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Nom de naissance | Srul Herş Moscovici |
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Activités | Psychologue social, directeur des études,chercheur ![]() |
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A travaillé pour | École des hautes études en sciences sociales New School for Social Research(en) Université de Genève ![]() |
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Serge Moscovici (de son nom de naissanceSrul Herș Moscovici ouSrul Hersch Moscovici), né le àBrăila (Royaume de Roumanie) et mort le[1],[2], est un psychologue social, historien des sciencesfrançais d'origineroumaine et l'un des principauxthéoriciens de l'écologie politique, pionnier de la penséeécoféministe et de l’anthropologie de la nature. Il est aussi un important penseur des méthodes et des conditions de l’efficacité de l'activisme, méthodes qu'il a tenté d'appliquer à l'activisme environnemental.
Ancien directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS) deParis et à laNew School for Social Research deNew York, il fut l'un des fondateurs de lapsychologie sociale[3] européenne. Il a été directeur du Laboratoire de psychologie sociale à l'EHESS et fondateur du Laboratoire européen de psychologie sociale à laMaison des sciences de l'homme à Paris (1976-2006), premier président de l’Association européenne de psychologie sociale expérimentale et, de 1974 à 1980, duCommittee on Transnational Social Psychology du Social Research Council. Il fut également membre de l'Académie des sciences de Russie et membre honoraire de l'Académie hongroise des sciences.
Il fut jusqu'à sa mort président honoraire du Réseau mondial Serge Moscovici[4], fondé en 2014 à la fondation Maison des sciences de l'homme à Paris.
AvecMarie Moscovici (née Bromberg), sociologue et psychanalyste française, il a deux fils dont l'un est le politicien françaisPierre Moscovici.
Issu d'une famillejuive roumaine, il fut exclu en1938 du lycée deBucarest par les loisantisémites. Après avoir subi lepogrom de Bucarest en janvier1941, il fut mis au « travail obligatoire » jusqu'au, c'est-à-dire jusqu'à l'entrée de l’armée soviétique enRoumanie. C’est durant ces quatre années de guerre qu’il prit goût à la lecture et apprit à parler le français au contact, notamment, d'Isidor Goldstein, futurIsidore Isou (fondateur dulettrisme), avec lequel il fonda la revueDa [« Oui »], revue d’art et de littérature éditée fin1944.Da fut rapidement interdite par lacensure.
En1947, il quitta seul la Roumanie et, comme beaucoup, utilisant la filière des « camps de personnes déplacées » passant par laHongrie, l'Autriche et l'Italie, il entra enFrance un an plus tard, à 22 ans, en tant que réfugié.
Il est inhumé au petitcimetière du Montparnasse (division 29).
En1949, il obtint sa licence depsychologie et en1950 le diplôme de l’Institut de psychologie de Paris. À partir de1950, il obtient une« bourse de réfugié »[réf. souhaitée] pour poursuivre ses études à laSorbonne, où il soutient, en1961 sa thèse, sous la direction deDaniel Lagache, sur lareprésentation sociale de lapsychanalyse. Par la suite, ses travaux de psychologue social porteront principalement sur les processus de passage de la science dans le sens commun et sur le pouvoir des minorités.
Il crée en1965 le Groupe d'études de psychologie sociale à laVIe section de l'École pratique des hautes études. C'est en ce lieu, devenu par la suite le Laboratoire de psychologie sociale de l'Ehess, que la discipline s'est véritablement constituée et que toute une génération de psychologues sociaux a été formée (Jean-Claude Abric,J.-L. Beauvois, Willem Doise,R. Ghiglione,Claudine Herzlich, Denise Jodelet, Michel-Louis Rouquette).
Plus tard, c'est à laNew School for Social Research deNew York qu'il sera convié comme professeur et où il enseignera, parallèlement à ses séminaires à l'École des hautes études en sciences sociales à Paris. En 1976, à lafondation Maison des sciences de l'homme, il crée le Laboratoire européen de psychologie sociale, un des premiers réseaux européens de recherche. Il a été professeur invité à l'InstitutJean-Jacques Rousseau de l’université de Genève, à l'université de Louvain ainsi qu’à l'université de Cambridge, et fait partie de nombreuses académies et sociétés savantes françaises et étrangères.
Il a été coéditeur duEuropean Journal of Social Psychology (1969-1974), duJournal for the Theory of Social Behaviour (1985) et de la collectionPsychologie sociale éditée auxPresses universitaires de France, ainsi qu'éditeur deEuropean Studies in Social Psychology (1982). Il a dirigé de nombreux ouvrages, contribué par une quarantaine de chapitres à différents ouvrages et publié plus d'une centaine d’articles dans des revues scientifiques.
DansLa Machine à faire des dieux, il pointe les limites de la sociologie, discipline qui s'est coupée des analyses psychologiques et psychiques des comportements collectifs. Selon Moscovici, cette coupure conduit à vouloir expliquer les phénomènes sociaux par la rationalité économique. Cette critique résulte d'une analyse de longue date sur la consubstantialité de la psychologie, de la psychanalyse et de la sociologie, comme l'atteste sa défense de l'« Œuvre au noir » de Sigmund Freud. Ce terme couvre les ouvrages de Freud sur la« psychologie des masses » (La psychologie des masses et l'analyse du moi,L'Avenir d'une illusion,Malaise dans la civilisation) où il reprend les analyses deGustave Le Bon etGabriel Tarde pour les compléter avec ses propres outils analytiques, comme les tropismes psychiques ou les complexes[5].
