Éris est découverte le par l'équipe deMichael E. Brown,Chadwick Trujillo etDavid Rabinowitz, duCalifornia Institute of Technology (Caltech) à l'observatoire Palomar, qui la surnomment d'abord« Xena », d'après lasérie téléviséeXena, la guerrière. L'annonce de sa découverte, précipitée à la suite des controverses liées à ladécouverte de Hauméa, est faite officiellement le. Sa taille, alors estimée comme étant beaucoup plus importante que celle de Pluton[a], fait qu'elle est initialement qualifiée dedixième planète du Système solaire par ses découvreurs et les médias. Cette qualification, ainsi que la perspective de découvrir d'autres objets similaires à l'avenir, incitent l'Union astronomique internationale (UAI) à définir le terme « planète » pour la première fois de façon formelle. Seloncette définition approuvée le, Éris est une planète naine, au même titre que Pluton etCérès, définition qui sera ensuite également appliquée àHauméa etMakémaké. En, l'UAI décide par ailleurs de classer Éris dans la catégorie desplutoïdes, les planètes naines orbitant plus loin queNeptune. Elle porte le nom de ladéesse grecque de ladiscorde,Éris, par allusion au conflit que sa découverte a provoqué parmi les astronomes au sujet des critères définissant une planète.
Animation montrant le mouvement d'Éris (pointée par la flèche) sur trois images prises en trois heures et ayant permis la découverte[12].
L'existence d'Éris est constatée le par Mike Brown et son équipe, qui lui donnent le surnom de « Xena » et commenom de code K21021C[10],[13]. Elle suit la découverte par QUEST de(136108) Hauméa (alors surnommée « Santa ») réalisée en et précède la découverte de(136472) Makémaké (alors surnommée « Easter Bunny ») en[14]. Toutefois, l'équipe de Caltech décide de n'annoncer publiquement aucune de ces découvertes, et garde secrète l'information de l'existence d'Éris ainsi que de plusieurs autres grandsobjets transneptuniens, en attendant des observations supplémentaires pour mieux déterminer leur nature[15],[16],[17],[18]. Lors de ces recherches, elle constate que, bien que Xena soit trois fois plus éloignée que Pluton et 30 % plus éloignée que Sedna, elle est six fois plus lumineuse[13]. Ceci les amène à penser qu'elle est plus grande que les deux autres en supposant unalbédo usuel de 0,6 à 0,7 pour l'objet[19].
Des images d'unepré-découverte sont ensuite retrouvées, le plus ancien cliché d'Éris datant du, sans qu'elle ne soit relevée à l'époque[2],[20].
L'annonce de ladécouverte de Hauméa, ici imagée parHubble avec ses lunesHiʻiaka etNamaka, par une autre équipe que Caltech précipite l'annonce de la découverte d'Éris.
Le, l'équipe de Caltech publie un résumé en ligne d'un rapport destiné à présenter Hauméa en septembre où il est précisé que l'objet pourrait être plus grand et plus brillant que tout objet précédemment connu dans laceinture de Kuiper[15],[22],[23]. Une semaine plus tard, l'équipe espagnole, annonçant que Pablo Santos Sanz — un élève de José Luis Ortiz — a découvert l'objet indépendamment le grâce à des images datant de à l'observatoire de Sierra Nevada, envoie en premier un rapport auCentre des planètes mineures (MPC) qui est officiellement diffusé le,[24],[25]. Dans un communiqué de presse publié le jour même, l'équipe de José Luis Ortiz qualifie Hauméa de« dixième planète »[26], choix que Mike Brown critiquea posteriori car l'équipe espagnole n'avait pas assez d'informations pour l'affirmer, notamment sur sa masse[17].
