Le groupe des langues slaves se décompose en trois familles de langues : orientale, occidentale et méridionale. Pour cette dernière, il existe pour lediasystème slave du centre-sud des dénominations politiques conformes aux recensements des pays slaves méridionaux et des dénominations linguistiques conformes aux classifications deslinguistes.
La division tripartie des langues slaves ne tient pas compte desdialectes parlés dans chaque langue. Certains d'entre eux, considérés comme des dialectes transitionnels ou, à l'image dusourjyk ou dubalatchka, des idiomes hybrides, font souvent le pont entre ces langues en offrant des similitudes qui n'existent pas lorsque l'on compare les langues écrites. Il existe suffisamment de différences entre les nombreux dialectes et langues slaves pour rendre difficile ou impossible la communication entreSlaves de nationalités différentes. À l'intérieur d'une même langue slave, les dialectes peuvent varier relativement peu, comme en russe, ou beaucoup plus, comme en slovène. Les médias modernes ont toutefois contribué à unifier chacune des langues slaves.
Outre ladiaspora slave (où des communautés importantes peuvent être trouvées, comme russes ou ukrainiennes auCanada ou croates enAustralie), les langues slaves se distribuent principalement comme suit :
Letchèque a 11 millions de locuteurs, essentiellement en Tchéquie, Slovaquie etAutriche
Leslovaque a 5,6 millions de locuteurs en Slovaquie, auxÉtats-Unis et en Tchéquie.
Lesorabe a 100 000 locuteurs avec un statut protégé enAllemagne et se divise en deux langues distinctes : le bas sorabe ou lusacien, parlé dans leBrandebourg et, moins répandu, le haut sorabe, parlé enSaxe.
Lecachoube (kachoube) a environ 100 000 à 250 000 locuteurs, essentiellement dans le Nord de la Pologne (où ceux-ci parlent également polonais) et au Canada.
Leslovince (vieux-poméranien), aujourd'hui éteint, se parlait enPoméranie.
Lepolabe, aujourd'hui éteint, se parlait dans certaines régions de l'Allemagne et de la République tchèque (vallée de l'Elbe).
quatre dénominationspolitiques correspondant à quatre des états issus de la dislocation de laYougoslavie : - lebosnien, parlé par 2,5 millions de locuteurs enBosnie-Herzégovine ; - lecroate, parlé par 7 millions de personnes enCroatie et enBosnie-Herzégovine ; - lemonténégrin, également appelé « serbe » auMonténégro, où, lors du recensement de 2003, 63 % des citoyens ont déclaré parler la langue serbe et 22 % ont déclaré parler monténégrin, et à la rubrique identité, 43 % s'identifiaient comme Monténégrins, et 32 % comme Serbes, ce qui implique que 21 % des citoyens du pays se définissent comme des Monténégrins de langue serbe ; - leserbe, parlé par 9 millions de locuteurs : 7,5 millions enSerbie, 1,5 million enBosnie-Herzégovine, auMonténégro et enCroatie.
Lebulgare a 9 millions de locuteurs, essentiellement enBulgarie, en Macédoine du Nord et en Grèce.
Lemacédonien a 2,5 millions de locuteurs, essentiellement enRépublique de Macédoine et est parfois considéré comme un dialecte bulgare.
Depuis un siècle au moins on constate que des éléments génétiquement apparentés unissent l'indo-européen et l'ouralien, mais dans une période (paléolithique) antérieure à l'apparition des deux groupes en question. Depuis les années 1980, l'hypothèse est avancée que leslangues balto-slaves, baltes et slaves présentent unsubstratouralien[3]. Cette théorie est controversée pour les domaine initiaux du proto-slave et du proto-balte, notamment par défaut de fondements linguistiques philologiques. Alors que les locuteurs baltes et surtout, des siècles plus tard, les locuteurs slaves se sont disséminés vers le nord et vers l'est à partir de leur patrie d'origine, ils ont rencontré des locuteurs de langues non-indo-européennes y compris mais probablement pas uniquement l'ouralien. Selon la linguisteSarah Grey Thomason(en), au moins deux types de preuves historiques indiquent que les locuteurs de diverses langues ouraliennes sont passés aux langues baltes et slaves à mesure que les groupes indo-européens ont pris le contrôle de nouvelles régions. Le premier type de preuve implique des inférences de la géographie linguistique. En particulier, enRussie, les langues ouraliennes sont parlées dans des zones relativement petites, isolées les unes des autres et présentent ainsi une image classique des îles linguistiques, des zones reliques dans une mer derusse. La conclusion historique évidente, puisque les immigrations en petits groupes peuvent être exclues (au moins avant les réinstallations soviétiques) est que ces îles sont les vestiges d'une présence ouralienne autrefois répandue dans le nord-est de l'Europe[3]. Le second type de preuve historique est documentaire, bien qu'il soit fragmentaire pour les périodes plus anciennes. Les premières chroniques montrent des peuples slaves et ouraliens en contact vers 862. L'expansion slave a probablement établi de tels contacts au moins dès leVIe siècle après J.-C.[3]. Ces considérations (sur une période récente, protohistorique) ne concordent pas avec la phonologie et le lexique des langues baltes et slaves, dont on a mis en évidence les rapports à l'intérieur d'un sous groupe dit "du nord" de l'indo-européen (V. I. Georgiev).
