Il passe ses vacances àNazelles dans la propriété de son grand-père maternel,Édouard Debat-Ponsan, puis, à partir de 1933, dans le domaineLes Madères acquis par son père àVernou-sur-Brenne, dont il hérite avec sa sœur en 1978 et où il a installé depuis lors un de ses ateliers.
Après avoir passé la seconde partie de son baccalauréat de philosophie, il s'inscrit en 1937 pour des études d'architecture à l'École des beaux-arts de Paris dans l'atelier de son oncleJacques Debat-Ponsan, et s'inscrit à laSorbonne pour une licence d'histoire qu'il obtient en 1942. Il fréquente l'atelier deLe Corbusier[2].
Entre 1940 et 1943, il rejoint son père et son frère dans la résistance desmaquis[4]. En 1944, il épouse Denise Coulon, qui est l'arrière-petite-fille d'Eugène Scribe et la petite-nièce deCamille Pelletan, avec qui il aura deux enfants,Patrice et Sylvie. Il peindra dans la propriété familiale de sa femme àSaint-Georges-de-Didonne ainsi que sur le port deRoyan jusqu'à sa mort. Durant laSeconde Guerre mondiale, son art est marqué par l'expression graphique. Le dessin lui permet de traduire toute l'horreur de la guerre :Le Mort deDachau, Le Sourire sadique du Nazi, Le Mort et son âme. En 1946, il installe un atelier à Cachan, il y peint une toile de 8 m de long :La Vérité et la Justice poursuivant le crime. Il rencontreAndré Lanskoy.
Autour de 1950, il privilégie la matière et les couleurs sourdes. Olivier Debré expose à New York à laPerspective gallery. Il est invité au Salon de mai auquel il participera jusqu'à sa mort. En 1951 la librairie-galeriela Hune présente pour la première fois les gravures d'Olivier Debré. L'année suivante, il participe à son premier Salon d'octobre qui regroupe les peintres les plus significatifs de l'art non figuratif et abstrait. Il y côtoieGeneviève Asse,Claude Bellegarde,Francis Bott,Jean Degottex,Pierre Dmitrienko,Jacques Doucet,Jacques Germain,Charles Lapicque,Jean Messagier,Kumi Sugaï,Zao Wou-Ki, parmi d'autres. 1953 correspond à une période charnière dans l'œuvre d'Olivier Debré qui délaisse lessignes-personnages pour lessignes-paysages qui sont alors, restituePierre Cabanne,« lieu de rencontre de ses sensations directement ressenties sur la nature et d'une pensée tendue vers la pleine et exacte connaissance »[6]. C'est à cette époque qu'il prend conscience des possibilités multiples offertes par la technique de lalithographie qu'il n'a jamais cessé de pratiquer[3]. Il participe pour la première fois en 1954 ausalon Comparaisons. En 1956, Michel Warren organise sa première exposition individuelle à Paris. L'année suivante, la seconde exposition chez Michel Warren le fait figurer« désormais en bonne place parmi les chefs de file de l'École de Paris », écrit John Prossot dansApollo dont la couverture reproduit le tableau exposé. Après un voyage en Espagne, il expose, en 1959, à la Phillips Gallery àWashington. Il rencontreFranz Kline,Mark Rothko etJules Olitski[7]. En mai, première exposition personnelle à la Knoedler Gallery aux États-Unis, avec une préface de Pierre Courthion. Il participe àPeintres d'aujourd'hui au Palazzo delle Arti à Turin.
Au tournant des années 1960, il revient au paysage, sa peinture est plus fluide avec des ponctuations de concrétions épaisses qui délimitent et créent l'espace. Il qualifie alors sa peinture d’abstraction fervente car elle symbolise l'émotion ressentie devant le paysage. En 1960, il expose à la galerie Knoedler à Paris. La presse se fait l'écho de cet événement[3]. Durant l'été, il séjourne enVénétie avec sa famille[3]. L'année suivante, il effectue un nouveau voyage en Espagne avec son fils Patrice. En 1962, il voyage en Grèce avec sa famille. À l'automne, une exposition de ses œuvres a lieu au musée de l'Athénée à Genève. Il participe pour la première fois au Salon Grands et Jeunes d'aujourd'hui à Paris. Il expose un bahut en bois sculpté posé sur un socle de métal à l'exposition « Antagonismes 2-L'objet » aumusée des arts décoratifs à Paris.