Mike Brown se rend rapidement compte qu'il s'agit du même objet qu'il suivait et qu'il est possible d'accéder directement aux rapports de l'observatoire de Kitt Peak, qu'il avait utilisé pour des vérifications d'orbites, en cherchant viaGoogle le code utilisé dans son rapport public[27],[28],[29]. Il constate alors que les positions deXena (Éris) et d’Easter Bunny (Makémaké) sont accessibles[30],[31]. Craignant de se faire également doubler pour celles-ci, il décide de ne pas attendre octobre pour les révéler et envoie le jour même au MPC les informations permettant d'officialiser leur découverte, qui sont donc aussi publiées le[32],[33]. Le soir, lebureau central des télégrammes astronomiques (CBAT) publie une circulaire annonçant la découverte presque simultanée des trois grands objets[34],[31]. Mike Brown fait en parallèle une conférence de presse sur le sujet de la découverte d'Éris — le plus grand objet des trois, dont on pense alors qu'il dépasse en taille Pluton — la présentant elle comme la dixième planète plutôt que Hauméa[28]. Si la paternité de la découverte de Hauméa est discutée entre l'équipe espagnole et Caltech en raison de cette controverse, la première ayant notamment été accusée defraude scientifique par la seconde, l'équipe américaine est totalement reconnue comme découvreurs d'Éris et de Makémaké[28],[35],[6].
Éris est nommée d'après ladéesse grecqueÉris (engrecἜρις), une personnification de ladiscorde[6],[36]. Le nom est proposé par l'équipe de Caltech le et est officiellement attribué par le biais d'une circulaire duBureau central des télégrammes astronomiques le, à la suite d'une période inhabituellement longue pendant laquelle l'objet est connu par sadésignation provisoire2003 UB313, automatiquement donnée par l'Union astronomique internationale suivant le protocole dedésignation des planètes mineures. Ce délai dans l'attribution du nom est causé par l'incertitude du statut de l'objet à l'époque, à savoir planète ou objet mineur, car différentes procédures de nomenclatures s'appliquent pour ces différentes classes d'objets[36],[7]. La désignation des planètes mineures et autres petits corps implique de donner aux corps dont l'orbite est connue avec certitude un numéro définitif[37]. Éris possède le numéro 136199 et sa désignation scientifique officielle complète est donc (136199) Éris[7].
Avant cette désignation définitive, deux surnoms sont utilisés pour l'objet dans les médias. Le premier, « Xena » est le nom informel utilisé par l'équipe de Caltech, d'après l'héroïne éponyme de la série téléviséeXena, la guerrière, qui était toujours diffusée à la télévision à l'époque[38],[39]. Selon Mike Brown, ils avaient conservé ce surnom pour le premier objet découvert plus grand que Pluton car débutant par un X et symbolisant laplanète X[13],[38]. De plus, il sonne mythologique et ils souhaitaient faire en sorte qu'il y ait plus de divinités féminines parmi les objets transneptuniens ; comme pourSedna[38]. Cependant, ils n'avaient pas pour objectif que ce surnom soit diffusé et c'est un journaliste duNew York Times qui permet sa popularité à la suite d'une discussion avec Mike Brown[40]. D'aprèsGovert Schilling, Mike Brown aurait d'abord souhaité appeler définitivement l'objet « Lila », d'après un concept de lamythologie hindoue ressemblant à « Lilah », le nom de sa fille qui venait de naître[41]. Brown choisit de ne pas rendre ce nom public avant qu'il ne soit officiellement accepté car il avait été fortement critiqué un an plus tôt en violant ce protocole pourSedna[42],[43]. Cependant, sa page Web personnelle annonçant la découverte avait pour adresse/~mbrown/planetlila et dans le chaos à la suite de ladécouverte de Haumea, il oublie de la modifier avant de publier. Plutôt que de relancer une controverse similaire à celle de Sedna, il dit simplement que la page Web est nommée d'après sa fille et abandonne ensuite l'idée de nommer l'objet « Lila »[41]. Par ailleurs, Diane, la femme de Mike Brown était de toute manière contre le fait que ce nom soit utilisé afin de faire secrètement référence à leur fille en raison des potentielles conséquences que cela pourrait avoir sur l'enfant[43].
L'équipe de Caltech suggère également « Perséphone », l'épouse du dieuPluton[12]. Le nom avait déjà été utilisé plusieurs fois par l'auteur descience-fictionArthur C. Clarke[44] et est alors populaire auprès du public, ayant notamment remporté un sondage mené parNew Scientist[45]. Dans ce dernier, « Xena », en dépit d'être seulement un surnom, arrive quatrième[45]. Cependant, ce choix devient impossible lorsque l'objet est annoncé comme une planète naine car il existe déjà unastéroïde portant ce nom,(399) Perséphone[12],[46].
