Bar,Indian Island,Madawaska etPabineau sont enclavées en territoire acadien. Il y a également des minorités malécites ou micmacques dans des localités acadiennes et lesautochtones, d'une manière générale, sont les plus nombreux dansArgyle (14,8 %)[b 3] et dans laparoisse de Saint-Louis (10,5 %)[b 4]. Les autochtones sont pourtant moins nombreux dans les Maritimes que dans le reste du pays[93].
De nombreuxCanadiens d'autres origines ainsi que des immigrants sont intégrés dans la société acadienne, même si la proportion d'immigrants reste relativement faible, ceux-ci ayant préféré s'établir dans les grandes villes canadiennes et les provinces plus prospères[93]. D'une manière générale, la N.-É. a la population la plus diverse[93]. La plus grande proportion d'immigrants se retrouve dans le comté deMadawaska, en particulier dans laparoisse de Clair (22 %)[b 5] et àLac-Baker (18,5 %)[b 6]. Les communautés accueillant le plus deminorités visibles sont aussi concentrées dans le Madawaska, plus précisément dans laparoisse de Baker-Brook (5,7 %)[b 7], àSaint-Léonard (4,3 %), àSaint-André (5,0 %) et dans laparoisse de Saint-Quentin (3,2 %)[b 8]. Certaines communautés sont surtout présentes dans une localité en particulier, comme lesLibanais àKedgwick[94]. Les francophones ne sont pas tous des Acadiens, et il y a notamment environ 13 000Québécois[c 2] et 1 500Français[95] dans les provinces de l'Atlantique. Très peu nombreux, lesJuifs forment toutefois une communauté dynamique[93]. Plusieurs personnalités issues des minorités se sont illustrés dans la société acadienne, dont le cinéaste libanaisRobert Awad, l'écrivain haïtienGérard Étienne et l'artiste multidisciplinaire belgeIvan Vanhecke.
Il existe plusieursdialectes acadiens. Lefrançais acadien est le principal dialecte dufrançais, parlé dans toute l'Acadie, sauf au Madawaska, où le français de la vallée, ou brayon, est beaucoup plus influencé par lefrançais québécois. Par ailleurs, lesAcadiens du Québec parlent surtout lefrançais québécois, bien que le français acadien soit très courant dans certaines régions comme les îles de la Madeleine. Lechiac, parlé aussi dans la région deMoncton, est parfois décrit comme un dialecte du français fortement influencé par l'anglais, parfois comme une langue à part entière. Les populationsanglicisées parlent généralement l'anglais des Maritimes.
Il n'existe pas d'organisme de normalisation en Acadie mais l'Office québécois de la langue française y joue une influence indéniable, particulièrement dans le langage technique. Certains organismes provinciaux jouent par contre un rôle restreint, par exemple dans la toponymie. Plusieurs auteurs se sont penchés sur l'étude du français acadien.Le glossaire acadien a été publié parPascal Poirier en 1925 et réédité en 1993.Yves Cormier a présenté sonDictionnaire du français acadien en 2009, dans la même année, Éphrem Boudreau présenta aussi sonGlossaire du vieux parler acadien. Ces dictionnaires se concentrent uniquement sur lesacadianismes. Les principaux dictionnaires français en incluent par contre quelques-uns, mais il existe de nombreux oublis notables, par exemple de mots n'ayant pas d'équivalents dans la francophonie, ainsi que certaines erreurs.
L'Université de Moncton possède aussi un campus àEdmundston, desservant ainsi le Maine et le Québec, ainsi qu'un campus àShippagan. Cette université compte neuf facultés, dont une dedroit, offre 180 programmes du premier autroisième cycle et compte 37 centres, chaires et instituts[102]. Le Centre de formation médicale du Nouveau-Brunswick y offre un programme complet demédecine en partenariat avec l'Université de Sherbrooke[103]. L'université compte 6 219 étudiants et 826 employés dont 390 professeurs en 2009[102] alors que son budget annuel est de 103 millions$[102].
Le Canada compte la plus grande proportion de personnes entre 18 et 35 ans possédant un diplôme post-secondaire, et les provinces de l'Atlantique ont les plus grands budgetsper capita dédiées à l'éducation parmi les pays duG8[104]. La situation diffère pourtant grandement chez les Acadiens. À l'Î.-P.-É., ceux-ci restent peu éduqués, 34 % n'ayant pas de diplôme secondaire ; le taux de diplômés collégiaux (21,5 %) est par contre dans la moyenne canadienne alors que le taux d'universitaires (13 %) s'approche de la moyenne provinciale[87]. Au N.-B., 37 % des Acadiens n'ont pas leur diplôme secondaire, comparativement à la moyenne provinciale de 29 %, alors que le taux d'universitaires à Moncton est comparable à Montréal (20,4 %) ; la situation serait due à l'économie basée sur les ressources naturelles de la plupart des régions[88]. En N.-É., les Acadiens sont de plus en plus éduqués (70 % de diplômés), dépassant la moyenne des francophones canadiens, mais restent toujours sous le niveau provincial (73 % de diplômés), une situation liée aussi à la situation économique[89]. Les francophones terre-neuviens, toutes origines confondues, sont un plus éduqués que la majorité anglophone et 21 % sont diplômés de l'université, comparativement à 11 % chez les anglophones et à 16 % chez les francophones canadiens[80]. En 2006, selon une étude de l'Institut de politique d'enseignement, les universités néo-écossaises étaient considérées les moins abordables en Amérique du Nord, alors que celles du N.-B. arrivaient en57e rang sur 60[105]. De plus, le nombre d'inscription est à la baisse dans toutes les universités de l'Atlantique, excepté Sainte-Anne, une situation qui ne s'expliquerait pas uniquement par le déclin démographique, selon Mireille Duguay[106].
Un problème important à l'heure actuelle est l'accès aux services sur l'ensemble du territoire, en particulier la santé, qui cause de nombreux débats au N.-B. La centralisation et la rationalisation de ces services causent une plus grandes spécialisation des institutions, ce qui à son tour réduit le nombre d'emplois et accentue la différence entre les villes et la campagne[a 5].
La santé et les services sociaux sont des compétences principalement provinciales.
À l'Î.-P.-É., les services de santé ne sont pas répartis également et il y a un seul centre de santé bilingue, dans larégion Évangéline[87]. Au N.-B., depuis la réforme de 2008, c'est un organisme bilingue, le réseau de santé Vitalité, qui gère, en région acadienne, 1 197 lits répartis dans 73 établissements dont 11 hôpitaux, 7600 employés dont 470 médecins et un budget de près de 600 millions $[107]. Cette réforme est jugée inéquitable par le comité Égalité Santé, qui la conteste avec le soutien de la SANB[88]. La N.-É. compte plusieurs centres de santé bilingues[87]. Le projet d'une clinique bilingue à T.-N.-L. est menacé notamment par l'interprétation du nombre de francophones[108]. Afin de faciliter l'accès aux services, le Réseau des services de santé en français de l'Î.-P.-É., fondé en 2002, et les gouvernements de N.-É. et de T.-N.-L. tiennent à jour un répertoire des professionnels bilingues[87],[89],[80].
