Les rotavirus sont la première cause degastro-entérites graves chez les nourrissons et les jeunes enfants dans le monde[2]. Ils semblent (chez la souris au moins) pouvoir infecter les glandes salivaires, lasalive devenant alors un agent infectieux ; avec lesnorovirus, ils causent des gastro-entérites chez environ 300 millions de nouveau-nés et jeunes enfants par an[3].
Les rotavirus sont la première cause dediarrhée aiguë sévère du jeune enfant dans le monde[4],[5]. L'OMS coordonne un suivi épidémiologique mondial[6].
Presque tous les enfants sont infectés par un rotavirus au cours des cinq premières années de leur vie. Cetteinfection peut rester asymptomatique ou entraîner unegastro-entérite (GEI, gastro-entérite infantile), dont les rotavirus sont la principale cause. L'infection est souvent asymptomatique chez l'adulte.
Environ 500 000 enfants de moins de 5 ans meurent de diarrhée à rotavirus chaque année, à plus de 85 % dans les pays à faible revenu d'Afrique et d'Asie[7].
Depuis 2001, l’OMS a mis en place un réseau de surveillance des rotavirus (réseaux régionaux de sentinelles en milieu hospitalier dans 35 pays des six régions de l'OMS), qui a montré que près de 40 % des hospitalisations pour diarrhée de l’enfant de moins de 5 ans dans le monde sont dues à des rotavirus (souches G1, G2, G3, G4 et G9 le plus souvent, avec une répartition des souches variant selon les régions), ceci pour 62 584 échantillons de selles analysés. Pour ces mêmes échantillons (non nécessairement représentatifs de la réalité mondiale), pour 4 936 enfants testés positifs au rotavirus de 2001 dans les pays suivis, 325 étaient en Afrique, 388 en Amérique, 323 en Europe, 1 290 en Méditerranée orientale, et 2 610 en Asie du Sud-Est et Pacifique occidental.
Les souches varient selon les pays ou les régions biogéographiques[8].
Dans lespays industrialisés, les infections à rotavirus représentent 15 à 50 % des cas de gastro-entérites ; bien que ces infections soient parfois sévères, la mortalité associée à celles-ci reste faible.
EnFrance, près de 300 000 épisodes annuels seraient décomptés chez les enfants de moins de cinq ans avec une dizaine de décès.Chaque année, 155 000 consultations en médecine générale, 30 000 recours aux urgences hospitalières et 14 000 hospitalisations sont dues aux Rotavirus[réf. nécessaire]. Son coût annuel est estimé à environ 28 millions d'euros[9]. Lors du pic de l'épidémie hivernale2005–2006, on estime que 1 850 000 personnes ont consulté leur médecin généraliste en 8 semaines pour une gastro-entérite ; l'incidence a été de 367 cas pour 100 000 habitants (le seuil épidémique étant fixé à 260 cas pour 100 000 habitants)[10].
Il s'agit donc d'un important problème desanté publique. D'autant plus que chaque année, l'épidémie degastro-entérite à Rotavirus concorde souvent avec les épidémies debronchiolite et degrippe, pouvant mettre en difficulté les systèmes de soins pédiatriques[11].
On rencontre desgastro-entérites à Rotavirus lors d'épidémies hivernales, mais il existe également des cas sporadiques tout au long de l'année.
Leurgénome est constitué de onze segments codant douze protéines. Sept groupesantigéniques ont été identifiés. La protéine VP6 de la couche intermédiaire de la capside détermine lessérogroupes, A à G. Trois d'entre eux (A, B et C) infectent leshumains, majoritairement le groupe A. Les protéines de la couche externe, VP4 et VP7, induisent quant à elles, la production d'anticorps neutralisants. La couche interne est formée par VP2, et les protéines VP1 et VP3 sont associées au génome.
La voie de transmission est féco-orale directe ou indirecte, essentiellement interhumaine. Le virus est résistant dans le milieu extérieur pendant des mois entre4 °C à20 °C.
La dose pathogène est estimée à environ 10 à 100particules virales. Une personne avec unediarrhée à Rotavirus excrète un grand nombre de virus (108 - 1010 particules/ml deselles[12]) pendant environ une dizaine de jours, les doses infectieuses peuvent rapidement être acquises par les mains contaminées, les objets, les aliments, l'eau). L'excrétion asymptomatique (sanssigne clinique) est possible et peut jouer un rôle dans la persistance de cette maladie.
