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Enpsychologie, l'effet eurêka (oumoment eurêka, ou encoreillumination soudaine) fait référence à l'expérience humaine courante où une solution à un problème ou une idée novatrice vient soudainement à l'esprit de manière consciente. Le terme "eurêka" signifie "j'ai trouvé" en grec ancien[1].
D'après des travaux récents, l'effet eurêka est caractérisé par les quatre phénomènes suivants[2],[3] :
- l'illumination est soudaine, lorsqu'on essaie activement de résoudre un problème, ou dans une période où l'on n'y réfléchit plus ;
- la solution au problème est alors traitée avec aisance ;
- le moment suscite un effet positif ;
- la personne est convaincue que la solution est correcte.
L'origine de l'expression "Eurêka" est attribuée au célèbre savant grec de l'antiquitéArchimède. Selon la légende, ce dernier aurait découvert le principe de lapoussée qui porte son nom alors qu'il prenait un bain. En constatant que le niveau de l'eau augmentait lorsque son corps y était immergé, il aurait soudainement compris le lien entre la poussée exercée par un fluide et le volume du corps immergé, permettant de déterminer une méthode pour savoir si une couronne était faite d'or pur. Dans son enthousiasme, il se serait écrié "Eurêka !", exprimant ainsi sa jubilation face à cette découverte majeure. Cette histoire est aujourd'hui considérée comme fictive, car elle a été mentionnée pour la première fois par l'écrivain romainVitruve près de 200 ans après la date de l'évènement présumé, et parce que la méthode décrite par Vitruve ne fonctionne pas[4].
Les chercheurs ont montré que le phénomène d’eurêka résulte de processus non conscients.
L’imagerie cérébrale a en partie localisé ces processus dans legyrus temporal droit, région du cerveau impliquée dans les associations d’idées. Ils peuvent être influencés par l’humeur, l’environnement et le sommeil.
La résolution de problèmes par eurêka améliore la mémoire et la capacité à distinguer le vrai du faux, mais peut aussi induire en erreur par un excès de confiance[5].
Certaines des énigmes suivantes sont utilisées dans les études sur la résolution de problèmes par eurêka[5].
Martin Gardner a écrit un recueil de problèmes en apparence difficiles et compliqués, mais qui peuvent avoir des solutions courtes et élégantes, obtenues par ce qu'il appelle un effet "haha"[6]. Un exemple est le problème consistant à connaitre le nombre minimal de coupes planes pour découper un cube 4 x 4 x 4 en 64 cubes unités en autorisant des regroupements de morceaux après chaque coupe. Le "haha" consiste à réaliser qu'il faudra au moins six coupes pour dégager les six faces d'un cube intérieur.
En combien de coups découpe-t-on entièrement une plaque de chocolatn xm (sans regroupement de morceaux cette fois) ? Le "haha" consiste à réaliser qu'à chaque découpage le nombre de morceaux distincts augmente d'une unité et que donc, quelle que soit la méthode, il faudra coups.
Le problème des neuf points est un problème classique utilisé par les psychologues pour étudier la perspicacité. Le problème consiste en un carré 3 × 3 créé par 9 points noirs. La tâche consiste à relier les 9 points en utilisant exactement 4 segments de droites, sans revenir en arrière ni retirer son stylo du papier. Kershaw et Ohlsson[7] rapportent que dans un laboratoire avec une limite de temps de 2 ou 3 minutes, le taux de solution attendu est de 0 %.
La difficulté du problème des neuf points est qu'il exige des répondants qu'ils regardent au-delà des relations conventionnelles entre la figure et le fond qui créent des contraintes spatiales subtiles et illusoires et (littéralement) qu'ils « pensent en dehors des sentiers battus ».
Exemple : « Un homme lavait les vitres d’un immeuble de grande hauteur lorsqu’il est tombé d’une échelle de 12 mètres sur le chemin en béton en contrebas. Étonnamment, il n’a pas été blessé. Pourquoi ? [Réponse] Il a glissé de l'échelon du bas. »
Ces énigmes ont été développées par G. Knoblich[8]. Des allumettes forment une égalité mathématique en chiffres romains simple mais incorrecte. La tâche consiste à corriger l’égalité en déplaçant une seule allumette.
Résoudre uneanagramme consiste à modifier l'ordre d'une succession de lettres afin de créer un ou plusieurs mots. L'ensemble de lettres d'origine peut être un mot lui-même ou simplement un mélange.
Lesrébus impliquent des indices verbaux et visuels qui obligent le répondant à restructurer et à « lire entre les lignes » (presque littéralement) pour les résoudre.
