Jules Michelet est issu d'une famille catholique. Son père, Jean François Fursy Michelet (1770-1846), était originaire de Laon. Voulant apprendre le métier d'imprimeur, il est venu à Paris et est entré à l'Imprimerie des Assignats, place Vendôme, en octobre 1792, puis à l'Imprimerie nationale pendant la Terreur. Après le 9 thermidor an II (27 juillet 1794) il a fondé une imprimerie avec des fonds qu'il a empruntés à son père, Félix Michelet (1747-1815), qui l'avait rejoint à Paris. Le 29 mars 1795, Jean François Furcy Michelet a épousé une Ardennaise, Angélique Constance Millet (1761-1815), de 9 ans son aînée, qu'il avait connue lorsqu'elle était venue rendre visite à son oncle à Laon. Jean François Furcy Michelet avait installé ses presses dans une chapelle déconsacrée (dépendant d’un anciencouvent de religieuses de Saint-Chaumont), 14rue de Tracy, où il produit à cette époque desassignats[5]. Jules Michelet y naît le. Son père, Jean François Furcy Michelet, maître-imprimeur est ruiné par le décret de Napoléon du qui limite sévèrement le nombre des presses parisiennes[6] et emprisonné à laprison Sainte-Pélagie pour dettes impayées en 1808. Sa mère, Angélique Constance Millet, est une femme pieuse et austère originaire d'une famille paysanne deRenwez, un village des Ardennes[7]. Après 1812, Jean François Furcy Michelet n'a plus exercé son métier et a été obligé de vivre de travaux dérisoires. La famille a connu la pauvreté. Constance Millet est morte trois ans plus tard, dans la nuit du d'hydropisie. Jules Michelet raconte dans son livre « Ma jeunesse » que cette nuit-là il traduisait un texte deSénèque sur la fragilité de la vie humaine[8].
Initié par son père au travail de l'imprimerie, Jules a la possibilité d'entrer à l’Imprimerie impériale où une place lui est offerte. Cependant, son père refuse, préférant s’imposer des sacrifices pour l’envoyer étudier à l'institution Mélot, tenue par M. Mélot, un ancien maître d’école de campagne qui lui apprend le latin, de 1809 à 1812, puis aulycée Charlemagne, dans la classe de troisième où il a pour maître Andrieu d'Alba[6] jusqu’à 1816. Jules y poursuit des études de lettres. Licencié ès lettres le, il peut entrer comme répétiteur à l'institution Briand.
Après quelques remplacements aulycée Charlemagne, il est nommé professeur d’histoire aucollège Sainte-Barbe-Rollin à Paris le[13]. Cette période est des plus favorables pour les érudits et les hommes de lettres en France[13]. Michelet a de puissants appuis enAbel-François Villemain etVictor Cousin, entre autres[14]. Bien qu’il ait des idées politiques fermes que lui a transmises son père — unrépublicanisme fervent teinté deromantismelibre-penseur —, il est d’abord et avant tout un homme de lettres et un enquêteur sur l’histoire du passé. Il appartient à cette école qui pense que l’histoire doit être avant tout un cours d’enseignement philosophique[15]. Ses premiers ouvrages sont des manuels scolaires destinés en premier lieu à ses élèves. Il publie tout d’abordTableau chronologique de l’histoire moderne de 1453 à 1739 en 1825, puisTableaux synchroniques de l’histoire moderne de 1453 à 1648 en 1826. Son ouvrage suivant,Précis d’histoire moderne, publié en 1827, est un livre solide et soigné, meilleur que tout ce qui est paru auparavant, écrit dans un style sobre et néanmoins captivant. Le de la même année, il est nommémaître de conférences de philosophie et d'histoire à l’École préparatoire, future École normale supérieure[16]. Sa nomination à l’École normale lui vaut en outre d’être choisi pour enseigner l’histoire àLouise d'Artois, fille ainée du duc d’Artois, future régente de Parme[17].
Une leçon de Michelet au Collège de France. Peinture deFrançois Flameng ornant le péristyle du premier étage à la Sorbonne, fin duXIXe siècle.