En 1963, double exposition à la galerie Knoedler à Paris puis à New York. C'est le poèteFrancis Ponge qui écrit le texte pour les deux catalogues, dontPour Olivier Debré[8]. La presse se fait largement l'écho de cet événement en France comme aux États-Unis ; à cette occasion, Olivier Debré retourne à New York où il rencontreMark Rothko pour la seconde fois.
Une rétrospective des œuvres d'Olivier Debré a lieu en 1995 à lagalerie nationale du Jeu de Paume à Paris, Daniel Abadie étant le commissaire et directeur[11]. À cette occasion, il décore vingt vases enporcelaine de Sèvres en collaboration avec lamanufacture nationale de Sèvres en une série de pièces uniques qui sera vendue par le musée et la Manufacture. La rétrospective est présentée dans de nombreux pays. Le peintre réalise les vitraux pour lachapelle Saint-Maudé de La Croix-Helléan dans leMorbihan. En 1996 a lieu à Paris l'inaugurationthéâtre des Abbesses, œuvre de l'architecte Vandehove, où Olivier Debré réalise le rideau et les toiles tendues des galeries des balcons latéraux. L'année suivante, c'est la première à l'Opéra Bastille du spectacleSignes avec les décors et les costumes d'Olivier Debré, spectacle dans lequelCarolyn Carlson a signé la chorégraphie. Ce ballet est inscrit dans le répertoire de l'Opéra et est repris régulièrement. Enfin, en 1998, Olivier Debré réalise le rideau de scène de l'Opéra deShanghai.
Abstraite et solidement construite dans lesannées 1940-1950, sa peinture a évolué à partir desannées 1960 vers une spatialité qui renvoie à la liberté et à l'impermanence de la nature. Grand coloriste, son intervention sur l'espace pictural exalte la couleur. Dans lesannées 1970, sa peinture atteint un équilibre formel dans une suite de toiles d’un format carré[3].
Olivier Debré a parfois peint de très grandes toiles en faisant glisser une sorte de pinceau-balai sur la toile au sol, peignant toujours dehors, quel que soit le temps. Il a dessiné également un timbre-poste, desvitraux, peint plusieurs rideaux de scène, pour laComédie-Française, pour l'Opéra deHong Kong et le nouvelOpéra de Shanghai enChine, ainsi que les fresques murales duThéâtre des Abbesses à Paris, ce qui ne se fit pas sans remous avec le directeurGérard Violette[16].
Il a aussi été sculpteur et illustrateur, entre autres deslivres deMichel Déon,Francis Ponge,Edmond Jabès etJulien Gracq. Il a publié quelques essais artistiques, notamment pour donner sa vision de l'évolution des formes, et proposé une nouvelle architecture adaptée à la ville contemporaine.
« Une peinture, aussi éloignée soit-elle de ce qu'il est convenu d'appeler la représentation du monde, en reste une image… Toute chose qui est participe du monde, y compris mon émotion. Les peintres qui se croient de purs lyriques décrivent le paysage de leur émotion… L'important reste l'intensité du sentiment et non le sujet, fût-il la description même de l'émotion. »
« À propos d'Olivier Debré, nous éprouvons une fois de plus tout ce que la peinture, depuis quelque temps, a décidé de nous taire pour nous dire, peut-être avec plus de force, ce dont elle désire à tout prix nous entretenir… Une sorte de figuration à l'envers qui capte et conduit notre regard à nous empêcher de voir précisément quelque chose, de façon seulement à nous permettre de ressentir principalement les douces, les si particulières rafales du lieu et de la saison. » -Francis Ponge[8]
« Vingt-cinq années jalonnent la courbe qui va de formes peintes dans la pâte del'abstraction chaude de 1943 et des signes écrits dans la vivacité du geste directement au tube du début de 1944 à la fin 1948, à la reprise des empâtements monolithiques des années cinquante, à la période actuelle de grandes plages de couleur aux confins ourlés de matière, quelque peu informelle, qui sont en quelque sorte l'accent et le centre de toute son œuvre. » -Julien Alvard(en)[60]
