Devenu symbole de laBelle Époque, cespiritueux fortement alcoolisé (entre 68 et 72 °) connut une popularité fulgurante en France ; la région deFranche‑Comté comptait plus de cinquante distilleries au début duXXe siècle. Toutefois, des versions de mauvaise qualité et les discours alarmistes sur lathuyone, accusée d’effetshallucinogènes, menèrent à saprohibition dans plusieurs pays : laSuisse en 1910, laFrance en 1915 et l’Europe continentale peu après.
Sa réhabilitation s'opère progressivement à partir des années 1990 : leRoyaume-Uni n'avait jamais interdit l’absinthe et fut le premier terrain de son renouveau commercial, suivi par la légalisation en Suisse dès 2005. Au sein de l’Union européenne, la réglementation harmonisée sur les teneurs maximales en thuyone a été établie en 1988 mais, en France, ce n’est qu'en 2011 que leSénat a voté l’abrogation de l’interdiction portant sur l’usage du nom « absinthe ». La boisson connaît un regain d'intérêt international depuis le début duXXIe siècle, avec la relance de marques historiques et un usage retrouvé dans lamixologie contemporaine, tout en étant strictement encadrée.
Ce n'est que vers la fin duXVIIIe siècle que l'on trouve la première trace attestée d'absinthe distillée contenant de l'anis vert et dufenouil. La légende veut que ce soit le docteurPierre Ordinaire (1742-1821)[2],[3] qui ait inventé la recette vers 1792. Les travaux deMarie-Claude Delahaye[4] et deBenoît Noël ont montré que cette recette devait également beaucoup à une herboriste suisse ducanton de Neuchâtel :Henriette Henriod pour M.C. Delahaye ou Suzanne-Marguerite Henriod pour B. Noël. Celle-ci aurait mis au point la première recette d'absinthe, qui était un breuvage médicinal. Cette question ne semble toutefois pas définitivement tranchée[5],[6].
Quoi qu'il en soit, lemajor Dubied acquiert la recette auprès de la mère Henriod en 1797[7] et ouvre, avec son gendreHenri-Louis Pernod (dont le père estbouilleur de cru), la première distillerie d'absinthe àCouvet[8] en Suisse. On trouve dans le livre de raison de ce dernier la première recette d'absinthe apéritive, datée de 1797. Ils fondent en 1798 la première distillerie, la maison Dubied Père & Fils. En 1805, Henri-Louis Pernod prend ses distances avec son beau-père et monte sa propre distillerie àPontarlier enFranche-Comté :Pernod Fils qui deviendra la première marque de spiritueux français[8].
Pendant une trentaine d'années, l'absinthe reste une boisson régionale essentiellement consommée dans la région de Pontarlier, qui devient la capitale de l'absinthe (en 1900, vingt-cinq distilleries emploieront 3 000 des 8 000 Pontissaliens malgré la lutte contre l'alcoolisme menée par le député de la régionPhilippe Grenier[9]). En 1830, les soldats français colonisent l'Algérie et les officiers leur recommandent de diluer quelques gouttes d'absinthe dans l'eau pour faire passer les désagréments de lamalaria et de ladysenterie[10]. Les soldats, à leur retour en France, popularisent cette boisson à travers tout le pays. Titrant 68 à 72° dans la bouteille, l'absinthe est alors diluée dans des verres hauts et larges (à un volume d'absinthe sont ajoutés six à sept volumes d'eau fraîche versée goutte à goutte sur un sucre posé sur unecuillère percée, elle-même placée sur le verre afin d'exhaler ses arômes) ; d'autres amateurs pratiquent une « purée » (dilution moindre jusqu'à la boire pure)[5].
Relativement chère au début des années 1850, elle est surtout consommée par labourgeoisie, devenant la« fée verte[11] des boulevards ». Puis, sa popularité ne cesse de grandir puisqu'en 1870, début de laguerre franco-prussienne, l'absinthe représente 90 % des apéritifs consommés en France[10]. En 1860, àAvignon,Jules-François Pernod fonde la société Jules Pernod, d'abord spécialisée dans l'extraction de lagarance, qu'il transforme en 1872 en Société Pernod père et fils, puis à partir de 1884, il se lance dans la distillation de l'extrait d'absinthe dans son usine deMontfavet[12]. La production d'absinthe augmente, entraînant une diminution des prix et une popularité grandissante.