Pour justifier Éris, le choix final de l'équipe de Caltech, Mike Brown explique que l'objet a été considéré comme uneplanète pendant si longtemps qu'il mérite donc un nom de lamythologie grecque ou romaine, comme les autres planètes. Éris, qu'il décrit par ailleurs comme sa déesse préférée, est dans la mythologie grecque responsable de conflits et de discordes, notamment laguerre de Troie[36]. L'astronome fait alors le rapprochement avec la controverse sur la définition d'une planète qu'a lancée la découverte de l'objet[47],[48],[49]. Le nom du satellite d'Éris,Dysnomie, qui est celui dela déesse grecque de l'anarchie, conserve cette idée. Avant d'être officiellement désigné, il était surnommé « Gabrielle » par ses découvreurs, d'après l'acolyte de Xena dans la série télévisée[38],[49]. Le clin d'œil à la série est ainsi conservé, puisqu'enanglais, l'anarchie se ditlawlessness et que l'actrice interprétant Xena estLucy Lawless[49],[50].
Simulation dumodèle de Nice montrant les planètes extérieures et la ceinture de Kuiper, à l'origine de l'orbite excentrique d'Éris[57] : 1. avant queJupiter etSaturne n'atteignent une résonance de 2:1 ; 2. après la diffusion vers l'intérieur des objets de laceinture de Kuiper à la suite du déplacement orbital deNeptune ; 3. après éjection des corps dispersés de la ceinture de Kuiper par Jupiter.
Bien que sa forteinclinaison orbitale soit inhabituelle parmi la plupart des autresobjets épars connus, les modèles théoriques — comme lemodèle de Nice — suggèrent que les objets épars qui étaient à l'origine près du bord intérieur de la ceinture de Kuiper auraient été dispersés sur des orbites avec des inclinaisons plus élevées que les objets de la ceinture externe. Comme la ceinture de Kuiper interne devrait être généralement plus massive que l'externe, les astronomes expliquent ainsi la présence d'Éris et des autres gros objets avec de hautes inclinaisons orbitales, tandis que celles-ci étaient auparavant négligées et les observations concentrées près de l'écliptique[58],[59],[60].
Éris étant initialement considérée comme plus grande quePluton, elle est annoncée comme la « dixième planète » duSystème solaire par laNASA et dans les rapports des médias sur sa découverte[61],[62]. En réponse à une incertitude concernant son statut et en raison du débat sur la question de savoir si Pluton devrait toujours être classée commeplanète, l'Union astronomique internationale (UAI) délègue à un groupe d'astronomes le soin de développer une définition suffisamment précise du terme planète pour trancher la question[56],[63]. Éris et Pluton étant semblables en de nombreux points, il apparaît qu'elles doivent être classées dans la même catégorie et, fin 2005, Mike Brown suggère par exemple comme critère qu'un nouvel objet découvert serait une planète s'il était plus grand que Pluton, arguant le poids de la tradition pour conserver Pluton en tant que planète. Cette proposition est jugée orientée car Éris est alors considérée comme plus grande que Pluton et il se retrouverait donc découvreur de la dixième planète[63].
Ladéfinition des planètes de l'Union astronomique internationale est adoptée le[64],[62]. Éris et Pluton deviennent toutes deux classées comme desplanètes naines, une catégorie distincte de la nouvelle définition de planète. Ce choix est alors très controversé et de nombreux astronomes déclenchent différentes formes de protestation et de pétitions afin que Pluton reste une planète[65]. Cependant, à la surprise de beaucoup, Mike Brown approuve cette décision même si cela implique que sa découverte ne sera pas une planète. Il publie tout de même un« Requiem pour Xena » sur son site le lendemain de la décision[49],[66]. L'UAI ajoute ensuite en l'objet à soncatalogue des planètes mineures, la désignant(136199) Éris[7].
La nouvelle sous-catégorie des « plutoïdes », dont fait partie Éris, est officiellement créée par l'UAI lors d'une réunion de son comité exécutif àOslo le[67],[68].
Quelques mois plus tard, en, l'équipe deMike Brown publie leur valeur du diamètre d'Éris à2 397 ± 100 km à l'aide des images prises par letélescope spatialHubble depuis 2003[56],[71]. Sa taille est déduite du fait que la luminosité d'un objet dépend à la fois de sa taille et de sonalbédo[5],[71]. Éris serait donc 4 % plus grande que Pluton et son albédo serait de 0,96, ce qui en ferait l'objet le plus brillant du Système solaire aprèsEncelade, unsatellite naturel deSaturne[71],[72]. Cet albédo élevé pourrait être causé par sa surface glacée, réalimentée par les fluctuations de température selon que l'orbite excentrique d'Éris l'amène plus ou moins près du Soleil[5],[71]. Au sujet de l'importante différence entre les résultats du télescopeHubble et ceux de l'IRAM, Mike Brown explique avoir réalisé une approximation de lamagnitude absolue légèrement inférieure à celle supposée auparavant (−1,12 ± 0,01 contre−1,16 ± 0,1), ce qui crée des différences sur le diamètre calculé[5].