LaRévolution de Juillet, qui porte au pouvoir ses professeursAbel-François Villemain etFrançois Guizot, permettent à Michelet, qui avait perdu sa royale écolière à la chute des Bourbons, de retrouver la place de précepteur royal de laprincesse Clémentine, future duchesse de Saxe-Cobourg[17], puis en octobre celle de chef de la section historique auxArchives nationales[17], ainsi que le titre de professeur suppléant deGuizot à laFaculté des lettres de Paris de 1833 à 1835[17], ce qui lui donne accès à une riche documentation historique et lui permet d'étayer et d'approfondir ses idées[16]:182.
En 1831, sonIntroduction à l’histoire universelle se démarque des ouvrages précédents par le style. Elle met en évidence ses capacités de synthèse et son talent d’écrivain, ainsi que ses étonnantes qualités de visionnaire[18], qui font réfléchir, mais le rendent aussi moins digne de confiance en tant qu’historien. Il y expose sa vision de l’histoire comme un long combat de la liberté contre la fatalité[19].
Peu après, il commence son œuvre majeure, l’Histoire de France, qui va l'occuper pendant les trente années suivantes. Il accompagne cette production de nombreux autres livres, surtout d’érudition, tels que :
lesŒuvres choisies de Vico (1835, 2 volumes), en particulier une traduction libre deScienza nuova deGiambattista Vico de 1744 sous le titre :La Science nouvelle, ou Principes de la philosophie de l’Histoire, avec une biographie de l’auteur ;
Mémoires de Luther écrits par lui-même traduits et mis en ordre par Michelet (1835) ;
Origines du droit français (1837) ;
Histoire romaine : république (1839) ;
Le Procès des Templiers (1841), second tome en 1851.
Ces ouvrages, et principalement lesOrigines du droit français, sont écrits dans la première manière de Michelet, c’est-à-dire dans un style concis et énergique, capable de donner relief aux sujets les plus arides et de revivifier le passé[20]. Il dit de lui-même :« Augustin Thierry avait appelé l’histoire narration ;Guizot, analyse ; je l’appelle résurrection »[21].
Depuis, suppléant de Guizot, il professe des cours à laSorbonne à forte tonalité anglophobe, avivée par son voyage en Angleterre d'août à septembre qui le met en contact avec larévolution industrielle et la misère ouvrière urbaine. Il fait de l'Angleterre la préfiguration de l'Europe, voire du monde futur[22].
1838 est une année très importante dans la vie de Michelet. Il est dans la plénitude de ses moyens, ses études ayant nourri chez lui son aversion naturelle envers les principes d’autorité et les pratiques ecclésiastiques, et à un moment où l’activité accrue desjésuites suscite une inquiétude réelle ou feinte, il est nommé à la chaire d’histoire auCollège de France, donnant sa leçon inaugurale le devant le ministre de l'Instruction publiqueSalvandy[5]:39. Assisté de son amiEdgar Quinet[b], il commence une violente polémique contre cet ordre impopulaire et les principes qu’il représente, polémique qui range leurs conférences, surtout celles de Michelet, parmi celles qui avaient à l’époque le plus de succès[24]. Les textes de ses conférences, plus religieuses qu’historiennes ou littéraires, parurent dans trois livres, où il dénonçait la trahison de l’Église romaine face au peuple :
en 1843,Des jésuites en collaboration avecEdgar Quinet ;
Ces livres ne sont pas encore empreints du style apocalyptique qui, en partie emprunté deLamennais, caractérise les derniers ouvrages de Michelet, mais ils contiennent en prémices la presque totalité de son curieux credo éthique, politique et religieux – un mélange deromantisme[25], appuyé par les arguments les plus excentriques et par une grande éloquence.
S’étant rendu également insupportable aux camps clérical et libéral, qui l’accusaient, le premier, de vouloir la mort du christianisme, le second de vouloir le « communisme intégral », la monarchie agonisante avait suspendu son cours auCollège de France par une décision ministérielle du[23],[26]. Pour autant, lors de larévolution de 1848, tout comme il s’était tenu, quoique de cœur avec les combattants, à l’écart des glorieuses de juillet 1830[c], il ne sera pas de ceux qui, en février 1848, sont entrés, comme Quinet, aux Tuileries, un fusil à la main. De petite taille, de santé fragile, Michelet n’était pas un homme d’action. Il redoutait le bruit et les foules, préférant le silence, la solitude, le travail paisible du cabinet[27]. Au contraire de nombreux autres hommes de lettres, il n’accepte pas l’offre qui lui est offerte d’entrer dans la vie politique active[d]. Les débordements de cette révolution, les tirs de la troupe sur le peuple notamment, le convainquent que la démocratie ne sera possible que lorsqu’une fois qu’elle sera définie et enseignée à l’ensemble des citoyens[28].