Le sport est pratiqué en Acadie depuis sa fondation mais est à l'origine peu présent dans la culture à cause des conditions de vie difficiles[112]. Les collèges fondés vers la fin duXIXe jouent un rôle dans l'implantation du sport dans la vie quotidienne[113]. À partir des années 1960, de nouvelles écoles sont construites avec des gymnases et d'autres installations sportives[113]. La fondation d'une école normale francophone àMoncton, puis l'ouverture du Département d'éducation physique de l'Université de Moncton permet la formation des enseignants en français[113]. Depuis1979, lesJeux de l'Acadie sont l'occasion, pour les athlètes en herbe de toute l'Acadie, de se mesurer les uns aux autres[113].
Les Acadiens sont à l'origine tolérants envers les autres religions et confessions car certains des fondateurs sontprotestants[114]. Leclergé n'est d'ailleurs pas très présent et s'intéresse surtout à l'évangélisation desMicmacs ; en fait, la pratique de la religion est surtout une affaire familiale à cause de la pénurie de prêtres[115]. Les Acadiens conservent laliberté de religion après la signature dutraité d'Utrecht en 1713[115]. À la suite de ladéportation des Acadiens, les relations deviennent tendues entre la population et les prêtres et évêques, qui sont désormais majoritairementÉcossais ouIrlandais, et anglophones[115]. Des prêtres acadiens sont formés auCollège Saint-Joseph dès1865 mais ceux-ci sont envoyés principalement dans des régions anglophones[115]. Un débat pour l'acadianisation du clergé commence dans les années 1880 et un premier évêque,Alfred-Édouard Leblanc, est nommé en1913[115]>. Un mouvement s'organise ensuite pour demander au pape une meilleure représentation dans le clergé, malgré l'opposition des anglophones, avec succès[115]. La demande de créer un archidiocèse à Moncton cause encore plus d'opposition mais est aussi acceptée en 1936[116]. Lediocèse d'Edmundston en est détaché en 1944 alors que lediocèse de Yarmouth est séparé de celui d'Halifax en 1953[116]. La foi catholique reste liée à l'acadianité jusque dans les années 1940, où une majorité des membres de l'élite sont soit des religieux, soit ont été formés dans des collèges catholiques[116]. Les communautés religieuses occupent une place fondamentale dans les secteurs de l'éducation et de la santé jusqu'aux années 1970[116]. Comme dans plusieurs régions du monde, la pratique religieuse baisse ensuite alors que le nombre de prêtres est en baisse et que certaines paroisses ne sont même plus desservies[116]. La foi catholique reste toutefois importante pour une bonne partie de la population mais son lien avec l'acadianité devrait être différent dans l'avenir selon l'historienne Naomi Griffiths[116].
L'interprétation du catholicisme en Acadie accorde une place importante aux femmes, une situation démontrée par le grand nombre d'églises dédiées à une sainte, aux cathédrales (Cathédrale Notre-Dame-de-l'Assomption de Moncton) qui sont dédiées àMarie ou àSainte Anne et au fait que deux communautés religieuses féminines ont été fondées en Acadie, soit la Congrégation des Filles de Marie de l'Assomption et la Congrégation des Religieuses de Notre-Dame du Sacré-Cœur, contrairement aux communautés masculines, qui proviennent toutes du Québec ou de France[116]. Le culte de Sainte-Anne est en fait très important et l'imposition de Marie de l'Assomption comme sainte-patronne n'y a rien changé. La mer occupe aussi une place importante dans la religion, notamment par la célébration toujours très populaire du dimanche des pêcheurs et de labénédiction des bateaux.
Depuis 1961, la situation économique de l'Acadie s'est améliorée face à la moyenne canadienne. Plusieurs facteurs expliquent cette évolution, dont l'augmentation de l'accès à l'éducation post-secondaire, l'augmentation de la participation au marché du travail et finalement le dynamisme entrepreneurial. L'économie traditionnelle acadienne était plutôtsocialiste et encourageait lacoopération, alors que l'individualisme qui accompagne l'urbanisation et lamodernisation a orienté les entrepreneurs vers lecapitalisme[a 5]. Ce dynamisme mena au développement d'un réseau d'organisations économique, qui augmentent l'implication de la population dans les décisions du gouvernement[a 5]. La montée de l'état-providence a joué un rôle majeur: les transferts de revenus représentent 20 % du revenu total chez les Acadiens, contre 16 % chez les anglophones, ce qui permet surtout de soutenir le secteur des services[a 5]. Le développement des services publics permet la création de nombreux emplois bien rémunérés dans toutes les régions. Le soutien du développement de l'entrepreneuriat, par l'entremise de programmes comme l'APECA, permet la création d'emplois[a 5].
Ces progrès s’accompagnent néanmoins de la persistance d’un important écart de développement. Cela s’explique, entre autres, par le fait que letaux d’activité y est inférieur à la moyenne canadienne et letaux de chômage supérieur[a 5]. L’activité économique est très saisonnière dans plusieurs régions, en partie parce que le secteur manufacturier est axé sur la transformation des ressources naturelles[a 5]. L'emploi demeure donc la principale préoccupation, causant une forte opposition à la réforme de certains programmes gouvernementaux, en particulier dans le secteur de la pêche, où l'assurance-emploi permet aux travailleurs de subvenir à leurs besoins durant les périodes d'inactivité[a 5]. Certains projets de diversification ont tout de même suscité un vaste mouvement d’opposition, comme la construction d’unincinérateur de sols contaminés àBelledune[a 5].
L'administration publique, la santé et l'éducation constituent les principaux secteurs d'emplois à l'Î.-P.-É. et en N.-É., où ils regroupent respectivement 31,3 % et 36 % des emplois, notamment auministère des Anciens combattants àCharlottetown[87],[89]. La fabrication est le domaine le plus important au Nouveau-Brunswick[88] et le second plus important à l'Île-du-Prince-Édouard[87] et en Nouvelle-Écosse[89]. L'économie terre-neuvienne est basée avant tout sur les matières premières. Pourtant, les communautés francophones ont uneéconomie postindustrielle, où les emplois dans le commerce et les services jouent un rôle important[80]. Au N.-B. et en N.-É., les Acadiens sont plus présents que les anglophones dans les secteurs primaires et secondaires[88],[89].
Les entrepreneurs représentent, en 2006, 8,4 % des travailleurs à l'Île-du-Prince-Édouard[87], 7,7 % au Nouveau-Brunswick[88], 8,7 % en Nouvelle-Écosse[89] et 4,9 % à Terre-Neuve-et-Labrador[80].
La vente et les services constitue la principale occupation des Acadiens, soit 21,0 % des travailleurs à l'I.-P.-E[87]., 24,0 % au N.-B[88]., 23,5 % en N.-É[89]. et 25,5 % à T.-N.-L[80]. Les domaines des affaires, de la finance et de l'administration gagnent en importance en Nouveau-Brunswick[89] ; les Acadiens du N.-B. y sont quant à eux moins présents que les anglophones[88]. Au N.-B. également, le secteur de la vente et des services est plus faible que la moyenne provinciale[88].
