D'abord perçu comme une continuation de laPremière République, avant de prendre la dénomination officielle d'« Empire français » en1809, il fait suite auConsulat, est entrecoupé par laPremière Restauration avant le rétablissement de son autorité lors desCent-Jours, et est suivi par laSeconde Restauration. C'est le premier des deux empires français établis au profit de la dynastie desBonaparte.
En1799, à l'issue ducoup d'État du 18 Brumaire,Napoléon Bonaparte est nommé Premier Consul. Trois ans plus tard, alors que le pays renoue avec une certaine prospérité, que la paix intérieure règne et que la menace extérieure semble éteinte après la signature de laPaix d'Amiens[3], le Deuxième ConsulCambacérès incite leTribunat à donner à Bonaparte« un gage éclatant de la reconnaissance nationale »[4]. Cela conduit à la proclamation du consulat à vie parplébiscite le. Pour beaucoup, Napoléon apparaît alors déjà« comme un roi à qui il ne manque plus qu'une couronne »[5]. La marche à l'Empire est accélérée par la découverte du complotroyaliste deCadoudal au début de l'année1804, qui aboutit notamment à l'arrestation dugénéral Moreau comme complice et à l'exécution du duc d'Enghien[6],[7].
En coulisses, l'entourage de Bonaparte s'active pour asseoir encore davantage son pouvoir en lui octroyant l'hérédité. L'ancien ministre de la Police,Joseph Fouché, œuvre en ce sens auSénat[6], si bien que le, cette assemblée invite Napoléon à« achever son ouvrage en le rendant immortel comme sa gloire »[8]. Chaque grand corps de l'État se joint peu à peu à cette demande, ainsi le conseil privé du Premier Consul, qui recommande l'établissement de l'Empire le[8], de même que leCorps législatif, par l'intermédiaire deFontanes qui déclare lors d'une cérémonie officielle :« Un empire immense repose depuis quatre ans sous l'abri de votre puissante administration »[9]. Dans le même temps, les partisans de l'Empire comme Fouché ou les frères de Bonaparte,Joseph etLucien, activent leurs réseaux de manière que dans toute la France, les collèges électoraux, les conseils généraux ou municipaux adressent aux institutions parisiennes l'établissement d'une monarchie républicaine[6]. Dans sa correspondance avec le Premier Consul, legénéral Soult fait valoir que cette ambition est partagée par l'armée[10].
La proclamation de l'Empire et l'organisation du nouveau régime
Le,Jean-François Curée dépose une motion demandant auTribunat d'émettre le vœu que Bonaparte soit déclaré empereur et que la dignité impériale soit déclarée héréditaire dans sa famille. Celle-ci est adoptée à l'unanimité moins une voix, celle deLazare Carnot, le suivant[11], tandis que leSénat adopte lui aussi le principe d'un empire héréditaire[8]. Le, une commission de dix membres composée de sénateurs, de ministres et des trois consuls, entame la rédaction d'un projet desénatus-consulte qui est arrêté deux jours plus tard et approuvé par le conseil privé de Bonaparte[12]. Le, ce projet est présenté au Sénat par le conseiller d'ÉtatPortalis, qui exhorte les sénateurs à l'approuver sans discussion :« C'est un beau spectacle que celui d'une nation qui, à peine sortie de la révolution la plus terrible, vient, dans le silence de tous les partis et dans le calme de toutes les passions, choisir elle-même les institutions les plus convenables à sa gloire et à son bonheur »[13].
Cambacérès (au centre du tableau) apporte à Napoléon le sénatus-consulte qui le proclame Empereur.
Le sénatus-consulte est approuvé le à la quasi-unanimité par le Sénat[Note 4], confiant ainsi à Napoléon le gouvernement de la République avec le titre d’Empereur des Français[12]. Des coups de canon sont tirés sur leChamp-de-Mars pour célébrer l'évènement[14], tandis que les sénateurs se rendent auchâteau de Saint-Cloud, oùCambacérès, qui préside l'assemblée, remet le texte au nouvel empereur[15], dans la galerie d'Apollon[14].
