Presses universitaires de Franche-Comté

22. La saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône). Traditions et innovations techniques dans la fabrication du sel au XIXe siècle… Quand le bois remplace le charbon de terre

Denis Morin

p. 479-504

Résumés

La concession de sel de Melecey fut accordée le 29 septembre 1843 peu de temps après la dénationalisation des salines en 1841 et exploitée de 1850 à 1873. L’extraction ne fut guère active, la production totale atteignant difficilement 20 000 tonnes. Programmée à l’origine pour fonctionner au charbon de terre, la mine de sel de Melecey fut l’une des rares salines à être exploitée de manière directe par abattage. À Melecey, le sel appartient à l’étage des marnes irisées. Le gîte se compose de 3 couches de sel gemme d’une épaisseur totale de 8 m situées à une profondeur moyenne de 130 m. Il fut exploité de 1850 à 1862 par voie d’abattage souterrain et fournit en moyenne pendant cette période 10 000 quintaux par an. De 1863 à 1871, l’exploitation eut lieu par dissolution et fournit environ 8000 quintaux. Elle fut arrêtée au mois de mars 1872 en grande partie par suite du mauvais état de l’ancien puits d’extraction transformé en puits d’épuisement. L’étude montre les causes du déclin de cette fabrique et son importance dans le paysage industriel de l’époque. La saline de Melecey constitue néanmoins le dernier bâtiment encore intact du XIXe siècle témoignant d’une activité en pleine expansion tributaire de plusieurs innovations techniques qui affectèrent aussi bien l’extraction du sel que sa préparation.

The salt concession of Melecey has been authorized in 1843 on September 29th, a few times after the denationalization of the salt works in 1841. The factory itself worked from 1850 to 1873. During all this time the extraction was not really important. The whole production was hardly reaching 20 000 tons. Originally, the factory has been programmed to work exclusively with coal. Down in the mine, salt was directly worked with stopping method. Wood was used after the failure of all the different coal mines opened in the surrounding area. Geologically, the salt layers belong to the iridescent marls. The ore deposit is made up of 3 rock salt layers 8 meters thick together. This ore, about 130 m beneath the surface, has been exploited from 1850 to 1862 by underground mining and produced 10 000 quintals per year. From 1863 to 1871, salt has been naturally dissolved with draining water and pumped. The factory produced 8000 quintals per year. At the time it stopped in March 1872, the main draining shaft was in pitiful conditions. This study shows the cause of decline of this industry and its importance throughout the industrial landscape. The Melecey salt factory is therefore the last XIXth century building still intact as a relic of past industrialisation in the area of Haute-Saône (France). It also shows a full expanding activity dependent on several technological innovations both concerning ore mining and dressing.

Entrées d’index

Texte intégral I. Les sources textuelles II. Localisation géographique III. Géologie IV. Un siècle d’histoire 1. Phase d’expansion V. Les structures d’exploitation : le sel VI. Le combustible : le lignite et ses conditions d’extraction 1. Le lignite – Les origines de l’extraction 2. La concession de 1843 3. Les conditions de l’extraction : les mines de Melecey-Fallon 4. La mine de lignite de Melecey VII. De vicissitudes en vicissitudes VIII. Le déclin – Les dernières difficultés et l’abandon de la saline IX. Les derniers soubresauts X. Les causes de l’abandon de la saline – Des causes multiples 1. La pauvreté du gisement de sel – Déclin économique 2. L’appauvrissement des ressources en combustible houiller 3. Un contexte géographique défavorable 4. Des techniques d’extraction inadaptées ? Conclusion Bibliographie Sources concernant la Saline de Melecey-Fallon 1. Archives départementales de la Haute-Saône (ADHS) a. Historique de la saline – Exploitation minière : rapports des Ingénieurs des Mines b. Historique de l’affaire : constitution, dévolution, correspondance c. Assemblées générales d. Comptabilité e. Moulin de Melecey f. Correspondance, notes g. Divers 2. Archives départementales du Doubs (ADD) 3. Archives de la Société d’Histoire et d’Archéologie de l’Arrondissement de Lure (Haute-Saône) 4. Archives du Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM) Bibliographie Auteur

Texte intégral

1Au milieu du XIXe siècle, le département de la Haute-Saône comptait trois salines en exploitation. La plus ancienne, la saline de Saulnot remonte au XIIe siècle. Elle fut l’une des premières salines européennes à avoir expérimenté la houille pour l’évaporation de ses eaux salées (Bouvard, 1989 ; Morin, 2000). La première extraction decharbon de terre eut lieu dans la montagne d’Ossemont, sur la commune de Corcelles, à proximité de la saline. Mise à sac en 1789, elle fut concédée à laCompagnie des Salines de l’Est qui décida de sa fermeture définitive en 1826 (Archives de la Direction Régionale de l’Industrie et de la Recherche – DRIRE – XIXe s. Salines de l’Est – Documents inédits conservés aux Archives Départementales du Doubs à Besançon).

2La saline de Gouhenans fit l’objet de deux concessions : la concession deGouhenans (3 janvier 1843) et celle desEpoisses (3 août 1848). Toutes deux furent réunies par décret du 14 mars 1877 dans le patrimoine de laCompagnie des Salines Houillères et Fabriques de produits chimiques de Gouhenans (ADD – A.DRIRE-FC). À la liquidation de la société en 1906, elles furent intégrées à laSociété Minière et Industrielle de Gouhenans elle-même fusionnée avec laSociété des Anciennes Salines Domaniales de l’Est en 1953. Le décret autorisant la mutation des concessions et rendant définitive la fusion fut signé le 8 février 1954. La production de la saline de Gouhenans était de l’ordre de 10 000 tonnes par an entre 1845 et 1856. Elle était alimentée seulement à cette époque par la saumure provenant de la concession. De 1932 à 1940, la production moyenne annuelle était de l’ordre de 13 000 tonnes. Pendant la guerre et jusqu’à l’arrêt de l’exploitation en 1945, la production fut réduite à 5 000 tonnes en moyenne par an (Morin, 2000).

Figure 1 : Saline de Melecey-Fallon – Évolution de la production de sel

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Source : D. Morin.

3La concession de sel deMelecey-Fallon, quant à elle, fut concédée le 29 septembre 1843 à MM de Raincourt et Legrand ; d’une superficie de 480 hectares. Elle s’étendait sur les communes de Villargent, Melecey, Fallon et Grammont (Archives DRIRE-FC). Le sel fut découvert sous une couche de houille keupérienne. Exploitée par puits et galeries, la mine fut louée ensuite par la compagnie propriétaire de la saline de Gouhenans. La fabrication était de 4 à 500 tonnes par an. Son activité cessa au début du XXe siècle.

4L’implantation de ces trois salines est liée aux affleurements de couches géologiques inséparables des gisements salifères, le Trias et le Lias, qui constituent une vaste dépression périphérique en limite des Vosges méridionales. Ces établissements étaient tous programmés à l’origine de leur implantation pour fonctionner aucharbon de terre, en réalité une houille keupérienne de médiocre qualité. Le combustible était extrait par puits et galeries sur place ou à peu de distance des établissements concernés. L’âge d’or des houillères de Gemonval, Melecey-Fallon, Corcelles, La-Grange-du-Vau date de cette époque. L’originalité de Melecey tient au fait que le gisement fit l’objet d’une exploitation combinée avec la houille d’abord par abattage puis par dissolution.

Figure 2 : Saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône). Vue générale du bâtiment vers l’Ouest

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Source : Carte postale ancienne. Cliché D. Morin

5C’est le seul bâtiment industriel de cette nature encore intact subsistant dans le nord de la Franche-Comté (fig. 2, p. 481). À l’origine d’un gisement de sel relativement complexe à exploiter, la question des conditions d’implantation et de maintenance d’une telle entreprise reste posée.

I. Les sources textuelles

6Les deux principales sources manuscrites proviennent des fonds de la Série S des archives départementales de la Haute-Saône (ADHS) et des fonds inédits des archives de la Direction Régionale de l’Industrie, de la Recherche et de l’Environnement (DRIRE), actuellement conservés aux archives départementales du Doubs (ADD). Un certain nombre de registres ont été recueillis dans les combles du bâtiment parmi lesquels un répertoire de correspondance avec les différents clients de la saline (du 18 mai 1867 à mars 1870), un registre de paye pour les différentes catégories d’ouvriers travaillant au complexe (mai 1853 à avril 1856) et plusieurs recueils de bordereaux. Ces documents sont en dépôt provisoire aux archives de la Société d’Histoire et d’Archéologie de l’Arrondissement de Lure (SHAARL).