Dans ses deux derniers livres en français,Raison et cultures etLe Scandale de la pensée sociale, Serge Moscovici revient sur l'histoire, l'actualité et l'utilité de l'approche des représentations sociales.
Il est à l'origine d'un certain nombre de théories fondamentales en psychologie sociale, parmi lesquelles la théorie des représentations sociales, la théorie de la polarisation de groupe, la théorie de l’innovation sociale (dites des « minorités actives ») ou encore la théorie du "sleeper effect". Ces théories ont eu une influence bien au-delà de sa discipline (en sociologie, théorie politique, sciences cognitives, etc.), ce qui fait de Serge Moscovici l'un des penseurs les plus importants des sciences sociales.
Parallèlement à sa thèse effectuée en psychologie avecDaniel Lagache pendant les années 1950, il se forme enépistémologie et histoire des sciences auprès d'Alexandre Koyré. Koyré devient alors pour Moscovici une figure paternelle jusqu'à sa mort en 1964[6]. À partir de 1962, Koyré le fait venir à l'Institute for Advanced Study dePrinceton où il rédige l'Essai sur l'histoire humaine de la nature publié en 1968. Moscovici enseigne également àStanford. Ses premiers travaux d'histoire des sciences ont porté sur l'Italie du XVIIe siècle. Koyré l'incite à travailler surJean-Baptiste Baliani, disciple deGalilée.
S'intéressant au concept de nature depuis les années 1940[6], c'est à partir de ses recherches en histoire des sciences qu'il théorise la "question naturelle" : les relations qu'entretiennent les groupes humains avec leur environnement matériel, et qui dépendent aussi des relations entre les humains, relèvent de choix politiques fondamentaux. Il développe alors une forme d'écologie politique, qualifiée de subversive[7], dans une série d'articles et d'ouvrages, notammentEssai sur l'histoire humaine de la nature en 1968 etLa Société contre nature en 1972.
Moscovici est pionnier de la penséeécoféministe et de l’anthropologie de la nature (il enseigna "l’ethnologie de la nature" à Paris VII dès le début des années 1970), deux courants de recherche qu'il va impulser et articuler[8]. Il définit en effet la nature comme une relation entre un pôle humain et un pôle matériel, ce qui lui permet de postuler la pluralité des natures et l’occidentalité de la nôtre. Il développe également une articulation théorique entre le dualisme nature/culture et certains systèmes de domination, dont la domination masculine, ce qui permettra àFrançoise d’Eaubonne de forger le concept d’écoféminisme en reprenant explicitement son travail[8]. Par ailleurs, Moscovici est un des théoriciens de l'écologie ayant le plus insisté sur l'importance du rôle des affects en politique (et sur le rôle de la psychologie). Il est aussi un des premiers en France à avoir placé la réflexion de l'écologie politique sur le terrain de l'activisme plutôt que sur le plan électoral, s'appuyant sur ses recherches théoriques et expérimentales sur lesminorités actives[8]. S'engageant lui-même politiquement pendant quelques années, il devient compagnon de route deRené Dumont puis deBrice Lalonde[9]. En désaccord avec la stratégie politique menée par le mouvement devenu parti[8], il se retire définitivement de la vie politique et du mouvement écologiste au début des années 1980 pour se consacrer à nouveau à la vie académique et à ses recherches en psychologie sociale (se centrant sur la question juive) et en histoire des sciences (il laisse à sa mort un travail inachevé sur la philosophie deGiambattista Vico).
De nombreux titres et distinctions lui ont été accordés parmi lesquels : commandeur de laLégion d’honneur[10], docteurhonoris causa de laLondon School of Economics, de l’université nationale autonome du Mexique, ainsi que des universités deBologne,Bruxelles,Genève,Glasgow,Pécs,Sussex,ISCTE,Rome,Séville,Jönköping,Iași,Brasilia,Évora.
En2003, il est devenu lauréat duprix Balzan pour son œuvre en psychologie sociale. Selon le communiqué de presse de la Fondation Balzan,« Les travaux de Serge Moscovici dans le domaine des sciences de l'homme et de la société se caractérisent par une grande nouveauté: ils ont bouleversé les paradigmes canoniques de la discipline, renouvelé ses méthodes de recherche et ses orientations, créé une école européenne de psychologie sociale dont l'originalité est universellement reconnue. Dans ce domaine Serge Moscovici occupe désormais la place éminente qui fut, jusqu'à la fin des années 60, celle de Jean Piaget. »
En2007, l'Association américaine de psychologie et laFédération européenne des associations de psychologues ont attribué à Serge Moscovici le prestigieux prixWundt-James pour son œuvre exceptionnelle en psychologie sociale.
En2010, le prix Nonino, Master of His Time, lui a été attribué pour son œuvre par un prestigieux jury présidé par V.S. Naipaul, prix Nobel de Littérature (2001) et composé par Peter Brook, John Banville, Ulrich Bernardi, Luca Cendali, Antonio R. Damasio, Emmanuel Le Roy Ladurie, James Lovelock, Claudio Magris, Norman Manea, Morando Morandini, Edgar Morin et Ermanno Olmi.
Liste non exhaustive d'ouvrages de Serge Moscovici[11]: