Qualifié par sa propre propagande[2] de « grand duc d'Occident »[n 1], il est un des princes féodaux les plus puissants de son temps, à la tête d'un vaste ensemble territorial à cheval sur le royaume de France et sur l'Empire. La cour de Bourgogne est alorsla plus brillante[réf. nécessaire] d'Europe, devenant du fait de sonmécénat un foyer artistique de premier plan, grâce notamment aux innovations desprimitifs flamands et des musiciens de l'école bourguignonne.
Les possessions de Philippe le Bon relèvent pour une part (duché de Bourgogne, comté de Charolais, comté de Nevers, comté de Flandre et comté d'Artois) du royaume de France, État dans lequel le pouvoir royal s'est renforcé au cours des siècles depuis Hugues Capet, malgré quelques épisodes comme le règne deCharles VI (1368-1422, roi en 1380).
L'enfance de Philippe se passesans doute[pas clair] d'abord auchâteau de Rouvres près deDijon, puis àParis où il vit quelque temps à la cour de France. Mais c'est auPrinsenhof deGand, dans lecomté de Flandre, qu'il passe la plus grande partie de sa jeunesse.Là, il se familiarise avec les mœurs et la langue de ses sujetsthiois et est d'ailleurs éduqué par des précepteurs flamands. Il est peu doué pour l'allemand et pour lelatin[réf. nécessaire]. Ilapprend[réf. nécessaire] le français avec un conseiller de son père,Jean de Thoisy, quidevient[Quand ?] son précepteur (il sera nommé chancelier de Bourgogne par Philippe en 1420).
En 1403, il est fiancé parPhilippe le Hardi à une cousine,Michelle de France (1395-1422), fille du roiCharles VI. Leur mariage a lieu en 1409, alors qu'ils ont treize et quatorze ans (Philippe devient donc le beau-frère du dauphin Charles) ; de ce mariagenaitra une fille[Quand ?], Agnès, morte en bas âge.
En 1410, Philippe devientcomte de Charolais : ce titre est ensuite dévolu à l'héritier présomptif du duc de Bourgogne. En 1411, il reçoit de son père le gouvernement ducomté de Flandre et ducomté d'Artois.
À la veille de labataille d'Azincourt (1415), le jeune prince de dix-neuf ans souhaiterait accompagner ses onclesAntoine (1384-1415) etPhilippe (1389-1415) sur le champ de bataille. Ces deux hommes, qui ont jusque là combattu pour lesBourguignons contre lesArmagnacs, refusent de suivre la politique neutraliste de Jean sans Peur face au retour des Anglais en France et rejoignent les rangs français. Le duc de Bourgogne empêche son fils de les suivre[7]. Antoine et Philippe trouvent la mort au cours de la bataille.
Philippe devient duc de Bourgogne le dans des conditions particulières : son père a étéassassiné àMontereau par un membre de la suite dudauphinCharles, lors d'une rencontre de réconciliation entreArmagnacs etBourguignons qui se livrent uneguerre civile depuis l'assassinat deLouis Ier d'Orléans, frère cadet duroi de FranceCharles VI, commis sur ordre de Jean sans Peur parRaoul d'Anquetonville. Le but de cette rencontre était de s'unir afin de faire face à l'occupation d'une partie du royaume par les Anglais dans le cadre de laguerre de Cent Ans. À cette date, les Bourguignons sont maîtres de Paris, tandis que le dauphin Charles réside depuis un an àBourges.
Peu après, le,Charles VI meurt à son tour. Henri VI devient doncroi de France en vertu dutraité de Troyes. De son côté le dauphin Charles, qui contrôle les régions situées au sud de la Loire, où il a de nombreux partisans de la faction desArmagnacs, se considère comme le successeur de son père en vertu de laloi salique. Cette situation marque le début d'une nouvelle phase de laguerre de Cent Ans.
L'alliance anglo-bourguignonne est renforcée en 1423 par le mariage du duc de Bedford avecAnne de Bourgogne (1404-1432), fille de Jean sans Peur et sœur de Philippe le Bon.Ce rapprochement ne fait pas l'unanimité. Certains princes anglais y sont hostiles, notammentHumphrey de Lancastre,duc de Gloucester, et les comtes deSuffolk et deSalisbury, qui auraient même, de 1424 à 1426, tramé un complot visant à attenter à la vie du duc de Bourgogne[11].
Durant cette décennie 1420, le royaume de France est partagé entre trois pouvoirs[12] : le duc de Bedford tient laGuyenne (en tant que fiefPlantagenêt), notammentBordeaux, et occupe le nord-ouest du pays, de laChampagne à laNormandie et à l'Anjou[13] ; Philippe le Bon tient ses propres fiefs et contrôle l'est de laChampagne ; le dauphin contrôle le sud du pays, duDauphiné à l'Armagnac. Il est aussi soutenu par deux petites entités isolées dans les territoires bourguignons : la ville deTournai, vassale du roi de France ; lachâtellenie de Vaucouleurs, à la frontière duduché de Lorraine. C'est dans cette châtellenie qu'apparait en 1429 la personnalité deJeanne d'Arc, qui, persuadée d'être chargée d'une mission divine, obtient l'appui du capitaine de Vaucouleurs,Robert de Baudricourt, pour aller voir le dauphin.
Le,Jeanne d'Arc, après avoir obtenu le soutien du dauphin Charles à Chinon, se présente devantOrléans,assiégée par les Anglais depuis 1428, et réussit à faire lever le siège au duc de Bedford dans la nuit du au.
Le, Jeanne d’Arc, traversant des territoires bourguignons, amène sous bonne escorteCharles VII jusqu'à lacathédrale de Reims, où il est sacré roi de France par l'archevêqueRegnault de Chartres. Bien que premierpair de France, Philippe le Bon est exclu de cet événement, qui va à l'encontre de sa politique pro-anglaise.
Le jour même du sacre, Jeanne d'Arc lui envoie cependant une lettre pour lui demander la paix. Mais le duc refuse cette offre.
En 1435, des discussions internationales en vue du rétablissement de la paix entre la France et l'Angleterre s'ouvrent àArras. Sont présents les rois d'Angleterre, dePortugal, dePologne, deSicile, d'Écosse, le duc Philippe le Bon et son épouseIsabelle de Portugal.
Le chancelier de BourgogneNicolas Rolin, fondateur desHospices de Beaune, est l'âme et le cerveau de ces négociations. Très vite, les Anglais sont en position d'infériorité : refusant l'annulation dutraité de Troyes qui leur serait défavorable, ils quittent la conférence. Ils considèrent que ce traité représente leurs revendications légitimes sur le trône de France et les territoires français. Cette position intransigeante rend difficile toute avancée dans les pourparlers de paix et, en conséquence, les Anglais décident de se retirer des négociations.
Lapaix d'Arras est donc signée sans eux le entre le roi de France et le duc de Bourgogne. Charles VII fait amende honorable pour le meurtre deJean sans Peur et jure de punir les coupables. Il confirme à Philippe le Bon la possession des territoires conquis par lui depuis 1418. Le duc de Bourgogne obtient, à titre personnel, la rupture du lien de vassalité qui le rattache au roi de France.
Les Anglais, furieux contre leur ancien allié, menacent Philippe le Bon. En retour, celui-ci envoie des troupes pour aider le roi de France à reprendre Paris ; de son côté, il tente sans succès de reprendreCalais.
Après ces événements, le duc de Bourgogne se concentre sur le développement et l'administration de ses États et ses troupes ne participent plus que rarement à la guerre franco-anglaise qui ne se termine qu'en 1453 (prise de Bordeaux par Charles VII).
Philippe le Bon.Fête Champêtre à la cour de Bourgogne. Sur cette toile attribuée àJan van Eyck apparaissent les armoiries portées par Philippe le Bon après son héritage duBrabant et duLimbourg, mais pas encore le collier de laToison d'or rendu obligatoire le[14].
Le, Philippe le Bon devient comte de Hainaut, de Hollande, de Zélande et seigneur de Frise après la « trahison » dutraité de Delft parJacqueline de Bavière. Celle-ci ne conserve que le titre de « comtesse d'Ostrevant » (Hainaut), avec les revenus afférents[18]. Souhaitant unifier ces territoires, il décide de les doter d'un même système monétaire qui sera produit par les ateliers des "quatre pays" (vierlander) que sont la Hollande, le Hainaut, le Brabant et la Flandre[19].