II. Localisation géographique

7La saline est située en limite des territoires des deux communes : Melecey et Fallon (fig. 3, p. 482). Elle occupe à 310 m d’altitude le fond d’un vallon entaillant la cuesta médio-jurassique et remontant en direction du Nord. Deux éminences dominent le site :la Goutte à l’Ouest (380 m) et laCharmoille à l’Est (356 m). Le fond du vallon est drainé par le ruisseau duGrand Ru qui prend sa source en amont du village de Fallon, lui-même approvisionné par le ruisseau de Bournois.

Figure 3 : Saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône). Localisation de la saline et des forges de Melecey-Fallon

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Source : Atlas cantonal du Préfet H. Dieu, 1858. Cliché D.Morin

III. Géologie

8La région est située sur le versant Nord-Ouest du plateau jurassique qui borde vers le Sud le bassin de l’Ognon et le sépare de celui du Doubs. C’est à sa base que s’étale la dépression triasique. Le Keuper constitue une longue bande de territoire qui prend naissance à proximité de Rougemont (Doubs) et suit vers le Nord-Est une ligne parallèle à la crête du plateau, au-delà d’Héricourt. Sa puissance moyenne est de 100 à 200 m. Les affleurements couvrent une large bande le long de la bordure commune des deux départements du Doubs et de la Haute-Saône (Merle, 1905). C’est dans le fond des vallées et dans la partie inférieure des versants, à la base de l’étage keupérien que les recherches de sel ont été les plus fructueuses (ADD – A.DRIRE-FC).

9Un sondage exécuté à l’aplomb du gisement montre l’existence de deux couches de sel gemme pur, respectivement de 4 m et de 2 m de puissance, d’une couche de 2 m de sel gemme argileux et enfin d’une épaisseur de 36 m de marnes gypseuses et salifères. C’est sur les résultats de ce sondage que la concession de Melecey-Fallon fut accordée (ADHS 299 S 12). Il avait recoupé les couches suivantes :

Puissance

Nature des terrains traversés

Profondeur (m)

7.00

Marnes irisées rougeâtres

7.00

8.00

Calcaire magnésien jaunâtre

15.00

3.50

calcaire bleuâtre

18.50

3.00

schistes gris

21.50

1.30

schistes rougeâtres

22.50

2.00

schistes grisâtres

24.80

4.00

argile schisteuse noirâtre

28.50

0.18

1° couche de houille

28.98

0.80

argile schisteuse noirâtre

29.78

0.33

2° couche de houille

30.11

1.00

argile schisteuse noirâtre

31.11

0.16

3° couche de houille

31.27

1.70

marnes gypseuses

32.97

66.00

1° banc de gypse marneux de diverses couleurs

98.97

16.00

2° banc de gypse jaunâtre, un peu salifère

114.97

2.00

3° banc de gypse

116.97

15.00

4° banc de gypse jaunâtre salifère

131.97

2.00

sel gemme argileux

133.97

4.00

sel gemme pur

137.97

3.00

marnes salifères

140.97

2.00

sel gemme pur

142.97

2.00

marnes salifères

144.97

10Ce sondage prolongé de 8,50 m n’atteignit pas le Muschelkalk. Les deux couches de houille d’une épaisseur totale de 0,50 m rencontrées par la sonde firent l’objet d’une demande de concession, et exploitées en même temps que le sel (Thirria, 1833).

IV. Un siècle d’histoire

11La saline de Melecey-Fallon a bénéficié d’un développement économique progressif. L’organisation initiale des approvisionnements, de la production et des débouchés va pouvoir se mettre en place, mais, comme toute activité économique, la situation de concurrence, la découverte de nouveaux gisements, le progrès et les innovations techniques, la constitution d’un marché national vont remettre sans cesse en cause les organisations prévues jusqu’à la récession.

1. Phase d’expansion

12En 1778, une première concession de mines de charbon de terre à Melecey et Gouhenans est accordée par ordonnance royale (ADHS C 49). En 1839 un gisement de grande étendue est repéré sur le territoire des communes de Melecey-Fallon. Il s’étend dans le Doubs jusqu’aux villages d’Abbenans et de Bonnal. Il s’agit d’une houille pyriteuse, de type lignite, intégrée dans les marnes irisées (ADHS 299 S 12).

13Le 29 septembre 1843, par ordonnance royale il est fait concession au Marquis de Raincourt, à Madame veuve de Raincourt, aux Sieurs Legrand Félix de Fallon, Dupré Claude de Fallon et Bégeot Albin de Lure d’une mine de sel gemme comprise dans les limites des communes de Villargent, Melecey, Fallon et Grammont. La concession couvre 4 km2 et 80 ha.

14À la même date, il est fait également concession de la mine de houille qui couvre un territoire deux fois plus étendu que la précédente.

15En fait, la découverte de sel gemme remonte déjà à quelques années et résulte de sondages de recherches en particulier d’un puits de 26 m foncé à Melecey même.

16Le 15 avril 1843, le Marquis de Raincourt etconsort demandent au Préfet de Haute-Saône l’autorisation d’établir une usine à sel sur le territoire des communes de Melecey-Fallon. Le 29 septembre, une concession de mine de houille leur est accordée. Cette concession couvre une partie du Doubs et de la Haute-Saône (commune d’Abbenans notamment).

17En 1845, par suite d’un traité passé entre les concessionnaires de la mine de Melecey et un certain Grante, domicilié à Paris, un acte de société est dressé

en vertu duquel Grante, moyennant le devoir de participer dans une certaine proportion aux bénéfices de l’ordonnance de concession, se charge de l’exécution des travaux nécessaires pour l’exploitation du sel et pour la construction d’une saline pouvant produire 100 sacs de sel par jour.

18Le 10 octobre de la même année, les premiers travaux sont engagés dans le sous-sol : le puits s’ouvre par une section de 3,20 m de long sur 1,80 m de large. Une roue hydraulique actionnée par le ruisseau de Fallon, issu de la forge limitrophe, sert à l’épuisement de l’eau. À cette époque, l’exploitation se fait par abattage direct.

On se rend dans le puits au moyen de bennes qui sont mises en mouvement par la roue hydraulique. Un frein sert à régler la descente. Il y a deux déchargeurs de surface, un forgeron qui répare les outils et un menuisier chargé de préparer les étais (ADHS 295 S 5).

Figure 4 : Saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône). Premières installations de traitement du sel du bâtiment principal

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Note : Coupe longitudinale. Les bacs de saumures sont situés sur deux niveaux

Source : Archives départementales de Haute-Saône. Cliché D. Morin.

19Au départ l’intention des concessionnaires était d’exploiter le sel par la technique antique du puits àmuyre ; les sondages étant alors naturellement suffisants. Le fonçage d’un puits d’extraction devenait dans ce cas inutile. Il fallait en effet que les bancs de sel soient plus puissants et que le sel fut suffisamment pur pour être livré à la consommation après pulvérisation. Paradoxalement, les recherches effectuées à Melecey tendent à démontrer le contraire : les bancs sont trop minces, le sel souvent chargé d’impuretés.

(…) Outre les dépenses dans lesquelles entraînera l’abattage du sel et de son extraction, il faudra très probablement le redissoudre après l’avoir amener à l’orifice du puits et l’on aura alors une évaporation en eau salée saturée, mais qu’on aurait pu obtenir aussi un degré de saturation par la voie beaucoup plus économique de l’exploitation par dissolution.
Il n’y a qu’un seul cas dans lequel l’exploitation directe par puits et galeries pourrait être avantageuse à Melecey, c’est celui où l’exploitation sur le sel viendrait à être modifiée, s’il arrivait comme les Chambres ont paru le décider dans la session de 1845 que l’impact du sel livré pour les besoins de l’agriculture fut diminué car alors on pourrait immédiatement livrer au commerce le sel brut extrait de la terre.
L’incertitude dans laquelle on se trouve relativement à la décision qui sera adoptée par le gouvernement à cet égard a engagé l’ingénieur soussigné à ne pas faire d’opposition au projet de creusement du puits exécuté par les concessionnaires de Fallon (ADHS 295 S 5).

