Vue de l'hôtel de ville pendant le peste de 1720 (1721, détail),musée des beaux-arts de Marseille. Autoportrait de Michel Serre peignant les ravages de la peste devant l'hôtel de ville.
Michel Serre, quatrième enfant de Jacques Serres, marchand ambulant, et de Marie Barbos est né à Tarragone le. Orphelin très tôt, il est accueilli à lachartreuse de Scala Dei, située à une quarantaine de kilomètres de Tarragone. En 1670, il se rend enItalie où il apprend la peinture dans différents ateliers àRome,Naples etGênes.
En 1675, il quitte l’Italie pour s’installer définitivement à Marseille.
En 1684, il peint pour lesChartreux l'immense toile deMadeleine enlevée par des anges conservée dans le chœur de l'église des Chartreux à Marseille.
Le, àNotre-Dame des Accoules, il épouse Florie Régimonde, fille de Jean Régimonde et de Jeanne Montaignon[2]. En, il achète un terrain à Suzanne de Marle et André Venture, puis y fait construire une grande maison dans la future rue Venture. L'emplacement exact de cette habitation n'a pu être trouvé.
Le, il obtient deséchevins une lettre de citadinage et accepte de peindre pour l'hôtel de ville une toile, actuellement disparue, représentant le Christ mourant sur la croix.
Pour le récompenser de ses succès,Louis XIV le nomme peintre des galères et maître à dessiner des officiers et pilotes[3]. Il travaille aux ouvrages de peinture des galères et enseigne aux jeunes officiers[MCH 1]. Il exécute plusieurs portraits de chefs d’escadre, dont celui de Louis de Montolieu (musée des beaux-arts de Marseille).
Le, il donne procuration à sa femme pour régir ses biens et se rend à Paris. C'est là qu'il rencontreJean-Baptiste Oudry qui devient son élève pendant quelque temps[MCH 2]. Il se fait connaître par l'exécution de diverses toiles dont celle duChrist chassant les vendeurs du temple (Versailles, église Saint-Symphorien)[MCH 2]. Il envoie un tableau représentantBacchus et Ariane à l’Académie de Paris qui l’admet au nombre de ses adhérents le[4] (musée des Beaux-Arts de Caen, œuvre détruite en 1944).
Ayant acquis une certaine fortune, il achète les charges de lieutenant du roi de la ville deSalon-de-Provence et de major de la ville deGardanne.Louis XIV signe les lettres patentes correspondantes respectivement le et le[2]. Ses armes sontd’azur à trois serres d’aigles d'or posées l'une sur l’autre.
Il achète de nombreuses maisons de rapport et des terrains à bâtir dans les quartiers de Mazargues et de Saint-Giniez[MCH 3].
Pendant la grande peste qui sévit à Marseille en 1720, Michel Serre se distingue par sa conduite. Il se révèle un homme de cœur et d’action. Il accepte la responsabilité de commissaire général de son quartier Saint-Ferréol et préside aux opérations de déblaiement du quartier. Il s’attira l’attention de l’intendant Lebret qui écrit aux échevins le :« Comme j’espère aller dans peu à Marseille, je verrai avec vous ce qui pourra se faire pour le tableau du sieur Serre dont je connais le mérite[5] ».
Il distribue sa fortune pour soulager la misère des survivants[6]. Son nom figure sur la stèle élevée en 1802 et placée actuellement au square dupalais des Arts. Ayant été un très proche témoin de cette terrible épidémie, il peindra trois toiles qui sont ses œuvres majeures.
En 1726 il acquiert une chapelle qu’il dédie à Saint Jean de la Croix dans l’église des Carmes déchaussés[MCH 4].
Deux tableaux représentent la peste dans l'église paroissiale de La Ciotat. L'un des deux est du peintre Michel Serre. Il représenteLe grand Saint Antoine, le bateau qui apporta la peste en Provence, en 1720, quittant sans secours la baie de La Ciotat[7].
Il meurt à Marseille le, veuf et ruiné, mais entouré du respect de tous. Il est enseveli à la paroisse Saint-Ferréol[8],[2].
La virtuosité de Michel Serre lui a permis de réaliser un très grand nombre de peintures dont plusieurs ont disparu. Il a surtout peint des scènes bibliques ou de la vie de la Vierge et du Christ. Il a également exécuté des tableaux relatifs à la mythologie et des représentations historiques, ainsi que des portraits. Ses tableaux sont conservés aumusée des beaux-arts de Marseille et dans des églises de Marseille et de sa région.