Il se consacre avec plus de force à son travail littéraire. Outre la reprise de sa grandeHistoire de France, momentanément interrompue au sixième volume au règne deLouis XI, il entreprend et termine, pendant les années qui séparent la chute deLouis-Philippe et l’établissement définitif deNapoléon III, une enthousiasteHistoire de la Révolution française.
Lecoup d’État de Napoléon III a pour conséquence de resserrer la censure des voix qui critiquent le clergé et la royauté. Le scénario de la suspension de cours s’était répété sous laIIe République, en 1851, à quelques mois du coup d’État, toujours sous la même accusation[29]. Le, un décret présidentiel le destitue, en même temps que son collègue et amiEdgar Quinet[23]. De plus, refusant de prêter serment à l’Empire, il perd sa place aux Archives[30]. Sa carrière professionnelle s'en trouvera brisée puisqu'il ne retrouvera plus de fonction d'enseignement à la suite de cet épisode.
De la mi-1852 à, il vit àNantes, dans la propriété de la Haute-Forêt, tout près duboulevard qui porte aujourd'hui son nom[31],[32], où il est en contact avec les milieux républicains, en particulier avecAnge Guépin. Il poursuit son histoire de la Révolution française jusqu'à la chute de Robespierre. En, les Michelet partent pour quelques mois en Italie, puis reviennent à Paris[33].
Alors que la rédaction de sa grande œuvre historique se poursuit, une foule de petits livres l’accompagnent et la diversifient. Parfois, il s’agit de versions plus étendues de certains passages, parfois de ce qu’on peut appeler des commentaires ou des volumes d’accompagnement. Avec le peintre d'histoireErnest Meissonier, il pousse le peintre paysagistePaul Huet à se présenter à l'académie des Beaux-Arts, mais il ne fut pas admis.
À la suite de deux attaques d'apoplexie survenues en 1871 à Pise et à Florence, Jules Michelet est diminué et a les mains paralysées. Il meurt le d'une crise cardiaque qui l'emporte en quatre jours. Il souhaite être enterré sans cérémonie religieuse et, conformément à ses volontés, est d'abord inhumé au cimetière d'Hyères[5]:219.
À la demande de sa femme, il est inhumé le aucimetière du Père-Lachaise àParis (division 52) lors de funérailles officielles et publiques organisées parGabriel Monod. La police estime que 10 000 personnes suivent le cortège funéraire depuis l'appartement de Micheletrue d'Assas jusqu'au Père-Lachaise[34].
Son tombeau, élevé par souscription internationale et inauguré en 1882, est l’œuvre du sculpteurAntonin Mercié, sur les dessins deJean-Louis Pascal[35]. Lastèle rectangulaire flanquée de colonnes aux angles est couronnée d'unecimaise ornée d'emblèmes et de rinceaux sculptés. Michelet est représenté sous forme degisant (le visage identique au masquefunéraire) étendu sur un sarcophage orné de deux médaillons[36] ; au-dessus de la couche funèbre,Clio la Muse de l'Histoire, drapée, indique du doigt la maxime de l'écrivain, épitaphe gravée dans la partie supérieure du bas-relief :« L’histoire est une résurrection »[37]. Deux jardinières, en gradins, encadrent la vasque d'une fontaine surmontée d'un édicule sur lequel est sculptée en bas-relief une urne penchée, symbole de la pensée à traduire[38].
Château de Vascœuil, où Michelet passa une partie de sa vie.
Marié par obligation le à Pauline Rousseau (1792-1839), fille du ténorJean-Joseph Rousseau(it), il a deux enfants, Adèle (1824-1855)[39] et Charles (1829-1862)[5]:90. Pauline est gaie et jolie, mais manque de culture et Michelet la délaisse rapidement pour son travail et sa carrière. Pauline boit et meurt de la tuberculose, le[40].
Michelet a une liaison platonique à partir de 1840 avec Françoise Adèle Poullain-Dumesnil,châtelaine de Vascœuil et mère de l'un de ses élèves,Alfred Dumesnil, qui se mariera avec sa fille Adèle. De 1842 à 1848, Michelet a deux amours ancillaires avec les bonnes Marie et Victoire[41]:110.
