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Le nom de laFrance est issu d'unpeuple germanique, lesFrancs.Clovis (466-511), roi desFrancs saliens, scelle par sonbaptême à Reims l'alliance de la royauté franque avec l'Église catholique. Il unit les tribus franques salienne et ripuaire et conquiert un ensemble de territoires enGaule et enGermanie qui sont agrandis par ses descendantsmérovingiens, puis par la dynastie desCarolingiens fondée en 751.Charlemagne en particulier conquiert laBasse-Saxe dans le Nord de l'Allemagne, leroyaume lombard en Italie, et constitue une marche à l'est qui deviendra l'Autriche. L'Empire carolingien est finalement partagé en 843 entre ses petits-fils par letraité de Verdun qui sépare laFrancie occidentale de laFrancie orientale, qui deviendra le royaume de Germanie. La dynastie desCapétiens s'impose définitivement en Francie occidentale à partir de 987.Philippe Auguste et ses successeurs donnent une nouvelle impulsion à l'unification territoriale duroyaume de France et repoussent les frontières orientales du Rhône sur les Alpes et de la Saône sur le Rhin, à partir de l'achat duDauphiné (1349) jusqu'à l'annexion de l'Alsace (1648-1697).
Le nom de France n'est employé de façon officielle qu'à partir de 1190 environ, quand la chancellerie du roiPhilippe Auguste commence à employer le terme derex Franciæ (roi de France)[3] à la place derex Francorum (roi des Francs) pour désigner le souverain. Le mot était déjà couramment employé pour désigner un territoire plus ou moins bien défini, comme on le voit à la lecture de laChanson de Roland, écrite un siècle plus tôt. Dès juin 1205, le territoire est désigné dans les chartes sous le nom deregnum Franciæ, c'est-à-dire royaume de France en latin[4],[5]. On ne peut ainsi parler d'histoire de France, au sens propre, qu'à partir duXIIe siècle[6].
Les Romains étaient les premiers à unifier l'administration de la Gaule en langue latine, laquelle est devenue celle de l'Église. Leconcile de Tours, réuni en 813 à l'initiative de Charlemagne, impose désormais de prononcer les homélies dans les langues vulgaires au lieu du latin.Paris, appelée à devenir la capitale par l'avènement en 987 de ladynastie capétienne, devient un centre universitaire renommé. La culture française connaît un élan nouveau au contact de laRenaissance italienne lors des guerres d'Italie. Elle s'enrichit des débats sur la réforme religieuse et n'est pas par la suite étouffée comme en Italie par une contre-réforme trop rigoureuse. Elle éclot pleinement à compter duXVIIe siècle, développant unclassicisme imprégné decartésianisme. C'est à cette époque que le français prend sa forme moderne sous l'égide de l'Académie française. LeXVIIIe siècle est le siècle de laphilosophie des Lumières, marqué par la promotion de la raison par les philosophes français dans les cours et capitales européennes et qui s'achève par laRévolution française.
L'adoption d'un cadre administratif uniforme (département), le développement rapide du chemin de fer et l'instauration parJules Ferry de l'instruction obligatoire et de l'école gratuite homogénéisent l'espace national, qui connaît dans la seconde moitié duXIXe siècle larévolution industrielle. La recherche et l'industrie françaises s'illustrent particulièrement dans les transports (automobile et aéronautique), dans la chimie et la santé, ainsi que dans l'armement.
La croissance économique se traduit par l'urbanisation de la population, le développement du salariat et l'amélioration du niveau de vie. Le mouvement syndical se structure, les assurances sociales apparaissent et se généralisent après laSeconde Guerre mondiale. La longue crise des années 1930, l'occupation allemande et lareconstruction suscitent la définition d'une politique économique (commissariat général du Plan) qui accompagne la formation de grands groupes de taille européenne voire mondiale. L'économie contemporaine est caractérisée par la tertiarisation des activités et la concurrence vigoureuse des pays émergents.
L'organisation de l'État s'est faite par étapes : instauration de l'armée et de l'impôt permanents à l'issue de laguerre de Cent Ans, mise en place desintendants dans les provinces par lecardinal de Richelieu, unification du droit (Code civil) et du système judiciaire à la Révolution. Le se constitue, par leserment du Jeu de paume, la première unité politique se réclamant du peuple français : c'est l'acte de naissance de l'État actuel. Une précoce tradition étatique explique le développement d'une administration dotée de puissantes prérogatives et animée par des corps d'officiers puis de fonctionnaires jaloux de leur statut, à l'encontre de laquelle se développe volontiers un esprit frondeur[7].
Sur le site duBois-de-Riquet, àLézignan-la-Cèbe, dans l'Hérault, a été découverte l'une des plus anciennes traces humaines connues sur le sol français, datée entre 1,1 et 1,2 million d'années, constituée d'une vingtaine degalets aménagés confectionnés à partir de roches diverses (quartzite, basalte, micro-granite…). Vers 1,15 Ma, lagrotte du Vallonnet, àRoquebrune-Cap-Martin, dans lesAlpes-Maritimes, a livré des vestiges lithiques du même type[8]. À partir d'environ 700 000 ans apparaissent des sitesacheuléens. ÀTerra Amata, àNice, les chercheurs ont trouvé l'un des plus anciens foyers attestés en France, daté de 380 000 ans. Les fossiles humains les plus anciens connus en France sont ceux de l'Homme de Tautavel, dont les restes ont été trouvés dans lacaune de l'Arago, àTautavel, dans lesPyrénées-Orientales. Il a vécu d'environ 570 000 à 400 000 ansavant le présent (AP).
À partir de 350 000 ans AP, l'Homme de Néandertal est présent sur le territoire de la France. Il taille le silex selon laméthode Levallois. Son industrie s'appelle leMoustérien. Sur les sites desEyzies et duMoustier, enDordogne, de nombreux outils ont été trouvés :racloirs,bifaces, pics, ciseaux. Il chasse lebison, l'aurochs, lecheval et lerenne. Vers 50 000 ans AP, il laisse les plus anciennes traces de sépultures connues en France.
À partir de 42 000 ans AP,Homo sapiens arrive en France et occupe les territoires de l'Homme de Néandertal, qui disparait progressivement : c'est l'époque de l'Aurignacien. C'est durant leGravettien qu'apparaissent lesVénus paléolithiques que l'on croit être l'œuvre d'une deuxième vague d'hommes modernes, venue de l'Est[9]. Leshommes de Cro-Magnon sont de remarquables artisans. Ils ont laissé des pointes desagaies en os longues et finement travaillées, des spatules, despoinçons, deslissoirs décorés. Les sites attestant de leur activité sont très nombreux :Bayac,Pincevent, lagrotte de Lascaux, célèbre pour ses 150 peintures et 1 500 gravures, celles deCosquer, deGargas et deChauvet… Le site deLa Madeleine en Dordogne, habité vers leXVIe millénaire av. J.-C. par des chasseurs de rennes et des pêcheurs, a livré desharpons à pointe mobile et a donné son nom à la culture de cette période : leMagdalénien, qui succède auSolutréen.
Durant l'interstadeBölling-Alleröd apparait l'Azilien. Vers, le climat se réchauffe. La fin de la glaciation amène la disparition du renne et du phoque. LeMésolithique est marqué par une culture, leSauveterrien, qui se répand du sud-ouest jusqu'à la Seine. Durant la même époque se manifeste leTardenoisien dans lebassin parisien.
Comme dans le reste de l'Europe, leNéolithique, qui voit l’apparition de l’agriculture et l’élevage, est dû à une diffusion démique : les premiers fermiers néolithiques présents sur le territoire français sont une population très homogène venue d'Anatolie. On observe deux grands courants de néolithisation, le courant danubien (culture rubanée) et le courant méditerranéen (culture de la céramique cardiale), qui sont en réalité le fait d'une seule et unique population colonisatrice issue d'une seule et même source commune qui a conquis la majeure partie de l'Europe, presque sans mélange avec les populations de chasseurs-cueilleurs rencontrés sur le chemin, même longtemps après la séparation des deux courants, et ce jusqu'à son arrivée sur les côtes atlantiques[10]. Au Néolithique moyen (-4800 à -3500), ces deux courants de néolithisation se rejoignent au centre de la France[11].
Parmi les cultures néolithiques seule la culture chasséenne s’est développée sur la majeure partie du territoire français (4350 et 3300 av. J.-C) . Les groupes humains se sédentarisent, donnant naissance aux premiers villages et aux premiers tombeaux mégalithiques :tumulus,cairns,dolmens, etmenhirs (voirallée couverte,culture Seine-Oise-Marne). Les menhirs sont très présents en Bretagne, isolés ou en alignement comme àCarnac (4 km, 2 935 menhirs), ou encromlech comme aupic de Saint-Barthélemy près de Luzenac en Ariège.
