Ce monarquealaouite soutient à partir de1944 l'Istiqlal, principal mouvement indépendantiste marocain, et s'oppose à la poursuite des dominations française et espagnole. Le, il est déposé par les autorités du protectorat français et contraint à l'exil — successivement enCorse et àMadagascar — jusqu'au. Revenu au pouvoir, il obtient la fin du protectorat et l'indépendance du Maroc.
Sidi Mohammed est né aupalais royal de Fès[1]. Il est le fils du sultanMoulay Youssef et de son épouseLalla Yacout, il est le troisième de ses frères. Il commence son éducation dans l'office situé dans l’enceinte du palais (dénomméqasr al-amami), destiné à l'éducation des enfants des rois et des princes[1]. Il y apprend à lire, écrire et reçoit les premiers enseignements de l'étudecoranique[1].
Quand son père instaureRabat comme capitale du royaume et de l'administration, il y transfère Sidi Mohammed, avec la plupart de ses frères[1]. Dans l'enceinte du palais royal de Rabat, il y établit un office à eux[1] et leur rattache des professeurs chargés de leur éducation[1].
À Rabat, des enseignants s'attachent à Sidi Mohammed et ses frères jusqu'à ce qu'ils mémorisent le Coran[1]. Après quoi il commence son cursus académique[1]. Il étudie l’arabe et le français, son père ayant nommé des enseignants pour qu'ils s'acquittent de cette tâche[1]. Mohammed Mammeri lui enseigne le français et l’entoure d’une attention particulière[2]. Sultan, il demeure longtemps à son service comme chef du protocole[2].
Sidi Mohammed poursuit ensuite sa scolarité dans une école publique à Rabat[1].
Sidi Mohammed est le fils deMoulay Youssef, sultan du Maroc de 1912 à 1927 sous leprotectorat français. À la mort de son père en 1927, un an après la fin de laguerre du Rif, il est choisi par les autorités françaises comme sultan à la place de ses deux frères aînés[3].
Deux fidèles à la Résidence générale française et conseillers de Moulay Youssef jouent un rôle essentiel dans la succession en faveur de Mohammed V :Mohammed Mammeri son précepteur et legrand vizir El-Mokri[4] au détriment du grand Chambellan et bras droit de son pèreThami Ababou.
En 1930, par l'ordonnance du, les deux tiers de la population du Maroc sont placés sous l'autorité des juridictions françaises[5].
Comme une partie non négligeable des élites nobiliaires marocaines, le sultan est fortement attristé par la défaite de la France face à l'Allemagne, actée par armistice en juin 1940[6].
Ledahir du[7] portant application au Maroc dustatut des juifs, « vu pour promulgation et exécution » par lerésident généralCharles Noguès[7], prévoit une mise en application à partir du. Les fonctionnaires juifs perdent leur emploi, et beaucoup se recyclent dans le commerce. Le sultan n'est pas perçu comme étant responsable de ces mesures imposées par Vichy[8]. Un télégramme diplomatique de 1941 présenté à l'Académie du royaume du Maroc en 1985, mentionne des « tensions » entre le sultan et le résident général Charles Noguès à propos du statut des juifs[9]. Selon l'historienDaniel Rivet, le sultan lança de multiples actions et déclarations attestant d'une certaine bienveillance envers la communauté juive locale, à la demande des notables de cette communauté, en permettant aux enfants juifs chassés des écoles du protectorat d'être scolarisés voir réfugiés dans les établissements de l'Alliance israélite universelle[6].
Il soutient très tôt avec son fils, le prince Moulay El Hassan (futur roiHassan II), les mouvements nationalistes marocains fondés par MohammedAllal El Fassi pour l'Istiqlal1937 et Bel Hassan El Ouazzani pour le PDI (Parti pour la démocratie et l'indépendance) lesquels réclament par le manifeste signé le l’indépendance du Maroc. Il dénonce aussi la répression française des émeutes àRabat,Salé,Casablanca,Fès et l’arrestation des chefs nationalistes de l’Istiqlal et duPDI.
Après la guerre, les relations diplomatiques avec la France sont toujours ouvertes, comme en témoigne son voyage de 1945 à l'invitation dugénéral de Gaulle, président du gouvernement provisoire[10]. En outre, il est le premier souverain accueilli en France depuis la victoire.
En1947, les progrès rapides du mouvement nationaliste incitent Sidi Mohammed à revendiquer pour la première fois l'indépendance lors dudiscours de Tanger, où il réclame également l’union des Arabes et l’adhésion du Maroc à laLigue arabe (fondée en1945) dont il fait l’apologie insistant sur les liens étroits entre leMaroc et l’ensemble dumonde arabe. Ce rapprochement entre la monarchie et le mouvement nationaliste, dont les projets diffèrent, s'explique selon l'historien Bernard Cubertafond par le fait que « chaque côté a besoin de l'autre : le mouvement national voit la popularité croissante du roi et sa prudente mais progressive émancipation par rapport à un protecteur qui, en fait, est sorti du traité de 1912 pour en venir à l'administration directe ; le roi ne peut, sauf à se discréditer, se couper d'un mouvement nationaliste regroupant les forces vives de son pays et l'élite de sa jeunesse, et il a besoin de cette puissance de contestation pour imposer des évolutions à la France »[5].