Lapêche est la base de l'économie des provinces de l'Atlantique avec des revenus annuels de 3 milliards $ et représente le tiers de ses exportations[104]. Le plus grand port de pêche estEscuminac, avec 500 bateaux tandis que leport de Shippagan est le plus rentable. Depuis l'effondrement des stocks demorue et lemoratoire de 1992, les principales espèces pêchées sont lecrabe des neiges et lehomard ; le principal marché du crabe est leJapon[117]. La ressource de crabe est très étudiée mais le contrôle des prises de homard est plus difficile et la ressource pourrait s'épuiser ; il y a dix fois plus de pêcheurs de homard que de crabe mais les prises sont du même ordre[117]. La transformation du poisson et des fruits de mer a lieu dans la plupart des villes portuaires mais certaines usines comme àSaint-Simon transforment le surplus des autres usines. L'industrie cherche de plus en plus lavaleur ajoutée.
La période des récoltes dure en moyenne 133 jours[8]. L'aquaculture est en expansion depuis les années 1990[117]. Lamousse d'Irlande est récoltée ou cultivée par une entreprise acadienne d'Halifax, qui est considérée comme le chef de file mondial de l'algue comestible, en plus d'être le plus grand fournisseur du Japon[117]. Le N.-B. a le plus important secteur de produits agricoles àvaleur ajoutée au pays ; l'industrie de la pomme de terre en est le chef de file, dont la multinationalMcCain Foods[104]. Les alimentssurgelés représentent 61 % des exportations alimentaires de l'Atlantique[104] ; en région acadienne, cette industrie est concentrée àGrand-Sault etScoudouc[118]. Lesboissons gazeuses (Scoudouc[118]) et labière (Moncton[119]) représentent quant à eux 8 % des exportations[104]. Lesconfiseries, pourtant importantes[104], sont peu développées en région acadienne. Toutefois, la fabrication dusirop d'érable est répandue, particulièrement àSaint-Quentin. LaPéninsule acadienne est la principale région productrice debleuets[120] mais la transformation et l'exportation est concentrée àOxford, en N.-É. anglophone[104]. L'industrie descanneberges est concentrée àRogersville mais se développe ailleurs. L'élevage et l'abattage dupoulet est concentré àSaint-François-de-Madawaska[121].
Il y a plusieurs mines près deBathurst. La majeure partie des marchandises transitant par leport de Belledune sont d'ailleurs le bois et le minerai. Les usines de la ville produisent ou transforment leplomb, l'acide sulfurique, l'argent, l'or, legypse et l'engrais[122]. Le N.-B. produit 31 % de latourbe au Canada[a 6] et la production y est concentrée dans laPéninsule acadienne[120]. Le Nord-ouest compte sur l'exploitation forestière et possède plusieurs usines, certaines de propriété locale comme Groupe Savoie mais la plupart appartenant a des intérêts anglophones ou étrangers, comme la compagnieJ.D. Irving. Edmundston, Belledune, Saint-Quentin, Kedgwick et Atholville comptent des usines de pâte et papier. La fabrication de papiers spécialisés est concentrée àDieppe etRichibouctou. Certains autres produits dérivés sont fabriqués en Acadie, notamment lescouronnes de Noël àNotre-Dame-des-Érables.
Laconstruction accapare 12 % duPIB au niveau fédéral et constitue le septième employeur de l'Atlantique[104]. Plusieurs villes comptent d'importants fabricants de matériaux de construction et d'équipements résidentiels comme lebéton, l'asphalte, l'acier, les équipements deventilation et declimatisation, les portes et fenêtres, les armoires de cuisine et lesmatériaux de construction divers. Il y a des usines de maisons préfabriquées à Tracadie-Sheila et à Bouctouche.
La puissance installée des centralesélectriques des provinces de l'Atlantique est de plus de 14 000 mégawatts (MW)[104]. L'électricité est produite, transportée et distribuée par desmonopoles desociétés de la couronne (Énergie NB,Newfoundland and Labrador Hydro etMaritime Electric) ou d'une compagnie privée (Nova Scotia Power). Lacentrale de Churchill Falls, inaugurée en 1971, fait l'objet d'un contentieux entre le Québec et T.-N.-L. Le coût de l'électricité reste le plus bas dans les pays duG8[104], sauf à l'Î.-P.-É., où il est le plus élevé au pays[a 1]. Cette province est d'ailleurs la plus innovatrice en matière d'énergie éolienne et de plus en plus imitée par les autres provinces[104]. Le plus grand raffineur et distributeur de produits pétroliers estIrving Oil, dont la raffinerie deSaint-Jean, la plus importante au pays, représente 43 % des exportations de pétrole[104]. Un champ degaz naturel est exploité à l'île de Sable et un gazoduc le relie aux États-Unis via la N.-É. et le N.-B. Le possible gisement de pétrole Old Harry, entre les Îles-de-la-Madeleine et T.-N.-L., crée des tensions entre cette province et le Québec[129]. Le chauffage se fait de plus en plus au bois à l'Î.-P.-É. puisque lemazout y est également trop cher[a 1].
Les provinces de l'Atlantique sont des chefs de file dans les domaines des technologies marines[104]. La N.-É. se démarque au plan dessciences de la vie mais T.-N.-L. est aussi reconnue dans lesbiotechnologies marines, le N.-B. dans les biotechnologies agricoles et environnementales et l'Î.-P.-É. dans la nutrition et la santé des sols[104].
LeGrand Moncton bénéficie de sa position stratégique, de sa population bilingue et de son réseau de télécommunications. Le secteur descentres d'appel y emploie 7 300 personnes[130]. Le secteur de l'infographie et de la conception delogiciels y est également développé[131].
En Acadie, les sciences et technologies ont pourtant tendance à être mises de côté en faveur de l'industrie et des arts, une situation qu'Alain Haché déplore mais explique par des raisons historiques[132]. La recherche s'est toutefois diversifiée et il y a quelques spécialistes de renom, tels que l'économisteDonald Savoie, le physicien Alain Haché, l'astrophysicienFrancis LeBlanc, le chirurgien Sylvain Beausoleil, l'ophtalmologue Raymond Leblanc et la biologiste Chantal Motar[133]. L'Université de Moncton joue un rôle clé dans la recherche, qui inclut notamment, au tournant duXXIe siècle, l'étude de laphotonique, duglaucome, de l'obésité – touchant une personne sur trois au N.-B. –, de la couleur desétoiles chaudes – théorie de la diffusion –, des effets bénéfiques des aliments fermentés et de la conservation des ressources naturelles[133]. De plus, quelques innovations se démarquent au Canada et à l'étranger, par exemple l'excavatrice multi-fonction d'Éco-technologies[134].
Dieppe compte le principal centre commercial de l'Atlantique, laPlace Champlain[135], alors que d'autres villes de petites tailles commeShippagan etAtholville basent une partie de l'économie sur les services à leur région respective. Les grandes surfaces et les chaînes de restaurant sont quant à elles généralement contrôlées par des intérêts étrangers. Les chaînes de restaurantPizza Delight,Mikes, Bâton Rouge etScores appartiennent toutefois à Imvescor, de Moncton[136].Co-op Atlantique, dont le siège est à Moncton, compte 99 succursales dans les provinces de l'Atlantique et au Québec et son chiffre d'affaires s'élève à plus d'un milliard de dollars en 2010[137], faisant d'elle la neuvième entreprise au Canada atlantique en2013[138] ; elle opère aussi plusieurs autres commerces et une usine de moulée.