Le, il épouseAthénaïs Mialaret, fille de l'ancien précepteur des enfants deToussaint Louverture. Athénaïs possède des aptitudes littéraires et a des sympathies républicaines, ce qui semble avoir davantage stimulé ses capacités. Le couple a en un fils, Yves-Jean-Lazare, qui ne vit que quelques semaines. Après la mort de Michelet, elle contribue à construire le mythe du« pape de l'histoire »[5]:92.
Michelet semble avoir un goût presque exclusif pour l'œuvre des philosophes des Lumières :Locke (sa thèse latine),Condorcet,David Hume. Mais au-delà de l'évidente filiation intellectuelle qui le relie aux Lumières (Voltaire etMontesquieu étaient parmi ses auteurs favoris), d'autres philosophes l'ont profondément inspiré, et tout particulièrementLeibniz.
Bien queLucien Febvre lui ait donné un rôlepopuliste et progressiste[42], Jules Michelet est resté assez réfractaire sur son siècle. Il affirme dans sonHistoire duXIXe siècle un pessimisme convaincu, proche d'autres historiens de laIIIe République, commeHippolyte Taine etErnest Renan[43].« Notre siècle, par ses grandes machines (l'usine et la caserne) attelant les masses à l'aveugle, a progressé dans la fatalité […]. Au fatalisme de 1815 et d'Hegel succède le fatalisme médical, physiologique […] Socialisme, militarisme et industrialisme »[44]. Il s'oppose à tous lesmonismessocialistes à propos de l'histoire de laRévolution française[45]. DansLe Banquet, il reproche aux socialistes de s'abandonner à la religion en les accusant d'ultra-cléricalisme[46].
Il fut le premier représentant de l'historicisme en France, théorie philosophique selon laquelle les connaissances, les courants de pensée et les valeurs d'une société sont liés au contexte historique de cette société. Dans une citation fameuse, il définit l'histoire comme une« résurrection »[47].
DansQuelques-uns parmi les meilleurs, il traite des sciences naturelles, sujet nouveau pour lui, auquel on dit que sa femme l'a amené. Le premier d’entre eux étaitLes Femmes de la révolution, esquisses détachées de sa grande histoire (1854). Dans le suivant,L’Oiseau (1856), il se découvre une veine nouvelle et très réussie. Ce sujet de l’histoire naturelle n'est pas traité du point de vue de la science, ni de celui du sentiment, ni de l’anecdote ou des commérages, mais de celui du panthéisme démocratique fervent de l’auteur.
Michelet restait fidèle à son système d’études psychologiques. Comme historien, il cherchait l’âme des faits ; dans ces ouvrages il rechercha l’âme de l’insecte et de l’oiseau. Taine écrivit :« L’auteur ne sort pas de sa carrière ; il l’élargit. Il avait plaidé pour les petits, pour les simples, pour le peuple. Il plaide pour les bêtes et les oiseaux. »
Ces œuvres remarquables, mi-pamphlets, mi-traités moraux, se succédèrent de façon ininterrompue pendant cinq ou six ans, à douze mois d’intervalle généralement.L’Amour (1858), un des livres les plus populaires de l’auteur, fut suivi parLa Femme (1860), un livre sur lequel, selon l’Encyclopædia Britannica, on pourrait fonder une critique entière de la littérature et du caractère français, et où Michelet ne fit que distinguer le plaisir sensuel de la passion amoureuse et de l’union de deux cœurs.
À l’homme réconcilié avec les animaux (L’Oiseau etL’Insecte), puis avec lui-même (L’Amour etLa Femme), il ne restait plus qu’à apprendre l’amour de la création. Tels furent les buts deLa Mer (1861) et deLa Montagne, publiés quelques années plus tard. DansLa Mer, Michelet tente notamment d’apporter les preuves historiques de l’existence dessirènes[48].