20Le choix de l’abattage direct fut adopté dans un premier temps ; le sel était pulvérisé puis dissout en surface avant d’être purifié par évaporation : une technique plus efficace au départ mais qui augmentait les manipulations et donc les coûts du traitement (fig. 4 et 5, p. 495 et 486).

21Le personnel se composait de 9 ouvriers mineurs ou aide mineurs travaillant 3 par 3 pendant 8 heures : ils fournissaient l’huile pour leurs lampes, mais on leur donnait la poudre dont on consommait 50 kg par mois ; l’usine possédait également 2 déchargeurs, un menuisier et un forgeron.

22Au niveau de l’exploitation, la problématique de l’aérage est omniprésente. Il était indispensable en effet de renouveler l’air dans l’intérieur du puits. L’air était injecté au moyen d’un soufflet actionné par la force hydraulique. « Dans le fond du puits, les lampes brûlent très bien et les ouvriers ne sont pas incommodés par le tirage à la poudre » (ADHS 295 S 5). À la fin du mois d’octobre 1845, un accident survient au niveau du puits : la poulie qui soutient l’une des bennes se détache, un mineur est tué sur le coup, un second est grièvement blessé (ADHS 295 S 5).

Figure 5 : Saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône). Premières installations de traitement du sel du bâtiment principal

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Note : Coupe transversale. Les bacs de saumure sont situés sur deux niveaux.

Source : Archives départementales de Haute-Saône. Cliché D. Morin.

Figure 6 : Saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône) (1849). Plan général du bâtiment et projet d’extension au Nord (en hachures)

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Légende : Sur ce plan figure l’emplacement des différentes zones de travail et de stockage depuis la zone d’extraction au Sud jusqu’aux magasins au nord. Les bâtiments situés à l’Est n’ont jamais vu le jour. Le reste des bâtiments est intact à l’exception des magasins situés à droite de l’entrée principale et qui ont été détruits. Ces magasins sont encore visibles sur la carte postale de 1900. Le ruisseau de Fallon, canalisé en profondeur par un chenal voûté entièrement appareillé, passe sous le bâtiment et la cour. L’eau actionne la roue hydraulique qui sert à mouvoir le système de pompes destiné à l’exhaure de la mine. (Projet d’établissement d’une saline pour être joint à une demande en autorisation d’exploitation – Plan de 1849 ADHS – 299.S.12).
a. Mur d’enceinte développant 380 m – b. Chemin de ronde extérieur de 3 m de largeur – c. Chemin de ronde intérieur de 3 m de largeur – d. Entrée de l’établissement par la route départementale au moyen d’une rampe entre deux murs de soutènement – e. Cour intérieure – f. Bâtiments renfermant 44 bacs ou chaudières tant à rez-de-chaussée qu’au 1er étage dans lesquels s’opéreront l’évaporation et la cristallisation des sels gros et moyens – g. Puits au moyen duquel on a atteint le gisement du sel gemme – h. Roue hydraulique – i. Ruisseau actuel débitant les eaux de roulement du fourneau de Fallon, redressé dans le passage de la saline au moyen d’un canal voûté R de 3 m d’ouverture – j. Canal de dérivation du ruisseau fournissant l’eau motrice à la roue hydraulique – k. Canal voûté pour déversoir des eaux du ruisseau – l. Salle de dépôt, triage et pulvérisation des matières sortant du puits – m. Machine à vapeur avec ses appareils de transmission – n. Salle contenant les envidoirs, appareils d’extraction, etc. – o. Générateur – p. Cheminée – q. Bacs de dissolution – r. Bassin de dépôt pour la clarification des eaux salées – s. Bassin suspendu pour la dessiccation du sel – t. Atelier de construction – u. Magasin du sel fabriqué – v. Porche couvert pour les chargements – x. Bâtiment pour les bureaux de la régie et pour la direction – y. Territoire de Melecey – z. Territoire de Fallon. La surface occupée par la saline est d’un hectare.

Source : ADHS – 299.S.12 – Calque en couleur.

23Le puits d’extraction mesure dans sa section 3 m de long sur 1,35 m de large ; il était divisé en trois compartiments dont l’un servait à monter les bennes, l’autre à les descendre. Dans le troisième étaient placés les corps de pompes pour l’épuisement ainsi que les échelles. D’une profondeur de 137 m, il était boisé jusqu’à 40 m. La totalité de la machinerie : aérage, pompes et système de relevage du sel, fonctionnait à partir d’une roue hydraulique unique actionnée par le ruisseau canalisé passant sous le bâtiment (ADHS 295 S 5). Les eaux d’exhaure qui coulent en permanence dans les galeries étaient relevées à partir d’un puisard foré en contrebas de l’ouverture des galeries.

Une roue hydraulique qui est mise en mouvement par le cours d’eau ayant servi à l’usine de Fallon suffit en ce moment pour l’épuisement de l’eau ; on rencontre une nappe d’eau au dessous de la Dolomie keupérienne ; l’eau qu’elle fournit est reçue dans une galerie horizontale ou dans un premier réservoir d’où elle est extraite par des pompes ; un deuxième réservoir est pratiqué dans la couche de houille elle même ; il sert à réunir les eaux qui s’échappent du premier réservoir. Au-dessous de la houille, on ne rencontre plus que du gypse qui est complètement imperméable en sorte que le fond du puits est tout à fait sec. Comme le gypse est très compact et forme des parois qui tiennent bien d’elles-mêmes, on ne boise le puits que jusqu’au gypse.Dans l’état actuel des choses, on extrayait 100 hectolitres d’eau par heure et pour cela deux pompes mues par la roue hydraulique suffisent ; cependant il y en a une troisième pour les cas imprévus. La première pompe enlève l’eau du premier réservoir et celle du deuxième réservoir (ADHS 295 S 5).

24À la fin de l’année 1848, le bâtiment de la saline qui abrite de fait les installations d’extractions déjà en place voit enfin le jour (fig. 6, p. 487).

V. Les structures d’exploitation : le sel

25Dans les débuts, de 1850 à 1862, l’extraction du sel a lieu par puits et galeries. Les textes montrent que les deux couches de sel – que les sondages avaient indiquées comme ayant 4 et 2 m d’épaisseur – étaient en réalité beaucoup moins puissantes et n’avaient, au niveau du puits que 2,40 m et 0,80 m. Les résultats du sondage furent faussés probablement par les débris de sel ramenés par la cloche provenant des assises situées juste au-dessus de celles que le trépan avait atteintes en dernier lieu. Dans ses rapports annuels de visite, l’ingénieur des Mines note le percement de nouvelles galeries au fond ; leur hauteur est de 2 m dont 1,50 m de sel, leur largeur est de 5 m. « … On compte qu’un mineur fournissait par jour et pour 2 francs, 4 bennes contenant chacune 280 kg de sel brut produisant 224 kg de sel raffiné » (ADHS 295 S 6).

26La topographie indique un développement de galeries d’environ 500 m. L’accès s’effectue à partir d’un puits foncé à l’intérieur du bâtiment des salines :

Le 1er septembre 1855, de 6 h.1/2 à 9 heures du matin, j’ai visité les ouvrages souterrains de la mine de sel gemme de Melecey-Fallon.
J’ai été accompagné par le maître mineur... attendu que pour le moment il n’y a pas d’ingénieur attaché à l’établissement. Nous sommes descendus et remontés par le puits ouvert dans l’enceinte même de la saline et qui est le seul existant dans tout le périmètre de la concession (…). Le puits a une profondeur totale de 150,20 m dont 12,50 m de puisard en contre bas du sol de la couche de sel gemme exploitée. Il est tout entier dans les marnes irisées, dans la partie supérieure il traverse les dolomies qui recouvrent la couche de houille et donnent beaucoup d’eau après les pluies. Par suite de l’insuffisance des pompes, cette eau tombe quelquefois dans le puisard et le charge de sel provenant, soit des lits inférieurs à la couche exploitée, soit de la partie d’aval de celle-ci qui plonge vers le Sud de 15 à 20 degrés (…) (ADHS 295 S 6).