Le secteur de lafinance est surtout contrôlé par des entreprisesontariennes[a 6] mais il y a quelques exceptions notables.UNI Coopération financière, dont le siège-social est situé àCaraquet, regroupe 22 caisses et 82 centres de services et a unactif de 2,9 milliards$ en 2009[139].Assomption Vie est une entreprise deservices financiers basée à Moncton et dont les bénéfices s'élevaient à 6,3 millions $ en 2009, pour des revenus de 124,9 millions $[140]. L'entreprise gère aussi les Placements Louisbourg, la plus ancienne maison degestion d'actifs au Canada atlantique, avec un actif de 1,2 milliard $ en 2009[140].Croix Bleue Medavie, aussi basée à Moncton, est une entreprise d'assurances comptant 1 450 employés en 2008, avec un chiffre d'affaires de 2,8 milliards $ en 2007[141].
L'Acadie est principalement séparée entre quatre provinces canadiennes mais celles-ci ont sensiblement le même fonctionnement politique. Le système politique canadien est en effet fondé sur laConstitution du Canada, qui définit les principes politiques, les institutions, les pouvoirs ainsi que les responsabilités du fédéral et des provinces[142]. Les provinces et le gouvernement fédéral ont chacun des responsabilités exclusives alors que certaines autres, comme l'agriculture, l'immigration et la pêche, sont partagées.
Lepouvoir judiciaire est réparti dans plusieurs cours provinciales tandis que le tribunal de plus haute instance est laCour suprême du Canada. Lacommon law est utilisée à tous les niveaux. L'Acadie étant la principale région francophone dans cette situation (lecode civil est utilisé au Québec), le Centre de traduction et de terminologie juridiques (CTTJ), créé par l'Université de Moncton en 1979, a depuis acquis une autorité internationale en matière decommon law en français[145].
La gouvernance locale est une responsabilité provinciale mais chacune des provinces possède en fait son propre système ; la gouvernance locale est le principal palier de gouvernement où les Acadiens ont un contrôle effectif. L'Î.-P.-É. compte unecité, des villes et des municipalités, ou villages[146]. La cité et les villes sont dirigées par un conseil municipal, les villages par un commissaire[a 1] ; la plupart du territoire reste sous la responsabilité duministère des Finances et des Affaires municipales de l'Île-du-Prince-Édouard.
Au N.-B., les villes ainsi que les villages ont sensiblement le même fonctionnement mais les villages n'ont pas l'obligation d'offrir autant de services. Les cités sont les municipalités les plus populeuse mais leur fonctionnement est généralement le même que les autres municipalités. Il y a finalement descommunautés rurales. La plupart des localités restent toutefois dans le système desdistricts de services locaux (DSL). Ceux-ci sont gérés directement par leministère des Gouvernements locaux du Nouveau-Brunswick mais leur population peut élire un comité consultatif dénué de pouvoirs. Lerapport Finn, publié en 2008, propose de revoir complètement l'administration municipale, en regroupant les municipalités existantes pour en réduire le nombre ainsi qu'en améliorant la fiscalité, la transparence et l'imputabilité[147]. Le gouvernement deDavid Alward est en période de consultations publiques en 2011 afin de procéder à une partie des recommandations[148].
La N.-É. est totalement constituée en municipalités et villages[149]. Les municipalités ont tendance à retourner la responsabilité de certains de leurs services à la province[a 7]. La plupart des municipalités étant très grandes, certaines localités commeChéticamp aspirent à se constituer en municipalité.
À T.-N.-L., les municipalités et les districts de services locaux ont un faible pouvoir de taxation et peuvent seulement fournir quelques services, les autres étant sous la responsabilité duministère des Affaires municipales de Terre-Neuve-et-Labrador ; la plupart des localités ne sont même pas constituées alors que plusieurs autres ne perçoivent pas de taxes municipales ni n'ont de règlements, renonçant donc aux avantages dont jouissent les autres municipalités[a 8],[150].
Voici une liste des vingt principales municipalités acadiennes en 2011[note 2],[note 3] :
Carte approximative d'une province acadienne, telle que proposée par le parti acadien. En bleu pâle, les comtés du N.-B. contenant une proportion importante de francophones. En bleu foncé, les régions majoritairement francophones.
Selon l'historienne Naomi Griffiths, les éléments fondamentaux de la politique acadienne sont la situation minoritaire et le rejet de l'assimilation[152].
Certaines prises de positions créent à l'occasion des tensions importantes, menant parfois à la création de groupesradicaux chez la majorité anglophone, comme leNew Brunswick Confederation of Regions Party en 1989 ou l'Anglo Society of New Brunswick durant les années 2000[152]. Les relations se sont malgré tout améliorées depuis les années 1950 et sont marquées par l'accommodation depuis la fin du siècle[152]. De nombreux intellectuels pensent que la coopération avec les gouvernements provinciaux et fédéraux peut continuer d'être bénéfique pour les Acadiens[153]. Lemouvement souverainiste du Québec a toutefois une influence négative sur les relations avec les anglophones tandis que l'avenir de l'Acadie, advenant la souveraineté du Québec, fait toujours l'objet de débat[153]. L'échec de l'accord du lac Meech en1987 et de l'accord de Charlottetown en 1992 alimentent d'ailleurs le pessimisme[153]. En 1992,Jean-Marie Nadeau propose, dansQue le tintamarre commence!, de forger de meilleurs liens avec ladiaspora acadienne afin d'assurer la survie de l'Acadie, une opinion défendue lors du premierCongrès mondial acadien en 1994[153]. Une autre doctrine courante cherche ladécentralisation des services gouvernementaux du N.-B. en faveur des municipalités et une revitalisation durégionalisme[153].
Une partie des intellectuels, tel que Michel Roy, accordent une importance fondamentale aux institutions et à l'acquisition d'une autonomie politique tandis que certains autres commeAntonine Maillet considèrent que seules « une mémoire, une culture, une langue, une âme, une mentalité, une identité » comptent[153]. Quoi qu'il en soit, une bonne partie de la population reste persuadée que les Acadiens n'ont pas encore été pleinement reconnus en tant que peuple[153], ce qui contraste de toute évidence avec ceux qui ont eu le pouvoir de le faire jusqu'ici. À titre d'exemple, l'ancien premier ministre du CanadaStephen Harper (au pouvoir jusqu'à la fin de 2015) avait avoué l'existence de l'Acadie mais s'était toujours opposé à ce qu'elle soit officiellement reconnue comme unenation, contrairement à ce qui avait été fait pour leQuébec en2006[154]. Il reste que l'existence même de l'Acadie n'est jamais réellement mise en doute, que ce soit par les Acadiens eux-mêmes ou par les anglophones du reste du Canada[155], notamment. Par contre, un sondage deLéger Marketing, produit en2006, révèle que seulement 45 % des Canadiens reconnaissent l'existence d'une nation acadienne[156].