Dans un autre genre paraît en 1862La Sorcière - qui connaît un« succès de scandale »[49] et fait l'objet de nombre d'interprétations psychologiques et littéraires[50].La Sorcière est développé notamment à partir de l'Histoire de l'Inquisition en France, un ouvrage paru en 1829 qui s'est avéré une des nombreusesforgeries du faussaireLamothe-Langon[51], prétendant se baser un procès en sorcellerie médiéval d’après des documents inédits des archives ecclésiastiques dudiocèse de Toulouse[e], pas plus que n'existe dechasse aux sorcières au Moyen Âge, ce phénomène ne débutant pas avant leXVIe siècle[53]. Les travaux de Michelet ont été régulièrement repris par des historiens et auteurs postérieurs qui, sans examiner la véracité des sources prétendues par Lamothe-Langon, ont répercuté laforgerie au point que les procès de sorcières imaginés par celui-ci sont devenus un standard de l'historiographie de la « chasse aux sorcières »[53]. En outre, Michelet y accrédite la légende dudroit de cuissage, bien qu'aucune trace d'une telle pratique n'ait jamais trouvée dans le droit positif français ni dans aucune archive[54].
Cette série, dont chaque élément était en même temps une œuvre d’imagination et de recherche, n’était pas encore terminée, que les derniers volumes révélèrent un certain relâchement. L’ambitieuseBible de l’humanité (1864), une ébauche historique des religions, a tout sauf peu de valeur. DansLa Montagne (1868), le dernier de sa série d’histoire naturelle, les effets de style du genrestaccato sont poussés plus loin même que ceux de Victor Hugo.Nos fils (1869), le dernier de la suite des petits livres publiés durant la vie de l’auteur, est un traité de l’éducation, fidèle à l’Émile de Jean-Jacques Rousseau[13], écrit avec une grande connaissance des faits et avec les habituelles largeur et profondeur de vue, et cela malgré des capacités d’expression déclinantes.
On retrouve ses pleines capacités dans un livre posthume,Le Banquet, publié en 1878. L’image des populations industrieuses et affamées de la côte ligure est (qu’elle soit vraie ou non) une des meilleures choses qu’ait faites Michelet[55]. Pour compléter cette liste d’ouvrages de tous les genres, on peut mentionner deux volumes d’extraits ou d’abrégés, écrits et publiés à différentes occasions :Les Soldats de la révolution etLégendes démocratiques du Nord, où il expose l’héroïsme des peuples européens pour gagner leur liberté[56].
Origines du droit français, cherchées dans les symboles et formules du droit universel, de Michelet, édité par Émile Faguet en 1890 et sa seconde édition parue en 1900, s'inspire à la fois de Vico et desAntiquités du droit allemand deJacob Grimm[57].
L’historien a joué un rôle dans la popularisation du personnage deJeanne d'Arc. Pour les diverses tentatives de récupération politiques et religieuses du personnage où Michelet joue un rôle important, voir l’articleMythes de Jeanne d'Arc.
C'est surtout concernant Michelet que les historiensFrançois Furet etDenis Richet ont déclaré que« L'histoire après tout, n'est pas une école de morale »[58]. Jules Michelet est considéré, à part pour son étude duMoyen Âge, comme un des auteurs de l'histoire officielle (en raison de son travail historique mandaté parLouis-Philippe et de son manque de rigueur susmentionné sur les faits historiques).
L'historienPierre Chaunu, dans ses entretiens avecFrançois Dosse, porte ce jugement :« Connaissez-vous quelque chose de plus nul que Michelet ? […] le culte de Michelet… soit…, il est vrai qu'il y a de belles pages, mais sur le plan de la recherche historique, c'est nul »[59].
L'historienLouis Chevalier, dans son introduction auxPaysans, deBalzac, lui reproche son manque de rigueur et ses critiques injustifiées :« Les conceptions historiques de Balzac sont celles de la plupart des historiens. Non de tous comme le montre l'indignation de Jules Michelet de voirUn peintre de genre s'amuser à peindre une taverne de valetaille et de voleurs et, sous cette ébauche hideuse, écrire hardiment un mot qui est le nom de la plupart des habitants de la France. Le malheur est qu'aucun historien ne trouvera jamais dansles Paysans de Michelet ce qu'il découvre dans ceux de Balzac […] »[60].
