Abbé laïc de Saint-Maurice-d'Agaune | |
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Parentèle | Henri II (neveu) Burchard II de Lyon (frère consanguin) ![]() |
Rodolphe III de Bourgogne, parfoisdit « Le Pieux » ou « Le Fainéant », né probablement entre 966 et 970 et mort le, est le dernierroi des Deux Bourgognes (Bourgogne transjurane et Bourgogne cisjurane).
Le roi Rodolphe doit soncognomen (surnom) deFainéant aux chroniqueurs germaniques qui dénigrent ce souverain de Bourgogne enclin à soutenir l'autorité de l'empereur[1]. Cette réputation s'est poursuivie jusqu'à très récemment[1],[2]. Il faut attendre les approches historiques desannées 1990 pour voir remis en cause ce jugement et analyser l'action du dernier roi de Bourgogne[1].
Rodolphe, que l'on trouve parfois sous la formeRaoul, naît probablement vers 966 selon certains auteurs[3] - les études récentes donneraient vers 970 selon un croisement des différentes sources[4]. Il est le fils duroi d'Arles ouDeux Bourgognes,Conrad IIIdit « le Pacifique » (925-993) et de sa seconde épouse,Mathilde de France (943-980), fille duroi de FranceLouis IV de France dit « d'Outremer »[3],[5]. Il semble que Conrad III« aurait fait un pèlerinage à Zurich pour obtenir un fils », car son aîné, prénommé lui aussi Conrad, est décédé durant l'année ou après 967[4],[6].
Rodolphe est mentionné avec son demi-frèreBurchard lors de la confirmation de la charte de l'abbaye de Savigny[6],[7]. Conrad III prépare ainsi ses deux fils à collaborer[7].
Conrad III meurt le[8]. Rodolphe lui succède, son frère aîné, Conrad, né du premier mariage, étant décédé[6].
Rodolphe est très probablement élu roi en cette fin d'année 993. Il reçoit la bénédiction royale dans lacathédrale de Lausanne[2]. Si le territoire de son royaume s'étend« duRhin, versBâle, à la Méditerranée et de laSaône à l'Aar », son domaine royal est en fait bien plus modeste, centré surNeuchâtel etLausanne, le pourtour dulac d'Annecy, sur la rive sud decelui du Bourget et lacombe de Savoie[2]. Les rois de Bourgogne pratiquent une « royauté vagabonde », possédant plusieurs palais — installés sur les rivages des lacs, à Lausanne,Vevey,Aix[Note 1] — qu'ils habitent au gré de leurs déplacements[2],[10].
Il possède par ailleurs l'autorité sur les abbayes deSaint-Maurice d'Agaune (à partir de 993), dont il est abbé laïc[11], et deTalloires et protège celles deRomainmôtier, dePayerne, deNantua et deSaint-André de Vienne[2]. Il semble cependant que le roi possède peu de moyens pour assoir son autorité, ce qui explique la tutelle progressive, puis définitive, de l'empereur germanique, ou encore la montée en puissance de familles seigneuriales locales[2].
Rodolphe III a été présenté par les historiens jusqu'à encore récemment comme un homme faible[1], manquant de courage, ce qui lui valut son surnom. Ce jugement reprend principalement l'avis des chroniqueurs germaniques qui dénigrent les rois de Bourgogne afin de favoriser l'empereur[1]. Le plus fréquemment cité est l'évêqueThietmar de Merseburg, chroniqueur et familier de la Cour impériale, qui décrit le roi Rodolphe III comme« mou et efféminé, n'[ayant] plus du roi que le nom et la couronne… Il n'est capable de défendre contre les dangers qui les menacent ni ses évêques, ni ses autres sujets »[12]. Il souligne par ailleurs sa faiblesse de gouvernance« En vérité le sens d'une telle royauté n'est guère que... d'empêcher un roi nouveau de mettre fin par quelque loi à une anarchie bien enracinée. Il n'y a en Bourgogne aucun comte qui n'ait le rang et la puissance d'un duc »[13]. Ces critiques seront systématiquement reprises par les historiens successifs, qui favorisent ainsi cette vision négative du dernier des rois de Bourgogne[1]. L'absence d'héritier jouera également un rôle dans cette désaffection et la remise en cause de son autorité[2].