LeParti acadien, fondé en 1972 au N.-B., avait pour objectif principal la formation d'uneprovince acadienne mais, en raison de la situation minoritaire, visait en fait à politiser la population[157]. Les tensions entre les militants du Nord et du Sud puis les politiques conciliantes deRichard Bennett Hatfield minèrent toutefois les appuis du parti, qui disparut en1986[157]. L'union des Maritimes est quant à elle proposée depuis le milieu duXIXe siècle[158]. Cette union impliquerait soit la formation d'une province canadienne unique, soit la création d'un nouveau pays, avec la possibilité d'une province acadienne.
Quoi qu'il en soit, l'article 16.1 de la Charte canadienne des droits et libertés reconnait deux communautés linguistiques au N.-B., l'une francophone et l'autre anglophone. LaProclamation royale de 2003 reconnait officiellement les torts causés par laDéportation des Acadiens. Toutefois, ces évolutions, qui encouragèrent notamment à abandonner le projet de création d'une province acadienne, n’empêchent guère le poids des francophones de baisser de manière constante au niveau provincial. En se basant sur le critère de la langue maternelle, leur poids est ainsi passé de 35,9 % de la population du Nouveau-Brunswick en 1951, à 32,4 % à 2016 (et même à 31,8 % selon le critère de la première langue officielle parlée, qui inclut également les allophones utilisant le français en premier). Selon l'expert Ilyes Zouari, spécialiste du monde francophone, les Acadiens duNouveau-Brunswick devraient avoir unindice synthétique de fécondité (ISF) de 2,7 enfants par femme, soit environ le double du niveau actuel (un des plus faibles au monde), afin de pouvoir maintenir leur poids au niveau provincial à long terme. Et ce, puisqu'il convient de tenir compte d'une immigration désormais importante et très majoritairement anglophone (à plus de 80 %, l'immigration étant gérée par un gouvernement principalement anglophone), du taux d'assimilation des Acadiens à chaque génération (environ 20 %, et particulièrement dans le sud-est) et du taux d'assimilation des immigrés francophones (censés pourtant renforcer la population de langue française de la province). À défaut d'atteindre ce niveau de fécondité, la remise à l'ordre du jour du projet de création d'uneprovince acadienne, regroupant les territoires acadiens du Nouveau-Brunswick, serait alors inévitable selon ce même expert[90],[91].
Le gouvernement fédéral offre des services en français dans toutes les provinces de l'Atlantique, notamment dans la moitié des points de service du Nouveau-Brunswick[87],[89],[88],[80]. Conformément auCode criminel du Canada, tous peuvent subir un procès criminel en français de même que recevoir des services judiciaires dans cette langue[87],[88],[89],[80] ; au N.-B., tout le domaine judiciaire est bilingue[88].
L'Î.-P.-É. possède une Division des affaires acadiennes et francophones ainsi qu'un Comité consultatif des communautés acadiennes, en plus de désigner au cabinet un ministre responsable des Affaires acadiennes et francophones ; concrètement, certains postes gouvernementaux sont bilingues et laLoi sur les services en français, adoptée en2000, s'applique à tous les services du gouvernement[88]. Au N.-B., tout service public doit être disponible en français[88]. En N.-É., l'Office des affaires acadiennes applique laLoi sur les services en français, adoptée en2004[89]. T.-N.-L. n'a aucune politique officielle de services en français mais possède un Bureau des services en français[80].
À T.-N.-L., seule la municipalité deCap-Saint-Georges offre des services en français[80]. À l'Î.-P.-É., il n'existe aucune loi forçant les municipalités à offrir des services en français maisAbrams-Village etWellington le font dans certains cas[87]. En N.-É., seuleClare offre tous ses services en français ; toutefois, lecomté de Richmond etArgyle offrent certains services dans cette langue[89]. Au N.-B., laLoi sur les municipalités oblige toute localité comptant au moins 20 % de francophones, ainsi que toutes les cités, à offrir des services en français ; 50 municipalités sont membres de l'Association des municipalités francophones du Nouveau-Brunswick[88]. Les municipalités néo-brunswickoise deDieppe etAtholville ont un règlement sur l'affichage commercial extérieur bilingue alors qu'àPetit-Rocher, l'affichage doit obligatoirement contenir du français[159] ; le débat est en cours dans d'autres municipalités[160].
Toutefois, ces évolutions ne parviennent pas en empêcher la baisse constante du poids des francophones dans les Maritimes, y compris auNouveau-Brunswick. En se basant sur le critère de la langue maternelle, leur poids est ainsi passé de 35,9 % de la population de cette province en 1951, à 32,4 % à 2016 (et même à 31,8 % selon le critère de la première langue officielle parlée, qui inclut également les allophones utilisant le français en premier). Selon l'expert Ilyes Zouari, spécialiste du monde francophone, les Acadiens duNouveau-Brunswick devraient avoir unindice synthétique de fécondité (ISF) de 2,7 enfants par femme, soit environ le double du niveau actuel (un des plus faibles au monde), afin de pouvoir maintenir leur poids au niveau provincial à long terme. Et ce, puisqu'il convient de tenir compte d'une immigration désormais importante et très majoritairement anglophone (à plus de 80 %, l'immigration étant gérée par un gouvernement principalement anglophone), du taux d'assimilation des Acadiens à chaque génération (environ 20 %, et particulièrement dans le sud-est) et du taux d'assimilation des immigrés francophones (censés pourtant renforcer la population de langue française de la province). À défaut d'atteindre ce niveau de fécondité, la création d'uneprovince acadienne, regroupant les territoires acadiens du Nouveau-Brunswick, serait alors inévitable selon ce même expert[90],[91].
Depuis 2005, au Canada, le 28 juillet est officiellement la « Journée de commémoration du Grand Dérangement », en mémoire de ce jour de 1755 où fut décidée la déportation des Acadiens. Cette journée, créée par proclamation royale demandée par le gouvernement canadien, fut en fait en lieu d’excuses de la reine britannique, excuses que demandaient des représentants de l’Acadie[165]
Il existe plusieurs autres symboles non-officiels de l'Acadie. L'un des plus anciens et des plus populaires est le poèmeEvangéline de l'auteur américainHenry Longfellow, publié en 1847. Des concours annuels sont organisés dans plusieurs communautés afin de choisir un Gabriel et une Évangéline, les deux personnages principaux du poème.
