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Uneéruption solaire ouéruption chromosphérique, couramment — mais improprement — qualifiée detempête solaire[1], est un événement primordial de l'activité duSoleil. La variation du nombre d'éruptions solaires permet de définir uncycle solaire d'une période moyenne de11,2 ans.
Éruption solaire, avec panaches émisen anneau.L'activité solaire la plus importante jamais enregistrée à cette époque, imagée parSkylab, le 19 décembre 1973.Le diamètre maximal de la protubérance est supérieur à la distance séparant la Terre de la Lune.[réf. nécessaire]Image d'une éruption solaire prise par le satelliteTRACE de la NASA.Éruption, avec éjections en longsfilaments.Craquelure et zones d'éjections. La longueur de la structure active dépasse l'équivalent de la distance Terre-Lune. La tache brillante au centre (point chaud) émet une grande quantité d'ultraviolets.
Elle se produit périodiquement à la surface de laphotosphère et projette au travers de lachromosphère des jets de matièreionisée qui se perdent dans lacouronne à des centaines de milliers de kilomètres d'altitude. Elle est provoquée par une accumulation d'énergie magnétique dans des zones de champs magnétiques intenses, au niveau de l'équateur solaire, probablement à la suite d'un phénomène dereconnexion magnétique.
La durée d'une éruption solaire dépend beaucoup de lalongueur d'onde utilisée pour son calcul, car les rayonnements à différentes longueurs d'onde sont émis par différents processus et à différentes altitudes dans l'atmosphère du Soleil. Une mesure courante de cette durée est lalargeur à mi-hauteur du pic du flux derayons X mous dans les bandes de longueur d'onde 0,05–0,4 et 0,1–0,8 nm (0,5–4 et 1–8 Å), mesurée par lesatellite géostationnaireGOES. En utilisant cette mesure, la durée d'une éruption varie de quelques dizaines de secondes à plusieurs heures, avec une duréemédiane d'environ 6 et 11 minutes dans les bandes 0,05–0,4 et 0,1–0,8 nm, respectivement[2],[3].
La fréquence d'apparition des éruptions solaires varie en fonction ducycle solaire de11 ans. Elle peut aller de plusieurs par jour près du maximum solaire à moins d'une par semaine près du minimum. Les éruptions les plus puissantes sont par ailleurs moins fréquentes que les plus faibles ; par exemple celles declasse X10 se produisent environ huit fois par cycle, tandis que celles de classe M1 se produisent environ 2 000 fois pendant le même temps[4]. En 1984,Erich Rieger(en)et al. ont découvert une périodicité d'environ154 jours pour les éruptions solaires émettant desrayons gamma, au moins depuis le cycle solaireno 19[5]. Cette périodicité a depuis été confirmée (et la période dénommée « période de Rieger »), et on en a détecté desharmoniques derésonance.
Les éruptions solaires sont classées en différentes catégories selon l'intensité maximale de leur flux énergétique (enwatts par mètre carré,W/m2) dans la bande derayonnement X de 1 à 8ångströms au voisinage de la Terre (en général mesuré par l'un des satellites du programmeGOES).
Deux des plus puissantes éruptions solaires ont été enregistrées par les satellites du programme GOES le et le. Elles étaient de classe X20 (2 mW/m2). Elles ont cependant été surpassées par une éruption du, la plus importante jamais enregistrée, estimée à X28[6].
La plus puissante des éruptions solaires observées au cours des 200 dernières années est probablement l'éruption solaire de 1859, fin août-début septembre, dont le point de départ fut observé entre autres par l'astronome britanniqueRichard Carrington. Cette éruption aurait laissé des traces dans les glaces duGroenland sous forme denitrates et debéryllium 10, ce qui a permis d'en évaluer la puissance[7][réf. incomplète].
Les éruptions solaires peuvent provoquer desondes de Moreton visibles depuis la surface de laTerre.