La nouvelle constitution ajoute 142 articles à la précédente, mais elle ne modifie pas en profondeur la définition et les fonctions des grandes institutions créées au début du Consulat. LeCorps législatif et leTribunat sont maintenus, de même que leConseil d'État et leSénat. La majorité des articles ajoutés le sont pour définir l'hérédité du trône, le rôle de la famille impériale, et les nouvelles dignités de l'Empire. Ainsi le principe de l'hérédité est fixé : il reprend celui de laloi salique, l'accordant de mâle en mâle, par ordre de primogéniture et dans la descendance directe, naturelle et légitime de Napoléon ou, à défaut, à ses frèresJoseph etLouis[16],[Note 5]. Par ailleurs, la nouvelle constitution crée sixgrandes dignités de l'Empire récompensant les deux anciens consuls et les membres de la famille de Napoléon. Ainsi,Cambacérès etLebrun sont respectivement nommés archichancelier et architrésorier de l'Empire, tandis que Joseph est nommé au titre de grand électeur, Louis à celui deconnétable,Murat à celui degrand amiral etEugène de Beauharnais à celui d'archichancelier d'État. Bien qu'honorifiques, ces dignités donnent accès à plusieurs corps de l'État, comme le conseil privé et le grand conseil de l'Empereur, le Sénat ou encore le Conseil d'État. De même, degrands officiers, militaires ou civils, sont nommés. Lemaréchalat est rétabli et limité à seize titulaires, nommés le, au lendemain de la proclamation de l'Empire[17].
Les décrets du et du fixent les préséances et l'étiquette impériale, tandis que laMaison de l'Empereur est organisée, notamment par la nomination deDuroc comme grand maréchal du palais, deCaulaincourt comme grand écuyer, deTalleyrand comme grand chambellan, deBerthier comme grand veneur, deJoseph Fesch comme grand aumônier et deSégur comme maître des cérémonies[18]. Par ailleurs, l'organisation de l'appareil d'État s'accompagne d'une réforme des ministères. C'est dans ce cadre queJoseph Fouché fait son retour à laPolice[19].
Durant le mois de, le peuple se prononce parplébiscite, mais uniquement sur la question de l'hérédité de l'Empire qui doit être approuvée et non sur la constitution dans son ensemble. Comme lors des précédentes consultations, le résultat est sans appel, avec un total de 3 524 254 oui contre 2 579 non[20],[Note 6]. Le résultat définitif de ce plébiscite est proclamé au nom duSénat le suivant parFrançois de Neufchâteau[21].
La République ne disparaît pas immédiatement dans les actes officiels de ce nouveau régime politique : la référence à la République perdure un temps, dans le serment de l'Empereur lors de son sacre (), dans l'énoncé officiel des lois (jusqu'en), dans les actes d'état civil (jusqu'à fin 1805), et sur les pièces de monnaie (leFranc Germinal, jusqu'en 1808). Le sénatus-consulte du supprime leTribunat et modifie laConstitution de l'an XII qui a établi ce régime impérial. Les lois proclamées commençaient jusqu'à cette date par « NAPOLÉON, par la grâce de Dieu et les constitutions de la République, EMPEREUR DES FRANÇAIS, à tous présens et à venir, SALUT ». Après, on trouve l'énoncé suivant : « NAPOLÉON, par la grâce de Dieu et les constitutions, EMPEREUR DES FRANÇAIS, ROI D'ITALIE et PROTECTEUR DE LA CONFÉDÉRATION DU RHIN, à tous présens et à venir. SALUT ». L’Empire français devient le centre d'un système politique continental, qui lui associe des États vassaux, sous l'autorité suprême d'un seul homme, Napoléon.
Le, Napoléon signe un décret qui établit la préfecture du département de la Vendée en la ville deLa Roche-sur-Yon, qui est ainsi refondée par un grand projet urbanistique. Cet acte vise à mettre un terme à l'instabilité de laVendée.
Le, la première cérémonie de remise de laLégion d'honneur a lieu.
Le :Le Sacre de Napoléon, dû àDavid (1807) ; cette scène, reconstituée par David à partir de ses croquis, montre le moment où Napoléon prend des mains dePieVII la couronne impériale pour en coiffer sa femme l’impératrice Joséphine.
Napoléon Ier est sacré empereur en lacathédrale Notre-Dame de Paris par le papePieVII. Il est réellement sacré, puisque le sacre consiste à être oint par lesaint-chrême, ce qui fut fait effectivement par le pape aux endroits habituels pour les souverains. Ainsi, le fait qu'il plaça lui-même la couronne au-dessus de sa tête n'a rien à voir avec le sacre, puisque la couronne n'est qu'un objet représentant le pouvoir impérial, tout comme le globe ou l'épée.
