| ||||||||||||||
| Élection présidentielle américaine de 1968 | ||||||||||||||
| 538 membres ducollège électoral (majorité absolue : 270 membres) | ||||||||||||||
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| Type d’élection | Élection présidentielle[a],[1] | |||||||||||||
| Mandat | Du au | |||||||||||||
| Corps électoral et résultats | ||||||||||||||
| Population | 205 805 755 | |||||||||||||
| Inscrits | 120 328 186[b] | |||||||||||||
| Votants | 73 211 875[c] | |||||||||||||
| 60,84 %[b],[2],[4],[7],[8] | ||||||||||||||
| Richard Nixon –Parti républicain Colistier :Spiro Agnew | ||||||||||||||
| Voix | 31 783 783 | |||||||||||||
| 43,42 % | ||||||||||||||
| Grands électeurs | 301 | |||||||||||||
| Hubert Humphrey –Parti démocrate Colistier :Edmund Muskie | ||||||||||||||
| Voix | 31 271 839 | |||||||||||||
| 42,72 % | ||||||||||||||
| Grands électeurs | 191 | |||||||||||||
| George Wallace –American Independent Party Colistier :Curtis LeMay | ||||||||||||||
| Voix | 9 901 118 | |||||||||||||
| 13,53 % | ||||||||||||||
| Grands électeurs | 46 | |||||||||||||
| Collège électoral | ||||||||||||||
| Président des États-Unis | ||||||||||||||
| Sortant | Élu | |||||||||||||
| Lyndon B. Johnson Parti démocrate | Richard Nixon Parti républicain | |||||||||||||
| modifier -modifier le code -voir Wikidata | ||||||||||||||
L'élection présidentielle américaine de1968 est laquarante-sixième élection présidentielle depuis l'adoption de laConstitution en 1787. Elle se déroule le mardi.
Cette élection se déroule dans un contexte très mouvementé[12],[13],[14],[15],[16],[17]. Depuis le milieu des années 1950, la société américaine connaît de profonds bouleversements. Lentement, ladéségrégation avait commencé à prendre forme avec le vote par laCour suprême de l'arrêtBrown v. Board of Education qui remettait en cause laségrégation raciale au sein de l'école publique. Lemouvement des droits civiques émergea au même moment, mais avec des difficultés à se structurer. Au début des années 1960, ladéségrégation entraîna une radicalisation du mouvement des droits civiques (Malcolm X,Black Panther Party) de même que pour lességrégationnistes (notamment leKu Klux Klan). Plusieurs actesterroristes eurent lieu durant la décennie, notamment dans leSud profond, comme l'attentat de l'église baptiste de la 16e rue dans l'Alabama en septembre 1963, lesmeurtres de la Freedom Summer en juin 1964 dans leMississippi ou encore lesmarches de Selma à Montgomery en mars 1965. Après l'assassinat du président Kennedy,Lyndon B. Johnson poursuivit la politique de son prédécesseur concernant les droits civiques, malgré l'opposition d'une partie duCongrès et des gouverneurs duSud. Malgré tout, leCivil Rights Act et leVoting Rights Acts furent adoptés et promulgués en juillet 1964 et août 1965, la seconde loi ayant été adoptée à la suite des violences perpétrées lors desmarches de Selma à Montgomery. Entre-temps,Malcolm X a été assassiné en février 1965 dans des circonstances encore non éclaircies. Pourtant, les émeutes urbaines se multiplient, comme àWatts (quartier de Los Angeles), àNewark dans leNew Jersey, àDétroit, àMiami (en) ou encore àChicago. En plus de ces bouleversements sur le plan intérieur, les États-Unis poursuivaient lacourse aux armements et lacourse à l'espace contre l'Union soviétique et s'inquiétaient d'une éventuelle contagion du communisme auViêt Nam, après lapartition décidée par lesaccords de Genève, ainsi qu'àCuba où le dictateurFulgencio Batista est renversé par larévolution en 1959. En conséquence, les États-Unis deviennent de plus en plus présents auSud du Viêt Nam à partir de1961. Lesincidents du Golfe du Tonkin en août 1964 conduisent à une intensification de la présence américaine, avec les premièresopérations militaires à l'automne 1964. Malgré larésolution dite du Golfe du Tonkin qui donnait des pouvoirs militaires très étendus au président Johnson, les États-Unis s'enlisent dans laguerre à partir de1967, entraînant de vastes mouvements d'opposition à la guerre[18],[19]. Quelques mois plus tôt, lediscours de Phnom Penh prononcé parCharles de Gaulle avait replacé leconflit au cours de lagéopolitique internationale, en devenant le premier évènement d'opposition à la guerre.