Cette population de fermiers néolithiques va être presque totalement remplacée ou assimilée par l'arrivée de nouvelles populations, de la fin duNéolithique au début de l'âge du bronze. Comme pour la colonisation par les fermiers néolithiques, cette migration n'est pas propre au seul territoire français mais concerne l'ensemble de l'Europe. Une migration très importante s'est produite depuis lasteppe pontique (culture Yamna) vers le centre de l'Europe, puis les autres parties de l'Europe à partir de[12],[13] Cette migration a joué un rôle clé dans la diffusion de laculture campaniforme[14],[15]. Ces populations à ascendance des steppes sont présentes sur le territoire de la France actuelle dès 2650av. J.-C.[16],[17],[18]. Les pasteurs nomades que sont leslocuteurs des langues indo-européennes se caractérisent notamment par lamaîtrise du cheval, l'invention de la roue, l'introduction de technologies métallurgiques du bronze et par la mise en place de nouvelles structures sociales. Cet ensemble d'innovations aurait favorisé les sociétés indo-européennes et leurs descendants[19]. Les populations celtiques seraient caractérisées par différents sous-groupes de l'haplogroupe R1b-M269 introduit en Europe par ces migrations indo-européennes[20].
Bien que cela ne s'appuie que sur peu de preuves tangibles on a supposé que la colonisation de la futureGaule par les peuplesCeltes (appelés communément Gaulois par les Romains) originaires d'Europe centrale a débutévers 1300 av. J.-C. avec lacivilisation des champs d'urnes pour se terminervers -700[21]. Il est possible toutefois que ce ne soit essentiellement que l'influence de la culture celtique qui se soit répandue sans être accompagnée d'une colonisation massive. Les études génétiques ont, en effet, montré que les individus de l'âge du bronze et ceux de l'âge du fer se regroupent dans des profils génétiques proches des populations actuelles d'Europe centrale. L'âge du fer n'est pas lié à un nouveau flux de gènes, ce qui semble indiquer qu'il correspond en France à une diffusion culturelle et non démique[22],[23]. Ces conclusions sont en adéquation avec les théories qui font émerger les Celtes de populations issues de laculture campaniforme. Néanmoins, étant donné la grande homogénéité des profils génétiques en Europe à cette période, une migration intra-européenne est difficile à mettre en évidence[22].
Vers la fin duVIIIe siècle av. J.-C., la métallurgie du fer se répand (âge du fer). Une nouvelle aristocratie guerrière se constitue grâce à l'apparition des épées de fer et au combat à cheval. Elle bouleverse l'organisation sociale des Celtes jusque-là agraire et égalitaire. Les « princes et princesses de la Celtique » (Patrice Brun) se font enterrer avec armes et chariots d'apparat, comme àVix enCôte-d'Or (550 à 450 av. J.-C.) (Bourgogne).
Conséquemment au climat vers la fin de l'âge du bronze danois, lesCeltes[24] provenant des régions rhénanes (Rhin - Danube,forêt Hercynienne) étendent leur autorité sur le reste de la Gaule à la fin duVIe siècle av. J.-C. et au début duVe siècle av. J.-C.. C'est le second âge du fer ou période dela Tène. Cette nouvelle période d'expansion correspond à des transformations économiques et sociales. Les guerriers aristocrates peu nombreux sont remplacés par des paysans-soldats regroupés autour d'un chef de clan. L'araire à soc de fer remplace l'araire en bois. Il permet de labourer les terres lourdes du centre et du nord de la France actuelle. Ceci explique en grande partie la colonisation de terres nouvelles, la croissance démographique et les nouvelles invasions qui en ont résulté.
Vers le début du390 av. J.-C., le chef sénonBrennos mène des guerriers celtes (Sénons,Cénomans,Lingons entre autres) en Italie du Nord où ils se joignent à d'autres peuples celtiques, parmi lesquels lesInsubres, lesBoïens et lesCarni. Rome est prise en -390. Les Romains vont contenir ces envahisseurs à partir de la fin de349 av. J.-C..
Les relations commerciales lointaines se développent.Vers 600 av. J.-C., est fondé le comptoir grec deMassalia (Marseille) sur les bords de la Méditerranée par des marins grecs venus dePhocée (lui conférant son surnom toujours usité de « Cité phocéenne »). Lors de cette fondation les Phocéens se heurtent à des tribus celtiques. D'autres comptoirs du même type, avant et après cette date, voient le jour surtout le long du rivage (Antibes dès,Alalia (Aleria) vers). Massalia prend toutefois un ascendant décisif sur ses rivalesvers 550 av. J.-C. avec l'arrivée en masse de réfugiés phocéens, Phocée étant tombé aux mains des Perses. L'influence grecque se manifeste le long des grandes voies commerciales grâce au rôle actif de Massalia. Les tombes princières montrent la présence de luxueux objets provenant du pourtourméditerranéen (notamment d'Égypte), ce qui atteste la dimensioncommerciale de la richesse de cesaristocrates.
La civilisation gauloise connaît une période particulièrement florissante. L'émergence de véritables villes fortifiées (oppida) de dimensions bien plus importantes que les forteresses des périodes antérieures, ou encore l'usage de la monnaie sont des traits caractéristiques de cette civilisation.
AuIIe siècle av. J.-C., se met en place une relative hégémonieArverne caractérisée par une forte puissance militaire et une grande richesse de ses chefs. Au même moment l'emprise romaine augmente dans le Sud de la Gaule. Elle se manifeste d'abord sur le plan commercial. Les fouilles archéologiques ont montré qu'au cours duIIe siècle av. J.-C., les amphores italiennes remplacent peu à peu celles venant de Grèce dans le commerce marseillais. À plusieurs reprises les Marseillais font appel àRome pour les défendre contre les menaces des tribus celto-ligures et les pressions de l'empire arverne.
Le sud-est de la Gaule, notamment les régions actuelles duLanguedoc et de laProvence, est conquis parRome avant la fin duIIe siècle et forme la province romaine deNarbonnaise. Cette région, qui va des Pyrénées aux Alpes en passant par la vallée du Rhône, est un territoire stratégique pour relier l'Italie à l'Hispanie, conquise lors de laseconde guerre punique. La conquête de ces régions s'achève en118 av. J.-C. après la défaite desArvernes et desAllobroges et l'alliance de Rome avec le peuple gaulois desÉduens. Après la chute de l'hégémonie arverne sous la pression des Romains, les grands peuples de Gaule —Éduens etSéquanes en particulier – connaissent une forte rivalité.
En58 av. J.-C.,Jules César utilise la menace que fait peser la pression germanique sur les Gaulois pour intervenir à l'appel des Éduens, alliés de Rome. La guerre est longue et meurtrière et en janvier-52, avec l'accession au pouvoir deVercingétorix, les Arvernes et leur clientèle se soulèvent contre l'armée du proconsul. Jules César fait face à la détermination des Gaulois dont le soulèvement est quasi général. Sièges, incendies de cités, politique de la terre brûlée et massacres, déportation en esclavage sont alors au programme qui s'achève par une victoire romaine face à la fougue gauloise désorganisée. En 50 av. J.-C., Jules César laisse une Gaule exsangue[26]. Il laisse aux villes une grande autonomie.
La Gaule après la conquête de Jules César.Empire romain à l'époque de laTétrarchie (division stratégique de l'empire romain en fonction des peuples et des zones géographiques). En rouge les territoires celtes.
Rien ne semble changer au début de l'occupation romaine. Certes les Gaulois doivent payer leurs tributs, mais ils gardent leurs magistrats et leur manière de vivre. Les voies romaines reprennent en grande partie les voies gauloises déjà nombreuses et bien entretenues, ce qui explique la grande rapidité de déplacement des légions romaines[28] ; la pacification sur le Rhin et en Bretagne favorisent l'essor économique. Pierre Gros résume ainsi l'impact de la présence romaine« la conquête romaine qui a entraîné l’entrée dans les temps historiques, a modelé pour des siècles le paysage rural, établi ou aménagé les principauxaxes de communication, urbanisé d’immenses terroirs, défini les territoires administratifs »[29].
L'urbanisation généralisée voit le développement de nombreuses cités, organisées sur le mode desmunicipes italiens, villes qui toutes perdurent encore de nos jours, tandis que les campagnes se couvrent de bourgades (vici) et de grandes exploitations agricoles (villae). La Gaule est alors avec l'Égypte la région la plus peuplée de l'Empire romain, avec une population estimée à 7 millions d'habitants[30]. En48, l'empereurClaude donne accès auSénat romain aux notables gaulois, comme le montrent lesTables de Lyon.
Le développement économique bénéficie des siècles dePax Romana : l'extension des vignes en Aquitaine, dans la vallée du Rhône et de la Saône et même dans celle de la Moselle est telle qu'elle concurrence les vins italiens. Des artisans italiens installés en Gaule créent une industrie de lacéramique sigillée prospère (par exemple àLa Graufesenque). L'artisanat gaulois produit aussi en abondance des objets en bois, des vêtements de laine et exporte vers les grands centres de consommation en Italie, sur le Rhin et le haut Danube[30]. Les échanges ne se limitent pas aux biens matériels : à côté des cultes populaires du nombreux panthéon gaulois, apparaissent dans les villes d'autres religions d'origine orientale : culte deMithra, deCybèle, deJésus, attesté à partir de177 (cf. lesMartyrs de Lyon). Ce dernier culte deviendra prépondérant dans les milieux urbains à partir duIVe siècle.
Cinq siècles de romanisation laissent de profondes marques sur les Gaules : des langues (occitan etfrançais), un droit écrit et dégagé de tout principe religieux, des villes, une religion (lecatholicisme), et même des habitudes quotidiennes (le pain, la vigne et le vin).