N'étant pas pratiquant, l'Empereur ne communie pas lors de lamesse. Il se couronne donc lui-même comme évoqué plus haut, se souvenant sans doute de l'épisode ducouronnement impérial deCharlemagne. Il couronne ensuite son épouseJoséphine, qui devient alors impératrice. Cette scène est représentée par le célèbre tableau deJacques-Louis DavidLe Sacre de Napoléon.
Le sacre impérial est lourdement chargé ensymboles. Le passage de laRépublique à l’Empire nécessite la création d’armoiries impériales, ainsi que la création d’objets symboliques destinés à établir une tradition auparavant inexistante. Napoléon, qui se veut rassembleur, décide d’associer aux symboles de son règne les images qui ont pu représenter auparavant laFrance, ainsi que les pouvoirs forts européens.
Lesabeilles sont censées rappeler lesMérovingiens, et leur disposition sur les armoiries et le manteau impérial doit rappeler lesfleurs de lys desCapétiens. La main de justice, utilisée par lesCapétiens lors des sacres royaux, doit faire apparaître que l'Empereur est l’héritier de leur pouvoir. Napoléon veut montrer qu’il est le fondateur de la « quatrième dynastie », celle desBonaparte, après les Mérovingiens, lesCarolingiens, et les Capétiens. D'autres symboles utilisés pendant le sacre sont chargés de valeurs morales. Ainsi Napoléon tient-il un moment le globe de Charlemagne ; il porte la couronne de ce même empereur. Son épée et son sceptre sont dits « de Charlemagne » : ils ont été en réalité utilisés depuis plusieurs siècles par lesValois puis lesBourbons lors de leurs sacres.
L’aigle est choisi en référence aux aigles romaines, portées par les légions, mais il est également le symbole de Charlemagne, l’aigle éployée. La couleur rouge du manteau impérial est une référence directe à la pourpre de l’imperium romain. Napoléon se pose ainsi en héritier de l’Empire romain et de Charlemagne.
Serment prononcé parNapoléon Ier lors de son sacre :
« Je jure de maintenir l'intégrité du territoire de la République ; de respecter et de faire respecter les lois du concordat et la liberté des cultes ; de respecter et faire respecter l'égalité des droits, la liberté politique et civile, l'irrévocabilité des ventes des biens nationaux ; de ne lever aucun impôt, de n'établir aucune taxe qu'en vertu de la loi ; de maintenir l'institution de la légion d'honneur ; de gouverner dans la seule vue de l'intérêt, du bonheur et de la gloire du peuple français. »
Napoléon devient aux yeux du peuple unchef d'État représentant à la fois le consensus politique d'une nation et unmonarque choisi et protégépar la grâce de Dieu. Toutefois, il est considéré à l'étranger comme l'héritier d'une révolution fondamentalement antimonarchique. Cette ambiguïté est sans aucun doute le point faible du régime.
C'est par ses victoires et alliances militaires que Napoléon Bonaparte parvient à faire de l'Empire la puissance dominante de presque la totalité de l'Europe continentale, brisant successivement les différentes coalitions que les souverains de l'Europe, soutenus militairement ou financièrement par l'Angleterre, lui opposent.
Le, l'avant-garde autrichienne du généralMack (60 000 hommes) entre sur le territoire de la Bavière, occupant la capitaleMunich le avant de se positionner autour d'Ulm, 120 kilomètres à l'ouest de Munich, pour barrer la route aux Français. Ayant fixé les Autrichiens par des démonstrations de la cavalerie de Murat à l'ouest, la Grande Armée enveloppe les Autrichiens par le nord et assiège Ulm dès le. Sans perspective d'être secouru par l'armée russe, Mack capitule le après que Munich est libéré par Bernadotte[24].
Le, la Grande Armée entre à Vienne, que les coalisés ont choisi de ne pas défendre.
À la nouvelle de la défaite d'Ulm, l'archiduc Charles est contraint de se replier surVienne, la Grande Armée entre en Moravie, mais elle ne peut empêcher la jonction des troupes de Koutouzov avec celles d'AlexandreIer et deFrançoisIer d’Autriche à Austerlitz.