À l'inverse, l'historienLucien Febvre veut rendre justice à Michelet en qui il voit le fondateur de l'histoire de France. Dans son article de 1933 « Michelet, Jules (1798-1874) », il écrit :
« Il ne faut pas oublier ce qu'étaient les études historiques aux environs de 1825, quand Michelet les abordait. Documentation insuffisante ? Mais il a dans ce domaine été un novateur. […] Et un labeur immense, des recherches considérables ont assuré les fondements d'une œuvre qui aujourd'hui nous paraît ruineuse. […] Mieux encore : n'oublions pas que les banalités d'aujourd'hui furent l'originalité presque révolutionnaire d'hier et d'avant-hier. Michelet a si totalement gagné certaines batailles que nous ne songeons même plus qu'il les fallait gagner[61]. »
Dans ses Leçons au Collège de France de à, Lucien Febvre souligne ainsi le caractère novateur du travail historique de Michelet, par comparaison avec les ouvrages d'Augustin Thierry et deFrançois Guizot[61].
Son portrait sur le site internet de l'Académie des sciences morales et politiques résume parfaitement la controverse :« Héros pourVictor Hugo, charlatan si l'on en croitSainte-Beuve, Jules Michelet n'oubliera jamais qu'il est sorti du peuple, ce peuple dont il fera le grand acteur de l'histoire de la France[62]. Chef de la section historique aux Archives nationales, Michelet se trouvait directement au contact des documents. Il vivra donc au cœur de l'histoire, qu'il raconte tout d'abord dans cetteHistoire de France dont les six premiers volumes traitent des origines jusqu'à la fin du règne de Louis XI. Estimant qu'il ne pouvait connaître la monarchie sans étudier la Révolution, dont il se pensait le fils, dont il se voulait le conteur, l'apôtre et le propagandiste, Michelet mettra en chantier, à partir de 1847, cetteHistoire de la Révolution française qu'il achèvera en 1853. Généralités hâtives, parti pris, idée fausse mais qui donne à l'œuvre son mouvement lyrique d'une nation tout entière actrice… On peut certes adresser bien des reproches à Michelet, écrire que sonHistoire de la Révolution est à peine un livre d'histoire, mais le livre se lit toujours et sa récente réédition dans la « collection Bouquins » lui a donné un nouveau public, attiré par l'élan de la plume, l'enthousiasme du conteur, plus que par la vérité historique[63]. »
L'historien du hautMoyen ÂgePierre Riché reproche à Michelet d'avoir propagé le mythe desTerreurs de l'an mille dans le premier chapitre de son livre IV de l'Histoire de France « L'an mille » lorsqu'il écrit :
« Cet effroyable espoir du Jugement dernier s'accrut dans les calamités qui précédèrent l'an mille ou suivirent de près. Il semble que l'ordre des saisons se fût interverti, que les éléments suivissent des lois nouvelles. Une peste terrible dévasta l'Aquitaine, la chair des malades semblait frappée par le feu, se détachait de leurs os et tombait en pourriture… Une famine ravagea tout le monde depuis l'Orient, la Grèce, l'Italie, la France, l'Angleterre. »
Michelet décrit ensuite des scènes de cannibalisme et les paysans qui se réfugient dans les églises et qui font donation de leurs terres aux prêtres et aux moines[65].
Le philosopheMichel Foucault considère que Michelet est coupable d'avoir élevé au rang de mythe la fausse idée selon laquelle l'Église aurait empêché ladissection decadavres :
Lycées Michelet :Arpajon,Lannemezan,Marseille,Montauban,Nantes (lycée professionnel, situé près de la rue de la Haute-Forêt, où Jules Michelet résidait durant son séjour à Nantes en 1852-53),Nice etVanves.
Plusieurs villes françaises ont également consacré unboulevard Michelet (Lyon, Marseille, Nantes…)
À l'étranger : rue Jules-Michelet àBucarest (Roumanie).
Durant lapériode de l'Algérie française, une ville de Kabylie, dans le département d'Alger s'appelaitMichelet. Son nom est aujourd'hui Ain El Hammam, mais les habitants continuent de l’appeler « Michelet ». Une importante rue d'Alger s’appelait égalementrue Michelet, alors.
En 1961 s'est tenue à l'hôtel de Rohan, aux Archives nationales, une exposition placée sous le haut patronage d'André Malraux, ministre d'État chargé des affaires culturelles, et intitulée « Michelet, sa vie, son œuvre 1798-1874 ». Un catalogue de 164 pages recense les 559 pièces exposées.