La période de 1880 à 1914, début de laPremière Guerre mondiale, marque une explosion de la production et une chute drastique des prix. La production française passe de700 000 litres en 1874 à 36 000 000 de litres en 1910[10]. Des absinthes de mauvaise qualité, surnommées « sulfates de zinc » en raison de la coloration obtenue grâce àce composé chimique, prolifèrent[13]. Un verre d'absinthe est alors moins cher qu'un verre de vin.
À cette époque, laFranche-Comté compte à elle seule une cinquantaine de distilleries. Mais aussiParis (70 distilleries),Bordeaux (environ 50),Marseille (45), Lyon (environ 20),Dijon (environ 10). La France compte alors un millier de marques d'absinthes[14].
Le, l'usine Pernod à Pontarlier prend feu et un employé de l'usine prend l'initiative de vider lescuves d'absinthe dans leDoubs, afin d'éviter qu'elles n'explosent. On raconte que les soldats en garnison à Pontarlier remplissaient leur casque de ce breuvage. Le lendemain, on en retrouvait des traces à la source de laLoue, ce qui permit de découvrir l'origine de cette rivière (pour partie unerésurgencekarstique du Doubs) et fit de l'événement le premiertraçage par coloration de l'histoire de l'hydrogéologie, certes involontaire[15].
Affiche deFrédéric Christol imprimée en France en 1910. « Omnibus pourCharenton ! Avec correspondance par l'alcool ou directement avec l'absinthe. »Interdiction à Paris dès août 1914[16].
Projet d'interdiction de l'absinthe en France (Extrait)
À diverses reprises, l'Académie de médecine a signalé le grand intérêt que présente, au point de vue de la santé publique et de l'avenir même de la race, l’organisation en France d'une lutte active contre l'alcoolisme. De son côté, l'Académie des sciences a, au cours d'une de ses récentes séances, apporté à ces vues l'appui de sa haute autorité en émettant un vœu pressant en faveur de l'adoption prochaine de diverses mesures propres à enrayer le fléau. Il a paru au gouvernement que le moment était venu d'entrer résolument dans la voie qui lui était ainsi tracée et qu'il convenait notamment de réaliser, dès à présent,une des mesures qui de tout temps ont été considérées, à juste titre, comme pouvant le plus aisément contribuer pour une large part à la restriction du mal : mettre un terme à toute consommation de l'absinthe et des liqueurs similaires.
Affiche critiquant l'interdiction de l'absinthe en Suisse, au début duXXe siècle.
En Suisse, le, Lanfray, un ouvrier viticole, tue femme et enfants après s'être saoulé à l'absinthe. L'affaire provoque une émotion considérable, attisée par les producteurs de vin romands qui trouvent ici le prétexte parfait pour demander l'interdiction de l'absinthe parvotation populaire. Le, le peuple suisse vote sa pénalisation (63,5 % des votants), interdisant « la fabrication, l'importation, le transport, la vente, la détention pour la vente de la liqueur dite absinthe dans toute l'étendue de la Confédération ». Au moment de l'interdiction, leVal-de-Travers, berceau de l'absinthe, compte14 distilleries,200 employés et plus de 300 000 m2 de cultures d'absinthes[22].
L'Académie de médecine crée même le terme « absinthisme » pour désigner un alcoolisme à l'absinthe[22], qui tient compte des nombreux méfaits qui lui sont alors attribués : aliénation mentale, épilepsie, convulsions, paralysies périphériques et même tuberculose[25].
En 1908, le groupe antialcoolique qui s'est constitué auSénat veut faire voter trois mesures :
Ceci conduit à son interdiction dans de nombreux pays : enFrance, par une disposition préfectorale du prise sous l'autorité de l'état de siège[26],[27], interdiction qui dure jusqu'au[28] ; enSuisse du au[29] car les ligues de vertu disaient d'elle « qu'elle rend fou et criminel, fait de l'homme une bête et menace l'avenir de notre temps ».
En réalité, il est clairement dit dans le projet d'interdiction de l'absinthe en France que la boisson est interdite pour lutter contre l'alcoolisme.
Buvard publicitaire Pernod père et fils.Facture des établissements Pernod.