Napoléon Ier veut faire croire à l'ennemi qu'il est trop faible pour le pousser à une offensive téméraire pour le vaincre. Pour ce faire, il utilise de nombreuses ruses (organiser le repli de ses troupes lors d'affrontements ou d'escarmouches, demander à être reçu par les autres empereurs pour un semblant de négociation, etc.). Les ennemis pensent alors que Napoléon ne dispose que de 40 000 hommes. Koutouzov n'en est pas persuadé, mais les jeunes généraux veulent briller devant leur empereur, et foncent dans le piège…
Le, à labataille d'Austerlitz, malgré son infériorité numérique,NapoléonIer et ses 73 000 hommes infligent une défaite humiliante aux coalisés austro-russes (86 000 hommes), en appliquant son plan considéré comme un chef-d'œuvre tactique.
Dès le lendemain de la bataille, les Autrichiens demandent un armistice, accordé le en échange de l'évacuation du territoire autrichien par les troupes russes. Par letraité de Presbourg (actuelleBratislava) du, l'empereurFrançoisII reconnait la réorganisation française de l'Italie, les titres de rois accordés par Napoléon aux électeurs de Bavière et de Wurtemberg, et l'indépendance des Républiqueshelvétique etbatave sous influence française. L'Autriche multiplie également les concessions territoriales au bénéfice du royaume d'Italie (Vénétie,Istrie,Dalmatie), de la Bavière, de Bade et du Wurtemberg. Enfin, le vaincu s'engage à verser à la France une indemnité de guerre de 40 millions de francs. Pendant ce temps, Napoléon neutralise laPrusse en obtenant une alliance en échange duHanovre britannique occupé par les troupes françaises[25].
L'Autriche hors-jeu, l'Angleterre et la Russie demeurent dans le conflit mais hors de portée de la Grande Armée. Napoléon est cependant décidé à en finir avec lesBourbons-Sicile qui ont engagé leroyaume de Naples dans la coalition contre la France. Le, il porte l'armée de Naples à 40 000 hommes sous le commandement du maréchalMasséna, chargé le de seconder Joseph Bonaparte. Le, Napoléon proclame que« la dynastie de Naples a cessé de régner ». Naples est occupée le, provoquant le départ pour laSicile des souverainsFerdinandIV etMarie-Caroline. Un acte du enregistré au Sénat français nomme Joseph au trône de Naples, faisant référence à un « Grand Empire » pour la première fois dans un texte officiel[26]. Ce même jour, Napoléon fait enregistrer le Statut de la Maison impériale régissant l'état-civil, l'organisation et les devoirs au sein de sa famille, ainsi que pour les grands dignitaires et les ducs de l'Empire[27].
La Prusse n'accepte pas que la suprématie française s’étende, avec laConfédération du Rhin, à ses propres frontières et, le, le roiFrédéric-GuillaumeIII, poussé par la Russie et leRoyaume-Uni, décrète la mobilisation afin de faire la guerre à la France.
Unequatrième coalition contre Napoléon se forme au mois d', composée de la Prusse, du Royaume-Uni, de la Russie, de laSaxe et de laSuède.
Napoléon doit alors préparer une nouvelle campagne militaire. Il concentre son armée sur le Rhin, et le25 septembre, il avance vers laSaxe avec environ 160 000 hommes (effectif de départ, augmentant au cours de la campagne). Le premier choc a lieu lors de labataille de Saalfeld, durant laquelle le princeLouis-Ferdinand de Prusse est tué.
L’avancée rapide de l’armée française est telle qu’elle permet d’annihiler l’armée prussienne, qui comptait 250 000 hommes. En effet,Napoléon et le maréchalDavout la mettent en déroute lors desbatailles d’Iéna et d’Auerstadt, le. L'armée prussienne perd dans la même journée environ 43 000 hommes, et toute son artillerie. Ces défaites jettent lesPrussiens dans le désarroi. Ainsi, on vit500 hussards français commandés par legénéral Lasalle capturer à eux seuls et sans résistance la ville fortifiée de Stettin, le29 octobre. L'armée prussienne n'existe plus.
Le, Napoléon fait son entrée àBerlin à la tête de laGrande Armée. Au total, Napoléon n'a mis que dix-neuf jours du lancement de son attaque sur la Prusse jusqu'à son entrée dans Berlin.