Cycle deLa Vie de Saint-François (quatorze toiles, dont deux ont disparu)
Le martyre de Saint-Pierre de Vérone, provenant de l’église des prêcheurs. Une copie a été faite par Joseph Coste qui remporte avec elle le prix d’encouragement[1]
Le Miracle de Saint Hyacinthe
La Vierge à l’enfant, Saint-François de Sales et Sainte Jeanne de Chantal
La Vierge à l'enfant apparaissant à Saint Pierre et Saint Paul. Ce tableau se trouve à l'intérieur d'un retable placé au-dessus de l'autel dit des portefaix dans l'église des Augustins à Marseille. Ce retable est couronné par un fronton animé de putti situés de part et d'autre d'une gloire qui rayonne autour d'une tiare et des clefs qui sont le symbole de l'apôtre Pierre, premier Pape de l'Église. L'attribution de cette œuvre peinte en 1692 pour la confrérie des portefaix à Michel Serre a été remise en question par l'historienne de l'art Marie Claude Homet[10].
Sainte-Anne, la Vierge et l’enfant jésus, Saint-Joseph. Ce tableau représente la Vierge assise tenant sur ses genoux l'enfant Jésus se tournant vers sainte Anne. En arrière est représenté saint Joseph[MCH 6].
Saint-Thomas d’Aquin foudroyant l’hérésie. Le saint est représenté tenant dans sa main gauche l'ostensoir tandis qu'il brandit de la main droite la foudre pour terrasser l'hérésie qu'il piétine : il s'agit probablement du protestantisme car la toile a été réalisée peu de temps après larévocation de l'édit de Nantes (1685). Derrière saint Thomas d'Aquin, l'artiste a représenté un fond architectural avec à droite une niche contenant une statue représentant un personnage barbu. Le saint est représenté en pleine force de l'âge, c'est l'homme d'action qui triomphe plus par la force que par la persuasion[MCH 8].
Les trois tableaux peints peu de temps après lapeste de 1720 représentant les scènes de cette épidémie sont les plus connus. Ces œuvres qui eurent un très grand retentissement à leur époque, demeurent un témoignage majeur de cet évènement.
Vue de l’hôtel de ville pendant la peste, Hauteur = 3.06 × Largeur = 2,77 m
« Ces deux tableaux représentent le déplorable aspect qu’offraient alors les quais et le cours : là on voit les moribonds étendus, ayant près d’eux une cruche et un vase que quelques personnes compatissantes remplissent avec terreur d’eau et de bouillon ; le cours est jonché des cadavres de ceux qui ont cherché l’ombrage de ses arbres ou celui des toiles que les officiers municipaux y ont fait tendre : partout ce sont des scènes déchirantes d’enfants, de femmes, de vieillards expirants[18]. »
Stendhal a apprécié ces deux tableaux :« Je viens de monter au premier étage de la Bourse (à l’époque bâtiment de l’hôtel de ville) pour les tableaux de Michel Serre. Contre mon attente, je les ai trouvés fort bons[19]. »
↑ab etcComte Godefroy de Montgrand,Armorial de la ville de Marseille, Alexandre Gueidon, Marseille, 1864,p. 181-183.
↑Paul Masson (dir.),Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône, Archives départementales des Bouches-du-Rhône, Marseille, 17 volumes parus de 1913 à 1937, tome IV,2e partie,p. 452
↑Julie Pellizzone,Souvenirs (1787-1815), Transcription d’Hélène Échinard, présentés et annotés par Pierre etHélène Échinard et Georges Reynaud, Publications de l'Université de Provence, Paris, 1995,p. 227(ISBN2-907883-93-3)
↑Paul Gaffarel et de Duranty,La peste de 1720 à Marseille & en France, librairie académique Perrin, Paris, 1911,p. 211
↑Académie de Marseille,Dictionnaire des marseillais, Edisud, Marseille, 2001,p. 319
↑Paul Masson (dir.),Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône, Archives départementales des Bouches-du-Rhône, Marseille, 17 volumes parus de 1913 à 1937, tome 16,p. 17.
↑Adrien Blés, Dictionnaire historique des rues de Marseille, Ed. Jeanne Laffitte, Marseille, 1989,p. 351,(ISBN2-86276-195-8)
↑Jean-RobertCain et EmmanuelLaugier,Trésor des églises de Marseille : Patrimoine culturel communal, Marseille, Ville de Marseille,, 368 p.(ISBN978-2-9535530-0-0),p. 120
↑Abbé Marius Ganay,La poétique histoire de Mazargues, Marseille, Société nationale des entreprises de presse, 1947,p. 124
↑Abbé Marius Ganay,La poétique histoire de Mazargues, Marseille, Société nationale des entreprises de presse, 1947,p. 111
↑Abbé Marius Ganay,La poétique histoire de Mazargues, Marseille, Société nationale des entreprises de presse, 1947,p. 125