Des linguistes[Qui ?] maintiennent que le groupe de langues slaves diffère de celui des langues baltes. Les peuples baltes vécurent dans une plus vaste région autour et au sud de lamer Baltique. Vers leVe siècle, les peuples slaves, en partant de l'actuellePolésie, centre ancien de leur aire de répartition initiale, engagèrent des migrations vers le sud-est, vers le nord et vers l'ouest, se divisant en trois branches linguistiques. Ces linguistes expliquent que les similitudes entre les deux groupes sont l'effet de la migration slave vers le nord-ouest et de la proximité de ces peuples. Avant leIXe siècle, on présume que les Slaves partageaient tous une langue à peu près identique appelée leslave commun, mais aucun écrit avant860 ne peut le prouver. À cette époque, le princeRastislav deGrande-Moravie demanda àCyrille et Méthode de créer un alphabet pour traduire des ouvrages religieux dans sa langue. Ainsi naquit l'alphabet glagolitique, utilisé pour écrire dans une langue que l'on nommevieux-slave ou slavon.
Vers la fin duIXe siècle, on décida de transcrire leglagolitique encaractères grecs, mais comme cet alphabet s'avérant insuffisant pour rendre tous les sons reproduits dans l'alphabet glagolitique, on y rajouta des lettres empruntées à l'alphabet hébreu. Cet alphabet reçut le nom d'« alphabet cyrillique », en l'honneur desaint Cyrille, qui fit considérablement avancer la littérature chez les slaves. Pendant plusieurs siècles, dans les territoires méridionaux, on utilisa leslavon d'église comme langueliturgique. Dans les territoires slaves occidentaux, on utilisa l'alphabet latin dès leXIe siècle, ce qui causa peu de temps après la disparition du slavon d'église pour cette région alors qu'on le garda en usage jusqu'auXVIIIe siècle dans l'Est.
Les Slovènes furent les premiers à délaisser le slavon auXVIe siècle, et les Serbes suivirent le mouvement au début duXIXe siècle. Vers 1850 apparut le concept deserbo-croate oucroato-serbe, s'appuyant sur la grande proximité entre lecroate, écrit en alphabet latin par lesCroates catholiques, et leserbe, écrit en cyrillique par lesSerbes orthodoxes. Après la disparition de laYougoslavie, les conflits entre les Serbes et les Croates mirent fin au regroupement de ces langues ; bien que les différences soient relativement minimes, on distingue de nouveau le bosnien, le croate, le serbe et le monténégrin, parfois regroupées et enseignées sous l'acronyme BCMS (bosnien-croate-monténégrin-serbe par ordre alphabétique).
La langue utilisée par tous ces peuples avant leur période historique (leproto-slave) conserva la majeure partie du système decas indo-européen, bien que l’ablatif ait fusionné avec legénitif. En plus desnombressinguliers etpluriels, le slavon d’église possédait un nombreduel, qui n'est conservé qu'en slovène et en sorabe, même si des résidus du duel nominal soulignent les substantifs qui suivent les nombresdeux,trois etquatre enrusse et encroate,bosnien,serbe et tous les nombres enbulgare. Les substantifs et les adjectifs slaves sont toujours degenre masculin, féminin ou neutre. L’ordre des mots est relativement libre, contrairement. par exemple. aufrançais, où le substantif précédant le verbe est généralement le sujet, et le substantif suivant le verbe est généralement l’objet.