Uneprotéine non structurelle (NSP4) semblerait jouer un rôle dans la pathogénie du virus et pourrait agir comme une véritableentérotoxine virale[12].
Les virus sont ainsi « absorbés » par lescellules épithéliales digestives parendocytose dans une vésicule appeléeendosome. Il semble que lesprotéines de la couche extérieure (VP7 et VP4) puissent rompre la membrane de l'endosome, créant ainsi ungradient de concentration encalcium. Cela facilite la fragmentation de la protéine VP7, ne laissant autour de l'ARNviral que la couche composée des protéines VP2 et VP6.
L'ARN polymérase va permettre latranscription de l'ARNm viral. Cette action est réalisée de façon plus aisée dans l'enveloppe protéinique du virus car l'environnement aqueux descellules hôtes ralentit de façon significative le détachement des deux brins d'ARN, phase initiale de la synthèse de l'ARNm). Le fait que l'ARN viral reste entouré, à ce stade, d'unecapside est également utile pour déjouer lesréponses immunitaires de l'hôte, réponses déclenchées par la présence d'un double-brin d'ARN.
Après unepériode d'incubation allant de quelques heures à quelques jours (en général 24 à 72 heures), desselles fréquentes et liquides apparaissent soudainement.Le virus pouvant atteindre le foie, ces selles peuvent être claires et accompagnées d'urines foncées.Lafièvre, généralement peu élevée, s'accompagne parfois devomissements, surtout chez les nourrissons. La guérison complète survient après 4 à 7 jours.
Cependant, unediarrhée sévère sans réhydratation adaptée (en eau etélectrolytes par unsoluté de réhydratation orale) peut entraîner le décès. L'association à d'autres pathogènes du système digestif peut jouer un rôle dans la sévérité de la maladie.
Les jeunes enfants, lesprématurés, les personnes âgées et les sujetsimmunodéprimés sont particulièrement enclins à développer des symptômes plus sévères.
La mise en culture du virus (surtout d'origine humaine) est difficile car la multiplication du virus nécessite la présence detrypsine qui est incompatible avec l'utilisation de serum pour la croissance des cellules.
La recherche d'antigènes viraux se fait le plus souvent par la techniqueELISA (de l'anglais « Enzyme-Linked Immuno Sorbent Assay »). La technique de référence consiste à rechercher les particules virales en microscopie électronique mais n'est pas utilisée en pratique routinière de laboratoire.
Le diagnosticsérologique par recherche d'anticorps n'est pas utilisé.
lavage systématique des mains (après être allé à la selle, après nettoyage des fesses d'un nourrisson, avant de préparer les aliments, avant de manger) et des surfaces souillées
Depuis le, leHaut Conseil de la santé publique recommande la vaccination contre les rotavirus des nourrissons âgés de moins de 6 mois selon un schéma vaccinal à 2 doses (2 et 3 mois de vie) pour le vaccin monovalent et à 3 doses (2, 3 et 4 mois de vie) pour le vaccin pentavalent[14]. Cette nouvelle recommandation va à l’encontre des avis publiés par l’organisme indépendant en 2006 et en 2010[15].
L'évaluation de l'effet de la vaccination dans des pays développés est très encourageante.
Un premiervaccin a été développé en1983 mais s'est révélé assez peu efficace en pratique courante dans les pays du tiers monde.
Un second vaccin oral anti-rotavirus, leRotashield, a été breveté en1991 et homologué en1998 et a permis l’administration d’environ 1,5 million de doses avant l’interruption de sa commercialisation à la suite d'une recommandation duCDC à Atlanta : quelques cas d’occlusions intestinales fatales parinvagination intestinale avaient été associés à la vaccination anti-rotavirus. Ce vaccin a été élaboré à partir d’une souche de rotavirus du singe Rhésus recombinée par co-infection avec trois souches de rotavirus humain. Les rotavirus sélectionnés pour l’élaboration du vaccin possèdent dix gènes du rotavirus de singerhésus et un gène d’une des trois souches de rotavirus humain codant la protéine VP7. Ce vaccin est efficace contre les trois sérotypes de rotavirus humain.
