Julius Robert-Mayer, benjamin des fils d'un pharmacien de Heilbronn, est issu d'une famille bourgeoise apparentée aux humanistesPhilipp Melanchthon etJohannes Reuchlin.
Alors que ses deux frères aînés Friedrich (1805–1872) etGustav Mayer (1810–1852) embrassaient comme leur père la profession de pharmacien, Robert Mayer étudia de 1832 à 1837 la médecine à l’université de Tübingen, qui l’exclut pour deux années (1837 et 1838) pour avoir été reconnu membre d'une société secrète étudiante et« s’être présenté au bal du Musée dans une tenue inconvenante. » Après un stage àParis (1839-40), il se fit engager comme médecin à bord d’unclipper néerlandais, leJava, en partance pourBatavia. Quoiqu’initialement indifférent aux éléments, certains phénomènes naturels (notamment le fait que les vagues soulevées par la tempête sont plus chaudes que l'eau de la mer calme) le portèrent à la méditation sur les questions dechaleur et lui firent notamment se demander« si la chaleur émise directement (la chaleur de combustion) provient exclusivement de la combustion, ou si elle résulte de sources de chaleurs directes et indirectes. » À son retour, en février 1841, Mayer décida de se consacrer à la solution de ce problème.
Il revint donc en 1841 à Heilbronn, fut recruté comme chirurgien de district, et épousa l'année suivanteWilhelmine Closs(de) (1816–1899). En 1842, le couple emménagea au n°13, Kirchhöfle. Il retrouva un ami, le professeur de sciences mathématiques et physiquesCarl Wilhelm Baur(de), dont il avait fait la connaissance à Paris[2].
Mayer soupçonnait que le corps humain émet moins de chaleur lorsqu’il fait chaud, car il avait constaté par sa pratique médicale que le sang veineux prend sous les Tropiques une couleur rouge clair inhabituelle, qu'il attribua à une consommation d'oxygène moindre[3].
Il adressa auxAnnalen der Physik dePoggendorff une communication intitulée « Sur l’évaluation qualitative et quantitative de la chaleur », où il postule un principe général de « conservation de la force thermique. » Comme elle comportait encore plusieurs erreurs, elle ne fut pas publiée de suite. Sans se décourager, Mayer poussa son idée et prit l’attache d'un professeur de physique de Tübingen, Johann-Gottlieb Nörrenberg, qui se défia de son hypothèse, mais lui conseilla vivement d'en donner des preuves expérimentales.
Lorsque l’eau dissipe sa vitesse en bouillons etremous, elle s’échauffe, preuve que sonénergie cinétique doit se convertir enénergie thermique. Si Mayer ne parvint pas à le montrer, il mesura l’équivalent mécanique de la chaleur et publia le résultat de ses mesures dans le cahier de mai 1842 desAnnalen der Chemie und Pharmacie deJustus von Liebig, sous le titre « Remarques sur les forces de la Nature inanimée[4]. » Dans son opuscule « Mémoire sur le mouvement organique dans ses rapports avec la nutrition » (1845, trad. en français 1872), il améliora la précision de ses mesures, estimant d'abord l’équivalent mécanique de1kcal à 365 000 pond-mètres, puis à 425 000 pond-mètres (la valeur exacte est de 427 000 pond-mètres). L’existence de ce coefficient d'équivalence implique que le travail mécanique et la chaleur peuvent s'exprimer avec les mêmes unités, qu'elles ne sont que différentes formes d'une mêmegrandeur physique : l’énergie. Cette idée constitue le « premier principe de la thermodynamique » et annonce un principe plus général : celui de laconservation de l'énergie, formulé parHermann von Helmholtz en 1847.
Mayer était parfaitement conscient de l’importance de sa découverte, mais son dédain du langage scientifique, sa tendance aux spéculations et sa religiosité l’écartaient du monde savant. Les physiciens contemporains dénigrèrent son principe deconservation de l'énergie. Il fut même l’objet d'attaques indignes de la part des physiciensHelmholtz etJames Joule : Mayer était jugé insuffisamment qualifié pour débattre de questions de physique.
Après la mort, coup sur coup, de ses deux enfants en 1848, Mayer sombra dans la démence. Sur une tentative de suicide le 18 mai 1850, il fut interné àKennenburg près Esslingen puis dans la clinique psychiatrique du château deWinnenden. Il quitta cet établissement brisé psychiquement. À la mort de son frère Gustav en 1852, il prit en charge ses deux nièces[5]. Il ne reparut sur la scène publique qu'en 1860, mais sa réputation scientifique était retombée. Elle ne bénéficia que d'une reconnaissance tardive, et Mayer n'en éprouvait plus de plaisir : sa foi dans la science s'était évanouie. Il demeura dans sa retraite domestique, consacra ses dernières années à la médecine de ville et mourut en 1878 à 63 ans.
LaDeutsche Film AG a tourné un film sur sa vie :Robert Mayer – Der Arzt aus Heilbronn, dont la première projection s'est tenue[6] le 28 octobre 1955.
La Maison de l'Histoire de Heilbronn a consacré plusieurs expositions à la famille Mayer, dont une montrait la maquette de l'appareil circulatoire que Robert Mayer avait construite en 1850.
Ueber dasSantonin : eine Inaugural-Dissertation, welche zur Erlangung der Doctorwürde in der Medicin & Chirurgie unter dem Praesidium von Wilhelm Rapp im July 1838 der öffentlichen Prüfung vorlegt Julius Robert Mayer . M. Müller, Heilbronn 1838
Traductions en français
Mémoire Sur Le Mouvement Organique Dans ses rapports avec la Nutrition, (1872), rééd. Kessinger Publishing (2009)
↑Cf.Christine et Holger Friedrich, « Unbekanntes aus den letzten Lebensjahren des Sinsheimer 1848/49er Revolutionärs Gustav Mayer (1810–1852) in St. Louis (Missouri) »,Kraichgau,no 17,,p. 257–264.
Alwin Mayer Mittasch,Julius Robert Mayers Kausalbegriff - Seine geschichtliche Stellung, Auswirkung und Bedeutung, Springer Verlag (1940)
Karl Höfler,Julius Robert Mayer als Physiologe, (1942)
Hermann Schüller,Am Pulsschlag der Welt - Julius Robert Mayer entdeckt die Energie Gebundene Ausgabe, Ebner (1947)
Peter Buck,Robert Mayer - Dokumente zur Bergriffsbildung des Mechanischen Äquivalents der Wärme, Franzbecker (1980)
Robert-Mayer-Bibliographie, bearbeitet von Gisela Eisert (= Kleine Schriftenreihe des Archivs der Stadt Heilbronn; 10). Heilbronn 1978.
Helmut Schmolz(de),Hubert Weckbach(de):Robert Mayer. Sein Leben und Werk in Dokumenten (= Veröffentlichungen des Archivs der Stadt Heilbronn Band 12), Heilbronn 1964.
Eugen Dühring:Robert Mayer. Der Galilei des neunzehnten Jahrhunderts. Verlag Ernst Schmeitzner, Chemnitz 1880 (Digitalisat)
Karl-Eugen Kurrer:Nichts wird aus nichts. Nichts wird zu nichts. Zum 200. Geburtstag von Robert Mayer. In:Stahlbau(de) 83. Jg., 2014, H. 12, S. 915–918.