Par le biais de la SNA, l'Acadie entretient diverses relations internationales officieuses ou officielles. Les relations les plus anciennes et les plus importantes sont avec la France. Celles-ci commencèrent en 1968, à l'initiative de la SNA. La France avait déjà déplacé sa chancellerie d'Halifax versMoncton en 1964, avant de la transformer en consulat général en 1966. La coopération France-Acadie est renouvelée à tous les deux ans et inclut un programme d'échange, de bourses d'études ainsi que de l'aide financière et technique. La SNA gère la Fondation Franco-Acadienne pour la Jeunesse, qui favorise l'échange entre jeunes, alors que la France a instauré un Service culturel à son consulat de Moncton[c 5]. Les relations avec laCommunauté française de Belgique commencent en 1983 et depuis, un programme d'échange est renouvelé tous les trois ans[c 5]. Depuis les années 1990, leConseil général deSaint-Pierre-et-Miquelon ainsi que des délégations de la SNA discutent d'enjeux communs. Un entente est finalement signée en 2001 et l'Association SPM-Acadie est fondée, plus tard remplacée par l'Association Miquelon Culture[c 6]. Les relations avec leCODOFIL enLouisiane commencent à la même époque[c 5]. À partir de 1995, leQuébec tente de se rapprocher de la francophonie canadienne[c 2]. En 2002, un monument commémorant l'apport des Acadiens au Québec est inauguré dans la ville de Québec[c 2]. En 2003, l'Assemblée nationale du Québec appuya unanimement la SNA dans sa démarche pour faire reconnaître les torts causés par laDéportation des Acadiens[c 2]. LeCentre de la francophonie des Amériques fut fondé en 2008. Au-delà de cette reconnaissance, il existe une Commission Acadie-Québec[c 7]. La SNA siège à l'Organisation internationale de la francophonie en tant que membre de la délégation d'accompagnement duCanada et ce depuis 2005[c 8].
Plusieurs lieux revendiquent le titre de capitale de l'Acadie, le plus ancien étantGrand-Pré, qui était par ailleurs la principale ville de l'Acadie en 1755[166]. En 1847, l'américainHenry Longfellow publie le poèmeEvangéline. Le succès du poème attire des milliers de touristes à Grand-Pré[167], le point de départ du récit, alors que l'image d’Évangéline est utilisée à des fins publicitaires[168] et que l'élite acadienne en fait un symbole national caractérisant la persévérance[54]. Un parc commémoratif prend forme en 1907 à l'instigation deJohn Frederic Herbin[169], auquel se greffent une statue offerte par leChemin de fer Windsor & Annapolis et l'église-souvenir, commanditée par laSociété nationale de l'Acadie[170]. Unpèlerinage annuel y est institué[171]. Le parc devient unlieu historique national en 1955[170]. L'image d'Évangéline est rejetée durant les années 1960[172].Evangéline est ensuite considéré comme un poème sur l'amour et ses ardeurs[173] alors que Grand-Pré refait surface dans la culture[174] et que le pèlerinage continue. Le lieu est inscrit aupatrimoine mondial de l'UNESCO en 2012[175].
Memramcook est l'un des seuls villages ayant survécu à laDéportation des Acadiens. Plusieurs réfugiés y retournent dès 1763, en faisant le plus important en Acadie. Par la suite, des habitants fondent d'autres villages, ce qui lui vaut le surnom de « Berceau de l'Acadie ». Memramcook joue aussi un rôle important dans larenaissance acadienne duXIXe siècle[176].
Moncton profite du rejet des valeurs traditionnelles et de la critique du poèmeÉvangéline durant les années 1960 pour être considérée comme la capitale de l'Acadie[177]. Cette réputation est controversée car le nom même de la ville commémoreRobert Monckton, un militaire britannique ayant dirigé la Déportation des Acadiens dans la région[177]. De plus, Moncton est une ville à majorité anglophone[b 9], avec un fort taux d'anglicisation[b 9], où les Acadiens ont eu beaucoup de difficulté à faire respecter leurs droits[178]. La ville abrite par contre plusieurs institutions dont l'Université de Moncton, alors que sa voisineDieppe est le siège de laSociété nationale de l'Acadie.
La définition officielle de l'acadianité fut choisie lors de la premièreConvention nationale acadienne àMemramcook, en 1881 : unfrancophonecatholique, descendant soit d'un colon établi dans l'ancienne Acadie, soit d'un déporté. Cette définition est moins bien acceptée de nos jours. En effet, certaines communautés sont anglicisées ou en voie d'anglicisation, le catholicisme n'est plus la seule religion et la pratique religieuse est en baisse tandis que l'Acadie n'est plus isolée comme autrefois et le nombre de mariages interethniques s'accroit, sans oublier que la population est de plus en plus consciente des origines diverses de plusieurs familles[93].
Les Acadiens sont enclins à s'identifier avant tout à leur ville, leur région, leur province ou leur pays avant de s'identifier à l'Acadie[180].Parmi toutes les régions, leMadawaska est celle ayant le plus fort sentiment identitaire distinctif[180]. Une partie des habitants se considèrent comme desBrayons au lieu d'Acadiens[180]. Le Madawaska possède plusieurs symboles dont un drapeau, des armoiries, un plat national ainsi qu'uneFoire brayonne, alors que le nom deRépublique du Madawaska est toujours utilisé de façon symbolique[180]. LesAcadiens du Maine, en particulier ceux du Madawaska, sont depuis les années 1970 de plus en plus conscients de leur acadianité et maintiennent d'importants liens avec la partie canadienne du Madawaska, bien qu'ils se considèrent avant toutAméricains[181]. LesAcadiens du Québec sont rarement au courant de leur origine, qu'ils découvrent souvent en faisant leur arbre généalogique[182]. LesCadiens sont intimement liés aux Acadiens, car ils descendent d'expatriés acadiens et d'autres immigrants établis en Louisiane vers la fin duXVIIIe siècle. Les Cadiens sont fréquemment appelés « Cajuns », un anglicisme dérivé de l'ancienne prononciation acadienne du mot acadien, « acadjonne ».
L'architecture acadienne trouve son origine en France mais s'adapte rapidement aux conditions climatiques et aux matériaux locaux ; des techniques de constructionmicmaques etmalécites sont ainsi adoptées pour améliorer l'isolation des maisons[183]. Après la destruction presque totale causée par laDéportation des Acadiens, les maisons sont de piètre qualité et construites à la hâte[184]. Malgré l'amélioration des conditions de vie, l'architecture reste simple jusqu'au milieu duXIXe siècle. Les traces d'inspiration française s'effacent alors progressivement devant les influencesaméricaine etanglaise. Les premiers architectes acadiens commencent leur carrière vers la fin du siècle.Léon Léger est reconnu pour soncouvent de l'Immaculée-Conception deBouctouche etNazaire Dugas a dessiné leChâteau Albert. Des matériaux comme labrique font progressivement leur apparition. Il est difficile de définir unstyle typique acadien puisque aucune étude exhaustive n'a été effectuée à ce sujet. Plusieurs villages historiques ont été construits depuis les années 1970 et de nombreux nouveaux édifices s'harmonisent avec l'architecture traditionnelle.