Dans la nuit du, les peuplesvandales,suèves,alains et d'autrespeuples germaniques franchissent la frontière sur leRhin, malgré la défense des auxiliaires francs, puis en 412 lesWisigoths franchissent les Alpes et atteignent l'Aquitaine. Le pouvoir impérial romain leur cède des territoires puis disparaît en 476. Les structures de l'Empire se défont en Gaule, le pouvoir politique passe aux mains de royaumes barbares avec leurs propres lois, leur propre religion, l'arianisme ou lepolythéisme.
Le danger que représentent lesHuns, suscite une alliance temporaire des occupants de la Gaule. En 451,Aetius prend la tête d'une coalition Gallo-romaine et Franque qui stoppe le raid de pillage desHuns commandés parAttila auxchamps Catalauniques[31]. Cette bataille, qui fut bien loin d'anéantir les Huns, fut magnifiée par les historiens et enrichie de l'épisode desainte Geneviève encourageant les Parisiens à la résistance face à Attila[32].
Au milieu de ces royaumes barbares, wisigoth, alaman, burgonde ou franc, un Romain,Syagrius, parvient à maintenir entre Soissons (voire de l'Allemagne centrale) et Loire uneportion détachée de l'Empire comme son bien propre et se fait donner le titre de roi des Romains, d'aprèsGrégoire de Tours[33],[34]. Des réfugiés Bretons venus deBretagne chassé par les Angles et les Saxons (l'actuelle Angleterre) s'installent enArmorique, qu'ils rendent partiellement indépendante du reste de la Gaule jusqu'à la création du duché de Bretagne en 939[35]. Les élites gallo-romaines encore présentes dans les villes en assurent la direction locale, et fournissent de nombreux évêques, protecteurs de leur communauté face aux malheurs de l'époque, interlocuteurs du pouvoir militaire des rois germaniques qui se partagent la Gaule et derniers représentants de la culture romaine. Citons parmi ceux-ciAvit de Vienne,Nizier de Lyon,Remi de Reims,Grégoire de Tours. Sur une médaille d'or de Constantin, datant sans doute de 310, on lit pour la première fois le motFrancia[36].
L'histoire de la France au Moyen Âge de 476 à 1453 se caractérise par plusieurs périodes et événements marquants durant dix siècles deClovis àCharles VIII : l'affirmation duchristianisme, la désintégration de l'Empire romain, la longue genèse du royaume de France, la grande peste, la guerre de Cent Ans... La société est marquée par l'essor des campagnes et de la population française, le développement du commerce (foires et marchés) et la renaissance urbaine, l'apparition des universités et la formation de lalangue française.
Au milieu de ces enchevêtrements de peuples, lesFrancs saliens installés dans le Nord de la Gaule et les Francs ripuaires sur les rives du Rhin et de la Moselle, font la conquête d'une grande partie de la Gaule sous l'autorité de leur roiClovisIer (466-511). La grande intelligence de Clovis est d'avoir compris que son pouvoir ne pourrait pas durer sans l'assentiment des peuples romanisés. Son baptême catholique par l'évêqueRemi de Reims entre 496[37] et 508 (le débat est toujours d'actualité)[38] permet la collaboration des Francs avec les élites gallo-romaines. Clovis est le fondateur de la première dynastie durable sur le territoire de la France actuelle, la dynastie mérovingienne.
La conversion de Clovis, quant à elle, a été valorisée plus tard par lesCapétiens en 987 pour affirmer le principe de la monarchie de droit divin, c'est-à-dire de l'origine divine du pouvoir royal. Ils popularisent la légende de laSainte Ampoule, apportée par le Saint-Esprit représenté par la colombe, pour oindre le roi baptisé à Reims, ampoule qui sera utilisée pour les sacres des Capétiens jusqu'à la Révolution.
Les Francs ont une vision patrimoniale de leur royaume. Clovis partage son royaume entre ses quatre fils, ce qui favorise les guerres entre les héritiers. La carte du pays évolue au gré des guerres, des crises et des héritages : le royaume de Clovis est vite divisé entreNeustrie,Austrasie etAquitaine, qui deviennent avec laBourgogne conquise par les fils deClovis dans les années 530, les divisions politiques majeures de la « Gaule » auVIe siècle et auVIIe siècle. Les Francs s'étendent à l'est.
Sous les Mérovingiens, la période de régression amorcée dès leBas-Empire continue. La population diminue auxVIe et VIIe siècles sous le coup des épidémies, notamment celles de lapeste. La désorganisation liée aux invasions barbares contribue à la disparition des artisans spécialisés qui avaient fait la renommée de laGaule romaine. Les routes romaines ne sont plus entretenues. Le rare transport des marchandises se fait par voie fluviale. Le grand commerce s'arrête presque totalement et une économie autarcique autour des grands domaines, lesvici, se développe. Beaucoup de paysans perdent leur liberté car ils se « donnent » aux puissants en échange de leur protection. Le terme « franc » finit par désigner les hommes libres, qu'ils soient d'origine germanique ou gallo-romaine, mais ils sont de moins en moins nombreux.
À partir du début duVIIe siècle marqué par lafaide royale, le pouvoir royal s'affaiblit au profit de l'aristocratie franque (lesleudes), et surtout aux « maires du palais »(major domus), sorte de premiers ministres. En effet les rois mérovingiens n'ont plus de terres à distribuer à leurs guerriers et sont donc abandonnés par ceux-ci. La famille desPippinides originaire d'Austrasie, s'empare des mairies du palais d'Austrasie puis de Neustrie. Elle remet laProvence, laBourgogne et l'Aquitaine, devenues quasi indépendantes, dans l'orbite mérovingienne et entame la conquête de laFrise au nord du royaume. L'un des plus fameux maires du palais,Charles Martel, repousse en732 une armée musulmane non loin dePoitiers. Pour récompenser ses fidèles, il confisque les immenses biens fonciers de l'Église qu'il leur redistribue. Ceci lui permet de s'assurer de leur fidélité sans se défausser de ses propres biens. Son filsPépin le Bref fait enfermer dans un couvent le dernier roi mérovingien,Childéric III, puis se fait élire roi par les guerriers francs en 751. Il prend aussi la précaution de se faire sacrer en compagnie de ses deux fils en 754 par le pape. Cela lui donne une légitimité nouvelle, celle de l'élu de Dieu, comme le roiDavid, élection supérieure à celle des guerriers francs. La dynastie mérovingienne a vécu. Commence le règne de la dynastie carolingienne.
Pépin le Bref fait la conquête de l'Aquitaine, devenue indépendante et de laSeptimanie, devenue l'une des cinq provinces musulmanes d'al-Andalus de 719 à 759[39]. Il intervient même hors de ses frontières en créant notamment lesÉtats pontificaux après une campagne contre lesLombards. À sa mort, il partage selon la tradition franque, son royaume entre ses deux fils,Carloman etCharles mais la mort précoce de Carloman permet à Charles de régner sur un royaume des Francs unifié. Le royaume des Francs (regnum francorum) connaît sa plus grande expansion sousCharlemagne. Celui-ci étend le royaume jusqu'enSaxe à l'est, au prix de 20 années de guerre, enBretagne, enVasconie, enLombardie, enBavière et chez lesAvars. Cependant, ces conquêtes ne sont pas définitives et de nombreuses révoltes secoueront la Bretagne ou la Vasconie. C'est alors que se mettent en place des « marches », zones militarisées qui servent à contrôler les attaques des Bretons ou desVascons. Cette politique de conquête a pour conséquence le couronnement impérial deCharlemagne le 25 décembre800 par le papeLéon III. Les contemporains ont voulu y voir une renaissance de l'Empire romain d'Occident. Mais l'Empire carolingien est centré sur la Gaule et la Germanie. Charlemagne se considère d'abord comme un roi franc. Les règnes de Charlemagne et de son filsLouis le Pieux restent cependant, entre deux vagues d'invasions, une période de renforcement du pouvoir royal, de renaissance des arts et de la culture qui a durablement marqué les esprits ; « Charlemagne fonde la paix germanique et chrétienne, inaugure la législation sociale et rend l'enseignement primaire obligatoire »[40].
Louis le Pieux renonce à confisquer les terres de l'Église pour les donner en récompense à ses fidèles. Ce faisant, il est obligé de puiser dans ses propres biens et affaiblit ainsi la puissance foncière des Carolingiens. Ses fils se disputent pour le partage de l'héritage carolingien. Finalement ils arrivent à un accord lors dupartage de Verdun de843. C'est à cette occasion que la Gaule est appelée pour la première foisFrancie occidentale (Francia occidentalis en latin). La Francie occidentale, concédée àCharles le Chauve, le plus jeune fils deLouis le Pieux donnera naissance au royaume de France à la fin duIXe siècle, après de multiples évolutions territoriales. La Francie occidentale s'étend de lamer du Nord à lamer Méditerranée, elle est grossièrement délimitée à l'Est par laMeuse, laSaône et leRhône. Elle a pour avantage l'extrême diversité de ses paysages et de ses ressources naturelles.
Le titre de roi redevient électif et les Carolingiens doivent céder leur couronne àEudes, comte deParis entre 888 et 898, àRobert Ier de 922 à 923, et àRaoul en 923 à 936.
Son élection marque la fin de la dynastie carolingienne et le début d'une nouvelle dynastie, ladynastie capétienne qui construira le royaume de France pendant le second millénaire.
