Şanlıurfa (souvent appelée simplementUrfa) est une ville du sud-est de laTurquie. Elle fut d'abord nomméeUrhai (enarménien, ouOrhai, enaraméen),Rohais, Édesse (ouÉdessa), puis Urfa et aujourd'hui Şanlıurfa ouRiha enkurde. Le nom antique d'Édesse estOsroé, qui provient peut-être du nom dusatrape Osroès qui gouverna la région. Selon la légende,Adam etÈve séjournèrent dans la cité, qui serait la ville natale d'Abraham et qui abriterait la tombe de sa femmeSarah. D'autres textes désignent la ville comme celle de Rûh, l'une des villes construites après leDéluge.
Plus tard, lors de la victoire d'Alexandre le Grand (-336/-323) sur les Persesachéménides et de sa libération, Urhai est occupée par une populationaraméenne. En-303, lesMacédoniens reconstruisent la ville et la rebaptisent Édesse, en souvenir d'une cité de leur pays (selon l'historien et le géographe grecAppien etÉtienne de Byzance). La ville devient alors la capitale de la province d'Osroène et est peuplée, ainsi que plusieurs autres villes, de vétérans de l'armée.
Vers-132 (ou-136), un chef de tribu,Aryu (ou Ariou,-132/-127 ou-136/-127), s'affranchit desSéleucides qui gouvernent la ville et fonde un royaume (ou principauté) indépendant avec Édesse pour capitale. À part quelques souverains d'originearménienne ouparthe, la plupart sont alorsnabatéens. Ce royaume, quelquefois appelé principauté desAbgar (11 souverains porteront ce nom), parvient à conserver son autonomie pendant près de quatre siècles, malgré les divers conquérants qui traversent son histoire.
SelonPline l'Ancien, à l’époque romaine, les habitants sont desArabes et leurs souverains auraient porté le titre dephylarque (chef d’une phylé) outoparque (magistrat). Le royaume s'étend au nord jusqu'auxMonts Taurus, à l'ouest jusqu'à l'Euphrate, qui le sépare de laCommagène, et à l'est jusqu'auTigre. Il comprend, à part Édesse, des villes importantes comme Carrhes (Harran),Nisibe (en Mésopotamie), Rhesaena,Saroug,Singara (Sinjar,Irak),Zeugma sur l'Euphrate, qui est la réunion des villes d'Apamée (rive gauche) et deSéleucie de l'Euphrate (rive droite) et un passage obligé pour les caravanes.
À l'époque dupremier triumvirat, Édesse est l'alliée desRomains. Le proconsulCrassus, à la tête d'une armée de 42 000 hommes, franchit l'Euphrate sur les conseils d'Abgar II Bar Abgar et attaque laMésopotamie dans le but de prendreSéleucie du Tigre. Mais il est trahi par Abgar II qui se range du côté desParthes. Crassus est battu à labataille de Carrhes et doit fuir enArménie (selonPlutarque, v.48-125). Ce serait sousAbgar V Ukomo ou Ukkama Bar Ma'Nu, que lechristianisme aurait été prêché pour la première fois à Édesse parThaddée d'Édesse (ou Jude, cousin deJésus-Christ). Dans la réalité, le règne d'Abgar IX paraît plus probable. Quoi qu'il en soit, Abgar V contribue beaucoup à la propagation du christianisme parmi ses sujets. Mais un de ses successeurs, son arrière-petit-fils, revient aupaganisme.
Plus tard,Abgar VII Bar Ezad est détrôné par l'empereur romainTrajan, qui garde la ville sous sa tutelle deux ans, avec de nombreuses destructions (guerre de Kitos), avant de la laisser à deux princes étrangers,Yalur etParthamaspatès. En123,Ma'Nu VII Bar Ezad, frère d'Abgar VII, réussit à reprendre le trône. À partir de cette époque, comme beaucoup de régions sous tutelle romaine, les monnaies sont frappées avec l'effigie du souverain régnant d'un côté et celle de l'empereur romain de son époque au dos. En163,Wa'Il Bar Sahru prend lesParthes comme alliés dans sa lutte contre les Romains.
Vers204,Abgar IX se convertit auchristianisme. À la suite de cette conversion, le christianisme syriaque se développa autour d'Édesse et de nombreux monastères furent construits, en particulier celui de la colline, le Torâ-dOurhoï.