Après cette victoire sur les Prussiens, Napoléon décide d'envahir laPologne prussienne avant que n'arrive l'armée russe. Le dernierpartage de la Pologne ayant eu lieu11 ans plus tôt, les soldats de Napoléon sont accueillis en libérateurs dans toutes les villes et dans toutes les campagnes, d'autant que, parmi eux, se trouvent les anciens deslégions polonaises de l'armée d'Italie deDombrowski. L'insurrection des provinces polonaises contre les occupants prussien et russe fournit à Napoléon 30 000 hommes.
DevantVarsovie, les Russes se dérobent, et refusent de livrer bataille.Murat s'empare dePraga, faubourg de la capitale. Napoléon arrive le àVarsovie. Obligé d'hiverner enPologne, Napoléon passe, ainsi, tout le mois de à Varsovie, où il rencontre la comtesseMarie Walewska. En fait, l'armée française a besoin de repos et de réorganisation ce qui lui interdit d'affronter immédiatement l'armée russe. Elle se replie alors sur la Vistule pour ses quartiers d'hiver en attendant de recevoir les renforts de France. Heureusement, de mémoire de Polonais, jamais l'hiver n'a été aussi clément. Pour les Français, la température est plus douce qu'à Paris en cette saison.
Le général russeBennigsen attaque à la fin du mois de, ce qui oblige Napoléon à engager la terrible et indécisebataille d'Eylau le. Les Russes se replient, malgré de lourdes pertes dans les deux camps.
L'armée française contre-attaque. Le, à labataille d'Heilsberg une charge impressionnante de la cavalerie deMurat contraint l'armée de Bennigsen à se replier à nouveau. Les Français les poursuivent et, le, remportent une victoire décisive à labataille de Friedland. Modèle de manœuvre et de jugement, comparable à Austerlitz dans sa conception, la bataille de Friedland marque la victoire sans appel de l'armée française.
Le, les deux chefs d'État signent, àTilsit, letraité du même nom. La Russie devient alliée de l'Empire français, lui cédant ses territoires méditerranéens deCattaro et desîles Ioniennes, et adhérant auBlocus continental. Le traité est catastrophique pour leroyaume de Prusse : il perd ses territoires à l’ouest de l’Elbe, qui formeront leroyaume de Westphalie, avec, à sa tête, le frère de l’empereur,Jérôme. Il doit céder ses possessions enPologne afin de constituer leDuché de Varsovie, et doit verser une lourde indemnité de guerre. Jamais l’empereur Napoléon n’a atteint un tel degré de puissance.
À partir de la fin de l'année 1807, l'engagement de la France dans les affaires de lapéninsule Ibérique (invasion du Portugal pour le forcer à appliquer le Blocus continental, ingérence dans la crise dynastique espagnole) déclenche laguerre d'Espagne, un conflit brutal qui s'étalera sur plus de six ans, et qui affaiblira l'Empire de manière importante.
Letraité de Fontainebleau entre la France et l'Espagne permet l'intervention de la France dans la péninsule ibérique pour contrôler le Portugal : le roiJeanVI de Portugal s'enfuit le avec sa cour vers leBrésil avec l'aide de la flotte britannique. Quelques mois plus tard et tandis que des troupes françaises dirigées vers le Portugal contrôlent plusieurs villes espagnoles, Napoléon obtient à Bayonne, après l'annonce du soulèvement du à Madrid, l'abdication du roiCharlesIV et le renoncement à leurs droits de son filsFerdinandVII et des frères de ce dernier. Cetraité de Bayonne permet à Napoléon de placer son frèreJoseph Bonaparte sur le trône espagnol. Cependant, le contrôle du pays est rendu très difficile par le soulèvement de la population espagnole - notamment par lesguérillas - ainsi que par l'intervention du Royaume-Uni qui expulse l'armée française du Portugal (Convention de Cintra du). Les armées françaises ne parviendront jamais à soumettre le Portugal.
Plan de la rade d'Alger dessiné en 1808 par le Colonel Vincent-Yves Boutin
Lapiraterie incessante des navires d'Alger, où croupissent environ deux mille esclaves dans troisbagnes[28], excède l'Empereur[29]. Depuis1801, les relations avec la Régence sont particulièrement tendues. Les massacres ou les captivités infligés aux marins et passagers du navire militaire Le Banel, parti de Toulon pour Saint-Domingue, commandé par le lieutenant de vaisseau Joseph-Thérèse Callamand, à la suite de son naufrage le sur lacôte algérienne, près duCap Ténès, suscitent un fort émoi[30]. En, Napoléon envoie une flotte commandée par le contre-amiral Leyssègue devant Alger[31].