Il est à noter que la Bretagne ne participe pas à l'élection et qu'en juillet 990,Conan le Tort se déclareBritannorumPrinceps (souverain des Bretons) et, selon le moine contemporainRaoul Glaber, est couronné à la manière des rois à l'abbaye du Mont-Saint-Michel en présence des évêques de Bretagne[41].
Le règne des premiers Capétiens est marqué par la faiblesse du pouvoir royal face aux grands seigneurs à la tête deprincipautés. Hugues Capet n'intervient jamais au sud du royaume. Son autorité est limitée au domaine royal, les biens matériels et les vassaux directs sur lesquels il exerce un pouvoir direct. Les premiers Capétiens ne possèdent qu'undomaine peu étendu, réduit pour l'essentiel à une zone entre Beauvais et Orléans, vestige du duché de France deRobert le Fort. Par une politique habile de la plupart d'entre eux, ils assureront la croissance du domaine royal.
Face aux grands du royaume quasi indépendants, ils possèdent cependant trois atouts. En premier lieu, ils parviennent à rendre héréditaire leur lignage en faisant élire et sacrer leurs fils de leur vivant, et en les associant au trône (usage suivi jusqu'à Philippe Auguste). En outre, les rois de France sont au sommet de la hiérarchie féodale et ne rendenthommage à personne pour leurs possessions. Mais,féodalité oblige, tous les grands féodaux du royaume doivent l'hommage au roi. Les plus prestigieux vassaux du roi de France étaient les souverains d'Anjou et d'Angleterre. Par la moindre étendue de ses domaines placée sous son administration directe, le roi de France était plus faible que bien des vassaux, mais en termes de vassalité, c'était bien le roi de France qui se trouvait au sommet de la pyramide du pouvoir du système féodal. Un adage dit que « Rex francorum imperator est in suo regno » : « le roi des Francs est empereur en son royaume ». Enfin, lesacre permet aux Capétiens d'acquérir un caractère divin à travers l'onction, faite grâce à l'huile de lasainte Ampoule, don duSaint-Esprit. Ainsi le roi, chrétien depuis le baptême deClovis, devient de plus, un roi de droit divin, qui ne tient son pouvoir que de Dieu. DepuisRobert le Pieux, fils d'Hugues Capet, on attribue aux Capétiens des pouvoirsthaumaturgiques, par simple toucher, ils étaient censés guérir desécrouelles ou scrofules[42].
Le mariage d'Aliénor d'Aquitaine avec le comte d'Anjou, devenu roi d'Angleterre sous le nom d'Henri II Plantagenêt, fait de ce dernier un vassal du roi de France bien plus puissant que son suzerain, comme le montre la première carte. Philippe II, dit Philippe-Auguste a comme objectif principal l'abaissement des Plantagenêts. Entre 1202 et 1205, il fait la conquête surJean sans Terre de laNormandie, duMaine, de l'Anjou, de laTouraine, du nord duPoitou et de laSaintonge. Jean sans Terre tente de réagir en organisant une coalition réunissant également l'empereur germaniqueOtton IV et le comte de Flandre. Le dimanche, Philippe II triomphe de la coalition lors de labataille de Bouvines. Sur le plan intérieur,Philippe-Auguste augmente les ressources royales par une bonne administration, ce qui lui permet de rétribuer des mercenaires, de construire des nouveaux remparts autour deParis, de paver la ville et d'édifier la forteresse duLouvre. À sa mort, le domaine royal est considérablement agrandi. Ses successeurs vont continuer son œuvre.
Son petit-fils,Louis IX, signe enfin la paix avec lesPlantagenêt. Il affirme le droit du roi de légiférer dans tout le royaume, y compris dans les grands fiefs quand l'intérêt commun l'exige. Il met en circulation une monnaie royale stable et fiable, legros tournois d'argent valable dans tout le royaume. Il place définitivement la monarchie au-dessus du bien commun. Ses légistes affirment que rien ne peut justifier la rébellion d'unvassal et qu'aucunévêque ne peut excommunier le roi. Louis IX secroise par deux fois pour combattre les musulmans enTerre sainte, de 1248 à 1254 (septième croisade) puis en 1270 enÉgypte et àTunis où il meurt de la dysenterie le 25 août.
Philippe IV le Bel (1285-1314) est le dernier des grandsCapétiens directs. Il est connu pour le rôle qu'il a joué dans la centralisation administrative du royaume. Il organise définitivement les parlements. Pendant tout son règne, il cherche à améliorer les finances royales. Comme il échoue à instaurer un impôt régulier, le budget de l'État fonctionne au moyen d'expédients : confiscation des biens des juifs, des marchands italiens, diminution du poids en métal précieux par rapport à leur valeur nominale des pièces frappées par le roi. Pour trouver de nouveaux subsides, il organise la première réunion de représentants des trois ordres ou états duclergé, de lanoblesse et dutiers état. Ce type de réunion sera appelé plus tardÉtats généraux. Il s'entoure de légistes originaires de toute la France. Mais Philippe le Bel est surtout connu pour son affrontement avec les papes, lesquels, pour échapper aux troubles continuels deRome, s'installent àAvignon mettant pour trois quarts de siècle la papauté sous influence directe de la France. Quand il meurt en 1314, la monarchie capétienne semble consolidée et forte.
Même si les sources écrites manquent, plusieurs indices montrent que la vitalité démographique de la France est très importante à partir duXIe siècle. Des hommes venus du royaume de France tiennent le premier rang dans la conquête en 1066 de l'Angleterre parGuillaume le Conquérant, duc deNormandie. Les chevaliers francs jouent un rôle prépondérant dans laReconquista de l'Espagne musulmane dès le milieu duXIe siècle. Ils sont si nombreux à participer à la premièrecroisade à la fin duXIe siècle, que les États créés après la prise deJérusalem en 1099 sont appelésÉtats francs d'Orient. L'augmentation de la population accompagne les grandsdéfrichements. Des nouvelles techniques agricoles se diffusent permettant de cultiver les terres riches et lourdes du bassin parisien : charrues à roue et à versoir qui aèrent le sol, herses qui brisent les mottes. Villages, églises et châteaux-forts façonnent le paysage des campagnes. Le retour à une paix relative favorise la circulation des marchandises et des hommes, la circulation monétaire et la renaissance des villes. Les artisans et les marchands se révoltent bien vite contre l'autorité tatillonne des seigneurs laïcs ou ecclésiastiques et parviennent à obtenir des chartes de libertés leur permettant de s'administrer eux-mêmes. Dans les villes, les artisans exerçant une même activité se regroupent en organisations professionnelles très rigides et protectionnistes.
La lignée des Capétiens directs se termine par les règnes successifs des trois fils de Philippe IV qui meurent sans héritier mâle. LorsqueCharles IV le Bel, le dernier fils de Philippe le Bel, meurt en 1328, c'est la première fois depuis l'élection d'Hugues Capet que le défunt roi n'a pas d'héritier mâle. Deux prétendants sont en lice,Édouard III, roi d'Angleterre, petit-fils de Philippe le Bel etPhilippe de Valois, neveu de Philippe le Bel. L'assemblée des grands du royaume préfère Philippe car il est de France et plus mûr que son jeune rival anglais. Cet événement marque le début de la dynastie des Capétiens-Valois, branche collatérale des Capétiens directs.
Tout l'Occident est affecté par les famines, lapeste noire et de nombreux conflits. Mais la France, l'état le plus peuplé d'Europe, est davantage touchée par les malheurs, d'autant plus qu'elle est le cadre d'une guerre interminable entre 1337 et 1453, laguerre de Cent Ans.
À partir de 1348, la peste qui avait déjà ravagé la France dans l'Antiquité et le haut Moyen Âge, fait un retour en force provoquant la mort de presque un tiers de la population française. En 1361-1363, et en 1418-1419, une forme de peste fait des ravages parmi les enfants. Les révoltes se multiplient, notamment à Paris : révolte d'Étienne Marcel,révolte des Cabochiens. Dans les campagnes lesjacqueries sont nombreuses.
Les différentes crises ont eu aussi des aspects positifs. Les paysans et les artisans qui survivent aux famines et à la peste voient leur condition de vie s'améliorer du fait de la hausse des salaires causée par la raréfaction de la main-d'œuvre. La noblesse décimée lors des grandes batailles de la guerre de Cent Ans se renouvelle. Les bourgeois achètent des seigneuries.
Laguerre de Cent Ans oppose la France et l'Angleterre pour la succession au trône de France, de 1337 à 1453. Malgré ce que son nom peut laisser croire, elle n'est pas continue mais compte 55 années de trêve pour 61 années de combats. Elle ne touche pas tout le royaume mais elle apporte la désolation et la mort là où elle a lieu : pillages, épidémies et désertification accompagnent les bandes de mercenaires qui, en l'absence d'intendance et de solde régulière, se paient en mettant à sac les régions où ils stationnent, même celles du prince qui les emploie. Pendant cet interminable conflit, le territoire français est le champ de combats épisodiques mais acharnés entre rois de France et rois d'Angleterre. Les Anglais bénéficient de la supériorité tactique de leur armée (et particulièrement de leurs archers). Ils infligent à lachevalerie française pourtant très supérieure en nombre, deux cuisantes défaites àCrécy en 1346 etPoitiers, bataille durant laquelle le roi de France,Jean II le Bon est fait prisonnier. Le dauphin Charles est contraint de signer letraité de Brétigny en 1360 qui concède aux Anglais un bon tiers duroyaume de France, prévoit le paiement d'une énorme rançon de 3 millions d'écus d'or pour la libération de Jean II le Bon, soit l'équivalent des recettes du roi pendant deux ans. Celui-ci meurt à Londres en 1364 sans que la rançon ait été complètement versée.