Bassin Ayn-i Züleyha
En216, sous le règne d'Abgar X Severus Bar Abgar (IX), l'empereur RomainCaracalla s'empara définitivement du petit royaume, qui devint uneprovince romaine. Cependant on a trouvé des monnaies au nom d'unMa'Nu IX Bar Abgar(X) Severus et d'unAbgar XI Farhat Bar Ma'Nu avec sur l'autre face la tête de l'empereur romainGordien III le Pieux, ce qui laisse supposer aux spécialistes que les Romains laissèrent encore quelque temps des souverains en place.
En262, le roi des PersessassanidesChahpuhrIer occupa brièvement Édesse puis l'abandonna du fait de l'arrivée du roi dePalmyreOdenath II venu défendre la ville. Celui-ci, allié de l'empereur romainGallien, était chargé de la défense de ses territoires en Orient.
À partir de250, Édesse, où le christianisme avait bien progressé, accueillit leschrétiens chaldéens, chassés dePerse par lesSassanides. Dans la ville même existaient des sources (auxquelles les Grecs donnèrent le nom dekallirroé) qui sont encore connues aujourd'hui. Les carpes sacrées toujours élevées dans le bassin (Ayn-i Züleyha), sont la manifestation de la légende du miracle d'Abraham. Selon celle-ci, ce serait à cet emplacement que le roi d'AssyrieNimrod aurait jeté Abraham dans une fournaise qui se changea aussitôt en eau poissonneuse.
À l’invitation deThoros, seigneur arménien d’Urfa, qui souhaitait s’allier avec les croisés contre ses ennemis, Baudouin de Boulogne, l’un des comtes croisés, arriva dans la ville. Peu après son arrivée, Toros fut assassiné, et le 10 mars 1098, Baudouin prit le contrôle de la ville et y fonda le Comté croisé d’Édesse (Urfa). Il imposa le catholicisme à la majorité syriaque et arménienne. En 1106, le sultan seldjoukide d’Anatolie,Kılıç Arslan Ier, marcha sur le Comté d’Urfa et assiégea la ville, mais ne parvint pas à franchir ses solides murailles. Après environ cinquante ans de domination franque, les tensions entre les Francs et les Byzantins, ainsi que la haine mutuelle entre les seigneurs croisés d’Urfa et d’Antioche, créèrent un contexte favorable à une attaque. Imadeddin Zengi, gouverneur de Mossoul et d’Alep, profita de l’absence du comte croiséJoscelin II pour se diriger vers Urfa. Il proposa aux habitants de se rendre, mais les chefs religieux syriaques et arméniens refusèrent. Les murailles furent alors attaquées par des catapultes, et après un siège d’environ quatre semaines, les Turcs prirent la ville le 24 décembre 1144. Ali Küçük fut nommé gouverneur d’Urfa, avec à ses ordres une garnison et sept commandants. Cette victoire est considérée comme le premier grand succès des musulmans contre les croisés, mais elle devint aussi l’une des principales causes de la deuxième croisade. Après la reconquête d’Urfa, Imadeddin Zengi expulsa une partie des Arméniens, accorda des droits aux Syriaques et fit venir 300 familles juives, connues pour leur proximité avec les musulmans, pour s’installer à Urfa. Il est rapporté qu’une synagogue se trouvait à l’emplacement de l’actuelle mosquée Hasan Padişah dans le centre d’Urfa. En 1182, la ville passa sous le contrôle deSaladin et resta longtemps sous la domination des Ayyoubides. En 1251, elle fut pillée par les Mongols, puis remise àHulagu Khan. Après la défaite mongole face aux Mamelouks lors de labataille d’Aïn Jalout en 1260, Urfa passa sous domination mamelouke.
Cette section est vide, insuffisamment détaillée ou incomplète.Votre aide est la bienvenue !Comment faire ?
Edesse, disputée pendant lesguerres ottomano-persanes, est reprise de manière définitive par lesOttomans en 1637. Elle prend alors le nom d'Urfa et devient la capitale d'une province appeléeeyalet de Raqqa ou pachalik d'Urfa. C'est un point de passage des caravanes de laroute de la soie.