« Vastes champs colorés d'Olivier Debré, qui sous-tendent des sources naturalistes, dans des compositions lyriques, essaimées d'îlots de matière justement venus aux cimes du tableau, ménageant des brèches secrètes et donnant sa marque à une œuvre déjà bien connue, fervente, enlevée, aux confins de l'abstraction. Peinture du geste et du signe, sobrement définie, aérée et pourtant d'une grande densité, qui jamais ne se coupe de ses sources originelles. » -Gérard Xuriguera[61]
« Debré capte les couleurs essentielles de la nature : la forêt fauve, la prairie vert pâle. Mais il ne se satisfait pas des facilités de la mode du monochrome qui, quoi qu'en disent les thuriféraires de cette technique, est un appauvrissement. Ses toiles sont plus diaprées, plus irisées que jamais. Parfois, une échancrure ouvre une échappée vers un nouvel espace, la promesse d'une future toile qui promongera celle-ci. Quelques reliefs plus sonores affleurent ces vastes étendues fluides et leur donnent des pulsions énergiques. Debré ne représente pas des paysages, il nous en imprègne. » - Pierre Mazars[22]
« Olivier Debré, par l'invention du signe-surface, a révélé que la peinture ne travaille pas des images, mais leur matière, car en celle-ci s'opère le croisement de l'impression, qui les dégage, et de l'émotion du peintre, qui s'ensuit. Le signe-surface entretient cette métamorphose permanente : il ne la représente pas, il en est le foyer où toujours se ranime l'élan dans lequel l'espace apparaît comme la matière visuelle unissant, à travers nous, le monde et nous. Mais en rendant visible cette émotion qui, avant lui, ne l'était pas, Olivier Debré l'a faite évoluer : l'espace n'est plus seulement un lieu ; étant de la matière, c'est un milieu révélateur qui compose et décompose les formes dans une danse aérienne et mentale où se dissolvent les vieilles séparations. » -Bernard Noël[62]
« Une peinture aux grands formats qui ouvrent l'espace de façon lyrique ; une abstraction qui à l'origine doit quelque peu àNicolas de Staël mais qui a depuis longtemps conquis son expression particulière. L'un des thèmes favoris d'Olivier Debré est le paysage de la Loire qui lui permet de créer un champ fluide où s'épanouit la couleur. » -Gérald Schurr[23].
« L'expression sculpturale qu'il donne à ses eaux-fortes n'est pas exempte de la monumentalité de ses paysages de la Loire ; il y a là le même "coulé", l'alternance de sérénité et de violence, de spontanéité et de réflexion, de formes fermées et ouvertes de ses peintures. La pointe du graveur n'est pas toujours un scalpel, elle adoucit les structures, suggère des contours, délivre des nuances ou des passages. » -Pierre Cabanne[63].
En 2015, le CCC - centre de création contemporaine de Tours est devenu leCentre de création contemporaine Olivier Debré. Il s'implante en 2016 dans un nouveau bâtiment construit sur le site du jardin FrançoisIer[65]. Le lieu n'est pas un musée consacré à Olivier Debré mais un centre d'art[66] qui fera vivre l’œuvre du peintre en la mettant en résonance avec la création artistique contemporaine[67].
Hôtel de ville deChinon (accrochage initial : lycée François-Rabelais, Chinon),La métamorphose de Chinon ou la translation de Jeanne, huile sur toile 187x698cm, 1975[72].
D et S ou Grise lourde 1948 (Centre Pompidou Paris).
Sculpture « fontaine », implantée sur l'aire de Parcé-sur-Sarthe A11. Fontaine en deux parties, mettant en scène tout autant l'eau tumultueuse que le calme d'une eau paisible. Jets d'eau, grès, métal.
Francis Ponge (traduction en langue anglaise d'Annette Michelson),Pour Olivier Debré, 2 lithographies originales d'Olivier Debré, 33 exemplaires numérotés,colophon signé par l'auteur et par l'artiste, Galerie Knoedler, 1963.
Pierre Torreilles,Pratique de la poésie, une eau-forte originale d'Olivier Debré, Fata Morgana, 1977.
Pierre Torreilles,Toutes les aubes conjuguées, 3 gravures signées et justifiées par Olivier Debré, colophon signé par l'artiste, 80 exemplaires numérotés, Thierry Bouchard, 1978.