27En fait l’exploitation ne concerne que le banc le plus puissant de 2,40 m. Deux galeries ouvertes, au nord et à l’Ouest vont alors explorer ce banc dans un rayon de 60 m autour du puits. Les travaux montrent que l’épaisseur du gîte diminuait rapidement du côté du Nord et de l’Ouest. Il y avait vers le NNW, c’est-à-dire vers la crête de l’anticlinal, un amincissement progressif du gîte sans perturbation dans la stratification du toit et du mur. Les mineurs avaient atteint la limite Nord-Ouest de la lentille de sel gemme (ADHS 295 S 6).

28Vite abandonnée l’exploitation finira par buter dans cette direction sur un épuisement progressif du gîte.

29Les travaux vont alors s’orienter en même temps vers le Sud où deux galeries d’allongement parallèles de 120 m seront percées. Elles sont dirigées suivant la pente, et recoupées par des transversales de moindre largeur. La galerie Ouest est déviée après avoir rencontré une arrivée d’eau. L’extrémité de cette galerie est alors utilisée comme réservoir d’exhaure. Celle de l’Est sera la plus longue. L’exploitation s’effectue par la méthode des chambres et piliers. Cette technique est similaire au traçage en vigueur dans les mines de fer oolithique en plateures de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècle (Morin, 2001a). L’abattage se fait à la poudre, ce qui suppose une certaine résistance de la couche exploitée ; « Deux hommes opérant ensemble font trois trous de 1m de profondeur et que l’on charge de 2 hectogrammes de poudre » (15 décembre 1855, ADHS 299 S 12) et (ADHS 295 S 6).

30Vers le Sud, la puissance du gisement varie de 2 m à 2,75 m avec un pendage de 6 à 8° orienté vers le Sud-Est.

31L’exploitation rencontre très tôt d’importantes difficultés liées à un envahissement permanent des eaux d’exhaure dans les galeries auxquelles il fallut remédier par des systèmes combinés de pompes et de puisards.

32Les problèmes de sécurité liés à l’abattage sont constamment évoqués dans les rapports d’ingénieurs. En 1853 l’ingénieur des Mines compte 8 mineurs occupés à extraire le sel ; 3 chargeurs et rouleurs s’occupent du transport. L’air se renouvelle spontanément dans les travaux en raison de la largeur des galeries et du courant d’air établi dans le puits par suite de la chute d’une grande quantité d’eau, une technique d’aérage utilisée fréquemment dans un certain nombre de mines. Le compartiment des échelles est séparé de celui de l’extraction. L’air descend par le premier et remonte par le second. Un foyer d’aérage y est envisagé. « Depuis la mise en exploitation de la mine, les rapports indiquent le creusement d’un vide de 1 800 m3 correspondant à 49 053 quintaux métriques de sel gemme brut » (ADHS 295 S 6).

33En 1863, les concessionnaires furent contraints de modifier leur mode d’exploitation en substituant le procédé par dissolution à l’abattage direct. Ce procédé est favorisé par la présence de nappes aquifères pérennes.

Pendant l’année 1854 on a dû, pour éviter que les eaux du puisard s’écoulent dans les galeries, en tirer 4 249 bennes contenant ensemble 765 m3 et conséquemment 180 000 kg. de sel, attendu que leur salure était d’environ 240 kg par m3. Ce poids de 180 000 kg correspond à un volume d’environ 80 m3 de sel gemme massif pesant l’un 2 257 kg. On a tiré des eaux depuis environ 6 ans. Le volume du sel gemme dissous est ainsi enlevé, est donc d’environ 480 m3. Il doit donc y avoir un vide notable autour du boisage du puisard. Effectivement, pendant la nuit qui a précédé ma visite des travaux souterrains, on a extrait 80 bennes d’eau contenant l’une 0,180 m3 soit ensemble 14, 400 m3 et cependant le niveau dans le puisard n’avait baissé seulement de 0,80 m. Sans attribuer aux calculs qui précèdent une exactitude parfaite, on peut être certain qu’il existe un vide notable au bas du puits. Je ne pense pas que cet état de choses présente des dangers pour les ouvriers, parce que les cadres du boisage supérieur au puisard sont tous engagés dans les parois du puits. Néanmoins, j’ai recommandé d’examiner fréquemment l’état des cadres inférieurs lorsqu’on épuisera les eaux (…) Et il y a lieu de croire que les travaux recevront alors une direction plus rationnelle et que l’on exploitera le sel par voie de dissolution, comme à Gouhenans. Et il n’y a donc pas lieu de prendre des mesures administratives (ADHS 295 S 6).

34La pompe principale est actionnée par la force hydraulique. Ce nouveau type d’exploitation durera environ 10 ans. En 1874, les exploitants tentèrent vainement de céder la mine aux salines de Gouhenans. L’arrêt des travaux survenus à cette époque fut définitif. L’exploitation, qui avait duré 30 ans, avait produit moins de 20 000 tonnes de sel dont 8 000 par dissolution.

VI. Le combustible : le lignite et ses conditions d’extraction

1. Le lignite – Les origines de l’extraction

35Le 24 mai 1773 une extraction decharbon de terre est attestée sur le territoire d’une commune proche, à Abbenans (ADHS C 49) :

J’ay reçu l’ordonnance que vous m’avez fait l’honneur de m’envoyer pour exploiter provisoirement pendant une année la houillère, ou mine de charbon de terre que j’ai fait découvrir près la maison du Treuil paroisse d’Abbenans ; recevés en, je vous supplie, mes remerciements très humbles et soyés bien persuadé que je vous rendrai compte directement des succès que j’en attends ; je vais commencer par chercher des débouchés pour le débit par la rivière de Saône et j’aurai soin de vous informer des découvertes que j’espère faire à cet égard et dans lesquelles j’ose présumer que vous voudrés bien m’encourager en m’accordant votre protection à l’ombre de laquelle j’espère faire de cette exploitation une ressource avantageuse par la suite pour la province (…) (Giromagny le 24 mai 1773 : lettre d’un certain Bastu des Hautschamps à l’intendant de la Province (ADD 1 C 1383).

36De cette exploitation aucune autre trace n’a pu être retrouvée sur le terrain. Il est certain que dès le XVIIIe siècle, la région a bénéficié de recherches visant à reprendre les anciens travaux d’extraction comme ceux qui avaient été effectués dès le XVIe siècle à Gemonval et Saulnot pour l’alimentation en combustible de la saline de Saulnot ; c’est le cas à Corcelles et sur le territoire de la commune de Champey.

37C’est en 1778 que sont attestées les premières recherches de lignite à Melecey dans une lettre de l’Intendant de la Comté valant certificat de concession :

Nous intendant, Charles André de Lacore, (…) avons permis et permettons audits Rochet et Prévot de faire exploiter par provision et pendant un an en leurs propres et privés noms exclusivement à tous autres les mines de charbon qu’ils ont découverts à Melecey et Gouhenans dans le Baillage de Vesoul, à charge par eux d’indemniser les propriétaires des fonds ou terrains sur lesquels ils formeront des fouilles ou établissements de gré à gré ou à dire d’experts et de se conformer aux règlements concernant les mines, enjoignons aux dits Rochet et Prévot de justifier dans un an à compter de la date de la présente ordonnance au sieur de St. Ferjeux notre subdélégué à Vesoul de l’usage qu’ils auront fait de la présente permission de l’état de leurs travaux exploitations et établissements ; faute de quoi commettons et autorisons ledit sieur de St. Ferjeux à l’effet de se transporter sur les lieux après ledit délai pour en faire la visite, vérification et reconnaissance, de laquelle il dressera procès-verbal pour y celui à nous envoyé avec son avis ou être rendu compte à M Bertin. Fait à Besançon le 17 juillet 1778.

2. La concession de 1843

38La concession de lignite de Melecey qui englobe la totalité de la concession de sel gemme est concédée par ordonnance royale du 29 septembre 1843 sur une étendue de 480 hectares, à Mme veuve de Raincourt, M. de Raincourt, M. Legrand, M. Duprel et Bégeot qui la cèdent à laSociété civile de Melecey-Fallon dont le siège social est à Besançon. Cette dernière indique dans un rapport de demande de renonciation en date du 10 juillet 1924, que la concession n’est nullement rémunératrice à cause de la minceur de la couche, des grandes difficultés d’extraction et des travaux déjà exécutés (fig. 7, p. 492).