En1438, il met le siège devant la ville deMarcigny (située à 15 km au nord deRoanne) afin d'affirmer son autorité sur des territoires contestés et de consolider son pouvoir en tant que duc de Bourgogne.
Toutes ces possessions forment désormais lesPays-Bas bourguignons, qui s'étendent de l'Artois (dans le royaume de France) à la Frise (dans l'Empire), la limite entre France et Empire étant encore l'Escaut[21].
En ce qui concerne les fiefs d'Empire, lavassalité de Philippe le Bon vis-à-vis de l'empereur est contestable en fait et en droit[22] ; en ce qui concerne ses possessions françaises, Philippe est souverain en fait ET en droit[23] puisque le traité d'Arras de 1435 l'a délié de son hommage au roi de France. Parler du duc de Bourgogne Philippe le Bon comme d'un princesouverain est donc parfaitement pertinent[24],[25].
En 1437 une révolte éclate àBruges contre Philippe le Bon. La révolte de Bruges en 1437 résulte du mécontentement face à la centralisation du pouvoir par Philippe le Bon, de nouvelles taxes imposées, et de l'ingérence bourguignonne dans les affaires locales, exacerbant les difficultés économiques et menaçant l'autonomie des citoyens. Il manque d'y laisser la vie, mais finalement pacifie la ville avec l'aide deGand et d'Ypres. En 1439, Philippe signe la paix deGravelines avec Henri VI d'Angleterre, ce qui permet une reprise du commerce entre le royaume insulaire et laFlandre. En1453, c'est au tour desGantois de se soulever; ils sont écrasés àGavere.
Le, Philippe le Bon meurt àBruges à près de71 ans.Charles le Téméraire hérite du duché de Bourgogne, comme de tous les autres titres et fiefs bourguignons de son père, devenant ainsi le nouveau souverain de l'État bourguignon.
Écartelé d'azur semé de fleurs de lys d'or à la bordure componée d'argent et de gueules (qui est de Valois-Bourgogne[n 2]) et de bandé d'or et d'azur de six pièces à la bordure de gueules (qui est de Bourgogne ancien) ; sur le tout d'or au lion de sable armé et lampassé de gueules (qui est de Flandre).
Commentaires : À son avènement (1419) : reprend les armes de son père.
Commentaires : Armes à partir de 1430 : successeur dePhilippe de Saint-Pol comme duc de Brabant, de Lothier, de Limbourg, et marquis du Saint-Empire. La même année(grandes armes ci-dessous à droite) il crée l'ordre de la Toison d'or.
Antoine bâtard de Bourgogne (v. 1421–1504), relève le nom deGrand Bâtard de Bourgogne à la mort de son demi-frère, seigneur deBeveren, auteur du rameau des Bourgogne-Beveren, né de Jeanne Lemaire dite Jeanne de Presles[29] ;
Marie de Bourgogne (1426–), de Jeanne Chastellain (on dit aussi de Jeanne de Presles)de Castellana, dite de Bosquiel, demoiselle deQuéry-la-Motte (Pas-de-Calais), épousa en 1442 Étienne de Bours dit Maillotin, gouverneur de Gorgues et de Dunkerque († 1450). Elle mourut le. Marie de Bourgogne épousa parcontrat de mariage le, suivi d'un traité passé à Bruxelles le,Pierre de Bauffremont, comte deCharny,chambellan de Philippe de Bourgogne.
En politique, Philippe le Bon prenait le temps de la réflexion et s'entourait d'avis avant d'agir.
Il pouvait être effrayant dans ses colères, mais il pardonnait vite, aimait la bonne chère et était grand amateur de maîtresses (trente connues). Sa facilité à pardonner (et non pas, comme le roi de FranceJean II le Bon, son adresse à manier l'épée) serait à l'origine de son surnom louangeur[n 3].
Cependant, le duc garda un ressentiment certain contre la couronne de France, commanditaire de l'assassinat de son père Jean sans Peur. Le décès de celui-ci provoqua chez Philippe une tristesse très profonde : les représentations le montrent quasiment toujours en pourpoint noir, signe de deuil.