James Sacré,Quelque chose de mal raconté, une gravure originale d'Olivier Debré, André Dimanche, Marqseille, 1981.
Michel Butor,Sous le soleil noir, feuillets mobiles, Zoé Christiani éditeur, 1991.
Mathieu Bénézet, Bernard Noël et Bernard Vargaftig,Trois états du toi, poèmes accompagnés de 9 lithographies originales d'Olivier Debré, 130 exemplaires numérotés, Éditions La Sétérée/ Jacques Clerc, 1992.
Dominique Grandmont,Demain, fruit du sommeil, poème (fac-similé de manuscrit) sur 32 feuillets pliés en accordéon, reproduction de peinture d'Olivier Debré au recto, Les petits classiques du grand pirate, 1995.
Eugène Guillevic,Ciels du quotidien, 3 eaux-fortes originales par Olivier Debré,Julius Baltazar et Roger Bertèmes, 60 exemplaires numérotés (les 12 premiers enrichis d'un dessin original à l'encre de Chine de chacun des 3 artistes), André Biren, Paris, 1996.
Michel Déon,Avant-jour, 4 eaux-fortes et aquatintes d'Olivier Debré, 57 exemplaires numérotés, les 12 premiers enrichis d'un lavis original en frontispice, colophon signé par l'auteur et par l'artiste, Biren, Paris, 1998.
Georges-Emmanuel Clancier,Est-ce un adieu ? On a tenu, édition originale des paroles d'adieu prononcées lors des obsèques d'Eugène Guillevic le 25 mars 1997, 2 gravures originales hors texte par Olivier Debré etJulius Baltazar, 65 exemplaires numérotés, Éditions Alain Pirol, Montréal, 1999.
L'Ecclésiaste - Un temps pour tout (traduction de l'Hébreu d'Ernest Renan), 8 eaux-fortes et une lithographie originale d'Olivier Debré, 210 exemplaires numérotés, Les Amis du livre, Paris, 1999.
Bernard Noël et Olivier Debré (entretiens avecJean-Yves Bosseur etMichel Archimbaud,Le rideau de la Comédie-Française, Librairie Séguier/ Garamont-Archimbaud, 1987.
Les Postes françaises ont émis le 19 avril 1993 le timbre-poste -Europa - « Rouge rythme bleu » - Olivier Debré, d'une valeur faciale de 2,50 FF et reproduisant la toile ainsi désignée[95].
↑a etbFrancis Ponge,Pour Olivier Debré, Paris, galerie Knoedler, 1963, avec deux lithographies sur double page, dont la couverture ; tirage : 33 ex. numérotés.
↑Institut de France, Académie des Beaux-arts,Notice sur la vie et les travaux deM. Olivier Debré (1920-1999) parM.Jean Cortot lue à l'occasion de son installation comme membre de la Section Peinture séance du 11 décembre 2002 ([PDF]en ligne suracademiedesbeauxarts.fr).
↑Julien Alvard, Pierre Courthion et Francis Ponge,Olivier Debré, Éditions du Musée Galliera, 1968.
↑Gérard Xuriguera,Regard sur la peinture contemporaine - La création picturale de 1945 à nos jours, Arted, 1983,p. 37.
↑Bernard Noël, « Matière d'espace » (préface),Le rideau de la Comédie-Française, entretiens d'Olivier Debré avec Jean-Yves Bosseur et Michel Archimbaud, Librairie Séguier/ Garamont-Archimbaud, 1987,p. 9.
Daniel Abadie etClaude Fournet,Olivier Debré - Dessins, sculptures, 1941-1974, Cahiers théoriques de l'abbaye Sainte-Croix, Les Sables-d'Olonne,no 6, mai 1974.
Pierre Courthion,Olivier Debré ou la peinture signifiante,XXe siècle, 1974.
Marc Donnadieu,Gestes, signes, traces, espaces - Figures de la peinture moderne française dans les collections publiques françaises, éditions du Musée d'art moderne André-Malraux, Le Havre, 2007.
Georges Roques, Claire Maingeon et Lydia Harambourg,De l'impressionnisme à l'abstraction - Une immersion dans la peinture, éditions du Musée des Beaux-Arts de Saint-Lô, 2013.