39La couche de charbon, située à une profondeur moyenne de 30 m, est exploitée uniquement pour les besoins de la saline. Sa qualité est médiocre, son allure irrégulière et sa puissance n’excède pas 0,40 m. À l’époque, la mine semble à peu près épuisée dans les parties où elle a été reconnue :

Il fallait même dans les dernières années de l’exploitation faire venir la houille de Gouhenans, les bancs s’amincissant jusqu’à 0, 25 m d’épaisseur, en même temps que la qualité devenait plus mauvaise. En tout cas, il n’y a pas lieu à songer à exploiter cette petite couche friable et pyriteuse même au cas où on la retrouverait avec sa puissance ordinaire de 0, 40 m à un autre usage qu’aux chaudières de la saline. Cette dernière étant inactive depuis longtemps et ne paraissant pas devoir être remise en activité par suite de l’éloignement de toute voie économique de transport, l’inexploitation de la mine de houille de Melecey est bien justifiée (ADHS 295 S 6 Rapports généraux des ingénieurs : procès-verbaux de visite : 1850-1889). L’abandon définitif des travaux de la mine de Melecey remonte à l’année 1865.

Figure 7 : Saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône). Carte de synthèse de la concession de houille : concession de 1843

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Légende :KG = Emplacement d’une galerie de houille – HI = Galerie de Direction proposée par l’Ingénieur des Mines.1. Puits de houille deBuisson brûlé – 2. Puits foncé en 1827 – 3. Puits de houille de la Carlotte – 4. Galerie de 50 m de longueur suivant la houille ; la puissance de la veine est de 50 cm, son inclinaison vers le Sud est de 20° – Travail de 1822 – 5. Moulin dePeute Vue (Commune du Magny) – 6. Puits de 17 m de profondeur sur la houille ; sa puissance est de 18 cm ; à cette profondeur on a pratiqué une galerie se dirigeant à l’Ouest, laquelle traverse une veine supérieure dont la puissance est de 33 cm ; son inclinaison vers le Sud paraît être de 30° – Travaux de 38 et 1839 – 7. Galerie – 8. Puits de 27 m, perçant la houille ; sa puissance est de 70 cm ; son inclinaison est de 30° – Puits de 1840 et 1841 ; sondage de 1839 – 9. Sondage de 7,30 m traversant une veine de houille de 60 cm (1840) – 10. Puits de recherche pratiqué en 1822 et abandonné avant d’avoir atteint la houille – 11. Sondage de 16 m perçant la houille, sa puissance est de 60 cm (1838) – 12. et 13. Puits desCrays.

Source : ADHS – 299.S.12 – Plan de la concession de sel gemme de Melecey-Fallon, concédée par ordonnance royale du 29 septembre 1843 sur une étendue de 480 hectares, accordée à Mme veuve de Raincourt, M. de Raincourt, M. Legrand, M. Duprel et Bégeot – Cartographie D. Morin

3. Les conditions de l’extraction : les mines de Melecey-Fallon

40En juillet 1862, dans le bois de Fallon, au lieu-ditBuisson brûlé, est commencé le fonçage d’un puits qui atteint le lignite à la profondeur de 23,10 m fin septembre. Le gisement est mis en exploitation régulière début octobre.

La couche a une épaisseur de 0,30 m divisée en deux veines par un lit de schiste de 0,04 m on était tombé sur d’anciens travaux qu’il a fallu réparer pour l’exploitation. Une galerie a été ouverte du Nord au Sud c’est-à-dire à peu près dans le sens de la pente. Cette taille dont le front est à 100 m environ de l’accrochage du fond sert de voie de roulage ; on a entaillé sur une hauteur de 1 m le toit qui est assez solide ; cependant pour plus de sûreté, on a posé à 0,80 m les uns des autres des cadres en bois, avec du blindage contre les parements et au-dessus des chapeaux. Le gîte est découpé en piliers de 2,50 m de largeur par des galeries transversales partant de la galerie principale. On enlève la houille à droite et à gauche de ces recoupes et on remblaie avec les parties stériles qu’on est forcé d’abattre pour faciliter l’accès dans ces tailles et dans la galerie principale. Quand le champ d’exploitation par la galerie actuelle de roulage sera suffisamment éloigné du fond du puits, l’extraction sera reprise de la même manière par une taille parallèle à cette galerie d’allongement. Le puits est partagé en deux compartiments dont l’un sert pour l’extraction au moyen de bennes et l’autre contient le compartiment des échelles et la galerie d’aérage. L’air frais descend par le compartiment des bennes arrive à l’extrémité de la galerie d’allongement, par suite du muraillement successif des tailles transversales abandonnées, se distribue dans les travaux en cours et retourne à la gaine en passant dans les anciens travaux remblayés. Sans être très actif, l’aérage est bon. Le puits n° 4 n’a guère d’avenir vers l’Ouest, parce que de ce côté, et à peu de distance se trouvent les affleurements. La houille que cette partie contient est d’ailleurs de mauvaise qualité, par suite du peu d’épaisseur du terrain de recouvrement ; elle se trouve altérée au point de ne pouvoir être employée. Les exploitants possèdent un registre de contrôle des ouvriers et un registre d’extraction qui compte aussi pour livre de vente attendu que les produits de la mine sont consommés sans exception à la saline de Melecey appartenant aux exploitants de la mine de houille. Les ouvriers, étant tous de la localité, ne sont pas pourvus de livrets. Le plan des travaux est mis à jour mais il n’est pas adressé annuellement au Bureau des Mines (ADHS 295 S 6).

4. La mine de lignite de Melecey

41La mine de lignite de Melecey se trouve en 1861 derrière la saline, à quelques mètres seulement du mur d’enceinte. En profondeur, la couche de lignite se trouvait à 9,30 m. Les travaux comprenaient une galerie montante qui s’avançait vers l’Est jusqu’à 40 m du puits et 3 galeries en direction vers le Nord, de 8 m de longueur ; ces galeries étaient réunies à leurs extrémités par une autre galerie de pendage pour favoriser le retour d’air. Ces ouvrages avaient 0,70 m de hauteur sur 0,70 m de large, ils étaient solidement boisés pour soutenir le toit formé d’une argile schisteuse noirâtre. Des planches étaient disposées sur le sol pour faciliter le roulage. Les eaux d’exhaure étaient élevées au jour au moyen d’une pompe manuelle ; elles étaient utilisées pour le lavage de la houille dans un lavoir à bras établi dans le voisinage du puits. Les ouvriers étaient au nombre de 10 à savoir 7 à l’intérieur et 3 à l’extérieur (ADD – A.DRIRE-FC – Salines de l’Est – Documents inédits).

VII. De vicissitudes en vicissitudes

42Par pétition en date du 2 juillet 1850, Grante, directeur gestionnaire de la fabrique, demande l’installation d’un générateur destiné à fournir la vapeur nécessaire à la vaporisation de l’eau salée. Dans le même temps, il est fait appel aux mines de houille de Gemonval pour renforcer l’approvisionnement en combustible des chaudières de la saline. Le gisement de Melecey-Fallon se révèle très vite insuffisant. La couche de lignite est très mince. Les mineurs sont forcés d’entailler le toit de l’encaissant pour donner aux galeries la hauteur nécessaire au passage des bennes : les pertes de temps sont considérables. Le roulage du minerai prend de plus en plus d’importance. Il faut multiplier les orifices. En 1852, Grante sollicite l’autorisation d’exécuter le forage d’un nouveau puits pour l’exploitation de la houille au lieu-ditLe Crays.

43Le 24 janvier, le fonçage du puits s’achève à 12,50 m de profondeur. Il est divisé en deux compartiments, le premier pour la benne actionnée par un treuil à bras d’homme, le second pour l’échelle, la pompe d’épuisement et la gaine d’aérage en planches. Cette gaine s’élève à 4,50 m au-dessus du sol.

44La couche de houille n’excède guère 18 à 30 cm d’épaisseur. L’extraction proche de la surface nécessite un boisage solide et surtout très coûteux. 14 ouvriers extraient journellement la houille sous les ordres d’un contre-maître (ADHS).

45Les différents rapports de visite soulignent les difficultés de l’exploitation. La couche de houille est irrégulière ce qui contrarie les plans successifs d’abattage et l’organisation des chantiers.