D'un point de vuehistorique, cette élection marque un tournant dans l'histoire des États-Unis. Elle marque d'abord la fragilisation de lacoalition du New Deal (en) qui avait favorisé la prise de contrôle duCongrès par leParti démocrate en1932, mais également la fin d'un cycle politique avec lecinquième système partisan (en) qui toucha à sa fin par le retour d'uncandidat issu duParti républicain à laMaison-Blanche[d], mais surtout par le réalignement de nombreux électeurs duSud profond et des anciensÉtats confédérés[12]. Élection la plus disputée depuis1960, elle vit la victoire de l'ancien vice-présidentRichard Nixon face au vice-président sortantHubert Humphrey. Pour la première fois depuis1924, un troisième candidat majeur parvient à s'immiscer dans le duelbipartite en la personne deGeorge Wallace, anciengouverneur de l'Alabama etdissident duParti démocrate, opposant au projet deGrande société et aux principales lois en faveur desdroits civiques, comme leCivil Rights Act ou leVoting Rights Act[20],[21].
Pour de nombreuxhistoriens etjournalistes, elle fut l'élection la plus mouvementée duvingtième siècle auxÉtats-Unis[13],[14] et la plus controversée depuis l'élection présidentielle de 1888 oùGrover Cleveland s'était incliné malgré l'obtention d'une majorité de voix duvote populaire.
Ne peuvent se présenter, selon l'articleII section première de laConstitution[e], que les citoyens américains:
Depuis l'adoption duXXIIe amendement en1947 et sa ratification en1951, les anciensprésidents qui ont déjà été élus deux fois ne sont plus éligibles[f].
En1967, 163 émeutes furent comptabilisées, notamment celles deDétroit[22],[23]. Les premières émeutes ont commencé en1963, mais ce sont lesémeutes de Watts en août 1965 qui deviennent le révélateur de la situation de la société américaine[24].
| Hubert Humphrey | Edmund Munskie |
|---|---|
| Président | Vice-président |
| 35e Vice-président des États-Unis (1965-1969) | Sénateur fédéral du Maine (1959-1980) |
| Campagne | |
Hubert Humphrey n'a reçu que 166 463 votes durant lesprimaires, ce qui ne l'a pas empêché de remporter l'investiture de son parti[25].
| Les candidats sont classés en fonction de leur progression durant les primaires et jusqu'à la convention du parti | |||||
| Eugene McCarthy | George McGovern | Channing E. Phillips | Lester Maddox | Robert Francis Kennedy | Lyndon B. Johnson |
|---|---|---|---|---|---|
| Sénateur fédéral du Minnesota (1959-1971) | Sénateur fédéral du Dakota du Sud (1963-1981) | Pasteur àWashington | Gouverneur de Géorgie (1967-1971) | Sénateur fédéral de l'État de New York (1965-1968) | Président des États-Unis (1963-1969) |
| Campagne | Campagne | Campagne | |||
| (éliminé à laconvention du parti) | (éliminé à laconvention du parti) | (éliminé à laconvention du parti) | (apporte son soutien à la candidature deGeorge Wallace) | (assassiné) | |
| 2 914 933 votes[25] | 0 votes | 0 votes | 0 votes | 2 305 148 votes[25] | 383 590 votes[25] |
| Richard Nixon | Spiro Agnew |
|---|---|
| Président | Vice-président |
| 36e Vice-président des États-Unis (1953-1961) | 55e Gouverneur du Maryland (1967-1969) |
| Campagne | |
Richard Nixon remporte les primaires avec 1 679 443 voix et suffisamment de délégués pour empêcher ses concurrents de décrocher l'investiture du parti[26].
| Les candidats sont classés en fonction de leur progression durant les primaires et jusqu'à la convention du parti | |||||
| Ronald Reagan | Nelson Rockefeller | Harold Stassen | George W. Romney | ||
|---|---|---|---|---|---|
| Gouverneur de Californie (1967-1975) | Gouverneur de l'État de New York (1959-1973) | Gouverneur du Minnesota (1939-1943) | Gouverneur du Michigan (1963-1969) | ||
| Campagne | Campagne | ||||
| (éliminé à laconvention) | (éliminé à laconvention) | (éliminé à laconvention) | |||
| 1 696 632 votes[26] | 164 340 votes[26] | 31 665 votes[26] | 4 447 votes[26] | ||
| Ticket indépendant de 1968 | |||||||||||||||||||||||||||||
| George Wallace | Curtis LeMay | ||||||||||||||||||||||||||||
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| Président | Vice-président | ||||||||||||||||||||||||||||
| 45e Gouverneur de l'Alabama (1963-1967) | Général de l'U.S. Air Force (1951-1965) | ||||||||||||||||||||||||||||
| Campagne | |||||||||||||||||||||||||||||

Après l'élection présidentielle de 1964, leParti républicain semblait en bien mauvaise posture[27],[28]. Divisé sur laguerre du Viêt Nam, sa ligne politique était également contestée. Malgré l'enlisement de laguerre, leParti démocrate restait le plus populaire. Enseptembre 1967, un sondageGallup indiquait que 42 % des électeurs songeaient voter pour le candidat démocrate lors de l'Election Day, contre 27 % contre le candidat républicain tandis que 31 % des électeurs envisageaient de voter pour un candidat indépendant[18].
Progressivement,Richard Nixon devint le principal opposant deLyndon B. Johnson dans la gestion de laguerre du Viêt Nam. Partisan d'une approche beaucoup plus répressive, il n'hésita pas à prendre la parole à latélévision dès1965 pour faire entendre ses vues[29]. À partir desélections de mi-mandat de1966, il apparut de plus en plus évident que l'ancienvice-président comptait se présenter à la prochaine élection présidentielle[30],[31]. Pourtant, la dériveconservatrice duParti républicain n'inspirait pas la confiance des électeurs[19]. En octobre 1967, l'ancienvice-président écrit un article pourReader's Digest dans lequel il pose la question de ce que devient l'Amérique[31],[32]. Un peu plus tôt, il écrivait un article intitulé« L'Asie après le Vietnam » dansForeign Affairs où il s'interrogeait sur les perspectives à long terme enAsie[31].Martin Luther King fut également très critique vis-à-vis de laguerre, expliquant que celle-ci retardait la mise en place du projet de la« Grande société » et appelant à une refonte totale de lapolitique étrangère américaine[33].
De plus en plus critique vis à vis de l'administration Johnson, legouverneur du MichiganGeorge W. Romney déclara sa candidature à l'investiture duParti républicain le[34]. Douze jours plus tard, le sénateur duMinnesotaEugene McCarthy, qui dénonçait laguerre comme étant« immorale » depuis de longs mois, se lançait à son tour dans la course à l'investiture duParti démocrate[31],[35]. Le même mois, un sondageGallup indiquait que 77 % des Américains interrogés étaient opposés à la stratégie adoptée l'administration Johnson au Vietnam[19]. Un autre sondageGallup indiquait que 53 % des Américains étaient néanmoins favorables à une intensification des actions militaires au Vietnam, tandis que 31 % demandaient le retrait[19].
Même le journaliste vedette deCBS NewsWalter Cronkite déplore l'enlisement américain dans laguerre[33],[36]. Il déclare au retour d'un séjour au Vietnam que :
« Prétendre que nous approchons aujourd'hui de la victoire, c'est croire, contrairement à l'évidence, les optimistes qui se sont trompés dans le passé. Suggérer que nous sommes au bord de la défaite, c'est céder à un pessimisme irraisonnable. La seule conclusion raisonnable, même si elle n'est pas satisfaisante, c'est que nous nous sommes enfoncés dans l'ornière[36]. »

Rarement une campagne présidentielle n'aura été aussi agitée[13]. Le,George W. Romney retira sa candidature à l'investiture duParti républicain avant même la tenue de laprimaire du New Hampshire[37],[38]. Au même moment,George Wallace était déjà crédité de près de 10 % d'intentions de vote, mais surtout en l'état de l'emporter dans plusieursÉtats duSud profond[38]. L'objectif affiché par le candidat de l'American Independent Party était d'ailleurs d'aller jusqu'à laChambre des représentants pour déterminer le vainqueur de l'élection, et tenter d'infléchir la politique dedéségrégation menée depuis1961[1],[31]. Bien inspiré,Richard Nixon attendit le pour déclarer sa candidature[31]. Le même jour, l'offensive du Tết commençait au Vietnam.