Grand amateur d'art, Philippe le Bon encouragea les sculpteurs et surtout les peintres. Philippe le Bon contribue également à faire modifier lepalais des ducs de Bourgogne deDijon par une façade flamboyante, des logis ducaux, une grande salle des festins et des cuisines ducales de30 cuisiniers.
Jean I Changenet, premierMaître des Prélats bourguignons, ayant contribué au décor de l'entrée de Philippe le Bon àDijon en 1454 et à celui de son service funèbre en 1467[33].
La campagne bourguignonne de l'extensionLords of the West d'Age of Empires II : Definitive Edition lui est partiellement consacrée, dépeignant principalement sa lutte contre Jacqueline de Hainaut et le siège de Compiègne.
↑À la fin de son règne, Philippe le Bon se voit gratifié par« les sarrazines voix » du surnom« pompeux »[3] de« grand duc du Ponant » ou« grand duc d'Occident », d'après l'historiographeGeorges Chastelain[4]. Or il ne s'agit pas là d'un titre officiel et héréditaire[5] mais plutôt d'une invention dupoète flamand, qui, après avoir qualifié le duc de Bourgogne d'« auguste », recourt à l'Orient pour le magnifier derechef grâce à un surnom prestigieux éclipsant« la puissance capétienne » et« soulignant la singularité d'un prince, unique en son temps », précise la chercheuseEstelle Doudet[4].
↑Pour reprendre une expression de Sylvain Gougenheim (Frédéric II, un empereur de légende paru chez Perrin en 2015).
↑Paul Bonenfant,Philippe le Bon, sa politique, son action, Bruxelles,De Boeck & Larcier, 1996,p. 27.
↑Selon ses adversaires, le dauphin serait né d'une liaison d'Isabeau de Bavière avecLouis d'Orléans, frère du roi de France (assassiné sur l'ordre de Jean sans Peur en 1407).
↑Joseph Calmette,Les Grands Ducs de Bourgogne, Paris, Albin Michel, 1949 (réédition :p. 184).
À Sint Maartensdijk,, la duchesse Jacqueline de Bavière, comtesse de Hollande, de Ponthieu et d’Ostrevant, donne quittance au duc de Bourgogne, d’une somme de500 écus d’or, ditsPhilippus de Bourgogne, montant de la première annuité de la rente qu’elle perçoit sur les revenus d’Ostrevant. Dans G. Wymans, « Inventaire analytique du chartrier de la Trésorerie des comtes de Hainaut », aux A.E. Mons,no d’ordre (cote) 1670, Éditions A.G.R., Bruxelles, 1985,p. 352. (Or. sur pch. ; sc. ébréché. (Sint Maartensdijk,).
↑A la fin de l'année 1430, alors que Philippe le Bon vient de recueillir la succession brabançonne, la Bourgogne est partout gagnante. Cf.Henri Pirenne,Histoire de Belgique, La Renaissance du Livre, Bruxelles, 1948,vol. II,p. 227 :
Sophie Jolivet,Pour soi vêtir honnêtement à la cour de monseigneur le duc de Bourgogne : costume et dispositif vestimentaire à la cour de Philippe le Bon de 1430 à 1455, thèse de doctorat de l’université de Bourgogne, 2003,[lire en ligne].
SophieJolivet,« La construction d'une image : Philippe le Bon et le noir (1419-1467) », dans Isabelle Paresys et Natacha Coquery (dir.),Se vêtir à la cour en Europe, 1400-1815, Villeneuve-d'Ascq / Versailles, IRHIS, Institut de recherches historiques du Septentrion : CEGES, Centre de gestion de l'édition scientifique / CRCV, Centre de recherche du château de Versailles,coll. « Histoire et littérature de l'Europe du Nord-Ouest »,, 347 p.(ISBN978-2-905637-64-2),p. 27-42.
Alain Marchandisse etBertrand Schnerb,« Philippe le Bon et la présence bourguignonne à Troyes », dans Arnaud Baudin,Valérie Toureille et Jean-Marie Yante (dir.),Guerre et paix en Champagne à la fin du Moyen Âge. Autour du traité de Troyes : actes des journées d'étude de Dijon, Chaumont, Épinal et Troyes (2020-2021), Gand, Snoeck,, 484 p.(ISBN978-9-46161-868-9),p. 168-179.