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Abu al-Abbas Sebti (1129-1204 ; enarabe أبو العباس السبتي, ou Abu al Abbas Ibn Ja`far al-Khazraji as Sebti, parfois connu sous le nom deSidi Bel Abbès) est un maîtresoufimarrakchi originaire deSebta. Il est l'un dessept saints de Marrakech.

Il naît àCeuta en l'an 524 du calendrier musulman (1129 du calendrier grégorien). Orphelin de père dès l'âge de dix ans, sa mère n'a d'autre recours que de mettre un terme prématuré à ses études et le faire apprenti auprès d'un tisserand. Mais le jeune enfant supportait mal ce choix et fuyait pour rejoindre le cercle du maître Muhammad al-Fakhar, ami du célèbreCadi Ayyad, tous deux symboles de l'âge d'or culturel que connaît la cité à l'époque. Impressionné par les capacités d'apprentissage et l'investissement de l'enfant, leCheikh al-Fakher l'initie à lamystique soufie et l'initie à unverset coranique amené à devenir le leitmotiv de l'œuvre du saint : "Dieu ordonne la justice et la charité"[1].
En l'an 540 de l'hégire (1145-1146), tout juste âgé de 16 ans, il quitteSebta pourMarrakech, alors accablée par les terribles campagnes militaires d'Abd al-Moumen. Dès, la ville tombe et devient capitale du nouvelempire almohade. Les nombreuses hagiographies du saint indiquent qu'Abu al-Abbas fit dès son arrivée forte impression auprès des populations désemparées des environs de la cité. Rapidement, il entama une longue retraite spirituelle sur les pentes désolées duJbel Gueliz, aux portes de la cité. Son compagnon spirituel, un dénommé Messaoud, subvenait aux besoins matériels d'Abu al-Abbas en allant travailler à Marrakech en tant que maçon. Un jour, victime de la malhonnêteté d'un client, Messaoud alla solliciter le maître. Le mauvais payeur fut puni, la justice fut rendue et la réputation d'Abu al-Abbas était faite. Il est alors invité par le nouveau souverainAbu Yaqub Yusuf à gagner la capitale, requête qu'il finit par accepter.
ÀMarrakech, Abu al-Abbas est inscrit parAbu Yaqub Yusuf sur le registre desTalabat al-Hadar et bénéficie à ce titre d'une école dôtée de biens enhabous. Il y dispense des cours degrammaire et de calcul, mais s'illustre par sa faculté à se mettre au service de ses étudiants, même pour les tâches les plus humbles. Il met en place de son vivant un dispositif d'assistance aux plus vulnérables qui servira par la suite de matrice aux dispositifs futurs de lazaouïa. Mais la renommée du saint est surtout due à ses prêches sur la voie publique, inhabituels chez les maîtres soufis qui privilégient généralement l'ascèse et les causeries entre initiés. Vêtu d'une simple toge de laine, il harangue les passants pour les inciter à faire preuve de générosité.Ibn Rochd, intrigué par la personnalité du personnage, résume sa doctrine par la phrase suivante : "L'Être est affecté par la générosité". Il vilipende l'avarice des grands, responsable selon lui des fléaux que connaît le pays comme la sécheresse. Il va jusqu'à mettre en cause le souverainYa'qub al-Mansur lui-même.
Son comportement iconoclaste suscite parfois la perplexité voire l'hostilité desfuqaha. On lui reproche notamment son langage peu châtié, son attitude ambiguë vis-à-vis des femmes, sa tendance à passer devant les portes des mosquées aux heures de prières sans daigner entrer. Il va même jusqu'à se voir intenter un procès pourhérésie, procès dont l'issue "miraculeuse" selon les chroniqueurs serait en réalité due à l'intercession du souverain lui-même, qui lui avait auparavant confié la direction d'un hospice ainsi que la présidence de la prière rogatoire pour la pluie[2]. Il décède en 601 du calendrier musulman (1205) à l'âge de 75 ans.
La trajectoire autant que la doctrine d'Abu al-Abbas sont atypiques, au point que certains auteurs detabaqât comme son contemporain ethagiographeal-Tadili (en) lui consacrent une rubrique particulière.Après la disparition du saint, sa renommée et sa popularité n'ont fait que s'accroître au fil des siècles. Son intercession est invoquée autant par les puissants (lors de son exil auMaroc, le sultannasride déchuMohammed V al-Ghani en appelle à son aide) que par le petit peuple. Encore aujourd'hui, les marchands de beignets dédient à Abu al-Abbas es-Sebti leurs premiers beignets de la journée tandis que les paysans font de même avec leur première gerbe de blé. Cette dédicace est appelée laabbassia.
Dès leXIVe siècle,Ibn al-Khatib témoigne de la richesse du mausolée érigé en son honneur, vers lequel convergent déjà des milliers de nécessiteux et dont les revenus pouvaient atteindre 1000dinars par jour[3]. Mais l'histoire de lazaouia ne débute qu'au début duXVIIe siècle avec la création par le souverainsaadienAbou Faris, qui souffrait d'épilepsie, d'une mosquée adjacente au mausolée primitif en1603 puis d'une bibliothèque en1615. Sous lesAlaouites, le rythme des embellissements et des réfections ne faiblit pas, depuisMoulay Ismaïl qui bâtit en1720 une coupole surplombant la tombe du saint jusqu'àHassan II qui entreprit en1998 la réfection du sanctuaire. Ces attentions témoignent de la place singulière que tient le saint dans la mémoire collective de laville rouge. Aujourd'hui, lazaouïa redistribue mensuellement à environ 2000 bénéficiaires[4], indigents et handicapés, une allocation dont le montant oscille généralement entre 50 et 200dirhams (soit entre 5 et 20euros).
L'origine de lazairja est attribuée au philosophe Abu al-Abbas Sebti par l'historien et économisteIbn Khaldoun dans son ouvrageMuqaddima[5].