Lorsque la production d'absinthe commence à être la cible d'une vive campagne contre ses méfaits dès 1907,Jules-Félix Pernod a succédé à son père à la tête de l'entreprise familiale. Quand sa production est interdite par une loi du Parlement français votée le[30], il est le premier à se reconvertir en fondant en 1918 la marque « Anis Pernod » qui produira le premierpastis commercialisé[31]. Son usine deMontfavet met aussi en marché d'autres produits anisés ou non comme le « Vin Pernod », le « Kunnel Korta », le « Velours » sans alcool ou toute une gamme d'anis à 30, 32, 35 et 40°[30].[pertinence contestée]
En 1926, les successeurs de Pernod dePontarlier ayant déposé la marque « Anis Pernod fils », Jules-Félix Pernod dépose contre eux une plainte qu'il argumente ainsi :« Il y a en notre faveur une antériorité indiscutable, l'Anis Pernod ayant été déposé à la fin des hostilités de 1914-1918, alors que la marque Anis Pernod et fils ne l'a été que dans les premiers mois de 1926. Dès l'apparition des produits anisés, nous avons été et restons les premiers dans le monde, les seuls Pernod fabricants d'anis. Nous ajouterons que notre ancien concurrent Pernod fils, dont nous ne contestons nullement l'existence en tant que marque d'absinthe, n'a aucun droit à l'appellation Pernod pour l'anis, le succès de notre marque Pernod a fait et fera des envieux, nous en aurons raison »[30].[pertinence contestée]
Le procès est gagné en première instance et il est fait appel. Jules-Félix Pernod décède en 1928 mais le 4 décembre de cette même année, les deux établissements d'Avignon et de Pontarlier fusionnent pour devenir les « Établissements Pernod »[30].[pertinence contestée]
Après l'interdiction de la fabrication, de la vente et de la consommation de l'absinthe et de ses similaires, d'autres anciennes marques d'absinthes se reconvertissent dans des anisés sans sucre qui se préparent comme l'absinthe (l'État autorise en 1920 la présence d'anis dans les spiritueux à 30° maximum avec un minimum de200 grammes de sucre et ne devant pas avoir la couleurverte feuille morte[pas clair] qui rappelle l'absinthe). En 1932 (année de la libéralisation des anisés dont la teneur en sucres est déréglementée, le degré est relevé à 40°, ce qui les fait passer de statut de digestif à celui d'apéritif),Paul Ricard invente lepastis de Marseille, qui est le premier anisé à connaître un succès presque équivalent à celui de l'absinthe. En 1938, les anisés peuvent titrer 45°, ce qui permet la dissolution dans l'alcool de plus d'huiles essentielles d'anis, ce qui donne alors à cette boisson toute sa saveur[5].
Le, un décret[32], signé parMichel Rocard, autorise et réglemente la présence dethuyone (principale molécule de l'huile essentielle d'absinthe, présente dans la grande et la petite absinthe) dans les boissons et l'alimentation, ce qui permet techniquement de produire à nouveau de l'absinthe en France. En 1999, la première absinthe française depuis 1915 est produite : la Versinthe verte, qui contient de la grande absinthe. Son apparition et son étiquetage (absinthe) met en évidence un hiatus entre le décret européen de 1988 et l'interdiction de l'absinthe en France de 1915 toujours en vigueur. Plutôt que d'abolir cette loi, le gouvernement pare au plus pressé en votant un aménagement du décret et en attribuant une nouvelle appellation légale à l'absinthe : « spiritueux aromatisé à la plante d'absinthe » et en complétant la réglementation européenne (35mg/L de thuyone maximum)[33] d'un taux defenchone et depinocamphone à ne pas dépasser (respectivement5mg/L et10mg/L). Depuis le, la distillation de l'absinthe est à nouveau autorisée en Suisse, afin de pouvoir demander uneAOC et ainsi protéger l'appellation (à condition, entre autres, que la teneur enthuyone ne dépasse pas35mg/L).