Outre la perturbation des transmissions radioélectriques terrestres, les éruptions solaires ont certaines conséquences néfastes :
les rayons durs émis peuvent léser les astronautes et endommager les engins spatiaux. Les personnels navigants de l’aviation civile sont parfois exposés (dose moyenne individuelle de 1,98 mSv par an en 2015). En France, ils sont suivis pour ce risque avec un calcul de dose effectué selon les trajets qu'ils effectuent. Une cartographie tridimensionnelle permet de connaître le rayonnement cosmique normal (moyen) en tout point et à toute altitude, et en 2017, la France est le seul pays à prendre aussi en compte les variations induites par les éruptions solaires, évaluées via les données de l’Observatoire de Meudon (Hauts-de-Seine) et par une trentaine dedosimètres embarqués sur des avions de ligne d'Air France. Quatre éruptions solaires ont eu un effet mesurable sur la dose en dix ans selon Sylvain Israël (expert en radioprotection à l'IRSN)[8]. Ce système d’information et d’évaluation a été revu en 2014 : les compagnies aériennes doivent fournir au registre national de dosimétrie des travailleurs, à l'IRSN, les données de vol et de présence pour chaque personnel navigant, en vue d'un calcul automatique des doses. Si nécessaire, certains personnels déjà très exposés diminuent leur temps de vol ou sont affectés à des lignes moins exposées, sur les vols transéquatoriaux, moins irradiés que ceux qui transitent près des pôles[8] ;
les radiations UV et les rayons X peuvent échauffer l'atmosphère extérieure, créant une résistance sur les satellites en orbite basse et réduisant leur durée de vie ;
leséjections de masse coronale, provoquant des tempêtes géomagnétiques, peuvent déranger le champ magnétique terrestre dans son ensemble et endommager des satellites en orbite haute ;
les fluctuations du champ magnétique terrestre peuvent induire descourants telluriques dans les longueslignes de transmission électriques, engendrant des tensions et des courants d'intensité considérable pouvant excéder les seuils de sécurité des équipements deréseau ;
certaines particules, très rapides et très puissantes, peuvent court-circuiter un satellite, voire le désactiver et le mettre définitivement hors d'usage.
Le, un puissant nuage de particules ionisées quitte le Soleil en direction de la Terre à la suite d'une éruption solaire. Deux jours plus tard, les premières variations de tension sont observées sur le réseau de transport d'Hydro-Québec, dont les systèmes de protection se déclenchent le à2 h 44. Une panne générale plonge le Québec dans le noir pendant plus de neuf heures[11].
Entre le et le, desorages magnétiques obligent les contrôleurs aériens à modifier le trajet de certains avions, causent des perturbations dans les communications satellitaires, provoquent une coupure de courant d'environ une heure en Suède[12] et endommagent plusieurs transformateurs électriques en Afrique du Sud[13].
En, laNASA lance le projetSolar Shield pour étudier la survenue de possiblescourants induits géomagnétiquement par une éruption solaire, et de tenter de les localiser, afin d'assister les compagnies productrices d'électricité dans la protection de leurs systèmes[14]. Le, un projet similaire est initié au niveau européen : EURISGIC (European Risk from Geomagnetically Induced Currents).
Le, laNASA annonce dans un communiqué que la Terre a échappé,le, à une « gigantesque tempête solaire »[15]. Une perturbation jamais vue depuis 1859 qui, si elle avait touché la Terre, aurait pu « renvoyer la civilisation contemporaine auXVIIIe siècle », car son impact aurait provoqué des dégâts d'une ampleur inédite[16], dont le coût pour l'économie mondiale aurait pu dépasser les 2 000 milliards de dollars[17].
La survenue vers 775 d'unorage magnétique 10 à 100 fois plus puissant que l'événement de Carrington (des milliers de fois plus qu'une éruption solaire ordinaire) est démontrée en 2012 par l'observation d'excès decarbone 14 dans lescernes d'arbres conservés dans lestourbières ou au sommet des montagnes. À cette époque, la fréquence de tels événements est estimée à 1 tous les 10 000 ans environ, mais en juillet 2021, deux autres événements au moins aussi puissants sont identifiés à partir des dépôts debéryllium 10 et dechlore 36 dans lescarottes de glace et des excès de carbone 14, l'un survenu en et l'autre en −5259. Seuls 16 % de la durée de l'Holocène (les 12 000 dernières années) ayant fait l'objet d'investigations à ce sujet, le nombre des super éruptions solaires pourrait êtrebien plus élevé[23]. La tempête solaire de 775 a significativement perturbé la stratosphère polaire, conduisant à des changements de la température pendant les hivers de l'hémisphère nord[24].
Conséquences d'une éruption géante sur notre technologie
Une éruption géante aujourd’hui dépasserait largement la résilience de nos technologies[25],[26]. Elle dévasterait réseaux électriques[27] et satellites, exposant astronautes, avions et couche d’ozone à des radiations nocives[28]. De plus, des perturbations mondiales paralyseraient chaînes d’approvisionnement, systèmes financiers et communications pendant des années, menaçant gravement la civilisation moderne, contrairement aux simples aurores boréales observées précédemment[29].
Astropixel.org, site d'un astrophotographe montrant de nombreuses photographies d'éruption solaire (le site présente également le matériel nécessaire pour observer les éruptions solaires)