Son fils, Charles V est un bon stratège : la paix obtenue permet de lui redonner les capacités de reconquérir les territoires cédés en évitant les grandes batailles rangées et confie à de grands capitaines telDu Guesclin la reconquête du territoire en reprenant une à une lesplaces fortes de l'ennemi par une stratégie desièges successifs. En 1377 les Anglais ne contrôlent plus que la Bayonne, Bordeaux, Brest, Calais et Cherbourg.
Batailles et opérations majeures en France entre 1415 et 1453.
Le redressement est provisoire. La folie deCharlesVI plonge le pays dans la guerre civile entre Philippe Le Hardi duc de Bourgogne, oncle du roi, et Louis d'Orléans, frère du roi. Ce dernier prend le contrôle de l'État et s'allie avec des seigneurs du Sud-Ouest hostiles au roi d'Angleterre. L'accent de ces méridionaux va donner le nom des partisans du duc d'Orléans : les Armagnacs. Le duc de Bourgogne a lui intérêt à ménager les Anglais qui commercent avec son comté de Flandre. Ces derniers profitent de la confusion pour lancer une chevauchée dévastatrice à travers la France. Après avoir évité Paris ils traversent la Picardie en direction de Calais. Ils sont rejoints àAzincourt en 1415 par la fine fleur de la chevalerie française. Les Français subissent de nouveau une défaite meurtrière face à une armée anglaise épuisée et moins nombreuse : le parti des Armagnacs est décapité. Le duc de Bourgogne, Jean sans Peur, en profite pour s'emparer de la Champagne puis de Paris. Son fils, Philippe le Bon, pousse Charles VI à signer le letraité de Troyes qui stipule :
Les Anglais par leur stratégie de pillage (les fameuseschevauchées) se sont fait haïr par le peuple et ne sont soutenus que par les artisans et les universitaires des grandes villes. Le rôle deJeanne d'Arc est politique et psychologique - elle catalyse cette volonté « de bouter les Anglais hors de France » - mais aussi militaire en participant activement à la libération d'Orléans puis à une campagne militaire victorieuse dans la Loire. Elle insiste pour queCharlesVII soit sacré à Reims le - ce qui est extrêmement symbolique et interprété à l'époque comme un nouveau signe de volonté divine car la ville est en plein territoire bourguignon -. Elle assoit de ce fait la légitimité du roi, faisant oublier les rumeurs prétendant qu'il était le fils illégitime duduc d'Orléans. La voie est alors libre pour la reconquête du territoire français. Le rôle militaire de Jeanne d'Arc s'affaiblit ensuite progressivement : durant l'hiver 1429, elle s'empare du village deSaint-Pierre-le-Moûtier, mais échoue devant la bourgade deLa Charité-sur-Loire avant d'être fait prisonnière devantCompiègne ().CharlesVII fait la paix avec lesBourguignons en 1435 (traité d'Arras) et privés de leur puissant allié, les Anglais sont finalement chassés de France en1453 après labataille de Castillon.
En ligne rouge : les frontières du Royaume français en 1477
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Les rois de France regagnent ensuite prestige et autorité. Ils ont encore affaire à forte partie avec lesducs de Bourgogne,Philippe le Bon etCharles le Téméraire, qui ont joint lesPays-Bas à leurs possessions bourguignonnes et se posent parmi les plus puissants souverains d'Europe.CharlesVII et son filsLouisXI les considèrent comme leurs principaux rivaux.
À lamort du Téméraire, ses possessions qui provenaient de la famille capétienne sont reprises par Louis XI mais les Pays-Bas reviennent à sa fille unique,Marie de Bourgogne qui les apporte à son épouxMaximilien d'Autriche : le partage devient une source de conflit entre les maisons de France et d'Autriche.
De la fin duXVe siècle à la fin de la première moitié duXVIe siècle, la politique extérieure française est largement dominée par lesguerres d'Italie. LesValois veulent faire valoir les droits hérités de leurs ancêtres sur leroyaume de Naples, et le duché deMilan. En 60 ans, ils conquièrent et perdent quatre foisNaples, six fois le duché de Milan. Finalement, ils abandonnent toute ambition enItalie[44]. On peut se poser la question de l'utilité de telles expéditions, sans cesse recommencées et se terminant à chaque fois par des échecs. Il existe plusieurs facteurs explicatifs : l'attrait des richesses et de la culture des prestigieuses villes italiennes, la volonté d'avoir le contrôle de passages qui permettent de menacer les intérêts deHabsbourg par le Sud. AuXVIe siècle, lesstratégies militaires se nouent, entre autres, autour de l'idée de frontière offensive. Il s'agit d'occuper des points d'appui pour en priver l'adversaire, plus que d'agrandir le territoire du royaume.
AuXVIe siècle, la guerre s'est considérablement transformée. L'artillerie dont le rôle est déterminant dans les batailles navales et dans les sièges commence à être utilisée pour les combats en rase campagne. La France, pour maintenir sa puissance dans le jeu européen, doit non seulement entretenir une armée permanente (les compagnies d'ordonnance créées parCharles VII), mais aussi posséder une solide artillerie et construire des forteresses capables de résister aux nouvelles techniques de guerre.
Tout ceci coûte fort cher. Lataille est multipliée par quatre au cours du siècle ; elle passe de 5 à 20 millions de livres[46]. Mais les ressources fiscales sont insuffisantes pour financer les dépenses. Les rois de France ont recours à l'emprunt – la dette double entre 1522 et 1550 – à labanqueroute en 1558 et 1567 qui permet d'annuler certaines dettes mais surtout d'en rééchelonner le paiement et à la vénalité des offices. Un office est une fonction publique dont le titulaire est inamovible depuis 1467 et qu'il achète. Si la vénalité existait déjà auXVe siècle,Louis XII etFrançois Ier l'ont systématiquement développée. Avec elle s'instaure peu à peu l'hérédité officialisée avec la création de lapaulette en1604, une taxe annuelle 1/60e de la valeur d'achat de l'office. Si les avantages sont évidents, procurer aux rois des rentrées d'argent rapides, les inconvénients le sont aussi.
Les règnes des trois fils d'Henri II,François II (1559-1560),Charles IX (1560-1574) etHenri III (1574-1589) sont marqués par lesguerres de religion entre protestants et catholiques. La Réforme s'est progressivement répandue en France à partir de 1520, au point qu'en1562, date du début des huitguerres de religion, un dixième de la population était devenue protestante[47]. Cette guerre civile est marquée par lemassacre de la Saint-Barthélemy, le et les jours suivants, où les protestants sont attaqués dans leurs propres maisons, faisant plusieurs milliers de victimes à Paris et en province. La guerre civile est aussi une grande menace pour l'unité territoriale. Les protestants et lesligueurs font des promesses aux souverains étrangers pour obtenir leur aide. Par exemple, les réformés promettent àÉlisabeth Ire d'Angleterre de lui restituer le Calaisis en échange de son intervention. De plus les troubles permettent à chacun des partis en présence de s'arroger des parcelles du pouvoir régalien. Les princes catholiques sont tout puissants dans les régions dont ils ont obtenu le gouvernement comme les Guise en Bourgogne, les Montmorency en Languedoc. L'édit de Beaulieu de1576 permet aux protestants de célébrer leur culte publiquement partout sauf à Paris. Ils peuvent occuper huit places fortes et bénéficient de chambres mi-partie dans lesparlements. Ils constituent alors un véritable Étathuguenot dans l'État. L'édit de Nantes de 1598 ne revient qu'en partie sur ces privilèges.
Louis XIII (1601-1643) a neuf ans quand son pèreHenri IV est assassiné en1610. Sa mèreMarie de Médicis assure la régence avec ses favoris et néglige l'éducation du jeune roi. Louis XIII l'écarte du pouvoir en 1617 en faisant assassiner son favori Concini. À partir de 1624, il règne en étroite collaboration avec son principal ministre, lecardinal de Richelieu qu'il soutient contre les intrigues des nobles, furieux d'être écartés du pouvoir. Il mène une politique de domestication des grands seigneurs du royaume (affaire ducomte de Chalais en 1626), de durcissement envers les protestants à qui il parvient à retirer les places-fortes que l'édit de Nantes leur octroyait. Il installe desintendants de justice, police et finance dans les provinces. Contrairement aux officiers ceux-ci sont des commissaires révocables. Ils sont indispensables dans les régions frontières ou occupées par les Français. Ils y assurent l'ordre en luttant contre les pillages des soldats français et en s'assurant de la fidélité des sujets, particulièrement des nobles et des villes. Le roi accentue la centralisation en favorisant l'atelier de frappe monétaire deParis aux dépens de ceux de provinces. Dès 1635, Louis XIII et lecardinal de Richelieu s'engagent dans laguerre de Trente Ans auprès des princes allemands protestants pour réduire la puissance de la dynastie desHabsbourg, d'Espagne, la première puissance européenne à cette époque et de ceux d'Autriche qui sont à la tête du Saint-Empire romain germanique. Pour affaiblir lesHabsbourg, les Français occupent des places fortes et s'assurent des passages qui les relient à leurs alliés, enAlsace, enLorraine et dans lePiémont. L'augmentation considérable de la pression fiscale, nécessitée par la guerre, provoque de nombreux soulèvements populaires : en 1636-1637 celui descroquants deSaintonge-Périgord, en 1639 celui desva-nu-pieds deNormandie, sévèrement réprimés.