L’Histoire de France sur le site deGallica. Il y a deux éditions celle d’Albert Lacroix (1876) et celle d’Ernest Flammarion (1893). Pour la première édition, qui comprend 19 tomes, il manque plusieurs volumes. La seconde édition dite « édition définitive, revue et corrigée » en 16 tomes est intégralement disponible dans lesŒuvres complètes de J. Michelet. Tome 1 à 6 Moyen Âge. Tome 7 Renaissance. Tome 8 Réforme. Tome 9 Guerres de religion. Tome 10 Henri IV. Tome 11 Richelieu et La Fronde. Tome 12 Louis XIV et la révocation de l’édit de Nantes. Tome 13 Louis XIV et le duc de Bourgogne. Tome 14 Régence. Tome 15 Louis XV. Tome 16 Louis XV et Louis XVI. Sommaire détaillé sur LA BIBLIOTHÈQUE NUMÉRIQUE UNIVERSELLE[1] Version texte de certains volumes disponible avec le Projet Gutenberg[2]
Les archives de Michelet sont conservées à laBibliothèque historique de la ville de Paris. Elles se composent de volumes de correspondances, de notes ou encore de manuscrits de ses œuvres, constitués par plusieurs dons et legs qui s'échelonnent de 1901 à 1974.
↑En 1841, il a obtenu du ministre Villemain la création, au Collège de France, d'une chaire d’Histoire des Littératures et Institutions et Institutions comparées du Midi de l'Europe, dont Quinet est nommé titulaire. Le cours annoncé sur le Christianisme et la Révolution française ayant soulevé, en 1845, des protestations du ministère qui refuse de l'approuver, Quinet n'accepte pas les changements proposés et quitte sa chaire[23]:67.
↑L’on a même prétendu qu’il leur aurait dit :« Faites l’histoire, nous l’écrirons ! »[27].
↑ De même, en décembre 1851 il ne prendra pas part à la résistance et, sous l’Empire, il n’acceptera aucune candidature politique[27].
↑Les travaux des historiensNorman Cohn et Richard Kieckhefer dans les années 1970 ont démontré que cet ouvrage constitue l'une des plus grandes falsifications de l'histoire, car ces archives n’ont jamais existé[52].
↑Jules Michelet,Examen des vies des hommes illustres de Plutarque proposé à une discussion publique, Paris, Fain,, [1]-26-[1], in-4º(OCLC1176816163,lire en ligne surGallica).
↑Alain Pons, « De la « nature commune des nations » au Peuple romantique : Note sur Vico et Michelet »,Romantisme, Paris,vol. 5,no 9,,p. 39-49.
↑Aurélien Aramini,« Michelet en 1848 : le rendez-vous manqué d’une philosophie de l’histoire », dans Edward Castleton et Hervé Touboul,Regards sur 1848, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté,(ISBN978-2-84867-539-8,DOI10.4000/books.pufc.22639),p. 319-338
↑Gabriel Monod,Jules Michelet par Gabriel Monod : avec un portrait par Boilvin, un sonnet par G. Lafenestre et un fac-simile, Paris, Sandoz et Fischbacher,, 121 p.(OCLC59216945,lire en ligne),p. 39.
↑Guy Belzane,La Sorcière de Jules Michelet : Les Fiches de lecture d'Universalis, Encyclopaedia Universalis,, 20 p.(ISBN978-2-85229-545-2,lire en ligne)
↑Jakob Wüest,Comment ils ont écrit l'histoire : Pour une typologie des textes historiographiques, Narr Francke Attempto Verlag,, 434 p.(ISBN978-3-8233-9178-4,lire en ligne),p. 218
René Banon, « Centenaire de la mort d'un historien (Jules Michelet 1798-1874) »,Recueil de l'Académie de Montauban : sciences, belles-lettres, arts, encouragement au bien 1973-1974,3e série,t. 68,,p. 211-229(lire en ligne)
Paule Petitier, « La Semaine sainte de Michelet : l'émergence de l'idée des fédérations à travers les papiers préparatoires de l’Histoire de la Révolution française »,Genesis (Manuscrits-Recherche-Invention),no 46,,p. 105-122(DOI10.4000/genesis.2805,lire en ligne).
Dominique Pety,Les Goncourt et l’Histoire de la société française pendant la Révolution : Michelet modèle ou contre-modèle ?,(lire en ligne),chap. 23,p. 105-122.
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