Sous son règne, la tutelle germanique se fait plus pesante et finit par étouffer son autorité[14]. À la mort de l'empereurOtton II du Saint-Empire, la mère de ce dernier,Adélaïde de Bourgogne, s'impose[15]. Elle est également la tante de Rodolphe III. La Bourgogne devient alors un territoire sur lequel le pouvoir impérial va tenter de s'imposer et exercer une forme de tutelle[15],[16]. L'EmpereurOtton III du Saint-Empire se pose en protecteur de l'Église en terre bourguignonne[15]. En 997, il oblige ainsi le roi Rodolphe III à rendre des terres à l'évêque de Lausanne[15],[14].
Face à l'intervention impériale, le roi Rodolphe veut réagir et tente de réduire cette influence impériale en s'appuyant notamment sur les évêques[2],[17]. Pour l'archivisteGilbert Coutaz, il se lance ainsi dans un« ensemble de donations de droits comtaux » en faveur du pouvoir ecclésiastique (Tarentaise en 996[Note 2],Sion en 999,Lausanne en 1011,Vienne en 1023[2])[17]. L'historien blegeHenri Pirenne a souligné en son temps que« tout ce qui était donné aux évêques était autant de pris sur les princes laïques et ce n'était pas se dépouiller que les enrichir ; car plus ils étaient forts, plus efficaces étaient les services qu'ils rendaient à la couronne »[19]. Le médiévisteRené Poupardin insiste cependant sur le fait que ces donations offrent plus de droits aux récipiendaires qu'elles n'impliquent de devoirs envers leur suzerain[2].
Durant l'année 999, l'impératrice, bien qu'âgée, se rend en Bourgogne[15],[14]. Elle intervient comme arbitre dans le conflit qui oppose son neveu aux grands seigneurs du Royaume[15],[16],[14].
Après l’an mil, le roi Rodolphe ne maintient pas la tradition de réunir enconciles lesévêques de ses États[14]. Les prélats bourguignons se dirigent donc vers un autre pôle de souveraineté, l'empereur[14]. Ainsi, en 1007, les archevêques deLyon et deTarentaise, les évêques deGenève et deLausanne participent-ils auconcile de Francfort[14],[20]. Profitant de l’affaiblissement de la royauté, les évêques peuvent ainsi gérer leur diocèse en toute indépendance[14].
Par la suite, pour se concilier l'appui du clergé contre les nobles, le roi fait plusieurs donations importantes auxévêques de Bâle, deSion et deLausanne. À ce dernier, il cède en1011 le « comté deVaud », c'est-à-dire la charge de comte et les droitsrégaliens (droits publics exercés à l'origine par le roi) sur les routes, les péages, les forêts, la monnaie, les marchés, les mesures, les eaux, les criminels, dans l'étendue du comté. Le, à la demande de ses familiers, Rodolphe III donne, ou plutôt rend à l'abbaye de Saint-Maurice d'Agaune lesfiefs de Sciex, deLully, deCommugny, la moitié dePully,Oron, la pauté (?) deVuadens,Bouloz, leplaid deVevey,Lutry,Vouvry,Ollon,Villy,Naters, quelques droits àSaint-Maurice et l'ensemble des alpages duChablais.
En1011, Rodolphe III épouseHermengarde ou Ermengarde[2],[21], une proche, voire une parente — et même peut être la sœur — du fondateur de lamaison de Savoie, le comteHumbert « aux Blanches Mains » (980-1048)[Note 3].
Rodolphe III donne à son épouse un douaire considérable, qui s’étend en particulier autour d’Aix et de lacombe de Savoie[24]. Bien vite, ces terres royales passent aux mains du comteHumbert aux Blanches Mains. Il est dit que le roi aime résider dans son palais d'Aix[2] et y prendre les eaux.
La région qu'il donne à Hermengarde monte jusqu'au pied du Jura avec la ville deNeuchâtel[25].
ÀStrasbourg, en1016, Rodolphe prête un hommage de main à son neveu l’empereur germaniqueHenri II du Saint-Empire, le reconnaissant comme protecteur et héritier[2],[14]. En effet, la venue d'un héritier tarde[2]. Le roi de Bourgogne promet à l’empereur de gouverner selon ses conseils et de lui laisser sa succession s’il devait mourir sans laisser un fils légitime. Mais cette soumission n'est pas acceptée par les grands du Royaume et, sous l’impulsion du comteOtte-Guillaume, toutes les villes ducomté de Bourgogne ferment leurs portes à l’empereur.