Contesté par une partie de son camp, puis vainqueur avec une marge très faible lors de laprimaire du New Hampshire (Eugene McCarthy obtient 42 % des voix),Lyndon B. Johnson renonce à l'investiture démocrate le[13],[35],[39],[40]. Quinze jours plus tôt,Robert Francis Kennedy, qui le soutenait du bout des lèvres, lui retira son soutien et se lança dans la course[14],[35],[40].
Le même mois, lacommission présidentielle formée pour enquêter sur les émeutes de1967 accusa lesblancs américains et leracisme persistant de la société américaine comme les principaux facteurs de ces évènements[23],[41].
Le,Martin Luther King estassassiné àMemphis dans leTennessee[14],[42]. Cet événement à un retentissement énorme dans la communauté noire, et des émeutes raciales ont lieu notamment àBaltimore,Chicago ou la capitale fédéraleWashington, malgré une journée dedeuil national décrétée parLyndon B. Johnson le[13],[14],[42],[43]. Le révérendJesse Jackson, futur candidat aux primaires démocrates dans les années 1980, fut l'un des deux témoins de l'assassinat[42]. Deux jours plus tard, près de 100 000 personnes assistent aux funérailles deMartin Luther King àAtlanta[42]. Commentant l'héritage deMartin Luther King,The New York Times écrivit la chose suivante :
« A certains moments de l'histoire, un homme devient plus grand que lui-même parce qu'il est le porte-parole et le symbole d'une cause. Il est transfiguré par les événements et l'histoire, en un sens, s'exprime à travers lui. Ces années de la révolution noire ont bien constitué une telle époque dans le cas du pasteur King. Avec sa mort tragique, se trouve démasquée une fois de plus la curieuse alliance entre les pourvoyeurs de haine raciale, tant Blancs que Noirs. L'esprit tortueux du criminel blanc qui a tué le pasteur King va de pair avec la réaction psychopathique de Stokely Carmichael qui incite publiquement au meurtre dans les rues. Le criminel insensé qui a tiré sur le pasteur King a mis un terme à son existence physique ; les Carmichael cherchent à répudier tout le concept de fraternité qui avait donné un sens, une signification pour demain autant que pour aujourd'hui à la vie du pasteur King[44]. »
De son côté,The Washington Post comparait le retentissement de la mort deMartin Luther King à celle deMohandas Karamchand Gandhi :
« Mais Gandhi a été fauché alors que sa philosophie avait triomphé dans l'indépendance de l'Inde. Le pasteur King n'a pas triomphé : la cause à laquelle il s'est consacré, la cause des pauvres, des Noirs, de la paix, n'a pas triomphé et ses paroles étaient attaquées avec une vigueur croissante par les militants noirs... La réponse des Blancs ne peut pas être d'adjurer les Noirs de suivre les modèles non violents du pasteur King mais de prouver que ces méthodes peuvent réussir. Elle ne peut pas être dans des discours adressés aux ghettos mais dans une action de cœur et d'esprit pour abolir les ghettos. Même avec la meilleure volonté, cela ne se fera pas en une nuit : la complexité des problèmes sociaux, économiques, scolaires qui ont créé les ghettos est plus solide que les briques et le ciment avec lesquels les ghettos sont construits. Et cela veut dire qu'il y aura très certainement des frictions, un climat de tension et de violences qui retarderont inévitablement le jour de la réconciliation des races[44]. »

Le, le secondCivil Right Acts fut promulgué, étendant les principes de laloi du même nom promulguée en 1964. Un mois auparavant, des manifestations organisées par desAfro-Américains contre la présence deGeorge Wallace àOmaha dans leNebraska avaient fait un mort, un jeune de 16 ans tué par balle par un jeune policier de 23 ans[23]. Commentant l'assassinat de Martin Luther King, leFinancial Times anticipait un vote massif duSud profond en faveur deGeorge Wallace lors de l'Election Day[44].
LeParti démocrate se divise entre partisans desdroits civiques menés parRobert Francis Kennedy dont l'inimitié avec le président Johnson était de notoriété publique,pacifistes menés par le sénateur duMinnesotaEugene McCarthy etségrégationnistes menés par l'anciengouverneur de l'AlabamaGeorge Wallace[19],[13],[45],[46]. Celui-ci a d'ailleurs choisi de se lancer comme candidattiers parti le[20],[47]. L'anciengouverneur de l'Alabama préparait sa candidature depuis1966, à une époque où il était persuadé queLyndon B. Johnson emporterait l'investiture duParti démocrate[48]. Au début du mois de mars, Wallace avait déjà récolté plus de 15 millions dedollars[1]. Le,Robert Francis Kennedy estassassiné àLos Angeles après avoir remporté la primaire deCalifornie[13],[14],[31],[45],[46],[47]. Opposant à laguerre du Viêt Nam et adversaire du président, sa lutte contre la corruption et lamafia lui attirèrent de nombreux adversaires[46]. Quinze jours auparavant, il avait rencontré l'écrivainRomain Gary àMalibu auquel il avait confié ses craintes[46]. Il meurt le lendemain après une opération de la dernière chance[46]. En réponse à cet évènement, les candidats décidèrent d'interrompre leurs campagnes plusieurs semaines[49]. Le président Johnson, très affecté par les évènements, parvint à faire évoluer la législation sur lecontrôle des armes à feu. LeGun Control Act est adopté le à deux semaines du scrutin[46].


Un mois avant l'assassinat de Robert F. Kennedy, leFBI révélait ses statistiques annuelles. Un chiffre illustrait la tension extrême dans laquelle se déroulait la campagne électorale, à savoir que lacriminalité avait augmenté de 88 % depuis1960[50].
Contrairement aux espérances de ses rivaux,Ronald Reagan etNelson Rockefeller alliés pour la circonstance,Richard Nixon décrocha aisément l'investiture duParti républicain[28],[33]. Il fut aidé dans sa tâche par le soutien décisif du sénateur deCaroline du SudStrom Thurmond qui lui amena les délégués nécessaires, notamment les délégués duSud qui représentaient plus de la moitié des délégués[31]. Au même moment, il disposait de 80 millions dedollars pour mener la campagne pour l'élection générale[31]. Pour apaiser les choses, le choix de son colistier fut un mélange de ce que représentaient Reagan et Rockefeller, à savoir legouverneur du MarylandSpiro Agnew, qui pouvait séduire une partie deslibéraux etconservateurs et aider à améliorer l'image personnelle de Nixon auprès d'eux[41],[47],[51]. Néanmoins, Nixon dût parfois recadrer son colistier, qui avait adopté un discours parfois trop musclé sur certains sujets[31]. Lors de son discours d'acceptation, Nixon condamna la situation dans laquelle se trouvait le pays depuis plusieurs mois, promettant d'apaiser la situation :
« Lorsque nous contemplons l’Amérique, nous voyons des villes enveloppées de fumée et de feu. Nous entendons le hurlement des sirènes dans la nuit. Nous voyons mourir des Américains sur de lointains champs de bataille. Nous voyons des Américains se haïr les uns les autres ; se tuer les uns les autres sur notre sol. Et nous voyons et entendons aussi cela, les cris angoissés de millions d’Américains demandant : avons-nous parcouru tout ce chemin pour cela ? De jeunes Américains ont-ils donné leurs vies en Normandie, en Corée et à Valley Forge pour cela[31] ? »
À l'opposé, laconvention nationale du Parti démocrate se déroula dans le chaos le plus total, alors que desémeutes se déroulaient au même moment àChicago, aboutissant à l'élection par les grands électeurs du parti d'Hubert Humphrey au détriement d'Eugene McCarthy qui avait remporté davantage de délégués lors des primaires[45],[47],[52]. Après lesémeutes de Chicago, 66 % des Américains approuvèrent la gestion des évènements par lemaireRichard Daley[53].
Les principaux thèmes de la campagne furent la criminalité, la pauvreté, la réhabilitation des villes, la situation économique des États-Unis et les discriminations raciales[52]. En juillet, un sondageGallup créditaitGeorge Wallace de 16 % d'intentions de vote, tandis que 34 % des électeurs duSud se déclaraient prêts à voter pour lui[48]. Dans le même sondage, 83 % des soutiens de Wallace estimaient que ladéségrégation allait trop vite, ou encore 70 % d'entre-eux considéraient que lesAfro-Américains étaient les principaux responsables de leur situation[48].

Pendant toute la campagne,George Wallace a utilisé une rhétorique mêlantdémagogie etpopulisme[41],[48],[54],[55]. Dans sesmeetings, il n'hésitait pas à dénoncer les démocrates, les républicains, mais aussi laCour suprême, lesopposants à la guerre et les communistes[48]. Depuis sa campagne infructueuse en1958 pour le poste de gouverneur, l'anciengouverneur de l'Alabama adopta des positions ultraségrégationnistes, n'hésitant pas à défendre le principe deségrégation à latélévision[55]. Déjà en1967, il avait déclaré à laNational Review se considérer comme étant« ségrégationniste »[48]. De plus, sa campagne contenait de nombreux messagesantisémites, dénonçant le soutien de l'organisationB'nai B'rith à ses adversaires[48]. L'Anti-Defamation League, proche de l'organisation, décompte de très nombreuses références antisémistes dans ses tracts et sesmeetings[48]. Malgré sa rhétorique, certains sondages le créditaient de plus de 20 % d'intentions de vote. En septembre, un autre sondageGallup le crédite de 21 % d'intentions de vote, tout en étant en tête dans six États (Alabama,Arkansas,Caroline du Nord,Géorgie,Louisiane,Mississippi) et second dans trois États (Caroline du Sud,Floride,Tennessee)[48]. Il obtint assez facilement le soutien des gouverneurs démocrates duSud profond[56].


D'ailleurs,Richard Nixon finira par reprendre à son compte une partie de la rhétorique deGeorge Wallace[33],[55]. Il avait d'ailleurs souhaité que la politique dedéségrégation prenne davantage de temps, s'opposant notamment aubusing[57]. Il parvint à surfer sur les divisions duParti démocrate pour l'emporter et mènera une intensive campagne dans les anciensÉtats confédérés, persuadé que c'est de là qu'il en titrera sa victoire[13],[41],[51]. Il n'hésita pas à faire de lacriminalité un thème majeur de l'élection[50]. Dès juillet, il privilégia leSud supérieur au détriment duSud profond[48]. Cela ne l'empêcha pas de proposer de créer uncrédit d'impôt au niveau fédéral pour favoriser l'ascension sociale des Afro-Américains ainsi que de meilleurs solutions de logement[58]. Il promit également une« paix dans l'honneur » au Vietnam[28].
De son côté,Hubert Humphrey devait faire face aux partisans d'Eugene McCarthy qui continuaient de contester la légitimité de sa nomination[52],[59]. Pourtant, le candidat démocrate finit par de démarquer sur la politique vietnamienne, annonçant àSalt Lake City le qu'il arrêterait les bombardements pour tenter de ramener leNord à la table des négociations, le tout en menaçant d'une reprise des opérations en cas destatu quo[31]. Lemeeting deGeorge Wallace du auMadison Square Garden fut le point d'orgue d'une campagne très tendue et très agitée, au cours duquel le candidat dénonça la couverture de sa campagne[48],[60]. Le candidattiers parti eut beaucoup de mal à gérer son colistier, l'anciengénéral de l'U.S. Air ForceCurtis LeMay[41],[48],[61]. La première conférence de presse commune fut d'ailleurs catastrophique, le colistier de Wallace parlant notamment de« phobie » concernant l'utilisation de labombe atomique contre leViêt Nam. À la suite de cela,Hubert Humphrey qualifia le ticket de« Bombsay Twins », décrédibilisant un peu plus la candidature de Wallace, et LeMay fut tenu à l'écart pour le reste de la campagne[31],[48]. L'anciengénéral n'était d'ailleurs pas le premier choix de Wallace, qui aurait préféréAlbert Chandler, l'anciengouverneur du Kentucky[48].
Le, soit une semaine avant le vote,Lyndon B. Johnson annonça la suspension des bombardements auViêt Nam ainsi que la reprise des négociations de paix, espérant aider la campagne d'Hubert Humphrey[14]. D'ailleurs, bien aidé par la campagne de Wallace, Humphrey rattrape son retard dans les sondages[62]. Une semaine auparavant, il n'était plus qu'à 8 points de son principal adversaire, contre seulement 15 % à Wallace[31].
Cet événement fut considéré par la suite comme la première« surprise d'octobre », expression attribuée à un proche deRichard Nixon,William Casey, par de nombreuxjournalistes et quelqueshistoriens[63],[64]. Pourtant, il fut révélé des années plus tard que les équipes deRichard Nixon avaient sabordé les négociations de paix àParis (une note datée du confirmant cela fut authentifiée[14]), promettant auSud Vietnam un meilleur accord en cas de victoire[14],[65]. Nixon disposait d'informations à la fois grâce àHenry Kissinger, mais aussi parBryce Harlow (en), un membre de son équipe de campagne, et parAnna Chennault, épouse de l'anciengénéral de l'US Air ForceClaire Lee Chennault. Or, il apparut que Chennault était très proche des diplomates sud vietnamiens présents àParis. Le, elle fut mise sur écoute par leFBI après qu'un télégramme fut intercepté[31].Lyndon B. Johnson avait d'ailleurs eu vent de ces informations et avait même évoqué ces incidents au téléphone avec Nixon le, mais avait renoncé la veille du vote à les dévoiler pour ne pas prolonger le chaos dans lequel se tenait le pays, faute de« preuve incontestable »[14],[31]. Cela ne l'avait pas empêcher de faire poser des micros dans l'avion de campagne de Nixon, qu'il surnommait le« bâtard calculateur » et dont il désapprouvait les méthodes[31].
| Inscrits | 538 | |||||
| Abstentions | 0 | 0 % | ||||
| Votants | 538 | 100 % | ||||
| Bulletins enregistrés | 538 | |||||
| Bulletins blancs ou nuls | 0 | 0 % | ||||
| Suffrages exprimés | 538 | 100 % | ||||
| Candidat | Parti | Suffrages | Pourcentage | |||
|---|---|---|---|---|---|---|
| Richard Nixon | Parti républicain | 301 | 55,95 % | |||
| Hubert Humphrey | Parti démocrate | 191 | 35,5 % | |||
| George Wallace | American Independent Party | 46 | 8,55 % | |||


Comment attendu,Richard Nixon estélu président avec moins de 50 % des suffrages exprimés par levote populaire[38]. La plupart desÉtats ruraux ont voté pour leParti républicain hormisHawaï, leMaine et leRhode Island[68]. En moyenne dans cesÉtats, ungrand électeur représentait 47 000 voix pourRichard Nixon, 160 000 pourHubert Humphrey et 315 000 pourGeorge Wallace[68]. Plus de 70 % de lapopulation américaine en1968 était unepopulation urbaine[68].


Dans les onzeÉtats les plus peuplés,Hubert Humphrey a amassé davantage de voix[68]. Cependant, il ne l'a pas toujours emporté, notamment dans l'Illinois, leNew Jersey, l'Ohio et laCalifornie où il fut défait avec une marge de trois points, tandis que l'Indiana donnait une marge plus importante àRichard Nixon[68].Richard Nixon l'a emporté dans les troisswing states (Californie,Illinois etOhio).
Hubert Humphrey fut également majoritaire dans lesmétropoles et les villes moyennes, tandis queRichard Nixon est arrivé en tête dans lessuburbs et dans lesÉtats ruraux. C'est principalement dans cesÉtats là queGeorge Wallace fut le plus performant[68]. Wallace parvient également à dépasser les 10 % dans certainsswing states, comme l'Indiana, leMichigan ou l'Ohio[27]. Par rapport à l'élection présidentielle de 1960, Nixon a perdu des voix dans les États ayant une forte activité agricole[27].

Pour la première fois depuis l'élection présidentielle de 1848, leprésident élu ne contrôle aucune chambre duCongrès[31],[41], où les résultats diffèrent de ceux de la présidentielle, marqués par la percée d'une 3ème homme, permettant la victoire étriquée de Richard Nixon, qui illustre combien le pays était divisé depuis le début de la guerre du Viêt Nam[13].
Le résultat très important deGeorge Wallace dans les anciensÉtats confédérés marque le basculement de ces États acquis auParti démocrate depuis leCompromis de 1877. La victoire deRichard Nixon est principalement due au fort score deGeorge Wallace, notamment dans les États confédérés[13].
Parmi tous les anciens États confédérés, seul leTexas plaçaHubert Humphrey en tête. Humphrey remporte par ailleurs moins de 10 % du vote desBlancs américains dans leSud[69],[70].George Wallace arrive en tête dans cinq anciens États confédérés, dans son État de l'Alabama, enArkansas, enGéorgie, enLouisiane et dans leMississippi.Richard Nixon est arrivé en tête dans les autres États (Caroline du Nord,Caroline du Sud,Floride,Kentucky,Tennessee,Virginie)[55],[68]. George Wallace remporte également un vote d'un grand électeur deCaroline du Nord,Lloyd W. Bailey (en), qui était censé voter pour Nixon[71].
