Sabinien naît àBlera, dans leLatium[1]. Il fait carrière dans l'église de Rome, jusqu'à la dignité dediacre. En juillet 593, le papeGrégoire Ier, qui a une haute opinion de lui, l'envoie commeapocrisiaire à la cour impériale de Constantinople. Il ne s'acquitte pas de manière satisfaisante aux yeux du pape de cette charge : en 595, il semble manquer de fermeté dans sa discussion avec l'empereur byzantinMaurice au sujet de l'attribution controversée du titre de « patriarche œcuménique » àJean IV le Jeûneur au mépris du pontife romain[2]. Il est rappelé[3] et envoyé en mission enGaule la même année[4]. Il retourne àRome en 597[5].
Sabinien estélu pour succéder à Grégoire probablement en mars 604, mais doit attendre la ratification impériale avant d'être consacré le 13 septembre de la même année[4].
Il semble avoir été élu en réaction contre certains aspects de la politique deGrégoire Ier[3] qui, dès le début de son pontificat, poursuit une ligne de « moralisation » de lacurie romaine en retirant leslaïcs et lesecclésiastiques de postes importants et en les confiant à desmoinesbénédictins, toushomines novi avec peu d'expérience, et sans respect de l'ancienneté et deshiérarchies. Les classes supérieures n'attendaient donc rien d'autre que sa mort de pour retrouver les places perdues. Sabinien, influencé par cette « élite » ecclésiastique et humilié par le rappel à Rome de son poste prestigieux à Constantinople, met en œuvre une ligne très contrastée avec celle de son prédécesseur, réattribuant au clergé « traditionnel » les charges ecclésiastiques confiées aux moines. LeLiber Pontificalis le félicite pour « remplir l'église de clergé », contrairement à Grégoire, qui avait tendance à occuper les postes ecclésiastiques avec des moines[5],[4],[6].
Il interrompt l'activité d'assistance gratuite aux nécessiteux, qui a joué un rôle important dans le pontificat deGrégoire Ier, l'accusant également d'avoir dilapidé le patrimoine de l'Église pour être loué et obtenir la réputation de bienfaiteur. Il se rend alors particulièrement détesté du peuple car il fait distribuer contre rémunération des céréales à la population affamée[6], comportement peu charitable, qui lui attire la haine des Romains et qui est la cause de sa probable mort violente à la suite d'une révolte populaire. Selon une légende,Grégoire Ier lui-même lui serait apparu dans un rêve pour le réprimander pour son comportement, mais comme Sabinien ne montrait aucun signe de vouloir changer d'attitude, Grégoire le frappa avec lacrosse épiscopale, provoquant rapidement sa mort[7],[8].
LeLiber Pontificalis déclare qu'il a distribué du grain pendant unefamine à Rome sous son pontificat, mais tandis que Grégoire distribuait du grain à la population romaine à l'approche de l'invasion, Sabinien le leur vend une fois le danger passé. Parce qu'il ne peut ou ne veut pas permettre au peuple d'avoir du grain pour peu ou rien, un certain nombre delégendes se développent ensuite dans lesquelles son prédécesseur est représenté le punissant pouravarice[9].
Il collabore peut-être aux négociations pour imposer une trêve entre lesbyzantins et leslombards[6]. LeLiber Pontificalis lui attribue un rôle de médiateur dans la trêve conclue en 605 entre l'exarqueSmaragde de Ravenne et le roi lombardAgilulf[10].
Dans sonEpitome pontificum Romanorum (Venise, 1557), l'historien italienOnofrio Panvinio attribue à Sabinien l'introduction de la coutume de sonner lescloches auxheures canoniales et lors de la célébration de l'Eucharistie[10],[5]. La première attribution de cette coutume se trouve dans leRationale Divinorum Officiorum deGuillaume V Durand, datant duXIIIe siècle[10].
Sabinien décède le 22 février 606, probablement à la suite d'une insurrection populaire, mais les circonstances exactes de sa mort sont inconnues. Il est enterré àSaint-Pierre, où lecortège funèbre arrive clandestinement depuis lepalais du Latran par les rues secondaires, faisant un long détour hors les murs de la ville[6] pour éviter les Romains qui lui sont hostiles[10],[5].