En, une série d'observations des plus gros objets transneptuniens par letélescope spatialSpitzer fournit une autre approximation d'Éris avec un diamètre estimé encore plus grand de2 600+400−200km, impliquant que la planète naine pourrait être jusqu'à 30 % plus grande que Pluton[73]. Ainsi, au vu de ces trois observations, la connaissance scientifique en 2008 permet toujours d'« affirmer avec certitude qu'Éris est plus grand que Pluton »[69].
Schéma de l'occultation d'une étoile par Éris le ayant permis de mesurer sa taille[74].
La composition interne d'Éris est pour l'instant inconnue mais pourrait être proche decelle de Pluton[85][78]. S'il y a eudifférenciation planétaire, elle pourrait avoir unnoyau rocheux. Grâce à sa masse connue et sa taille vérifiée avec une bonne précision lors de l'occultation de 2010, une première mesure de lamasse volumique d'Éris est faite à2,52 ± 0,05g/cm3[79], réévaluée en 2021 à2,43 ± 0,05g/cm3[3]. C'est bien plus que celle de Pluton, estimée à1,75g/cm3[79]. Ainsi, ladensité voisine de 1 des glaces détectées en surface doit être compensée par une masse rocheuse, de densité de l'ordre de 4 ou 5, en proportion égale aux glaces d'eau etsubstances volatiles (azote,méthane,oxyde de carbone)[86]. En proportions, Éris serait un gros corps rocheux couvert d'un modeste manteau de glace d'une centaine de kilomètres d'épaisseur, les deux composantes comptant pour des proportions d'environ 70 et 30 %, avec plus de roches que Pluton car la densité d'Éris est plus élevée[87]. Ces roches pourraient affleurer à la surface sans être visibles car dépourvues de signatures spectrales caractéristiques, ou bien être recouvertes d'une couche de glace[86]. Cependant, toutes ces suppositions restent incertaines et critiquables car elles reposent sur la taille et la densité de la planète naine, qui ne sont pas connues de façon suffisamment certaine[87].
Avec une teneur en glace d'eau de l'ordre de 50 % ou plus pour la masse d'Éris, la présence en profondeur d'eau liquide sous l'effet de la haute pression est envisageable dans les couches profondes, coexistant avec de la glace sous haute pression[88]. Les modèles dechauffage interne pardésintégration radioactive suggèrent de façon concordante qu'Éris pourrait être dotée d'unocéan subglaciaire à la limite entre le manteau et le noyau[89]. En 2025, une modélisation de l'évolution thermo-orbitale d'Éris confirme qu'il est difficile de l'expliquer sans postuler l'existence d'unocéan sous-glaciaire[90].
La seule façon de déduire les caractéristiques de surface d'Éris depuis la Terre ou ses environs est d'utiliser des moyens indirects comme l'analyse spectrale[87]. Lespectre électromagnétique d'Éris est observé par le télescope de 8 mètresGemini North àHawaï le[91],[87]. L'analyse infrarouge de l'objet révèle la présence de glace deméthane — et potentiellement de glace d'azote —, indiquant que la surface d'Éris semble être similaire àcelle de Pluton[85][87],[91],[92]. Il s'agit du troisième objet transneptunien sur lequel du méthane est détecté, après Pluton et sa luneCharon. Par ailleursTriton, unsatellite naturel deNeptune, semble être d'origine similaire aux objets de laceinture de Kuiper et possède également du méthane à sa surface[91]. D'autres analyses ultérieures amènent à modéliser et à diviser la surface de la planète naine en deux parties : une couverte de glace de méthane presque pure et l'autre d'un mélange de glaces de méthane, d'azote et d'eau, ainsi que detholins[93],[94]. La concentration en azote dans la surface pourrait varier en fonction de la profondeur et des variationssaisonnières[95].
Les spectres infrarouges d'Éris (en rouge) et dePluton (en noir) mettent en évidence leurs lignes d'absorption du méthane communes[92].
Cependant, à la différence de Pluton et Triton, Éris semble être de couleurgrise voireblanche[87],[12]. La couleurrougeâtre de Pluton est probablement due à des dépôts detholin sur sa surface, assombrissant celle-ci en augmentant sa température et provoquant donc l'évaporation des dépôts de méthane[11]. En comparaison, Éris se situe assez loin du Soleil pour que le méthane se condense sur sa surface même là où sonalbédo est faible. Cette condensation uniforme sur toute la surface recouvrirait en grande partie les dépôts de tholin rouge[11].
Du fait de son orbite, la température de surface d'Éris devrait varier entre30 et 56K (−243 °C et−217 °C)[87],[12],[78]. Le méthane étant très volatil, sa présence indique qu'Éris a toujours résidé dans une région lointaine du Système solaire où la température est suffisamment froide ou qu'elle possède une source interne de méthane pour compenser la perte de gaz hors de son atmosphère[87],[96]. Ces observations contrastent avec celles d'une autre planète naine transneptunienne,Hauméa, qui possède de laglace d'eau mais pas de méthane[96].
Éris apparaît extrêmement brillante : son albédo très élevé de 0,96 implique qu'elle réfléchit jusqu'à 96 % de la lumière du Soleil, ce qui est bien davantage que les 80 % constatés avec de laneige fraîche par exemple[72]. Pour expliquer ce phénomène,Bruno Sicardy, enseignant-chercheur auLESIA, propose :« Cet éclat pourrait s'expliquer par la jeunesse ou fraîcheur du sol gelé : il ne date pas des origines du Système solaire. Au fur et à mesure qu'Éris s'approche ou s'éloigne du Soleil sur son orbite, son atmosphère d'azote se condense en fine couche brillante d'environ un millimètre d'épaisseur. Puis, elle se volatilise de nouveau »[97],[98].
Cette luminosité permet de suggérer qu'Éris possède une atmosphère, potentiellement jumelle decelle de Pluton[85],[87],[97]. Lorsque Éris est aupérihélie, à environ 37,77 UA, son atmosphère serait maximale : à la surface, certaines régions sont très brillantes, du fait de restes de glace d'azote, et des régions sombres, composées d'hydrocarbures complexes relevées par lasublimation des glaces. Ce sera le cas dans environ 250 ans et l'atmosphère d'Éris sera alors au plus proche de celle actuelle de Pluton, avec unepression atmosphérique proche dumicrobar[92],[99]. Quand Éris s'éloigne du Soleil, son atmosphère secondense et recouvre la surface de glace fraîche. À son point le plus éloigné, les glaces s’assombrissent sous l'effet desrayonnements ultraviolets et des composés complexes se forment. À l'approche de son périhélie suivant, les glaces commencent à se sublimer à nouveau[87],[78],[100].
Quant à sapériode de rotation, elle était estimée à 25,9 heures[78],[102]. Cette mesure reposait notamment sur un calcul à l'aide dutélescope spatialSwift et de mesures au sol permettant de garantir cette mesure avec une certitude statistique de 99 %[103]. Cependant, d'autres calculs à partir des données du télescope spatialHubble aboutissent à une valeur bien plus élevée de 14,56 ± 0,10 jours et indiquent queDysnomie serait pratiquement enrotation synchrone avec sapériode de révolution d'environ 15,79 jours[104].
En novembre 2022, une étude deR. Szakátset al., basée sur de nouvelles données decourbe de lumière d'Éris prises avec des télescopes au sol de classe ∼1-2 mètres et avec les télescopes spatiaux TESS etGaia, montre une période de courbe de lumière égale à la période orbitale de Dysnomie, 15,8 jours, avec une amplitude de courbe de lumière de 0,03 magnitude, ce qui signifie qu'Éris a une rotation synchrone. En supposant que Dysnomie a une origine collisionnelle, les calculs avec un modèle d'évolution de marée simple montrent que Dysnomie doit être relativement massif (rapport de masse de 0,01 à 0,03) et grand (rayon de ≥ 300 km) pour ralentir Éris en rotation synchrone. Ces simulations indiquent également que, en supposant des paramètres de marée habituellement pris en compte pour les objets transneptuniens, la masse volumique de Dysnomie devrait être de1,8 à2,4g/cm3, une valeur exceptionnellement élevée parmi des objets transneptuniens de taille similaire, imposant des contraintes importantes sur les conditions de formation[4].
Diagrammes illustrant l'orbite d'Éris par rapport à celles deSaturne, d'Uranus, deNeptune et dePluton (en blanc et gris).
Éris possède uneorbite fortementexcentrique qui l'amène à 38 UA duSoleil à sonpérihélie et à 97,56 UA à sonaphélie, avec unepériode orbitale de 559 ans[56],[105],[106]. Contrairement aux huit planètes, dont les orbites se trouvent toutes à peu près dans le même plan que celui de laTerre, l'orbite d'Éris est très fortementinclinée : elle forme un angle d'environ44degrés par rapport l'écliptique[56],[2]. Comme la date du périhélie est définie à l'époque choisie à l'aide de la solution parcalcul numérique d'unproblème à deux corps, plus l'époque est éloignée de la date du périhélie, moins le résultat est précis. LeJet Propulsion Laboratory Horizons arrive après simulation à la conclusion qu'Éris est arrivée au périhélie vers 1699, à l'aphélie vers 1977, et sera de retour à son périhélie vers 2257[56],[107],[108].
Distances d'Éris et de Pluton par rapport au Soleil de2007 à 3007.
Éris est dans les années 2020 située à environ 96 UA du Soleil, presque à son aphélie, ce qui implique qu'il faut plus de neuf heures aux rayons duSoleil pour l'atteindre[78]. Lorsqu'ils sont découverts, Éris etDysnomie sont les objets connus les plus éloignés du Système solaire, à l'exception descomètes de longue période et dessondes spatiales commeVoyager 1 et2 ouPioneer 10[56],[12]. Cela reste le cas jusqu'en 2018, après la découverte de2018 VG18[109]. Cependant, avec undemi-grand axe de près de 68 UA, ce n'est pas l'objet non cométaire dont le périhélie est le plus lointain, ni l'objet non cométaire possédant la période de révolution la plus longue. Ainsi, dès 2008, plus de quarante objets transneptuniens connus étaient plus proches du Soleil qu'Éris même si leur demi-grand axe est plus grand, comme1996 TL66,2000 CR105,2000 OO67,2006 SQ372 ou(90377) Sedna[110].
Le périhélie d'Éris d'environ 38 UA est typique desobjets épars et, bien qu'intérieur à l'orbite de Pluton, la met en principe à l'abri de l'influence deNeptune, dont le demi-grand axe est à 30 UA du Soleil[85][56],[105],[111]. Pluton, en revanche, comme les autresplutinos, suit une orbite moins inclinée et moins excentrique et, protégé par lesrésonances orbitales, peut traverser l'orbite de Neptune[112]. Dans environ huit siècles, Éris sera plus proche du Soleil que Pluton pendant quelques dizaines d'années[113]. Elle aurait été formée dans le bord interne de laceinture de Kuiper et influencée par Neptune alors que le Système solaire se formait, ce qui explique sa position et sa forte inclinaison orbitale[114].
Diagramme desobjets transneptuniens en fonction de leur distance au Soleil et de leur inclinaison orbitale. Éris est en haut à droite.
Lamagnitude apparente d'Éris est d'environ 19, ce qui la rend suffisamment brillante pour être détectable par certainstélescopesamateurs[115],[56],[85]. Par exemple, un télescope de 200 mm avec uncapteur photographique CCD peut détecter Éris dans des conditions favorables[115]. Grâce à son fort albédo de 0,96, Éris serait 50 % plus lumineuse que Pluton si elle était ramenée à la même distance que l'autre planète naine[39].
En raison de la forte inclinaison de son orbite, Éris reste de nombreuses années dans la même constellation duzodiaque traditionnel[108]. Elle se trouve depuis 1929 dans la constellation de laBaleine et entrera en 2036 dans lesPoissons. Elle se trouvait dans leSculpteur de 1876 à 1929 et dans lePhénix d'environ 1840 à 1875. Après son entrée en 2065 dans leBélier, elle passera dans l'hémisphère céleste nord : en 2128 dansPersée et en 2173 dans laGirafe où elle atteindra sadéclinaison nord maximale[108].