Comme tous les candidats vainqueurs depuis1904 (sauf en1956), Richard Nixon l'a emporté dans leMissouri[72],[73]. De même, comme toutes les élections depuis1920, le vainqueur l'a emporté dans l'Illinois[74].
Ce fut la première fois depuis l'élection présidentielle de 1928 que laCaroline du Nord votait majoritairement pour le candidat duParti républicain. De même, ce fut la première fois que le candidat duParti républicain remportait l'élection sans l'emporter dans leMinnesota. Autre particularité, leMaine et leVermont n'ont pas placé le même candidat en tête, ce qui constituait une première depuis l'l'élection présidentielle de 1912. Enfin, ce fut également la dernière fois que l'Oregon et l'État de Washington n'ont pas placé en tête le même candidat.
L'électorat noir eut beaucoup de difficultés à se déplacer, car dans certainsdistricts, moins de 20 % de la population noire était inscrite sur leslistes électorales[68]. Néanmoins, les chiffres ont fortement augmenté, comme l'illustreAndré Kaspi avec trois États[75]. Entre1964 et1968, le nombre d'électeursafro-américains inscrits sur les listes électorales est passé de :
L'adoptionVoting Rights Act a permis auprocureur général des États-Unis d'intervenir personnellement pour procéder aux inscriptions quand les gouverneurs refusaient de le faire[75].
85 % des électeursAfro-Américains ont voté pour Hubert Humphrey, contre 12 % pour Richard Nixon (soit un peu plus de 750 000 voix sur plus de 6 millions d'électeurs Afro-Américains[27]) et 3 % pour George Wallace, tandis que l'électorat blanc était beaucoup plus disparate. En effet, 47 % d'entre eux ont voté pour Richard Nixon, contre 38 % pour Hubert Humphrey et 15 % pour George Wallace[13],[68]. Dans les dix-sept États les moins peuplés, seul leDelaware vit George Wallace remporter l'adhésion de plus de 10 % de l'électorat afro-américain[68].
LeXIVe amendement puis leXIXe amendement ont apporté peu de précisions supplémentaires, hormis de tenter de mieux définir lacitoyenneté américaine et d'accorder ledroit de vote aux femmes. Après laguerre de Sécession et jusqu'à l'adoption duVoting Rights Act en1965, la très grande majorité desAfro-Américains et des autresgroupes ethniques minoritaires furent exclus ducorps électoral, notamment dans leSud du pays, et cela malgré l'adoption duXIVe amendement. Les sénateurs ne furent élus ausuffrage universel qu'à partir de1914. Depuis l'élection présidentielle de 1920, toutes les sources concernant les élections américaines divergent sur le chiffre exact ducorps électoral. Ainsi, l'université de Californie à Santa Barbara estime que lecorps électoral, c'est-à-dire la population en âge de voter lors de l'Election Day est d'environ 120 285 000 électeurs potentiels et environ 86 574 000 d'électeurs inscrits sur des listes électorales[2], tandis que leStatistical Abstract of the United States (en) de1969 estime ce chiffre à environ 118 465 000 électeurs[3]. Une troisième estimation faite par leDave Leip's Atlas of U.S. Presidential Elections (en) donne un chiffre de 120 328 186 électeurs potentiels et de 81 667 602 électeurs inscrits sur les listes électorales[4]. Letaux d'abstention est assez difficile à calculer, d'autant que ce ne sont pas les électeurs inscrits, mais les électeurs potentiels qui sont comptabilisés pour le calcul[5],[6]. En plus de cela, il y a des cas particuliers, sachant que lamajorité civile est fixée à 21 ans dans la plupart des États :« La Chambre des représentants se composera de membres choisis tous les deux ans par le peuple des différents États ; dans chaque État, les électeurs devront remplir les conditions requises pour être électeur de l'assemblée la plus nombreuse de cet État. »
Pour cette élection, les sources sont toutes identiques, avec untaux d'abstention de 39,1 %[2],[4],[7],[8].
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
| Par année | |
|---|---|
| ParÉtats |
|
| Primaires | |
| Collège électoral | |
| Autres | |