Louis XIV a quatre ans et demi quand son père meurt en 1643. Sa mèreAnne d'Autriche assure la régence avec lecardinal Mazarin. Jusqu'en 1661, date de sa mort, c'est ce dernier qui gouverne effectivement, même après la majorité deLouis XIV. Il poursuit l'effort de guerre entamé par Richelieu. Les troupes françaises remportent des victoires décisives qui permettent de mettre fin à laguerre de Trente Ans (1618-1648). Letraité de Münster d'octobre 1648 accorde à la France presque toute l'Alsace, confirme la possession des trois évêchés et donne trois forteresses à la France sur la rive droite duRhin,Landau,Philippsbourg etBrisach. Mazarin poursuit ainsi la politique de passage vers leSaint-Empire romain germanique entreprise par le cardinal de Richelieu. Le conflit se poursuit cependant avec l'Espagne jusqu'en 1659. Avec lapaix de Pyrénées, le domaine royal s'agrandit du Roussillon, de l'Artois et de certaines places du Hainaut comme Thionville et Montmédy. Louis XIV épouse l'infante d'Espagne,Marie-Thérèse d'Autriche. Pour la première fois, dans un traité signé par la France, la frontière entre la France et l'Espagne est définie par la nature : « les crêtes des montagnes qui forment les versants des eaux »[49].
À la mort deMazarin, en 1661,Louis XIV déclare qu'il gouvernera désormais seul, c'est-à-dire sans premier ministre. Il réclame de ses secrétaires d'État une stricte obéissance et leur interdit de décider sans lui. Pour être sûr d'être obéi de ses ministres, il les choisit parmi la bourgeoisie commeColbert ouLe Tellier. Le règne de Louis XIV marque une centralisation extrême du pouvoir royal. Les grandes décisions sont prises par le conseil d'en haut qui se réunit deux ou trois fois par semaine et où ne siègent que 3 à 5 ministres. Lesintendants sont plus que jamais la voix du roi dans les provinces. Dès le début de son règne personnel (1661-1715), Louis XIV amorce le redressement de l'autorité royale. Les gouverneurs des provinces, issus de la haute noblesse n'ont plus d'armée à leur disposition et doivent résider à la cour, ce qui rend plus difficile le clientélisme. En 1665, Louis XIV interdit auxparlements de délibérer sur les édits et leur ordonne de les enregistrer sans vote. Les états provinciaux deNormandie,Périgord,Auvergne,Rouergue,Guyenne etDauphiné disparaissent. Avec Colbert, il entreprend de réformer la justice et fait rédiger toute une série d'ordonnances ou codes applicables dans tout le royaume. N'étant pas sûr de la fidélité des officiers propriétaires de charges héréditaires, il confie leurs fonctions à des commissaires révocables. Ce procédé finit par contraindre les officiers à l'obéissance. La noblesse perd tout pouvoir politique. Elle est domestiquée àVersailles où son plus grand souci est de se faire remarquer du roi. Pour cela, elle doit faire des dépenses excessives et en est réduite à quémander des pensions au roi pour assurer son train de vie fastueux.
Territoire sous règne français et conquêtes de 1552 à 1798.
Laguerre de Succession d'Espagne, menée par une coalition européenne pour empêcher lecomte d'Anjou second fils du dauphin de devenir roi d'Espagne commence en 1701. La France après quelques victoires connaît de nombreux revers. La paix est signée àUtrecht en 1714 et confirme l'accession d'une branche des Bourbon sur le trône d'Espagne. Le vieux roi qui meurt en 1715, voit son fils et son petit-fils mourir avant lui. Son héritier est donc son arrière-petit-fils né en 1710.
Quand le régent meurt en 1723,Louis XV s'appuie sur un de ses ministres,Fleury, son ancien précepteur en qui il a toute confiance, jusqu'à la mort de celui-ci en 1743; date à laquelle le roi prendra alors les rênes effectifs du pouvoir. Sous son règne, la France s'agrandit. En 1735, laLorraine, principauté souveraine, plusieurs fois occupée par la France, est donnée àStanislas Leszczynski, roi malheureux, chassé du trône dePologne par les Russes et les Autrichiens, et beau-père de Louis XV. À sa mort en 1766, elle entre dans le domaine royal. LaCorse,indépendante de facto depuis1755, est symboliquementcédée par larépublique de Gênes en1768 puis soumise militairement après labataille de Ponte-Novo en mai1769. Auparavant en 1762, la région desDombes avait, elle aussi, rejoint le domaine. Sous les règnes de Louis XV et deLouis XVI, est entreprise une politique de simplification et de régularisation des frontières. Il s'agit de procéder à des échanges de places avancées avec les États voisins pour éviter les enclaves aussi bien françaises en dehors des frontières qu'étrangères à l'intérieur du territoire. En 1789, il n'existe plus que trois enclaves étrangères en territoire français, Avignon et le Comtat qui appartiennent au pape, la principauté de Montbéliard et la république de Mulhouse[50].
C'est d'ailleurs auXVIIIe siècle que se forge la théorie desfrontières naturelles de la France. Un mémoire adressé au roi précise : « La France effectivement doit se tenir bornée par le Rhin et ne songer jamais à faire aucune conquête en Allemagne. Si elle se faisait une loi de ne point passer cette barrière et les autres que la nature lui a prescrites du côte de l'occident et du midi : mer océane, Pyrénées, mer Méditerranée, Alpes, Meuse et Rhin, elle deviendrait alors l'arbitre de l'Europe et serait en état de maintenir la paix au lieu de la troubler »[51]. Pendant son règne,Louis XV refuse plusieurs fois les propositions qui lui sont faites d'annexer lesPays-Bas autrichiens (laBelgique actuelle) en échange de son alliance ou de sa neutralité, sans que les historiens en comprennent bien la raison[50]. Le refus de Louis XIV d'annexer les Pays-Bas autrichiens montre que cette idée n'est pas, à ce moment, la doctrine officielle de l'État.
Le plus grand problème de l'État est alors le déficit budgétaire chronique qui conduit à rendre le roi dépendant des financiers et des manieurs d'argent. Autre source de paralysie des systèmes de gouvernement, l'opposition desparlements, se posant en défenseur des lois du royaume et encontre-pouvoir. S'opposant à toute tentative de réformes du royaume, elle contribue à la crise de la monarchie absolue sous le règne deLouis XVI.
Le petit-fils de Louis XV,Louis XVI, arrive au pouvoir en 1774. Il est gauche et timide. Il vit dans une cour traversée par les intrigues et les coteries. Son règne est marqué par une politique velléitaire. Face aux pressions de la cour, des parlements et de la noblesse, il est incapable de prendre les mesures nécessaires pour combler une dette publique et un déficit budgétaire démesurés. L'aide apportée aux insurgés américains aggrave encore le déficit. Plusieurs autres facteurs expliquent les difficultés de la monarchie absolue.
Malgré les tentatives de centralisation administrative, le pays est loin d'être unifié. Il existe des douanes intérieures entre les provinces, il n'y a pas d'unité des poids et mesures. Tout ceci entrave le développement économique de la France à un moment où l'Angleterre est en plein décollage industriel. Les impôts ne sont pas perçus de la même manière dans tout le pays, même si les intendants en supervisent la répartition et la levée. Malgré les efforts entrepris depuisFrançois Ier avec l'ordonnance de Villers-Cotterêts, les lois ne sont pas les mêmes dans tout le royaume. Le nord est encore soumis audroit coutumier, à peu près 300 coutumes, alors que le Sud est régi par un droit écrit, inspiré dudroit romain.
AuXVIe siècle, des marins français commencent à naviguer le long des côtes nord-est de l'Amérique du Nord. En1524,Giovanni da Verrazzano explore pour le compte deFrançois Ier le littoral et les environs de l'actuelleNew York, puis descend jusqu'aux Antilles. Dix ans plus tard, en1534, le même François Ier envoie lemalouinJacques Cartier explorer de nouvelles terres aux environs deTerre-Neuve. Cartier parvient jusqu'à l'estuaire dufleuve Saint-Laurent, puis remonte celui-ci, prend officiellement possession des lieux découverts au nom du roi de France, et atteint plusieurs campements amérindiens. Un second voyage s'ensuit, l'année suivante, lors duquel il pousse jusqu'à l'actuelleMontréal et croit avoir découvert une région riche en or, ce qui motive le roi dans la préparation d'une troisième expédition, cette fois-ci de colonisation. Mais celle-ci, qui a lieu en1541, échoue et il faut désormais attendre un demi-siècle pour assister à l'installation des Français sur les rives duSaint-Laurent. Néanmoins, si cette première entreprise de colonisation n'atteint pas ses objectifs et si les guerres de religion détournent longuement le regard de la monarchie de l'Amérique, les flottes des pêcheursbretons,basques etnormands fréquentent régulièrement les côtes deTerre-Neuve et l'estuaire du Saint-Laurent dans leurs campagnes de pêche à la morue, assurant une présence française indirecte, discrète et périodique.