Si, le, le Parlement français abroge une loi interdisant aux producteurs français d'utiliser la dénomination « absinthe », en réaction à une demande d'IGP au profit des seuls producteurs duVal-de-Travers[34], cetteindication géographique protégée suisse est confirmée par l'Office fédéral de l'agriculture le pour l'« absinthe », la « Fée verte » et « La Bleue », malgré de nombreuses oppositions[35], venant en particulier de la fédération française des spiritueux (FFS) et la Confédération européenne des producteurs de spiritueux qui ont déposé, en septembre de la même année, un recours contre cette décision auprès duTribunal administratif fédéral[36]. Ce dernier donnera raison aux opposants le, en refusant d'accorder l'IGP au Val-de-Travers[37]. Le, uneIndication géographique est reconnue par l'INAO sous le nom d'« Absinthe de Pontarlier »[38].
Dégustation d'absinthes auConcours général agricole de Paris en 2013.Dégustation d'absinthes auConcours général agricole de Paris en 2013, après ajout d'eau fraîche et de glaçons.Un grand choix de bouteilles d'absinthe.
L'absinthe, comme autrefois, titre entre 45° et 90°. En France, elle est produite notamment àFougerolles (distillerie Peureux), àPontarlier (distillerie Pierre Guy de Pontarlier), ville dont elle fit la richesse jusqu'à l'interdiction de 1915, àLa Cluse-et-Mijoux (distillerie Les Fils d'Emile Pernod), àSaumur (distillerie Combier), àRennes (distillerie Awen Nature) et àVichy (distillerie Muse de France). Une des plus vieilles distilleries de France, ladistillerie Cherry Rocher située en Isère, produit également sept absinthes différentes. Il existe aussi deux distilleries enProvence.
Elle est surtout de nouveau fabriquée auVal-de-Travers (région deSuisse romande) — berceau de l'absinthe — dans une douzaine de distilleries, ainsi qu'à Fenin auVal-de-Ruz (distillerie Larusée).
Deux absinthes : laNouvelle-Orléans de Ted Breaux fabriquée à la distillerieCombier à Saumur et la suisseKübler du Val-de-Travers.
Au Val-de-Travers, le village deMôtiers possède une longue tradition de l'absinthe ; en 2014, lecanton de Neuchâtel y a inauguré la maison de l'absinthe.
La fontaine à absinthe, placée sur le comptoir, était équipée de robinets qui laissaient couler l'eau fraîche sur les sucres. L'eau sucrée tombait goutte à goutte sur l'absinthe, ce qui entraînait la formation d'un louche (trouble du mélange en un blanc opalescent, avec une teinte de jaune verdâtre)[39].Rituel de l'absinthe, on notera le verre spécifique à dose avec sa boule creusesoufflée.Pelles à absinthe.
La préparation de l'absinthe est qualifiée de rituel en raison des nombreux accessoires spécifiques nécessaires à son élaboration ainsi qu'à son aspect codifié.
L'absinthe pure est tout d'abord versée dans un verre spécifique sur lequel on place une cuillère (appelée pelle) à absinthe[40]. On place ensuite sur la cuillère un demi-sucre ou un sucre sur lequel on verse de l'eau glacée au goutte à goutte. Comme le pastis, l'absinthe se dilue dans trois à cinq fois son volume d'eau. Au moment où le tout premier volume d'eau vient « troubler » la liqueur (voireffet Ouzo, les huiles essentielles dans l'absinthe étant solubles dans l'alcool et insolubles dans l'eau), une discrète émanation de couleur bleue peut être visible et a été à l'origine de la dénominationLa Bleue, l'autre nomvernaculaire donné à l'absinthe. La manière de préparer l'absinthe joue un rôle capital dans son goût final en permettant aux arômes de plantes de se libérer et de prendre de l'ampleur face aux autres arômes[41].
Durant ce processus, les ingrédients non solubles dans l'eau (principalement ceux de l'anis vert ouétoilé, ainsi que lefenouil) forment desémulsions, ce qui trouble l'absinthe[42].
Traditionnellement, le sucre ne se brûle pas. Ce n'est qu'en 1990 dans les discothèquestchèques qu'un rituel où le sucre brûlé est apparu, probablement pour attirer l'attention des clients sur cet apéritif[13].
Aujourd'hui, l'absinthe entre également dans la composition de nombreux cocktails (comme le Bacardi Recuerdo par exemple).
En 2001, François Guy,4e génération de laDistillerie Pierre Guy de Pontarlier qui distillait avant l'interdiction, lance la première absinthe distillée et colorée naturellement, redonnant ainsi à l'absinthe de Pontarlier ses lettres de noblesse. Depuis 1921, la distillerie produit également de « l'absinthe sans absinthe », un anis distillé unique : lePontarlier-Anis.