Depuis 2004, deux nouveaux vaccins (à virus actifs) sont commercialisés : le Rotateq du laboratoire Merck et le Rotarix du laboratoire GlaxoSmithKline. Administrés par voie orale, ils sont indiqués dans l’immunisation active des nourrissons à partir de six semaines. Le schéma de vaccination comporte :
soit trois doses (Rotateq) : la première dose peut être administrée à partir de l’âge de six semaines et au plus tard à l’âge de 12 semaines. L’intervalle entre chaque dose doit être d’au moins quatre semaines. Les trois doses doivent de préférence être administrées avant l’âge de 20-22 semaines, mais il est possible de les administrer jusqu'à 32 semaines. Le risque d'invagination intestinal persiste mais est très faible[16].
soit deux doses (Rotarix) : la première dose peut être administrée à partir de l’âge de six semaines. L’intervalle entre les doses doit être au moins de quatre semaines. Le schéma de vaccination doit préférentiellement être administré avant l’âge de 16 semaines, et doit être terminé avant l’âge de 24 semaines. Ce vaccin comporte un risque très faible d'invagination intestinale, largement inférieur au bénéfice de la vaccination[17].
Ces deux vaccins autorisés et maintenant utilisés en routine dans onze pays (dont l'Australie) ont montré une efficacité de 8 à 98 %, selon les essais faits en Amérique et Europe. Le vaccin semble agir davantage sur la gravité de l'infection que sur son incidence. Dans plusieurs pays pauvres, ils diminuent substantiellement la proportion des diarrhées graves et la mortalité de ces dernières[18],[19]. La diffusion de ces vaccins dans ce type de pays est cependant potentiellement limitée par son coût important, par la nécessité de préserver la chaîne du froid dans le transport du vaccin et par la fenêtre vaccinale relativement étroite (nourrissons de moins de deux semaines)[20]. Les deux vaccins comportent cependant un risque très faible d'occlusion intestinale parinvagination intestinale[21],[22] (un à cinq cas pour 100,000 vaccinations).
LeRotavac a été développé en Inde et utilisé dans ce pays. Administré en trois injections, il ne semble pas se compliquer d'invagination intestinale[23].
EnFrance, en 2012, les formules de vaccins contre la gastro-entérite à rotavirus (Rotarix,Rotateq) ne sont pas remboursés par laSécurité sociale. Depuis le, leHaut Conseil de la santé publique (HCSP) recommande la vaccination contre les rotavirus des nourrissons âgés de moins de six mois selon un schéma vaccinal à deux doses (deux et trois mois de vie) pour le vaccin monovalent et à trois doses (2, 3 et 4 mois de vie) pour le vaccin pentavalent[14]. Cette nouvelle recommandation va à l’encontre des avis publiés par l’organisme indépendant en 2006 et en 2010[15].« La notification d’effets indésirables graves y compris ayant pu entraîner la mort » conduit le HCSP à suspendre sa recommandation le 21 avril 2015[24].
Le CSH, Conseil Supérieur d'Hygiène belge recommandait, en février 2007, la vaccination contre le rotavirus chez tous les nourrissons à partir de l'âge de deux mois ; aucune dose de vaccin ne sera administrée au-delà de l'âge de six mois vu le risque accru d'invagination intestinale observé avec un précédent vaccin contre le rotavirus chez les enfants de plus de six mois. Le vaccin y est remboursé depuis le1er novembre 2006.
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↑U.D. Parashar, A. Burton, C. Lanata, C. Boschi-Pinto, K. Shibuya, D. Steele, M. Birmingham et R.I. Glass, « Global mortality associated with rotavirus disease among children in 2004 »,J Infect Dis,vol. 200:Suppl 1:S9-S15,(lire en ligne[PDF])
↑J.R. Gentsch, A.R. Laird, B. Bielfeltet al., « Serotype diversity and reassortment between human and animal rotavirus strains: implications for rotavirus vaccine programs »,J Infect Dis,vol. 192,, S146-S159(lire en ligne[PDF])
↑Sentiweb-Hebdo, Bulletin 06 du 6 au 12 février 2006, quotimed.com - 14 février 2006
↑F. Fourquet, J.C. Desenclos, C. Maurage et S. Baron, « Le poids médico-économique des gastro-entérites aiguës de l’enfant : l’éclairage du programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) »,Arch Pediatr,vol. 10,,p. 861-68(DOI10.1016/S0929-693X(03)00459-7)
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↑Stowe J, Andrews N, Ladhani S, Miller E,The risk of intussusception following monovalent rotavirus vaccination in England: a self-controlled case-series evaluation, Vaccine, 2016;34:3684-3689