46La configuration des terrains oblige les exploitants à diversifier les sources d’approvisionnement.

La couche de combustible rencontrée par ce puits est à peine exploitable ; elle demeurerait enfouie sous terre si une saline n’existait à côté. Du reste, les divers puits et sondages déjà pratiqués dans le périmètre de la concession ne permettent pas d’espérer des gîtes beaucoup plus riches et l’on trouve plus d’avantages à exploiter la couche des Crays qu’à s’approvisionner à la houille de Gémonval, distante de 10 km.
Les déblais qui proviennent spécialement du percement des galeries sont plus que suffisants pour remplir le vide produit par l’extraction. Le parcours de l’air dans l’intérieur est indiqué par des flèches sur le plan ; il descend par le puits, se dirige vers l’Est en suivant la galerie, s’infléchit vers le Nord et revient au puits (ADHS 295 S 6).

47En 1853, le puits deCrays est abandonné faute de rentabilité. En 1855, le fonçage du puits 3 ou puits Saint Pierre est engagé au lieu-ditDe derrière Lachaud. 16 Mineurs et 15 Manoeuvres dont 7 payés par l’établissement y travaillent. Le chiffre se stabilisera à 15 mineurs et 11 manœuvres. L’ouverture de la mine de houille au puitsSaint Pierre déterminera l’abandon des exploitations déjà peu rentables au niveau du Puits à sel et la fermeture de la mine duBuisson Brûlé. Ce puits est définitivement abandonné à la fin de février 1857.

48À cette époque s’achève le contentieux existant entre les concessionnaires de la mine et les exploitants.

49En 1857, les habitants de Melecey protestent par pétition auprès du Préfet contre les prélèvements abusifs de bois effectués par la saline dans les communaux. À cette date, les mines de houille enregistrent une chute de rendement. Paradoxalement, il est nécessaire de compléter massivement par un apport de bois l’alimentation des chaudières à sel.

50Dans un rapport, l’ingénieur des forêts met en garde les administrateurs et tente d’apaiser la colère des habitants. L’affaire remonte jusqu’à la Préfecture. Pour faire face à la pénurie de combustible, les exploitants décident d’abandonner le système d’évaporation initial par serpentins. Deux grands poêles semblables à ceux de Gouhenans et chauffés à feu nu sont alors installés.

51En 1858 il est fait appel aux mines de houille de laGrange du Vau près de Vy-les-Lure pour approvisionner la saline en combustible. Près des 4/5e de la production de cette mine sont alors acheminés à la saline. En 1861 l’exploitation des houillères de Melecey-Fallon qui tournait au ralenti reprend : elle est confiée à un ancien maître mineur de Vy-les-Lure moyennant un prix déterminé pour le quintal métrique de houille extrait. Le 2 juillet, un puits est donc foncé à quelques mètres du mur d’enceinte de la saline pour y exploiter la houille. La couche de minerai est atteinte à 9,30 m. Les galeries boisées ont une section carrée de 0,70 m ; des planches sont disposées sur le sol pour faciliter le roulage.

VIII. Le déclin – Les dernières difficultés et l’abandon de la saline

52Le 25 juillet 1862, l’Ingénieur des Mines constate l’abandon de la mine de sel. La saline est en chômage. Les eaux envahissent le puits. Les exploitants envisagent à nouveau l’extraction par voie de dissolution en établissant des pompes dans l’un des compartiments du puits. En octobre redémarrent les premières exploitations de houille qui rencontrent d’anciens travaux. S’agit-il des travaux et sondage datant du XVIIIe siècle ? L’abattage s’effectue désormais par dépilage : le gîte est découpé en piliers de 2,50 m de largeur par des galeries transversales à partir de la galerie principale. Les galeries sont immédiatement remblayées par les matériaux stériles et servent de soutènement : l’exploitation se rationalise mais ne compense pas le manque de rentabilité dû à la faible puissance de la couche de houille.

53Jusqu’en 1862, l’exploitation a lieu par abattage souterrain ; elle fournit une moyenne de 10 000 à 15 000 quintaux de sel par an. Le puits d’extraction se trouve toujours à l’intérieur même du bâtiment de la saline (fig. 7, p. 492). Le sel est dissout au jour et les eaux saturées sont soumises à évaporation au moyen de serpentins : la saline de Melecey-Fallon utilise alors une technologie avancée pour l’époque, voire expérimentale. Malheureusement, les mauvaises conditions d’exploitation, la relative impureté du sel remonté à la surface, la conjoncture économique locale et surtout la pénurie de combustible ne permettront pas de poursuivre ce type de traitement. En 1857, Dromard, directeur de la saline, demande l’autorisation de faire fonctionner une chaudière et une machine à vapeur (fig. 8, p. 496) pour accroître l’extraction de l’eau salée : la roue hydraulique ne suffit plus à entraîner le mécanisme (Demande d’autorisation adressée au préfet pour mettre en activité une machine à vapeur pour extraire le sel du puits de la saline, ADHS 17 J 161) – (Appareil à vapeur, Melecey. ADHS 303 S 10) – (ADD – A.DRIRE-FC – Salines de l’Est – Documents inédits) (fig. 9, p. 497).

54En 1865, un terrible accident se produit dans la houillère duBuisson Brûlé (Morin, 2001b). À la suite d’un incendie survenu dans la gaine d’aérage, les flammes envahissent le puits et les galeries : une dizaine de mineurs périssent dans l’incendie. Un seul survivant parvient à gagner la surface. La mine est définitivement fermée (ADHS 226 E 2 et ADHS 24 M 11).

55En 1867, la production de la saline atteint 11 727 quintaux métriques de sel. À partir de cette année, le puits étant définitivement noyé, une pompe approvisionne directement les deux poêles en surface en saumure (fig. 8, p. 496).

56En mars 1872, l’exploitation cesse en grande partie par suite du mauvais état de l’ancien puits d’extraction transformé en puits d’épuisement. LaCompagnie des salines de Gouhenans négocie alors avec le Marquis de Raincourt en 1873 pour reprendre la direction à sa place et produit en son nom le minimum de 5 000 quintaux exigé par la régie. Elle adresse en 1874 une demande à l’administration, pour amodier régulièrement la concession. L’insuccès des recherches effectuées pour extraire à Melecey la houille nécessaire à l’évaporation de l’eau salée, la décide à retirer sa demande et l’exploitation est abandonnée.

Figure 8 : Saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône). Chaudière. Schéma dressé par l’ingénieur des Mines

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Source : ADHS. Cliché D. Morin.

57Un nouveau puits de houille est foncé dans le bois de Fallon sans grand succès.

58Jusqu’à cette date, les produits de la saline sont essentiellement vendus dans le Doubs (3 900 quintaux métriques sur 5 000) dans une moindre part en Haute-Saône et dans le Territoire de Belfort. En 1903, la production totale des salines de Gouhenans et Melecey-Fallon atteint 9 718 tonnes pour une concession s’étendant sur près de 1 458 ha (ADD,ibid.).

59Peu d’éléments concernent le déclin de la saline elle-même, les archives disponibles s’arrêtant en 1882. Les comptes et pièces d’archives recueillies sur place s’arrêtent quant à eux autour de l’année 1863. Il est vraisemblable que le bâtiment ait été abandonné au début des années 1900.

Figure 9 : Saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône). Pompe d’exhaure actionnée par la vapeur en remplacement de la pompe d’origine mue par énergie hydraulique

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Source : ADHS. Cliché D. Morin.

IX. Les derniers soubresauts

60Durant la Première Guerre Mondiale, une tentative de remise en état de la saline échoue : le puits est éboulé : impossible de descendre au fond pour effectuer les réparations. Jusque vers les années 1950 laCompagnie des Salines de l’Est entretient le bâtiment (ADD,ibid.). Rachetée par les établissementsMaglum autour des années 1950, la saline est soumise au pillage. Le parc est transformé en dépôt de ferrailles.