Dès lors, les relations se tendent avec les autorités françaises, notamment avec le nouveau résident général,Alphonse Juin, qui applique des mesures sévères et fait pression sur le sultan pour qu’il désavoue l’Istiqlal et se démarque des revendications nationalistes. La rupture avec la France est consommée en1951 et Sidi Mohammed conclut avec les nationalistes le pacte de Tanger pour lutter pour l’indépendance. La nomination d’un nouveau résident général, le généralAugustin Guillaume, accentue les dissensions entre Mohammed V et la France. De nouvelles manifestations virent à l’émeute au Maroc en1952, notamment à Casablanca tandis que Sidi Mohammed donne à la cause marocaine une audience internationale à l’ONU avec le soutien desÉtats-Unis.
En1953, le généralAugustin Guillaume manœuvre avec d’autres élites marocaines, notamment leGlaoui, pacha deMarrakech, l’ouléma de Fès et les tribusberbères et fait déposer Mohammed V le[11] pour placer son oncle,Mohammed Ibn Arafa, sur le trône tandis que Sidi Mohammed refuse d’abdiquer. L’arrestation puis la déportation du sultan, d’abord enCorse[12], puis àMadagascar (àAntsirabe[13] à partir de1954), a eu le contraire de l’effet escompté. Elle soude les Marocains derrière leur sultan et fédère le mouvement nationaliste derrière Sidi Mohammed. Une vague de violences et d’attentats dans les grandes villes et dans le Rif secoue le Maroc, tandis qu’éclate dans le même temps laguerre d’Algérie en 1954 et que la même politique déclenche les mêmes effets enTunisie contre leNéo-Destour d'Habib Bourguiba.
La situation se tend au point qu'en 1955, les nationalistes marocains, qui bénéficient de soutiens enLibye, enAlgérie (avec leFLN) et dans l'Égypte deNasser (où vit alors en exilAbd-el-Krim, ancien chef de la révolte du Rif dans les années 1920) forcent le gouvernement français à négocier et à rappeler le sultan.
Mehdi Ben Barka négocie avec les autorités françaises le retour de Sidi Mohammed. Le, il peut faire son retour au Maroc avec son jeune fils, le prince Moulay El Hassan et est accueilli triomphalement à Rabat ; c'est dans tout le sultanat que l'euphorie gagne la population qui fête le retour du sultan avec les drapeaux marocains et des chants patriotiques à la gloire du Maroc, de son peuple et de son sultan. Plusieursodonymes locaux rappellent cette date duSeize-Novembre.
Il signe dès un traité d’amitié avec la France qui maintient des forces armées au Maroc jusqu’en1963. Elles aident Sidi Mohammed à réprimer de nombreuses insurrections, notamment dans le Sud et leRif. Il prend dès 1957 le titre de roi du Maroc, pour symboliser l’unité du pays malgré les clivages entre arabes et berbères.
Sur le plan diplomatique, il est proche de la France et permet à l’armée française d'exploiter le territoire marocain pour ses opérations contre les indépendantistes algériens. L'opposantMehdi Ben Barka le décrit comme un « instrument docile » du néocolonialisme[5].
Le, le roi est endormi par anesthésie générale au sein de la clinique médicale de son palais, à Rabat, pour subir une banale intervention chirurgicale sur la cloison nasale réalisée par un chirurgienvaudois : il ne s'en réveille jamais et décède des suites de l'opération[14]. Son fils lui succède huit jours plus tard sous le nom d'Hassan II.
Le,Lucien Saint, résident général du Maroc à cette époque, invite le sultan du Maroc, Sidi Mohammed ben Youssef (futur Mohammed V) alors âgé de 19 ans, qui, en villégiature àLuchon, en compagnie de son grand vizir et de son interprète, sont reçus très cérémonieusement à la mairie deMarignac. Ils ont apposé, tous trois, leur signature en caractères arabes dans le registre des délibérations[réf. nécessaire].
↑abc etdSaïd Bouamama,Figures de la révolution africaine,La Découverte,.
↑a etbDaniel Rivet,Le Maghreb à l'épreuve de la colonisation, Pluriel,, 250 p.(ISBN2012353673), chapitre "Le commencement de la fin : des années 1930 à 1945".
↑Jacques Dahan,Regard d'un juif marocain sur l'histoire contemporaine de son pays : de l'avènement de Sa Majesté le sultan Sidi Mohammed Ben Youssef, au dénouement du complot d'Oufkir (1927-1972), L'Harmattan, 1995(ISBN2738437273),p. 31.
« Discours de la libération du 18 novembre 1955 : “Nous nous réjouissons de pouvoir annoncer l’avènement d’une ère de liberté et d’indépendance” »,Le Matin, Casablanca,,p. 7(lire en ligne[PDF], consulté le) — extraits.
« Discours de S.M. Le Roi Mohammed V à l'occasion de l'investiture du nouveau Gouvernement »,Bulletin officiel du Royaume du Maroc,no 2379,,p. 835(lire en ligne[PDF], consulté le) — en date du 12 mai 1958.