Dans ce problème, un ensemble de 8 pièces est disposé sur une table dans une certaine configuration, et le sujet est invité à déplacer 2 pièces de manière à ce que toutes les pièces touchent exactement trois autres. La difficulté de ce problème vient du fait que l'on pense le problème de manière purement bidimensionnelle, alors qu'une approche tridimensionnelle est la seule façon de le résoudre[9].
A la suite d'Archimède, plusieurs découvertes scientifiques ont été faites à la suite d'un moment Eurêka.
L'un des exemples les plus célèbres de l'effet eurêka est l'histoire de la découverte de la loi de la gravité parNewton. Selon la légende, il se trouvait en 1687 dans son verger lorsque, soudainement, une pomme est tombée d'un arbre près de lui. Cela a suscité son intérêt et l'a conduit à réfléchir à la force qui tirait la pomme vers le sol. Cette observation a déclenché une réflexion plus approfondie, le conduisant à formuler la loi de la gravité, qui explique l'attraction entre les objets massifs.
Le mathématicienCarl Friedrich Gauss écrit dansson journal en 1796 « ΕΥΡΗΚΑ. num. = Δ + Δ + Δ », faisant référence à sa découverte selon laquelle tout entier positif peut être exprimé comme la somme d'au plus troisnombres triangulaires[10].
LeBroom bridge à Dublin est connu pour être le lieu oùSir William Rowan Hamilton a découvert dans un éclair de génie la formule fondamentale desquaternions le 16 octobre 1843, formule qu'il aurait écrite sur une pierre du pont, depuis remplacée par uneplaque commémorative.
Friedrich Kekulé, chimiste allemand du XIXe siècle, a connu un moment eureka crucial dans sa recherche sur la structure du benzène. Alors qu'il luttait pour comprendre comment les atomes de carbone étaient organisés dans la molécule, il s'est endormi dans son fauteuil et a rêvé d'une image de serpents s'enroulant. Ce rêve lui a donné l'idée de représenter les atomes de carbone dans une structure cyclique, formant ainsi la base de la compréhension de la structure du benzène.
Henri Poincaré était coutumier d’éclairs mathématiques intuitifs qui survenaient à l’improviste, alors que le chercheur était occupé à tout autre chose. Il en raconte un exemple dans le chapitre « L’invention mathématique », issu de son ouvrageScience et Méthode[11].
"À ce moment, je quittai Caen, que j’habitais alors, pour prendre part à une course géologique entreprise par l’École des Mines. Les péripéties du voyage me firent oublier mes travaux mathématiques ; arrivés à Coutances, nous montâmes dans un omnibus pour je ne sais quelle promenade ; au moment où je mettais le pied sur le marche-pied, l’idée me vint, sans que rien de mes pensées antérieures parut m’y avoir préparé, que les transformations dont j’avais fait usage pour définir les fonctions fuchsiennes sont identiques à celles de la Géométrie non-euclidienne. Je ne fis pas la vérification ; je n’en aurais pas eu le temps, puisque, à peine assis dans l’omnibus, je repris la conversation commencée, mais j’eus tout de suite une entière certitude. De retour à Caen, je vérifiai le résultat à tête reposée pour l’acquit de ma conscience."
L'une des idées clés dans le développement de sathéorie de la relativité restreinte est venue àAlbert Einstein lors d'une conversation avec son amiMichele Besso. Il relate : J'ai entamé la conversation avec lui ainsi : « J'ai récemment travaillé sur un problème difficile. Aujourd'hui, je viens ici pour le résoudre avec vous.» Nous avons abordé tous les aspects de ce problème. Puis, soudain, j'ai compris où se trouvait la clé. Le lendemain, je suis revenu le voir et, sans même le saluer, je lui ai dit : « Merci. J'ai complètement résolu le problème. »Cependant, Einstein a déclaré que l'idée même de la relativité restreinte ne lui est pas venue comme un moment eurêka soudain et unique et qu'il y a été « conduit par des étapes découlant des lois individuelles dérivées de l'expérience »[12].
Un soir de 1951, l’astronomeWilliam Wilson Morgan dit avoir eu une «inspiration fulgurante [...] un élan créatif intuitif». Ce moment décisif lui valut de résoudre l’un des grands mystères de l’astronomie concernant la forme de notre galaxie. Tandis qu’il scrutait le ciel sans activement réfléchir à ce problème, une succession d'étoiles lui fit découvrir le fait que notre galaxie a une forme spirale[5].