En1018, Rodolphe renouvelle et complète les engagements qu’il avait pris à Strasbourg[14], et se comporte dès lors en véritablevassal de l’empereur en lui remettant en libre disposition les fiefs tenus par le comte deBesançon Otte-Guillaume, et en se faisant investir par Henri II de sa couronne et de son sceptre. La royauté bourguignonne est désormais totalement soumise au pouvoir impérial.
Hugues, fils illégitime de Rodolphe, est promuévêque de Lausanne en1019.
Rodolphe III concède lecomté de Vienne à l'archevêque de Vienne en1023.
À la mort d'Henri II, en1024, Rodolphe III est contraint par les nobles de Bourgogne de révoquer sa donation faite huit ans auparavant.
Toutefois, en1025, il est obligé de renouveler son engagement à l'égard du nouveau roi de GermanieConrad II le Salique (mari de sa nièceGisèle, fille de sa sœurGerberge), qui occupeBâle pour faire pression.
En1027, Conrad II est couronné empereur germanique, Rodolphe assiste à la cérémonie. Il confirme la succession en faveur de son neveu par alliance[2].
En 1032, sentant la fin proche, le roi fait envoyer à l'empereur germanique Conrad II les insignes de son pouvoir : la couronne et la lance de saint Maurice[2].
Dès juin1032, Burchard, son demi-frère et archevêque de Lyon, soutenu par de nombreux féodaux du royaume de Bourgogne, désapprouve ce choix politique et refuse la tutelle germanique.
Le roi meurt le[26].Conrad II le Salique devient son successeur. Il est soutenu par la reine, le parti des Viennois, l'évêque de Lausanne ou encore lesHumbertiens[2],[26]. Tandis que le neveu de Rodolphe III,Eudes II de Blois, fils de sa sœur aînée, suscite contre l'empereur la révolte des féodaux et des prélats duroyaume de Bourgogne, dont le comteGérold de Genève, l'archevêque de Vienne, l'évêque de Maurienne, etBurchard III,archevêque de Lyon[2],[26].
L'année suivante, Conrad se fait couronner àPayerne[2]. Eudes II envahit le Royaume. La guerre entre les deux cousins dure deux ans et Eudes doit abandonner la partie devant une coalition formée par l'empereur et leroi de FranceHenri Ier de France.
Le, Rodolphe III fait uneimportante donation en faveur de son épouseHermengarde, Ermengarde ou Irmengarde dont lesArchives départementales de l'Isère ont conservé le diplôme original sur parchemin[27]. Voici le texte de ce document :
«Au nom de la très Sainte et Indivise Trinité, Rodolfe, Roi par la Clémence de Dieu ; qu'il soit connu de tous les hommes, nés ou à naître, que, poussé par amour conjugal et conseillé par les grands de mon royaume, je donne à ma très chère épouse Irmengarde, la résidence royale d'Aix avec les colons de ce domaine en notre propriété, pour qu'ils l'habitent et en cultivent les terres. Et je lui donne monfisc[Note 4] d'Annecy, avec ses dépendances, ses esclaves[Note 5] et ses servantes ; et je lui donne la totalité de l'abbaye Saint-Pierre de Mont-Joux[Note 6] et je lui donne mon fisc deRue avec ses dépendances, ses esclaves et ses servantes, et je lui donne le château deFont avec ses dépendances, et la part de lavilla d'Yvonand[Note 7] qu'Henri possédait, avec ses esclaves, ses servantes et toutes ses dépendances ; je lui donne la résidence royale deNeuchâtel, avec ses esclaves, servantes et toutes ses dépendances ; je lui donneAuvernier avec toutes ses dépendances, esclaves et servantes ; je lui donneArinis[Note 8], avec toutes ses dépendances, esclaves et servantes. Qu'elle ait le droit de posséder, de donner, de vendre, en somme de faire tout ce qu'elle voudra de ces biens. Pour que nos successeurs tiennent pour vrai et ne cassent pas ce que j'ai fait, nous avons authentifié de notre main et ordonné qu'il soit scellé de notre sceau.Signé du seigneur Rodolfe.
Au dos du texte : « Moi Hermengarde, reine, je donne à Dieu et à St Maurice de l'Église de Vienne, tout ce qui m'a été donné. »
Padolfe chancelier, j'ai reconnu.
Daté du8e jour des calendes de mai,17e lune, indiction…, l'an de l'Incarnation du Seigneur 1011, sous la19e année du règne de Rodolfe, fait à Aix ».
Rodolphe III de Bourgogne | ||||||
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