Depuis le, il est possible de distiller de l'absinthe en Suisse tout à fait légalement, soit chez un distillateur « à façon » — il en existe 400 en Suisse — soit en demandant une concession à laRégie fédérale des alcools, àBerne. Pour l'obtenir, il faut au moins distiller500 litres d'alcool à 96 % en volume (par année), soit près de950 litres d'absinthe à 53 % en volume. La concession n'est pas facilement accordée, à moins d'entrer dans une coopérative de distillateurs qui louent ensemble un local pour y installer leursalambics. Les périodes de distillation sont annoncées à l'inspecteur régional de la Régie fédérale des alcools qui « déplombe » l'alambic et replace une cordelette avec un plomb quand la distillation est terminée.
Les achats d'alcool sont soumis à une taxe : environ29 francs suisses[Quand ?] par litre d'alcool à 96 % en volume. Le distillateur doit remplir une « déclaration de distillation » dans laquelle il indique la quantité des matières premières (alcool), la quantité des spiritueux produits (absinthe), et la quantité des flegmes (produits de tête et de queue de distillation).
En Suisse, la personne qui distille et qui veut vendre son produit est soumise à l'autocontrôle. Elle doit faire déterminer par un laboratoire spécialisé (Laboratoire cantonal à Neuchâtel), le taux dethuyone, defenchone et le pourcentage en volume. L'analyse coûte350 francs suisses[Quand ?].
À cela, il faut ajouter une patente cantonale pour la vente du produit, qui coûte une centaine de francs, plus 2 % du chiffre d'affaires présumé. Pour vendre dans toute la Suisse, il faut débourser plus de500 francs suisses (environ460 euros)[Quand ?], si les quantités vendues hors du canton de production dépassent les400 litres par année.
Cette dernière disposition a été annulée.Précisions de la Régie fédérale des alcools, en Suisse :
L'autorisation fédérale de commerce de détail est annulée à partir du
L'autorisation fédérale pour le commerce de détail sera supprimée avec l'entrée en vigueur de la loi fédérale du sur la suppression et la simplification des procédures d'autorisation. Pour le commerce de détail hors des limites du canton, aucune autorisation fédérale ne sera désormais nécessaire. La patente pour le commerce de détail délivrée par le canton où le commerce a son siège suffira à l'avenir.
L'entrée en vigueur de cette modification a été fixée au.
Avant la levée de l'interdiction, la production clandestine d'absinthe au Val-de-Travers était estimée à35 000 litres par année.
En 2005, les producteurs — déclarés — d'absinthe en Suisse et surtout dans la région du Val-de-Travers auraient produit — selon Marc Gilliéron, de la Régie fédérale des alcools (voir Liens externes en fin d'article) sur les ondes de la Radio suisse romande le — quelque61 000 litres d'absinthe pure (100 % en volume).
Cette quantité théorique d'absinthe a été vérifiée par les agents de la Confédération dans les distilleries de l'ensemble de la Suisse, en particulier au Val-de-Travers et au Val-de-Ruz où sont produits 90 % de l'absinthe « suisse ». Une fois réduite à la teneur alcoolique de mise sur le marché de l'absinthe (53 % en volume en général), cette quantité donne 115 000 flacons de 1 litre à 53 % en volume.
Avec la libéralisation de l'absinthe en Suisse, les champs d'absinthe refleurissent au Val-de-Travers. Paradoxalement, l'absinthe fabriquée légalement est en général beaucoup plus forte (et parfumée si on la coupe juste au début de sa floraison) que l'absinthe clandestine distillée à partir des plantes obtenues dans lesherboristeries. Au point que des absinthes clandestines qui n'affichent que 3-5 mg dethuyone par litre, sont largement dépassées par des absinthes légales, avec des herbes du Val-de-Travers, dont les taux montent jusqu'à 20-25 mg de thuyone par litre d'absinthe (taux maximal légal :35mg/L).
En 2012, la Distillerie Fils Du Roy dePaquetville au Nouveau-Brunswick produit une absinthe issue de la distillation de plantes produites dans les jardins mêmes de la distillerie sous le nom de « La courailleuse ». C'est en 2015 qu'une deuxième Distillerie Fils du Roy s'implante àSaint-Arsène au Québec. En 2016, la deuxième distillerie produit leur première absinthe[44].
L'absinthe était jadis produite par distillation ou mélange d'essences (esprit d'absinthe), plus rarement par simple macération (teinture ou élixir d'absinthe).
Les absinthes distillées sont produites par une macération des plantes dans l'alcool suivie d'une distillation. Cette méthode de fabrication de l'absinthe est la plus traditionnelle. Elle permet la production d'absinthes à la fois très aromatiques et peu amères.
La technique par mélange d'essences est une technique semi-industrielle qui repose sur une macération et une distillation séparée de chaque plante composant l'absinthe.
Aujourd'hui, la majorité des absinthes sont réalisées par mélange d'essences. De nombreuses absinthes de qualité supérieure sont produites par distillation. On trouve plus fréquemment qu'à la Belle-Époque des absinthes amères simplement macérées puis filtrées, avec ou sans adjonction de sucre.
Le développement de cette technique s'est fait sous l'influence du mode de production d'autres élixirs de plantes comme le pastis, ou legénépi (déjà dit « absinthe des Alpes » par Duplais en 1855).
La prohibition de l'absinthe et l'interdiction de la distillation personnelle ont favorisé la recherche de recettes adaptées à ce mode de fabrication. Peu traditionnelles, les absinthes macérées sont interdites par l'Interprofession de l'absinthe du Val-de-Travers/Suisse. Dans ce pays la macération semble n'être ainsi le fait que de liquoristes clandestins qui ne possèdent pas d'alambic. Ce n'est pas le cas dans d'autres pays, comme la France, où des absinthes macérées originales et de qualité sont aujourd'hui couramment produites et commercialisées.
L'arôme d'un distillat et d'une macération d'absinthe sont très différents. La simple macération tend à produire des absinthes plus amères et plus herbacées que la distillation. Contrairement aux affirmations selon lesquelles la simple macération ne serait pas un procédé de fabrication historique, le manuel Roret de 1888 propose une recette de « quintessence d'absinthe » par simple macération.
Selon les recettes, d'autres plantes peuvent compléter la recette comme l'angélique, lacoriandre, lavéronique, le calamus, lamenthe... Soit dans le processus de macération (avant distillation), soit dans le processus de coloration (après distillation).
Au début de la cuite, on sent très fort l'alcool ; à la fin les odeurs se diversifient. À ce moment-là, il faut être attentif et goûter à tout moment lablanquette qui coule blanche parce que l'alcool diminue rapidement. Sitôt que le goût risque de tourner aucachou, il faut retirer le récipient mais continuer de distiller et de récolter tout l'alcool qui reste, parce que ces arrière-goûts sont nécessaires à la prochaine cuite donnant à l'absinthe un bouquet complet, harmonieux et velouté.
La qualité de l'absinthe dépend beaucoup de la blanquette, si on la laisse trop couler, l'absinthe aura un goût de cachou. Si on en ajoute trop peu lors de la prochaine cuite, l'absinthe sera fade et insipide.
L'eau que l'on ajoute à l'alcool avant la distillation joue un rôle primordial, c'est elle qui relève le parfum des plantes. C'est pourquoi il faut bien en mesurer la quantité.
Pour colorer l'absinthe de manière naturelle, laisser couler l'absinthe au sortir de l'alambic dans une bonbonne qui contient des plantes de petite absinthe, de mélisse et d'hysope.
Alambic pour la fabrication artisanale de l'absinthe par macération. On voit les plantes d'absinthe utilisées pour la macération sécher derrière l'alambic, pendues contre le mur.
Quintessence d'absinthe (recette du manuel Roret de 1888) :
La thuyone entraîne des risques importants de convulsions mais il n'a pas pu être déterminé que l'absinthe favoriserait les crises d'épilepsie. Les études contemporaines pour déterminer les effets de la thuyone[45] sur le comportement (et aussi celles de la Rutgers University) montrent qu'il faudrait ingérer plusieurs litres d'absinthe pour parvenir à une dose toxique de thuyone. Les effets toxiques seraient alors bien sûr masqués par les effets toxiques de l'alcool seul. De même, leméthanol n'est toléré qu'à très faible dose du fait de ses effets neurotoxiques importants[46].
Il estégalement probable[réf. nécessaire] que les effets ressentis par certaines personnes soient dus à d'autres composants que la thuyone seule.
Avec la libéralisation de l'absinthe une multitude d'artisans et d'industries ont commencé à utiliser cet alcool ou cette plante dans leurs produits. Entre autres :
L'Absinthe ouPortrait du poète Cornuti est une aquarelle dePablo Picasso, de 1903, Collection particulière, Paris.
Madeleine au moulin de la galette deRamon Casas est une huile sur toile de 1892, buveuse d'absinthe dans une ginguette de Montmartre, Paris.
Jihel de son vrai nomJacques Lardie auteur de nombreuses planches ayant trait aux artistes et l'absinthe dans une série intituléeNos absintheurs traduites en cartes postales satiriques. Également une série de cartes postales sur le rassemblement annuel de Pontarlier (13 dessins connus).
Ciment de l'histoire pour des cartes satiriques sur le peintre Delacroix et l'absinthe.
Le Verre d'Absinthe parPablo Picasso, dont il réalise six exemplaires différents à Paris durant le printemps 1914, dont l'un est aujourd'hui conservé au MoMA à New York, et un autre auCentre Pompidou à Paris.
Ernest Hemingway évoque également l'absinthe dansL'Étrange Contrée (The Strange Country), nouvelle écrite vers 1950 et dansLe Jardin d'Eden (The Garden of Eden), dont l'action se déroule en France et en Espagne vers 1927.
Marcel Pagnol (souvenirs d'enfance), "Enfants, pour le poète il faudra sans retard, de l'absinthe aux yeux verts préparer le nectar".
Le poèmeOde à l'absinthe (trouvé vers 1906) est attribué àAlfred de Musset.
Daniel Fallstrom,Absinthe, 1903.
Gustave Kahn,Absinthe, mère des bonheurs..., La revue moderne et naturaliste, 1879.
Raoul Ponchon,L'Absinthe et le Cobaye,Five o'clock Absinthe (1920, inLa Muse au cabaret. Ce poème, écrit en français, a ensuite été traduit en anglais),L'Absinthe du mort,La Mort de Pelloquet (1906),Sonnet de l'Absinthe (1886, inLe Courrier Français).
August Strindberg,Coucher de soleil sur l'océan (1873),L'Été indien (1883).
Octave Féré et Jules Cauvain,La Chanson de l'Absinthe dans le romanLes buveurs d'absinthe, 1864.
Antoni Deschamps,Adversus Absynthium (À l'encontre de l'absinthe), 1847.
Dans le filmMoulin Rouge (2001) : l'absinthe est la boisson favorite des acteurs de« Spectacular ! Spectacular ! ».Ewan McGregor en boit à plusieurs reprises. La Fée verte, interprétée parKylie Minogue, représente l'absinthe.
Dans le filmFrom Hell (2001) :Johnny Depp dans le rôle de l'inspecteur visionnaire, boit l'absinthe mélangée à dulaudanum.
Dans le filmVan Helsing (2004) : Quand le chasseur de monstres Gabriel Van Helsing et la princesse Anna se réfugient sous le vieux moulin, ils trouvent des caisses d'absinthe dont ils boivent une bouteille, mais toutefois ils ne la distillent pas.
Dans la série téléviséeR.I.S Police scientifique,saison 5épisodes 1 et 2 (Mise à l'épreuve,partie 1 et 2) : Virgile Jaugaret meurt à cause de ses recherches sur l'absinthe après avoir découvert l'absinthe « véritable ».
Dans la série téléviséeHighlander,saison 1épisode 14 : Duncan McLeod combat un immortel assassin ayant un penchant très prononcé pour l'absinthe, considérée par un des personnages secondaires de l'épisode comme une boisson « rendant fou ». L'absinthe sert de fil conducteur durant tout l'épisode, amenant notamment à une distillerie clandestine permettant à McLeod de localiser son adversaire.
Dans l'épisode « Demi-monde » (saison 1,épisode 4) de la sériePenny Dreadful, Dorian prépare une absinthe à l'aide d'une « fontaine à absinthe ».
Dans la sérieAmerican Horror story (saison 5épisode 4 )le propriétaire de l'hôtel sert un verre d'absinthe à ses invités à l'occasion d'Halloween.