En l'année 1895, les Arméniens d'Urfa, qui constituaient alors le tiers de la population totale de la ville, furent la cible des troupes auxiliaires kurdes, de la police locale turque ainsi que d'habitants turcs venus prêter assistance. Selon Lord Kinross, la communauté arménienne déplore la perte de huit mille victimes au cours de ces tueries de masse. C'est dans ce contexte que trois mille réfugiés chrétiens s'entassèrent dans la cathédrale pour fuir les exactions. Parmi eux deux mille cinq cent périrent dans des circonstances effroyables puisqu'ils furent brûlés vifs, après que l'édifice ait été incendié. Ces évènements qualifiables de proto-génocidaires sont un prélude à la vaste campagne d'extermination des Arméniens en 1915 sur l'ensemble du plateau anatolien.
Durant laPremière Guerre mondiale et dans le cadre dugénocide arménien, la ville reçoit à l'été 1915 les premiers rescapés venant du nord[1]. Après le massacre par les gendarmes turcs de centaines d'Arméniens et l'arrestation de l'élite arménienne de la ville, devenue entre mai et un centre de transit des déportés[1], une centaine d'hommes et de femmes rescapés et réorganisés décident à partir du de résister dans les quartiers arméniens[2]. L'insurrection dure vingt-cinq jours durant lesquels l'armée ottomane tente vainement à plusieurs reprises de prendre le contrôle des quartiers arméniens[3]. Après deux assauts les 13 et, l'armée prend le contrôle le de toute la ville et assassine les rares rescapés, viole les femmes et enlève des jeunes filles « comme dans un marché aux esclaves »[4].
Les 20 et, Şanlıurfa voit transiter un premier convoi de deux mille femmes et enfants et un deuxième de trois mille cinq cents vers le désert syrien[4]. La ville continue de servir de centre de transit pour plusieurs dizaines de milliers d'Arméniens jusqu'en[5].
L'Empire ottoman était engagé avec les empires allemand et austro-hongrois dans une bataille contre les Britanniques et les Russes tsaristes. À la fin de la Première Guerre mondiale, l'Empire ottoman vaincu, les armées européennes ont tenté de prendre en charge les différentes parties de l'Anatolie, d'abord les Britanniques, puis les Français occupèrent Urfa pour l'incorporation dans lemandat français sur la Syrie et le Liban. L'occupation britannique de la ville dure du au.
Les forces françaises prennent le relais avec une présence fortement contestée, notamment avec la résistance des troupes turques. Les troupes françaises sont attaquées à Marache et ailleurs à partir de 1920, le poste français à Urfa est isolé et assiégé pendant deux mois avant que les troupes ne quittent la ville.
La retraite française de la ville est menée en vertu d'un accord avec le gouvernement turc, commandés par le capitaine Ali Bey Saip affecté d'Ankara. Le retrait devait avoir lieu pacifiquement mais les unités françaises tombent dans une embuscade des forces turques au col de Şebeke sur le chemin de la Syrie, faisant 296 victimes parmi les Français. Les têtes des officiers Français sont portées en triomphe dans les rues.
Incitée par l’honneur fait à Antep, devenueGaziantep (« Antep la victorieuse ») et à Maraş, devenueKahramanmaraş (« Maraş l'héroïque »), elle obtient d'être débaptisée à son tour pour célébrer sa libération de l'occupation française. L’adjectifŞanlı (« glorieux ») est accolé à son nom en 1984.
La ville est une mosaïque peuplée par des Turcs, Arabes etKurdes[6] qui l'appellent Riha.
La ville, conjointement avec celle d'Harran, a été proposée en 2000 pour une inscription au patrimoine mondial et figure sur la « liste indicative » de l’UNESCO dans la catégorie patrimoine culturel[7].
La ville est bâtie dans la grande plaine du Daïsan, affluent de l'Euphrate, au sud-est de l'Anatolie et au nord-ouest de laMésopotamie. Elle a longtemps été une importante étape sur la route reliant la Mésopotamie à la Méditerranée.
La frontière actuelle avec laSyrie n'est qu'à quelques kilomètres au sud de la ville.
La ville bénéficie d’un climat tempéré chaud, avec une température annuelle moyenne de 17,7°C. Les précipitations sont faibles (aux alentours de 500 mm par an, pluie très rare de mai à octobre), et la zone est semi désertique.