La perspective de mettre en échec la politique commerciale et l'influence de l'Angleterre solidement installée àMalte motive également ce nouveau projet de conquête africaine.
Le[32] Napoléon ordonne la reconnaissance des fortifications d'Alger. L'amiralDenis Decrès, ministre de la Marine et des Colonies choisit leColonel Boutin pour recueillir sur place les informations nécessaires. Son rapport[33] est remis le. Les projets d'expédition en Algérie sont ajournés.
Découpage administratif de la France en 1812L’Empire à son apogée en 1812 : en vert foncé, la France ; en vert clair, ses territoires vassaux.
À son apogée en 1811, l'Empire Français compte130 départements et plus de44 millions de sujets. Il est capable de déployer, avec ses alliés, 600 000 hommes contre la Russie. Il maintient une présence militaire étendue enAllemagne,Italie,Espagne et sur leDuché de Varsovie. La Prusse et l'Autriche sont ses alliées. Enfin lesprovinces illyriennes sont directement rattachées à l'Empire, sans être cependant départementalisées (le projet de départementalisation ayant été abandonné en 1811), tandis que laCatalogne est détachée du royaume d'Espagne en pour être directement soumise à l'autorité de l'Empereur.
En,Murat prend le commandement de l'armée française stationnée en Espagne, pour appuyer l'invasion du Portugal. Le, le peuple de Madrid, inquiet de voir la famille royale espagnole convoquée à Bayonne par Napoléon, se soulève contre l'armée française (Dos de mayo). Une terrible répression de la part de Murat s'abat alors dans la nuit du 2 au. De 1809 à 1810, la lutte de la guérilla espagnole est indécise. De 1811 à 1812, les défaites françaises se multiplient en Espagne, tandis qu'une tension diplomatique augmente entre l'Empire français et l'Empire russe, du fait des rivalités économiques amplifiées par la logique du Blocus continental et l'application du traité de Tilsit.
Le, ces tensions croissantes entre la France et la Russie aboutissent à l'invasion du territoire russe par Napoléon et saGrande Armée constituée de soldats de vingt nations. Lacampagne de Russie - tout comme la guerre d'indépendance espagnole de 1808 à 1814- se révèle catastrophique pour l'Empire français. Les russes utilisent latactique de la terre brûlée, qui consiste à détruire leurs vivres et leurs maisons pour éviter que les soldats ennemis ne puissent se ravitailler ou s'abriter. La Grande Armée se dissout quasi totalement (600 000 hommes au départ et environ 30 000 soldats encore opérationnels au retour) tandis que les alliés de la veille redeviennent des adversaires : la Prusse et l'Autriche respectivement en février et en.
En1813, la guerre contre lasixième coalition aboutit à l'expulsion des forces impériales de l'Allemagne (défaite de Leipzig le), à quelques places fortes près. De à, lacampagne de France voit la France envahie par les coalisés. Autrichiens, Prussiens et Russes occupent le pays après l'abdication de Napoléon, le.
Son ultime retour, du au, lors desCent-Jours s'achève par la déroute de l'armée française àWaterloo ().
L’Empire se veut, au moins à ses débuts, l'héritier du Consulat et de la République. Les victoires de son armée exportent dans les pays conquis nombre d'acquis de laRévolution. Lajustice et lasolde seigneuriales sont abolies partout où passe l'armée française. Lesprivilègesaristocratiques sont éliminés sauf enPologne. LeCode napoléonien est introduit dans de nombreux pays, en particulier aux Pays-Bas, en Allemagne et en Italie, rendant tout un chacun égal devant la loi. Il établit le système du jury et légalise ledivorce.
L’Empire est aussi le creuset d'une nouvelle noblesse héréditaire. À l'occasion du redécoupage de la carte de l'Europe auquel se livre Napoléon, sa famille et ses proches reçoivent lestrônes de différents pays d'Europe, tandis que ses principaux collaborateurs sont dotés detitres copiés sur ceux de l'Ancien Régime.