Éris possède un uniquesatellite naturel connu, nomméDysnomie (officiellement : (136199) Éris I Dysnomie). Il est découvert par l'équipe de Michael E. Brown le avec un télescope de 10 mètres à l'observatoire W. M. Keck,Hawaï, et annoncé officiellement le[117],[118]. Sa découverte est le résultat de l'utilisation d'un nouveau système àétoile guide laser par l'équipe d'optique adaptative pour les quatre plus brillantsobjets transneptuniens (Pluton,Makémaké,Hauméa et Éris)[117]. Sa cause de formation la plus probable, tout comme pour la quasi-totalité des autres lunes d'objets transneptuniens, serait une collision suivie d'uneaccrétion des débris autour de l'objet massif restant[104],[119]. L'orbite du satellite aurait pu grandement évoluer depuis la collision qui l'a amené à se former et la présence d'autres satellites non encore découverts n'est pas à exclure[120].
Dysnomie porte d'abord ladésignation provisoire « S/2005 (2003 UB313) 1 », type de dénomination usuel pour un satellite. Puis, après que « 2003 UB313 » a reçu le nom officieux de « Xena », l'équipe décide de surnommer le satellite « Gabrielle », d'après le prénom de l'acolyte dupersonnage fictif[38],[49]. Après qu'Éris ait reçu son nom définitif, le choix pour « Dysnomie » est fixé en, en référence à la déesse grecque de l'anarchieDysnomie (engrecΔυσνομία), qui est fille d'Éris[36],[78]. Brown révèle par ailleurs que le choix a été motivé par la similitude du nom avec celui de sa femme, Diane[49].
Elle est probablement la deuxième plus grande lune d'une planète naine, aprèsCharon orbitant autour de Pluton, et reste parmi les douze plus gros objets transneptuniens connus avec un diamètre estimé à 700 ± 115 km (25 % à 35 % du diamètre d'Éris)[122]. Sa période de révolution autour d'Éris est de 15,785 899 ± 0,000 050 jours avec une légèreexcentricité orbitale de 0,0062 et undemi-grand axe de 37 430 km[79],[3]. Ces observations détaillées de l'orbite de Dysnomie autour d'Éris permettent de connaître précisément la masse de la planète naine et du système grâce à latroisième loi de Kepler[79],[80],[81],[82]. Il est estimé que la prochaine série detransits du satellite devant la planète naine se produira en 2239[3].
Éris n'a jamais été survolée par unesonde spatiale — c'est par ailleurs le plus grand objet du Système solaire qui n'a jamais été survolé — mais dans les années 2010, à la suite du succès du survol de Pluton par la sonde spatialeNew Horizons, plusieurs études sont menées pour évaluer la faisabilité d'autres missions de suivi pour explorer laceinture de Kuiper et au-delà[123]. Des travaux préliminaires d'élaboration de sonde destinée à l'étude du système éridien existent, la masse de la sonde, la source d'alimentation énergétique et les systèmes de propulsion étant des domaines technologiques clés pour ce type de mission[124],[125].
On estime qu'une mission desurvol d'Éris pourrait prendre 24,66 ans en utilisant uneassistance gravitationnelle deJupiter, sur la base d'une date de lancement en ou en. Éris serait à 92,03 UA duSoleil à l'arrivée de la sonde[124].
↑Les premières estimations donnaient un diamètre atteignant 3 600 kilomètres, plus d'une fois et demi celui de Pluton, mais cette valeur a été grandement précisée et revue à la baisse grâce à uneoccultation stellaire d'Éris observée en 2010.
↑« The trans-neptunian object UB313 is larger than Pluto » - F. Bertoldi, W. Altenhoff, A. Weiss, K.M. Menten & C. Thum.
↑Christopher R. Glein, William M. Grundy, Jonathan I. Lunine, Ian Wong, Silvia Protopapa, Noemi Pinilla-Alonso, John A. Stansberry, Bryan J. Holler, Jason C. Cook, Ana Carolina Souza-Feliciano,Moderate D/H ratios in methane ice on Eris and Makemake as evidence of hydrothermal or metamorphic processes in their interiors: Geochemical analysis, Icarus, Volume 412, 2024,https://doi.org/10.1016/j.icarus.2024.115999
La version du 1 juin 2021 de cet article a été reconnue comme « article de qualité », c'est-à-dire qu'elle répond à des critères de qualité concernant le style, la clarté, la pertinence, la citation des sources et l'illustration.