Jusqu'au début duXXe siècle, la sculpture et la peinture est surtout réalisées par les décorateurs d'églises. Parmi les principales œuvres toujours existantes, notons celles dePhilomène Belliveau, Caroline Léger, Anna Bourque-Bourgeois, Jeanne Léger, Alma Buote et Yolande Boudreau, qui ont toutes étudié l'art à l'étranger. À partir des années 1930, le docteurPaul Carmel Laporte enseigne la sculpture et le dessin àEdmundston et forme plusieurs artistes de renom, dontClaude Picard,Claude Roussel etMarie Hélène Allain. À la même époque, plusieurs autres doivent suivre des cours à l'extérieur avant de poursuivre leur carrière en Acadie, dont Gertrude Godbout, Eulalie Boudreau, René Hébert,Georges Goguen,Roméo Savoie, Hilda Lavoie-Franchon et Claude Gauvin. Certains réalisent des peintures religieuses et murales pour les églises, dont Édouard Gautreau, Claude Picard et Ernest Cormier. L'église Sainte-Anne-de-Kent, qui comptait entre autres des tableaux de Gautreau, était surnommée la « chapelle Sixtine de l'Acadie » jusqu'à sa destruction dans un incendie en 2007. Nelson Surette se fait connaître grâce à ses tableaux représentant la vie quotidienne. Adrien Arsenault est aussi reconnu.Nérée De Grâce puise son inspiration dans le folklore acadien et ses tableaux se retrouvent dans plusieurs collections à travers le monde, ainsi que sur un timbre canadien. Les musées canadiens possèdent des œuvres d'autres artistes, dont les plus connus sont les sculpteurs Arthur Gallant, Alfred Morneault et Octave Verret ainsi que les peintres Léo B. LeBlanc, Médard Cormier et Camille Cormier[a 10].
En 1963, Claude Roussel met sur pied le département d'arts visuels de l'Université de Moncton. Les diplômés les plus prolifiques sont l'artiste multidisciplinaireHerménégilde Chiasson et le peintreYvon Gallant mais on compte aussi Paul Édouard Bourque, Jacques Arseneault, Francis Coutellier, Marc Cyr, Pierre Noël LeBlanc,Anne-Marie Sirois, Lucille Robichaud, Lionel Cormier, Luc A. Charette, Daniel Dugas, Guy Duguay, Roger Vautour, Ghislaine McLaughlin, Gilles LeBlanc, Georges Blanchette, Gilles Arsenault, Hélène LaRoche, André Lapointe, Robert Saucier,Jocelyn Jean et Paul-Émile Saulnier[a 10].
Le Festival acadien, le festival Acadie Rock et leGala de la chanson de Caraquet sont des événements musicaux d'envergure. Un instrument d'invention acadienne est latritare[185].
La première pièce de théâtre acadienne, et probablement la première en Amérique du Nord,Le Théâtre de Neptune, fut créée parMarc Lescarbot en 1606[a 15]. Il n'y a ensuite plus de théâtre durant deux siècles en raison du contexte socio-économique et politique difficile[a 13]. Latradition orale devint toutefois florissante et a une influence jusqu'à ce jour[a 13]. Des collèges, notamment leCollège Saint-Joseph deMemramcook, s'intéressent au théâtre dès1864[186]. Des professeurs commeAlexandre Braud etJean-Baptiste Jégo créent des pièces très populaires[187]. Des nationalistes commePascal Poirier etJames Branch créent de leur côté des pièces de théâtre paroissiales[188]. La première troupe indépendante, la Troupe Notre-Dame de Grâce deMoncton, est fondée par Laurie Henri en 1956[189].
La production deLes Crasseux d'Antonine Maillet en 1968 est considérée comme le véritable début du théâtre acadien[188]. les troupes Les Feux chalins et le Théâtre amateur de Moncton sont fondées la même année[190] et un programme d'arts dramatiques est créé en 1969 à l'Université de Moncton[191]. Présentée en 1971,La Sagouine d'Antonine Maillet connait un succès phénoménal à la suite de sa mise en scène auThéâtre du Rideau Vert deMontréal en 1972[192]. Elle a depuis été représentée à plus de 2000 reprises avecViola Léger en tant qu'unique interprète[193].
Le contexte économique difficile des années 1980 force les troupes à annuler des productions et laCompagnie Viola-Léger à cesser ses activités en 1989[198],[a 14]. Les troupes se redirigent vers les productions pour enfants, où les textes d'Herménégilde Chiasson se démarquent[a 14]. LePays de la Sagouine est fondé en 1992 àBouctouche d'après l'œuvre d'Antonine Maillet[188]. De plus en plus de pièces de théâtre sont publiés[199]. Le théâtre redevient plus adulte au milieu des années 1990[200], et connait un renouveau par la fondation de nouvelles troupes, dontMoncton Sable en 1996[188], et l'arrivée de nouveaux dramaturges, dontGracia Couturier. La place qu'occupe les productionsquébécoises s'attire toutefois des critiques[188]. Quelques nouveaux succès critiques et financiers, dont la reprise de la pièceLouis Mailloux, ainsi que la fondation de festivals, mettent tout de même en valeur les créations typiquement acadiennes.
Léonard Forest[a 16], le pionnier ducinéma acadien à l'emploi de l'Office national du film du Canada dans les années 1950 et 1960 a tourné cinq films acadiens et est l'instigateur du studio onéfien deMoncton où furent réalisés la plupart des films acadiens jusqu'auxannées 1970[201]. La plupart des films acadiens sont desdocumentaires, dont les longs métrages les plus exportés sont du cinéaste Phil Comeau :Ron Turcotte, jockey légendaire etZachary Richard, toujours batailleur un film qui s'est mérité 20 prix et qui a été présenté aux Nations unies à Genève. Il y a eu quelques longs métrages fiction qui ont été produits dont le premier film acadien long métrage indépendant en 1994Le Secret de Jérôme de Phil Comeau qui s'est mérité 15 prix et qui fut aussi présenté à l'UNESCO à Paris, et le film de 2008Full Blast de Rodrigue Jean qui s'est mérité le prix du Meilleur premier film canadien au TIFF. Les films acadiens avec les records du plus de prix mérités aux festivals canadiens et internationaux, sont de Phil Comeau;Belle-Île en Acadie avec 458 prix etRacines, diaspora & guerre avec 63 prix. Aujourd'hui, une dizaine de maisons de productions acadiennes, surtout basées à Moncton, Caraquet et Halifax, produisent surtout pour la télévision. LeFestival international du cinéma francophone en Acadie, deMoncton, fondé en 1987, est le principal festival du cinéma annuel. Parmi les cinéastes acadiens notoires, mentionnonsPhil Comeau,Renée Blanchar,Ginette Pellerin,Rodolphe Caron, Monique Leblanc, Julien Cadieux, Chris LeBlanc, Herménégilde Chiasson, la cinéaste d'animationAnne-Marie Sirois et le scénaristeJacques Savoie. Quelques Acadiens font carrière àHollywood dont les réalisateurs frèresJoseph De Grasse etSam De Grasse au début duXXe siècle, et l'acteurRobert Maillet auXXIe siècle.
Les séries télévisées de fiction notables sont notammentLa Sagouine de Phil Comeau, diffusée en 2006, etBelle-Baie de Renée Blanchar, diffusée pendant cinq saisons à partir de2008. Depuis, quelques autres séries acadiennes de fiction ont vu le jour, mais toutes sont réalisées par des réalisateurs québécois. Anne-Marie Sirois fait des films d'animation.Acadieman est la premièrebande dessinée acadienne, créée par Daniel « Dano » Leblanc au début des années 2000[202] et adaptée ensérie animée à partir de 2005. Le succès du personnage mène à la production du long métrageAcadieman vs. le C.M.A. en 2009.