Profitant de cette présence qui s'intensifie à partir des années1580,Henri IV, souhaitant relancer l'effort maritime et outremer de la France pacifiée par la fin des guerres de religion, octroie en1598 puis en1603 des monopoles commerciaux, destinés à encourager l'installation à Terre-Neuve. C'est l'Acadie qui est colonisée en première, lorsquePierre Dugua de Mons etJean de Poutrincourt fondentPort-Royal en1605. En1608,Québec est officiellement fondée parSamuel de Champlain, qui s'efforce de développer la colonie naissante. En1614, il scelle, au nom de la France, une alliance avec les IndiensHurons, qui engage les Français dans laguerre contre les Iroquois, ennemis des Hurons. Alors que, plus au sud, lesAnglais s'installent sur les côtes deVirginie (1607) puis duMassachusetts (1620), et que lesHollandais font de même sur l'îleManhattan, laNouvelle-France s'étend timidement, sous la pression iroquoise et avec des moyens financiers, militaires et politiques limités, voire parfois presque dérisoire. Lecardinal de Richelieu, qui perçoit l'importance et les avantages du commerce maritime et de l'expansion coloniale, réussit à relever partiellement une colonie québécoise délaissée par la régence deMarie de Médicis, et créé en1627 laCompagnie des cent-associés, qui détient le monopole de tout commerce avec la Nouvelle-France mais également la gestion de celle-ci. Elle ne parvient toutefois pas à s'imposer, subissant des revers d'abord militaires en1629, lorsque les Anglais s'emparent de Québec une première fois - rendue en1631 - et détruisent une flotte de secours, puis commerciaux, la traite des fourrures ne constituant pas un atout économique assez fort pour faire face aux dettes qu'accumule la compagnie. Elle survit au cardinal un peu plus de vingt ans, jusqu'à sa dissolution par Louis XIV en1663.
Carte de la Nouvelle France vers 1755.
À la même date, la colonie passe sous contrôle royal direct. Colbert, dont l'objectif est de former une industrie nationale puissante et de développer pour ce faire le commerce maritime, se lance dans un projet de modernisation et de peuplement de la Nouvelle France, qui doit devenir un empire économiquement prospère et politiquement imposant. Depuis la mort de Richelieu en1642, une nouvelle période d'oubli de la part de la métropole s'était ensuivie pour la colonie, sous-peuplée au regard de l'essor démographique des possessions anglaises. L'exploration du territoire repose alors sur les missionnaires, notammentjésuites, qui évangélisent les tribus amérindiennes, et sur des aventuriers et trappeurs individuels, parfois hors-la-loi, nomméscoureurs des bois ouvoyageurs. LesGrands Lacs sont atteints dans lesannées 1640, Montréal est fondée en1642, mais, dans l'ensemble, la présence française est fragile à l'arrivée de Louis XIV. Celui-ci, conseillé par Colbert, entreprend de pacifier la colonie en acculant lesIroquois à la défaite en1666, de s'assurer le contrôle de l'Acadie rendue par les Anglais en1667, puis de peupler la colonie, notamment par l'envoi, au cours desannées 1660 et1670, d'orphelines ou de veuves - les fameusesfilles du roi.
À partir de1689, commence une série deguerres coloniales contre les Anglais, les deux adversaires ajoutant à leurs rivalités continentales une concurrence commerciale, maritime et territoriale dont les colonies constituent la principale scène de conflit. La fondation de laLouisiane française en1699, qui achève d'encercler les possessions anglaises confinées sur le littoral atlantique, ne fait qu'exacerber les tensions. Par letraité d'Utrecht de1713, la France reconnaît la perte de l'Acadie et de laBaie d'Hudson. Si lesannées 1730 et1740 sont celles du développement relatif du commerce atlantique et d'une longue paix avec laGrande-Bretagne, propice à la croissance économique et à la stabilité sociale, la Louisiane reste sous-développée et le Canada sous-peuplé face aux concurrents anglais. L'empire français nord-américain manque de plus d'une véritable continuité, l'intérieur de son territoire officiel ou revendiqué étant le plus souvent à l'écart de la présence française, qui ne s'y manifeste qu'au travers d'un réseau décousu de forts. Les colons britanniques se sentent cependant de plus en plus menacés, surtout lorsque les Français s'implantent dans lavallée de l'Ohio au milieu duXVIIIe siècle. En1754 éclate laguerre de la Conquête, pendante decelle de Sept Ans en Europe. L'issue en est désastreuse pour l'empire colonial français : Québec est prise en1759, Montréal se rend en1760, et letraité de Paris de 1763 entérine la perte par la France du Canada et de la Louisiane. Momentanément récupérée en1800, celle-ci est définitivement vendue auxÉtats-Unistrois ans plus tard.
En1635, laGuadeloupe et laMartinique passent sous contrôle français. La culture du tabac, qui demande une demande en main-d'œuvre fournie au départ par desengagés européens, subit la concurrence du tabac de Virginie, plus compétitif. Les îles se tournent donc, à partir des années1660 et1670, vers l'exploitationsucrière, qui fera leur richesse. Au même moment, Louis XIV envoie auxboucaniers de l'île d'Hispaniola, établis àSaint-Domingue (actuelleHaïti, soit la partie ouest de l'île) un gouverneur, afin de faire passer les républiques boucanières et flibustières sous sa coupe. L'opération est un succès : en1697, l'Espagne, présente sur la partie est d'Hispaniola, reconnaît à la France la possession de Saint-Domingue. S'y développe durant les années qui suivent l'exportation du sucre, qui dépasse bientôt celle de laJamaïque anglaise, pourtant grosse productrice.
Latraite des esclaves africains prend de l'importance avec l'émergence de la culture de la canne à sucre, nécessitant une main-d'œuvre importante à l'heure où les engagés se font de moins en moins nombreux. Lecommerce triangulaire se met en place sur l'Atlantique, les Européens échangeant des armes, munitions ou objets depacotille en Afrique contre des esclaves, avant de revendre ceux-ci dans les colonies en échange des produits exotiques produits par celles-ci. Ces produits (dont le sucre), fortement demandés en Europe, y sont écoulés sur un marché dynamique et lucratif. Ce commerce, véritable système économique et maritime atlantique qui concerne toutes les Antilles, contribue autant à l'essor des colonies antillaises de la France que de grands ports commeNantes ouBordeaux, qui s'embellissent.
La période révolutionnaire commence vers1787. À cette époque la monarchie absolue est incapable de conduire les réformes, notamment fiscales, indispensables à la modernisation de la France face à la contestation des groupes privilégiés,parlements etnoblesse en tête. D'autre part, les idées nouvelles portées par les philosophes des Lumières et les économistes anglais ont pénétré les couches aisées de la population qui réclament une monarchie parlementaire, la rationalisation des institutions et la libéralisation d'un système économique archaïque. Laréaction nobiliaire et la crise économique jouent un rôle non négligeable dans l'ébranlement populaire. La période révolutionnaire se termine en 1814-1815, quand l'empereurNapoléon Ier est envoyé en exil d'abord à l'île d'Elbe et ensuite dans l'île de Sainte-Hélène. Traditionnellement les historiens distinguent deux temps majeurs pendant la période révolutionnaire : laRévolution française de 1789 à 1799 et la période napoléonienne (Consulat etPremier Empire) de 1799 à 1815.
L'année1789 est riche en événements historiques. Incapable d'établir un impôt universel,Louis XVI a convoqué lesÉtats généraux pour le à Versailles. Les députés dutiers état parviennent en deux mois et sans violence à mettre fin à lamonarchie absolue avec l'aide d'une partie duclergé et de lanoblesse, en se faisant reconnaître commeassemblée nationale à la suite duserment du jeu de paume, prêté le. Le, les Parisiens, exaspérés par la crise économique, l'instabilité gouvernementale et redoutant l'arrivée de troupes autour deParis, prennent d'assaut laBastille, accélérant ainsi le processus révolutionnaire initié par les députés, en faisant plier un symbole de l'absolutisme royal. En effet, le 17 juillet, le roi, venu à l'hôtel de ville de Paris entériner les nouvelles institutions parisiennes nées de laprise de la Bastille, accepte de porter la cocarde tricolore : le blanc, la couleur royale, entouré des deux couleurs de la garde municipale deParis, le bleu et le rouge. Cette association de couleurs préfigure ledrapeau tricolore qui est utilisé à partir de 1794 pour symboliser la république. À la fin du mois de juillet 1789, les campagnes sont agitées par laGrande Peur, une révolte contre lesdroits féodaux. Pour mettre fin à l'agitation les députés votent dans lanuit du 4 août 1789, l'abolition des privilèges et des droits féodaux. Même si ces derniers sont déclarés rachetables lors de la rédaction desdécrets des 4, 6, 7, 8 et 11 août 1789, cette date marque la fin de l'Ancien Régime et le début d'une nouvelle société. LaDéclaration des droits de l'homme et du citoyen votée le en est l'acte de baptême. Ce texte reconnaît l'égalité des citoyens devant la loi, consacre la souveraineté nationale et légitime le droit à la résistance à l'oppression. Avec le retour forcé du roi à Paris les 5 et, la Révolution semble avoir atteint ses buts : faire naître une monarchie parlementaire en rabaissant le prestige du roi et en restreignant ses pouvoirs. Le, un an après la prise de la Bastille, lafête de la Fédération célèbre, sur leChamp-de-Mars à Paris, la réconciliation nationale et l'unité de tous les Français. La mémoire de ces deux dates a conduit à adopter, en 1880, la date du 14 juillet commefête nationale de la République française.