Sous l'Empire, chaqueministre travaille directement pourNapoléon Ier : tous les pouvoirs sont entre ses mains[35]. Ils sont réduits à de simples agents d'exécution dépourvus d'initiative, leur travail consiste à surveiller l'application des lois[36]. Pour aider les ministres, néanmoins débordés de travail, il va être créé des administrations dirigées par des conseillers d'État, appelées Directions générales. Ces dernières sont quasiment autonomes face aux ministères. Ainsi sont créées la Direction générale des Postes en 1804, la Direction générale des Forêts en 1805, la Direction générale des Revues et Conscription militaires en 1806, la Direction générale des Vivres de guerre en 1808, la Direction générale des Mines en 1810, rejoignant les Directions générales créées sous leconsulat[36].
Les institutions locales reposent sur un principe nouveau : gouverner est le fait d'un seul, délibérer celui de plusieurs. Tous les agents du pouvoir sont désormais nommés par Napoléon tandis qu'une pyramide s'installe : département, arrondissement, commune. À la tête du département, un préfet dirige, assisté d'un conseil général qui discute, le dernier mot revient au préfet. Pour l'arrondissement : un sous-préfet qui reçoit les ordres du préfet et d'un conseil d'arrondissement. Le sous-préfet transmet les ordres du préfet au maire dans la commune et au conseil municipal. L'administration locale est entièrement entre les mains du préfet, lui-même nommé et révoqué par l'Empereur qui, à Sainte-Hélène, les surnomme « les empereurs au petit pied ». Tout repose sur le préfet qui est jugé en fonction de l'esprit public qui règne dans son département, sur l'état des routes et le bon rendement de sa conscription.
LesProvinces illyriennes sont créées par le décret du de la réunion de plusieurs territoires hétérogènes (laDalmatie occupée depuis 1806, une grande partie de laCroatie, laCarniole, laCarinthie et un bout duTyrol)[37]. Cette annexion avait pour objectif d'affaiblir l'Autriche, d'interdireTrieste auxBritanniques fermant ainsi toute la côteAdriatique orientale aux marchands anglais et de disposer d'un Étatslave contre leTsar[38].
Le pays est divisé en dix puis en 1811 en sept provinces administrées chacune par un intendant qui a les mêmes pouvoirs qu'unpréfet, ces provinces sont elles-mêmes divisées endistricts avec les équivalents dessous-préfets à leur tête. Tout en haut de l'administration se trouve le gouverneur général assisté d'un intendant général des finances[37].
L'administration met en place les acquis de la Révolution dans ces territoires, mais la plupart ne sont pas acceptés par les populations. L'égalité devant l'impôt est assez mal accueillie par la population habituée à des exceptions sous la domination autrichienne. Laconscription, introduite le, est l'objet d'émeutes en Croatie et de fuite en Autriche ou dans lesîles de Quarnero d'habitants et leur famille fuyant les prochaines levées[38]. La religion fut aussi l'objet de tensions exacerbées par leclergé local qui ne supporte pas la suppression desdîmes[39].
Si lafrancisation est de mise particulièrement dans l'enseignement, les autorités respectent les langues locales et les apprennent[39]. Les autorités comptent particulièrement sur l'enseignement pour assimiler les populations. Par l'arrêté du, chaque commune doit posséder uneécole primaire pour garçons et chaque canton une école primaire pour filles. Plusieurslycées sont prévus avec pour langue d'enseignement exclusive lefrançais, mais sur les sept projets seulement deux sont créés (àLaybach etRaguse). Uneécole supérieure est installée à Laybach. De nombreux Illyriens sont envoyés dans lesgrandes écoles françaises[40].
Art religieux : église de la Madeleine (Paris), nouvelle cathédrale Saint-Vincent (alors Saint-Napoléon) de Mâcon, église Saint-Louis de la Roche-sur-Yon (décidée sous l'Empire, construite sous la Restauration), toutes trois en style néoclassique
↑L'Empire abandonne la devise de la République (« Liberté, Égalité, Fraternité »), sans qu'elle soit remplacée par autre chose : les Armes de l'Empire sont muettes, le grand sceau de l’État n'indique que« Napoléon Empereur des français » ; comme la monnaie, qui a en revanche, sur sa tranche, les mots« Dieu sauve la France ». Les deux ordres nationaux de l'Empire, l'Ordre de la Légion d'Honneur et l'Ordre de la Réunion, ont des devises particulières :« Honneur et Patrie » pour le premier,« Tout pour l'Empire » pour le second.
↑Jusqu'en 1852, date de création duSecond Empire, les historiens et hommes politiques français utilisaient l'expression d'« Empire » seulement pour le régime instauré enFrance parNapoléon Bonaparte en 1804.