Dans la série animéBoJack Horseman (saison 1épisode 6) BoJack veut oublier ses problèmes et demande au barman de lui servir un alcool fort. Le barman ui propose d'abord du cyanure, qu'il refuse (boisson jugé trop forte) ; puis de laVodka (jugée "boisson des adolescents") ; pour qu'enfin il accepte de boire de l'absinthe.
Dans la série animéeThe Midnight Gospel, le président parle des substances et ses utilisations "bonnes ou mauvaises", d'où dit-il « Pour quelqu'un qui fait la fête, qui boit de l'absinthe puis qui doit conduire après pour rentrer : mauvaise idée ».
Dans le jeu d'aventureLes Chevaliers de Baphomet un ex-gendarme, assis à la terrasse du café de Montfaucon, boit en cachette de l'absinthe dans une flasque. Après lui avoir volé sa flasque, l'absinthe est utilisée pour plonger un client d'une galerie d'art dans un coma éthylique.
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Benoît Noël :Alfred Jarry écartelé entre l'Étoile-Absinthe et L'Étoile de Pierre, inL'Étoile-Absinthe, Tournée 134, 2015, Tusson (Charente), Du Lérot.
Pierre Chevrier et Pierre-Michel Delessert,100 eaux-de-vie, liqueurs et spiritueux extraordinaires, Issy-les-Moulineaux, Glénat, 2015.
Matthieu Frécon,L'Alambic - L'Art de la Distillation : Alcools, Parfums, Médecine, Genève, Ambre, 2015 et 2018.
Pierre Dornier, Philippe Del Fiol et Laurent Cheviet,Pontarlier Anis - Un siècle d'histoire de la Distillerie Guy, Pontarlier, Éditions du Belvédère, 2015.
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↑Benoît Noël, « Libelle en faveur de l'érection d'une statue de la Mère Henriod à Couvet », inBulletin de la 8e Fête de l'Absinthe de Boveresse, juin 2005.
↑Documentaire « La fée verte et le burnous. Philippe Grenier, de Blida à Pontarlier », d'Anaïs Kien et Véronique Samouiloff, émissionLa Fabrique de l'histoire, 20 mars 2012.
↑La couleur propre de l'absinthe à la fin de la distillation est blanche mais c'est la chlorophylle de lapetite absinthe et de l'hysope macérés qui lui donnent sa teinte verte.
↑En 1900, l'absinthe a conquis la France :25 distilleries dans la région dePontarlier, soit151 alambics et une production annuelle de30 millions de litres. Dans tous les cafés français le rituel de lafée verte fait fureur. Chacun verse de l'eau, goutte-à-goutte, sur unsucre posé sur une cuillère (appelée pelle) en équilibre au-dessus du verre
↑« Savez-vous que boit cet homme dans ce verre qui vacille en sa main tremblante d'ivresse ? Il boit les larmes, le sang, la vie de sa femme et de ses enfants. »
↑On y trouve au bas : « L'absinthe rend fou et criminel, provoque l'épilepsie et latuberculose, elle tue chaque année des milliers de Français. Elle fait de l'homme une bête féroce, de la femme une martyre, de l'enfant un dégénéré, elle désorganise et ruine la famille et ainsi l'avenir du pays ».
↑PierreJulien, « Médicament devenu poison, l'absinthe : Marie-Claude Delahaye, L'Absinthe. Histoire de la fée verte »,Revue d'Histoire de la Pharmacie,vol. 72,no 261,,p. 182–182(lire en ligne, consulté le).
↑« Quand régnait la " fée verte " »,Le Monde,(lire en ligne, consulté le).
↑Société économique politique etSociété de statistique de Paris. Comptes rendus,Journal des économistes, Paris : Guillaumin,(lire en ligne),p. 309.
↑LéonBonneff et MauriceBonneff,Marchands de folie : cabaret des Halles et des Faubourgs; Cabaret-Tâcheron; Cabaret-Cantinier; Cabaret-Placeur; Cabaret de luxe; l'Estaminet des mineurs; au pays du "Petit Sou": sur les quais de Rouen; au pays de l'Absinthe; de l'infirmerie spéciale du Dépôt à la maison de fous, Paris : Marcel Rivière,(lire en ligne).