61À la suite d’une demande en renonciation de concession les ingénieurs des Mines décrivent ainsi la saline à la suite de leur visite Le 28 octobre 1925 :

Nous avons visité les anciens travaux de la concession de lignite et sel de Melecey-Fallon instituée par ordonnance royale du 2 novembre 1842. L’abandon des travaux de cette mine date de 1865 et il n’existe même plus, à la surface, aucune trace de puits ou galeries. Mais à l’intérieur de l’ancienne saline de Melecey, on voit encore un ancien puits de 35 m de profondeur et d’une section carrée de 1,20 m de côté. Pendant la guerre de 1914-1918, on a essayé, mais sans succès de l’utiliser pour l’extraction de l’eau salée. Il est à moitié éboulé et remblayé mais il est recouvert par d’épais madriers. Il n’y a donc qu’à le remblayer rapidement (ADD,ibid.).

62Aujourd’hui subsistent encore la cuve à saumure en bois, pièce unique par sa conception et son volume (fig. 10, p. 498), la charpente, la cheminée et les magasins à sel.

Figure 10 : Saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône). Grande cuve à sel en chêne

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Source : Photographie D. Morin.

X. Les causes de l’abandon de la saline – Des causes multiples

1. La pauvreté du gisement de sel – Déclin économique

63À l’époque où la concession de Melecey avait été instituée, le sel venait d’être redécouvert depuis peu dans l’Est de la France. Il y avait là la source d’une industrie nouvelle pour les régions concernées que le gouvernement ne pouvait que favoriser en facilitant en encourageant les recherches. Pour autant, des sondages plus étendus auraient certes démontré rapidement la pauvreté du gisement. Ce que les travaux de recherches n’ont pu démontrer, l’exploitation le révèlera plus tard.

64Il semble bien que l’une des causes de l’insuccès de l’exploitation de Melecey ait été la pauvreté du gisement. Dans un rapport, l’ingénieur des Mines, Le Vernier, indique en 1863, que le coût de revient du sel était alors de 4,75 francs à Melecey, alors qu’il était de 1,50 francs à Gouhenans et que le prix de vente était de 4,49 francs (ADD – A.DRIRE-FC – Salines de l’Est – Documents inédits).

65En cause également : la situation géographique de l’entreprise et la mauvaise qualité du sel rempli d’impuretés qui rendaient difficiles et onéreux les procédés d’épuration et d’évaporation. Preuve de la pauvreté du gisement, la faible quantité qui en a été extraite : moins de 20 000 tonnes en plus de 30 ans ! Pourtant, durant cette période, l’industrie du sel était en plein essor. L’abaissement de l’impôt de 40 à 10 francs les 100 kg en 1848, en avait favorisé l’exploitation en augmentant considérablement les débouchés.

2. L’appauvrissement des ressources en combustible houiller

66À la mine de sel était superposée une mine de houille keupérienne, exploitée conjointement, et qui permettait d’obtenir à bon compte le combustible nécessaire à l’évaporation des eaux salées. C’est cette combinaison charbon de terre/sel gemme qui est à l’origine de l’implantation de l’usine. Mauvaise interprétation des sondages, surévaluation des ressources en charbon ? Toujours est il que cette exploitation était rendue de plus en plus difficile compte tenu de la faible épaisseur du gisement et son épuisement progressif.

67L’utilisation massive du bois dans le soutènement indispensable des ouvrages souterrains en particulier des galeries de roulage et des tailles, les difficultés de l’abattage liées à la faiblesse des couches augmentèrent de manière considérable les coûts d’entretien de la mine. La houillère avait pourtant été ouverte pour pallier le manque de bois : cette situation paradoxale n’était plus tenable.

3. Un contexte géographique défavorable

68Une autre cause de déclin semble liée au contexte géographique et économique local et régional. La situation enclavée de la saline, l’éloignement des voies de communication constituent autant de facteurs économiques limitants. (ADD,ibid.). Les gares les plus rapprochées étaient Lure sur les réseaux de l’est à 27 km de distance et L’isle-sur-le-Doubs sur le réseau nord à 24 km. L’ingénieur des Mines reste cependant optimiste :

Cette situation est à la veille de s’améliorer par la suite de la construction de la ligne de Lure à Loulans qui doit passer à proximité de Melecey. Il est possible qu’après l’ouverture de cette ligne, la saline de Melecey soit remise en activité ; jusque-là elle paraît devoir rester en chômage. À notre avis, l’inexploitation de la mine de sel de Melecey est justifiée tant au point de vue technique qu’au point de vue économique. Comme d’autre part, l’intérêt des consommateurs n’est nullement en jeu dans l’espèce, nous estimons qu’il n’y a pas lieu d’appliquer à cette mine l’article 49 de la loi du 21 avril 1810 (Rapport de l’ingénieur des Mines Vesoul le 6 juillet 1891. ADD,ibid.).

69En fait la saline de Melecey ne fut guère plus favorisée que celle de Gouhenans ; et l’ouverture de la ligne de Montbozon à Lure, postérieure à l’abandon des travaux, ne réussit pas à modifier sensiblement les conditions du marché du sel dans la région.

4. Des techniques d’extraction inadaptées ?

70Les techniques minières par abattage manuel et à la poudre ont certainement entraîné un surcoût dans la production avec la multiplication des manipulations en surface. Il fallait donc optimiser les performances techniques relatives à la dissolution et à l’évaporation du sel, ce qui fut réalisé à plusieurs reprises par l’adjonction de serpentins puis de chaudières à vapeur.

71D’autres innovations furent implicitement mises en oeuvre au niveau de l’extraction elle-même, tant pour améliorer les conditions d’exploitation que pour accroître le rendement. Ces techniques furent mises en place en réponse à des situations conjoncturelles défavorables, et bien souvent à grands frais et sans étude préalable, ce qui explique en partie la faiblesse de la production et les difficultés économiques de la saline. Il est probable également que les pompes ne ramenaient au jour que la partie supérieure et la moins chargée de sel de la nappe d’eau salée souterraine. C’est ce qui ressort de l’analyse de plusieurs rapports. Ils ne concernent toutefois que la dernière phase de l’exploitation par dissolution.

Conclusion

72L’ouverture de la saline correspondait pour l’entrepreneur principal de l’époque, le Marquis de Raincourt, à une alternative novatrice, viable, susceptible de susciter un renouveau économique local. Malgré son échec relatif, l’exploitation de Melecey-Fallon constitue néanmoins un cas riche d’enseignement pour l’histoire des techniques. L’usine appartient à la dernière génération de salines, programmée pour fonctionner au charbon de terre et caractérisée par une série de mutations et d ‘évolutions :

  • un mode d’extraction au départ combinée de la houille et du sel gemme dans un même contexte géologique et géographique.

  • une amélioration du rendement énergétique des moteurs hydrauliques adaptés à la mine.

  • des tentatives d’innovations dans le traitement du sel.

  • des transferts de technologie en matière d’abattage

  • une série d’expérimentations liées à l’exploitation : abattage et dissolution.

73L’épuisement progressif des gisements de charbon de terre, leur exploitation de plus en plus problématique devaient entraîner un retour paradoxal à une énergie dévoreuse de forêts : le bois. Une situation qui ne pouvait se pérenniser dans le contexte économique de l’époque.

74Le bâtiment principal toujours existant concentrait dans un espace clos l’ensemble de la chaîne opératoire : extraction, traitement, stockage et expédition (Morinet al., 1990). Il abritait un vaste espace non-compartimenté ; les chaudières étaient disposées en enfilade, pour faciliter le travail des chauffeurs et le contrôle de la cuite. L’amplitude de la charpente, l’élévation des murs permettaient l’évacuation des vapeurs vers les ouvertures ménagées à cet effet. Les magasins situés en bout de chaîne communiquaient avec la halle par le haut. L’éclairage était assuré par les nombreuses fenêtres qui s’ouvrent à mi-hauteur et qui cernent la structure. La qualité des proportions et le mélange de la pierre et de la brique prévalent dans la composition architecturale de l’édifice que domine l’unique cheminée carrée en briques (fig. 11 et 12, p. 501). Isolée voire enclavée dans le contexte rural, la saline de Melecey-Fallon tourne néanmoins une page d’histoire industrielle essentielle pour la compréhension des mutations techniques de la fin du XIXe siècle.

Figure 11 : Saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône). Vue actuelle des bâtiments à l’intérieur de l’enceinte vers le Nord-Ouest*

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Note : En face : bâtiments administratifs et hangars destinés à abriter les charrettes. À droite la grande halle et la cheminée. On distingue la façade des bâtiments de stockage (tout à fait à droite de la photographie).