L'artisanat acadien est avant tout traditionnel. Lacourtepointe est un artisanat très populaire et bien qu'Evelyn Coutellier a créé des motifs originaux, la plupart des artisans conservent les motifs traditionnels en ne changeant que les couleurs.Chéticamp est reconnu pour sestapis houqués, qui sont généralement fait en série mais certaines « houqueuses » commeElizabeth LeFort se sont fait connaître par leursmurales.Les Tisserands du Madawaska, dans larégion éponyme, produisent des vêtements et des napperons. La plupart des régions acadiennes de cette province comptent des tisseurs, des sculpteurs sur bois et d'autres sortes d'artisans. On en retrouve aussi à laBaie-Sainte-Marie. Adrienne Landry deDieppe était auparavant la seule tisseuse d'expérience du sud-est du N.-B. Les Artisans de St-Louis se sont par la suite orientés vers le tissage à l'aide d'une formation financée par le Développement régional. La Coopérative d'artisanat de St-Paul s'est quant à elle dirigée en symmographie (artisanat à base de ficelles) et ses plaquettes représentantLa Sagouine sont très populaires. Plusieurs ateliers de poterie ont été aménagés par des diplômés en céramique, comme Les Métiers d'art du Nord-Est par les Frachon, le studio Keramos deCocagne par Ronald Gauguen, Fernand Daigle àSaint-Louis-de-Kent et Nancy Morin àMoncton.
Lacuisine acadienne est d'originefrançaise mais on trouve plusieurs autres influences, particulièrementcanadiennes françaises, amérindiennes et mêmeallemandes. Il y a en fait plusieurs cuisines régionales. La plupart des ingrédients sont disponibles sur place alors que certains proviennent d'un commerce ancien avec les Antilles et le Brésil, comme les raisins secs, le riz, lacassonade et lamélasse. La pomme de terre est l'aliment de base et le poisson et les fruits de mer sont très populaires.
L'Acadiane dans la Louisiane ; la partie foncée est celle où la culture cadienne est la plus présente.Bateaux décorés du drapeau de l'Acadie, aux îles de la Madeleine.
L'influence culturelle de l'Acadie se ressent surtout aux États-Unis et au Canada. En plus des 500 000 Acadiens des provinces de l'Atlantique, il y aurait en tout un million d'Acadiens ou de Cadiens en Louisiane, un million en Nouvelle-Angleterre (notamment dans le Maine), un million au Québec et probablement 300 000 en France, soit un total d'au moins 3,8 million dans le monde[84].
LesCadiens sont intimement liés aux Acadiens car ils descendent d'expatriés acadiens et d'autres immigrants établis en Louisiane vers la fin duXVIIIe siècle. L'Acadiane, enLouisiane, est d'ailleurs un territoire officiellement reconnu. Ainsi, la culture cadienne s'exprime par plusieurs biais que voici : langue, architecture, littérature, musique et cuisine.
Lefrançais cadien est influencé par le français acadien. LeConseil pour le développement du français en Louisiane (CODOFIL) est une agence de l'État deLouisiane pour la promotion de l'usage dufrançais dans la population louisianaise[204]. L'anglais cadien est d'ailleurs un dialecte d'anglais parlé par les Cadiensanglicisés. Par ailleurs, dans le nord de l'État duMaine, on peut trouver au sein de la population anglophone des influences de la syntaxe et du vocabulaire français à cause de la présence d'Acadiens dans la région[205].
Les exilés en Louisiane développèrent trois styles d'architecture, dont l'un inspiré de l'architecture acadienne traditionnelle[206]. Ces différents styles ne sont plus utilisés à partir de 1911 mais reviennent à la mode depuis les années 1990. De nombreux exemples d'architecture acadienne sont par ailleurs visibles auMaine, auQuébec et enFrance.
La littérature cadienne francophone est quant à elle apparue en 1980, lorsqueJean Arcenaux a publiéCris sur le Bayou. David Cheramie, Debbie Clifton etZachary Richard ont aussi été publié, et ce autant aux États-Unis qu'au Canada[207].
Le cinéaste acadienPhil Comeau, a réalisé plusieurs films sur la diaspora acadienne en France, en Louisiane et au Québec:Racines, diaspora & guerre (2023),Belle-Ile en Acadie (2019),Belle-Ile-en-Mer, île bretonne et acadienne (2016),Zachary Richard, toujours batailleur (2016),Les Acadiens du Québec (2011, série).
↑Adrien Bérubé lui donne en fait les noms d'Acadie fonctionnelle ou opérationnelle, plus couramment appelée l'Acadie de l'Atlantique et parfois encore l'Acadie des Maritimes.
↑JeanDaigle etUniversité de Moncton. Chaire d'études acadiennes,L'Acadie des Maritimes : études thématiques des débuts à nos jours, Chaire d'études acadiennes, Université de Moncton,(ISBN2-921166-06-2 et978-2-921166-06-5,OCLC29312170,lire en ligne), p. 331
↑JeanDaigle etUniversité de Moncton. Chaire d'études acadiennes,L'Acadie des Maritimes : études thématiques des débuts à nos jours, Chaire d'études acadiennes, Université de Moncton,(ISBN2-921166-06-2 et978-2-921166-06-5,OCLC29312170,lire en ligne), p. 320
↑La Presse canadienne, « Selon les experts au N-B, les tempêtes témoignent des changements climatiques »,CapAcadie.com,(lire en ligne).
↑Vincent FrankZelazny,Notre patrimoine du paysage : l'histoire de la classification écologique des terres au Nouveau-Brunswick, Ministère des ressources naturelles du Nouveau-Brunswick,(ISBN978-1-55396-204-5,lire en ligne)
↑a etbStéphanBujold, « L'Acadie ? Quoi ça ? Les Acadiens ? Qui ça ? Esquisse d'un territoire indéfini et d'un peuple éparpillé »,Cahiers, Société historique acadienne,,p. 45-46(lire en ligne) :
« Le demi million de leurs compatriotes qui occupent toujours l'Acadie historique »
↑Proclamation désignant le 28 juillet de chaque année, à compter de 2005 « Journée de commémoration du Grand Dérangement », https://laws-lois.justice.gc.ca/fra/reglements/TR-2003-188/page-1.htmlDes excuses pour les Acadiens, François Gravel, Acadie Nouvelle, 13 décembre 2017, https://www.acadienouvelle.com/editoriaux/2017/12/13/des-excuses-pour-les-acadiens/
↑Placide Gaudet,Le Grand Dérangement, Sur qui retombe la responsabilité de l'Expulsion des Acadiens, Ottawa: Ottawa Printing Company, 1922,p. 56-58.
↑RobertViau,Grand-Pré : lieu de mémoire - lieu d'appartenance, Longueuil, MNH Publications,(ISBN2-89617-003-0),p. 73.
↑abc etdJacques PaulCouturier, « La République du Madawaska et l'Acadie : la construction identitaire d'une région néo-brunswickoise auXXe siècle »,Revue d'histoire de l'Amérique française,vol. 56,no 2,,p. 153-184(lire en ligne, consulté le)
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La version du 16 juin 2009 de cet article a été reconnue comme « bon article », c'est-à-dire qu'elle répond à des critères de qualité concernant le style, la clarté, la pertinence, la citation des sources et l'illustration.