Seuls lebulgare et lemacédonien possèdent un article défini, exprimé sous la forme d'un suffixe postposé au substantif ou à l'adjectif (exemple en bulgare :жена (žena) - femme,жената (ženata) - la femme,млада жена (mlada žena) - jeune femme,младата жена (mladata žena) - la jeune femme; exemple en macédonien :брат (brat) - un frère,братот (bratot) - le frère). Les autres langues slaves ne possèdent ni article défini ni article indéfini.
AuXVIIIe siècle, les linguistes slaves se rendirent compte que leurs langues possédaient une catégorie grammaticale beaucoup plus richement exploitée que dans les autres langues indo-européennes : l’aspect verbal. La forme de chaque verbe est aujourd’hui classée soit par l'aspect perfectif ou par l'aspect imperfectif.
Dans les langues slaves, l'aspect perfectif/imperfectif est construit à l'aide d'affixes.
Pour comparer avec le français, on peut dire que les verbes construits avec un affixe perfectif sont ressentis par les Slaves comme l'expression d'une action qui doit parvenir à son terme pour pouvoir avoir lieu (commenaître : un mouvement littéraire peut mettre des années à naître ; si ce mouvement s'arrête en cours de naissance, il n'est pas né). À l'inverse, le même verbe affixé pour être imperfectif sera ressenti comme l'expression d'une action. qui, quelle que soit sa durée, n'aura pas besoin d'arriver à son terme pour avoir lieu (commemanger en français : si on s'arrête au milieu du repas, on a toutefois mangé)[4].
On pourrait alors croire que la différence aspectuelle entre le français et le slave réside dans le fait que le perfectif/imperfectif français dépend du verbe choisi (naître etsortir seraient perfectifs,manger serait imperfectif) alors que le slave pourrait moduler l'aspect (et par là, le sens) du verbe grâce à une simple affixation. Il n'en est toutefois rien : le français peut perfectiver ou imperfectiver un verbe à l'aide d'un contexte adéquat (sortir de la maison est perfectif,sortir en boîte est imperfectif[5]), et le slave peut effectuer la même opération à l'aide desaffixes. La différence est donc non dans le traitement des aspects mais dans la nature de leurs indices : indicescontextuels pour le français, indices morphologiques (affixes) pour le slave. C'est une différence de taille puisqu'elle modifie et organise toute lamorphologie verbale du slave.
Des sixtemps indo-européens (présent,futur,imparfait,aoriste,prétérit etplus-que-parfait), le slave commun a conservé le présent et l’aoriste. On a remplacé l’imparfait et le prétérit anciens avec un nouvel imparfait et le futur indo-européen avec la forme du temps présent du verbe perfectif. La nouvelle forme perfective souligne un aspect de l’action verbale qui n’a pas eu lieu avant le moment de l’énoncé et que le narrateur exprime alors ayant lieu plus tard, habituellement quelque part dans le futur. Un futur, périphrastique retrouvé dans le slave oriental et occidental, exprime une action future sans emphase. Dans les langues slaves méridionales, le futur ne peut se former qu’avec l’aide d’un auxiliaire ou d’une particule.
Le slavon d'Église possédait un ensemble élaboré de formes verbales (jusqu’à 236 pour un verbe imperfectif). Tous sauf le croate, le serbe, le macédonien et le bulgare ont perdu les temps aoristes et imparfaits. Dans ces langues, le parfait ancien indiquait une action passée n’ayant pas été vue par le narrateur. On utilisait la forme parfaite dans les autres langues slaves pour indiquer un temps autre que le présent, plus souvent le passé mais aussi en conjonction avec une forme auxiliaire pour indiquer le conditionnel (comme en russe et en tchèque) ou même le futur (comme en slovène). Le tchèque et le polonais ont aboli l’emphase et la tonalité, le premier ayant une emphase non distinctive sur la syllabe initiale et le dernier sur l’avant-dernière syllabe. Cette règle comporte néanmoins quelques exceptions :
les verbes conjugués au passé avec la première ou la deuxième personne du pluriel :zrobiliśmy (nous avons fait) — accent sur l'antépénultième.
les verbes conjugués au conditionnel :zrobiłbym (je ferais) — accent sur l'antépénultième.
les verbes conjugués à la première ou la deuxième personne plurielle du conditionnel :zrobilibyśmy (nous ferions) — accent sur la syllabe précédant l'antépénultième.
certains mots issus dulatin (exemple :matematyka) (mathématiques) — accent possible sur la syllabe précédant l'antépénultième bien que cet usage tende à se perdre.