Source : Photographie D. Morin.

Figure 12 : Saline de Melecey-Fallon (Haute-Saône). Vue générale actuelle du bâtiment principal. Vue vers le Sud

Image 100000000000024A000001B9FADA9E8C683D5A2E.jpg

Source : Photographie D. Morin.

Bibliographie

Sources concernant la Saline de Melecey-Fallon

1. Archives départementales de la Haute-Saône (ADHS)

a. Historique de la saline – Exploitation minière : rapports des Ingénieurs des Mines

ADHS 299 S 12 Melecey : sel gemme et houille (1818-1882).

ADHS C 49

ADHS 295 S 5 Rapports généraux des Ingénieurs : procès verbaux de visite (1817-1845).

ADHS 295 S 6 Rapports généraux des Ingénieurs : procès-verbaux de visite (1850-1889).

ADHS 303 S 10 (1850-1863) Appareil à vapeur – Melecey.

ADHS 296 S 4 Statistiques des mines et minières, carrières dans la Haute-Saône (1843-1846).

ADHS 296 S 5 Etats statistiques des mines, minières et carrières dans la Haute-Saône (1848-1867).

ADHS 226 E 2

ADHS 24 M 11 (1865) Rapport sur l’accident survenu à la houillère de Fallon.

b. Historique de l’affaire : constitution, dévolution, correspondance

ADHS 17 J 156 Constitution d’une société pour l’exploitation des mines de sel et de houille de Fallon et Melecey (1848, 1856). Litige entre les actionnaires (1853-1856). Cession par Félix Legrand, directeur des fourneaux de Fallon, actionnaire des salines de Melecey-Fallon, à Alexandre Péruez, demeurant au château de Troissy (Marne) des deux actions qu’il possède de la dite saline (copie) (1859), lettre (1872). Requête de Marie Louis Prosper Charles de Raincourt adressce au ministre des travaux publics, relative à l’amodiation des salines de Melecey-Fallon à laSociété des Salines de Gouhenans (1874). Liquidation Martelet – Un des trois administrateurs des salines – (1884-1885). Conventions entre laSociété des Salines de Melecey-Fallon et leSyndicat des Salines de Franche-Comté (1887), correspondance reçue de laSociété des Salines de Gouhenans (1875-1898) 1848-1898.

c. Assemblées générales

ADHS 17 J 157 Délibérations, notes, rapports (1877-1897).

d. Comptabilité

ADHS 17 J 158 Répartition du dividende de la société (1878-1896). Compte de la réserve (1892-1895) 1878-1896.

e. Moulin de Melecey

ADHS 17 J 159 Notes, correspondance (1856-1892).

f. Correspondance, notes

ADHS 17 J 160 Correspondance, notes (1856-1898).

g. Divers

ADHS 17 J 161 Demande d’autorisation adressée au préfet pour mettre en activité une machine à vapeur pour extraire le sel du puits de la saline (1857). Etats de parcelles dépendants du moulin et de la saline (1877-1878), ventes de pièces de terre dépendant de la saline (1895). 1857-189S.

2. Archives départementales du Doubs (ADD)

ADD 1 C 1383 Premières exploitations.

XIXe s. Salines de l’Est – Documents inédits. Archives de la Direction Régionale de l’Industrie et de la Recherche – DRIRE – conservés aux ADD.

29 Sept 1843 – Cahier des charges de la saline.

16 Mai 1866 – Lettre de la Préfecture de Haute Saône à l’Ingénieur en chef des mines pour une enquête sur la situation de l’industrie du sel en France.

12 Juin 1866 – Idem ; date de la réunion concernant la commission d’enquête.

14 Mars 1866 – Enquête sur les sels ; rapport à l’empereur : 6 pages imprimées (Ministère de l’Agriculture, du Commerce et des Travaux Publics).

14 Mars 1866 – Idem : enquête sur les sels, questionnaire de 13 pages.

3. Archives de la Société d’Histoire et d’Archéologie de l’Arrondissement de Lure (Haute-Saône)

XIXe s. Saline de Melecey-Fallon – Documents inédits. Registres de comptes de la saline et des houillères.

4. Archives du Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM)

Bibliographie

BOUVARD A., 1989, « Les économies de bois de chauffage dans les salines européennes à la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe siècle »,Bulletin de la Société d’Emulation de Montbéliard, 111.

MERLE A., 1905,Les gîtes minéraux et métallifères du département du Doubs, Thèse, Besançon.

MORIN D., 2000, « Sel et charbon de terre en Franche-Comté du XVIe au XIXe siècle : modèle économique et source d’innovations techniques »,XXe Congrès international d’Histoire des Sciences. Actes du Symposium : le charbon de terre en Europe avant l’usage industriel du coke. Liège, 21-23 juillet 1997, De diversis artibus, collection de Travaux de l’Académie Internationale des Sciences.Ed. Brepols, p. 85-98.

MORIN D., 2001a, « Evolution of underground iron ore mining techniques (Liasic and supra liasic) in Eastern France (XVIth-XIXth centuries) »,5th International Mining History Congress.Milos Island, Greece. 12-15 september 2000, p. 324-341.

MORIN D., 2001b, « Accident à la houillère de Fallon (Haute-Saône) le 12 mai 1865 »,Bulletin de la Société d’Histoire et d’Archéologie de l’Arrondissement de Lure, SHAARL, 19, p. 38-41.

MORIN D., COURBET P., PARIETTI JJ. et PY M., 1990,Etude de faisabilité d’un circuit de la mine en Haute-Saône,Mines de fer, mines polymétalliques et mines de houille, Musée des Techniques et Cultures comtoises – Dossier technique.

THIRRIA E., 1833,Statistique minéralogique et géologique du département de la Haute-Saône, Besançon, Ed. Outhenin Chalandre.

Auteur

  • Denis Morin

    Docteur (HDR) en Archéologie/Epistémologie/Histoire des Sciences et des Techniques et chercheur associé au CNRS (UMR 5608 – TRACES – Travaux et Recherches Archéologiques sur les Cultures, les Espaces et les Sociétés) à l’Université de Toulouse le Mirail. Archéologue spécialisé dans l’Histoire des Sciences et des Techniques, D. Morin a centré ses recherches sur l’histoire des techniques minières (Techniques d’extraction des ressources minérales) et métallurgiques (Mines, Métallurgies, Cultures et Territoires). Chargé de cours à l’Université de technologie de Belfort Montbéliard, il enseigne depuis 1995 l’Histoire des Techniques : « Matériaux et Energies en Europe de l’Antiquité à l’Époque Moderne ». Il assure également la responsabilité d’un cursus d’enseignement sur le thème « Industrial Heritage and Culture ». Il dirige actuellement plusieurs chantiers de fouilles et programmes de recherches en France et à l’Étranger : Minerais, Mines et Métallurgies des pays de karst en Europe ; Techniques d’extraction des minerais polymétalliques en gisements profonds : les mines du Laurion (Attique, Grèce) ; À l’origine du métal dans les Alpes. Mines et métallurgies dans les hautes vallées alpines ; Innovations et circulations techniques dans les Alpes du Moyen Âge à l’époque Moderne ; Techniques d’extraction de l’étain (Programme franco-Britannique en projet). Il a notamment publié : Morin D ., Rosenthal P. et Fontugne M., 2007, « Roman-Early Medieval iron mining and smelting at high altitude in the Alps (Argentera-Mercantour Massif – Alpes Maritimes, France) »,Antiquity, 81 (313), sept. 2007, http://www.antiquity.ac.uk/ProjGall/morin1/index.html;Morin D., 2007, « Les mines antiques du Laurion : techniques minières et stratégies d’exploitation »,Mineria antigua : Estudios regionales y temas de investigacion actual, Colloque international, 28-29 novembre 2005, Madrid, Casa de Velasquez, CSIC Madrid, UTAH/Université de Toulouse le Mirail, (à paraître) ; Morin D., Lavier C., et Guiomar M., 2006, « Moriez : The beginnings of salt extraction in Europe (sixth millennium BC) : The salt spring of Moriez (Alpes de Haute-Provence, France) »,Antiquity, 80 (309), sept. 2006, http://antiquity.ac.uk/ProGall/morin/index.html.


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