L'abolition des privilèges et de la féodalité pousse les constituants, pétris de rationalisme et des idées de Lumières, à réorganiser la France pour lui donner l'unité qui lui faisait défaut. L'assemblée décide de supprimer l'enchevêtrement des anciennes circonscriptions administratives et décide, le, de créer une circonscription administrative unique pour la justice, l'administration, la religion, la collecte des impôts, gérant la chose publique de manière très décentralisée. Il s'agit des 83 premiersdépartements, gérés par des conseils de département élus et divisés eux-mêmes en districts, en cantons et en communes. La suppression des douanes intérieures, la décision de créer de nouvelles unités de poids et mesures basées sur lesystème décimal et valables dans toute la France, la rédaction de codes unifiant le droit à l'échelle nationale, l'égalité en droit pour les protestants et les juifs sont autant d'initiatives propres à consolider l'unité nationale à mettre au crédit des Constituants. La suppression descorporations par ledécret d'Allarde et l'interdiction des rassemblements paysans et ouvriers par laloi Le Chapelier en1791 participent de ce désir d'unité, mais entraînent à long terme une faiblesse descorps intermédiaires, notamment des syndicats[53]. L'affaire desprinces possessionnés d'Alsace et de l'annexion d'Avignon et duComtat Venaissin en 1790 permet aux révolutionnaires de poser un nouveau principe dudroit international, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.
Par contre, la réorganisation du clergé catholique sans l'autorisation de la papauté suscite une profonde division dans le royaume. Laconstitution civile du clergé votée le transforme lesévêques et lescurés en fonctionnaires élus et devant prêter serment de fidélité à la Nation. Cette loi est condamnée par le pape, ainsi que laDéclaration des droits de l'homme et du citoyen. La France est alors divisée en deux : le monde rural soutient plutôt les prêtres réfractaires, ceux qui refusent de prêter serment pour obéir au pape, les citadins plutôt les jureurs, ceux qui acceptent le serment à la Nation. L'hostilité du roi et d'une immense majorité de la noblesse aux changements est un autre élément fondamental de division. De nombreux nobles émigrent, formant à la frontière allemande unearmée d'émigrés prête à intervenir.Louis XVI louvoie, espère la guerre et une défaite française pour retrouver son pouvoir absolu. Cette guerre est déclarée le par la toute nouvelle assemblée législative issue de laConstitution de 1791, la première jamais votée en France. Les défaites des premiers combats et l'invasion du territoire national ont pour conséquence la chute de la monarchie le et la proclamation de la République le. Deux jours avant, le, une armée composée de jeunes volontaires patriotes avait arrêté l'avance prussienne àValmy. Si la victoire militaire est minime, son impact symbolique est très fort.
À l'automne les armées de la Révolution occupent les Pays-Bas autrichiens, la rive gauche duRhin, laSavoie etMulhouse.Danton fait sienne la théorie desfrontières naturelles et encourage les guerres de conquête bien loin de l'idéal révolutionnaire de libération des peuples opprimés. À Paris, la nouvelle assemblée élue au suffrage universel pour voter une nouvelleconstitution, laConvention, est occupée par leprocès du roi à partir de décembre 1792.Son exécution le soulève l'indignation de l'Europe monarchiste et entraîne la formation de la première coalition en février.
Sous la pression des sans-culottes lesGirondins sont chassés de laConvention par les journées révolutionnaires des 31 mai et. LesMontagnards qui forment la partie la plus radicale de l'assemblée arrivent au pouvoir. Ils n'hésitent pas à satisfaire certaines revendications du peuple parisien pour garder le pouvoir et surtout, sauver la République menacée de chaos face aux menées contre-révolutionnaires des royalistes en Vendée et ailleurs, à la révolte desGirondins contre la « dictature parisienne » appelée révolte fédéraliste et à l'avancée des coalisés sur le territoire français. Les Montagnards instaurent un gouvernement révolutionnaire, c'est-à-dire un gouvernement extrêmement centralisé dans lequel les décisions sont prises par un organe issu de laConvention, leComité de salut public, dominé par la forte personnalité deRobespierre. Ces mesures extraordinaires doivent sauver la révolution par laTerreur (envers les ennemis de la République) et la vertu (des patriotes). Le, lalevée en masse est décrétée. C'est le premier exemple dans l'histoire de France d'une conscription obligatoire de tous les jeunes hommes célibataires. C'est aussi la première fois que l'économie nationale est presque entièrement tournée vers l'effort de guerre. Lors des journées des 4 et 5 septembre, les sans-culottes demandent que la Terreur soit mise « à l'ordre du jour ». Cette demande est transmise à la Convention le 5 septembre, mais sans que les députés ne l'instaurent officiellement. Le, le gouvernement est déclaré révolutionnaire jusqu'à la paix avant d'être régi officiellement par le décret du 14 frimaire (4 décembre). Sous la pression du peuple qui souffre de la faim, relayée par les sans-culottes, les députés adoptent des mesures économiques d'urgence : à la loi du contre l'accaparement qui punit de mort la spéculation, ils ajoutent le 11 septembre le maximum national des grains et des farines et le une nouvelle loi du maximum général sur les denrées et les salaires[54]. L'ensemble de ces mesures d'exception permet de vaincre les révoltes et de dégager les frontières dès l'automne 1793. Les armées françaises, commandées pour la plupart par des généraux issus du rang, passent de nouveau à l'offensive. Les régions conquises deviennent des départements : celui du Mont-Blanc, des Alpes-Maritimes et du Mont-Terrible (Mulhouse-Bâle). En 1794 la Belgique est reconquise ainsi que la rive gauche du Rhin.Robespierre, qui veut renforcer la Terreur alors que la situation ne le justifie plus, est renversé le 9 thermidor an II (27 juillet 1794) et exécuté le lendemain.
Les Conventionnels mettent fin au régime d'exception qu'a été laTerreur. Ils rédigent une nouvelle constitution, celle duDirectoire, qui partage le pouvoir exécutif entre 5 directeurs et le pouvoir législatif entre deux assemblées. Lesuffrage censitaire est rétabli. Mais la constitution ne permet pas de résoudre les conflits entre les différents pouvoirs. LeDirectoire est une période où les multiples élections et les coups d'État se succèdent. L'insécurité est très grande ainsi que la misère populaire. Par contre, sur le plan extérieur, les conquêtes et les annexions sont nombreuses. LaBelgique et une partie de la Hollande sont transformées en 9 départements français le1er octobre 1796[55]. En 1798, c'est au tour de la rive gauche duRhin et deGenève d'être organisés en cinq départements. Les frontières naturelles sont largement atteintes. Si on ajoute que lesProvinces-Unies, laSuisse et l'Italie sont transformées enrépubliques sœurs avec des institutions calquées sur celles duDirectoire et une politique étrangère inféodée à celle de la France, les frontières naturelles sont même dépassées. Si lesrépubliques sœurs bénéficient des acquis révolutionnaires comme la suppression de la féodalité et l'égalité en droit, elles doivent fournir des réquisitions et des œuvres d'art, ce qui rend vite la présence française impopulaire.
La lassitude des Français induite par les désordres intérieurs permet au généralNapoléon Bonaparte d'être favorablement accueilli, quand par lecoup d'État du 18 brumaire (9 novembre 1799), il met fin au Directoire. Le général est en effet très populaire depuis ses éclatantes victoires lors de lapremière campagne d'Italie (1796-1797). Il bénéficie de plus de puissants appuis politiques. Son frèreLucien Bonaparte est président du conseil des cinq-cents, une des deux assemblées du Directoire.Sieyès fait appel à lui pour renverser le régime et pouvoir ainsi en établir un autre plus stable. Mais dès qu'il est au pouvoirNapoléon Bonaparte le confisque à son profit et établit un régime personnel : leConsulat.
Révoltes dans les colonies et abolition de l'esclavage
À partir de 1791, une importanterévolte d'esclaves débute àSaint-Domingue, la plus richecolonie française, peuplée en 1789 de 25 000 Blancs, 28 000 Libres de couleur etpresque500 000 esclaves[56]. Elle entraîne le vote le d'undécret accordant l'égalité de droit entre les Libres de couleurs et les Blancs, puis aboutit deux ans plus tard à lapremière abolition de l'esclavage dans les colonies françaises, votée le 4 février par laConvention montagnarde. Toutefois, en raison de l'occupation britannique de certains territoires, parfois à la demande des colonsplanteurs, l'abolition n'est effective que dans trois colonies : Saint-Domingue, laGuadeloupe et laGuyane. L'esclavage sera progressivementrétabli par Bonaparte en 1802, avec pour conséquence la perte de sa principale colonie, qui accède à l'indépendance en 1804 sous le nom d'Haïti.
Bonaparte fait rapidement rédiger une constitution, laConstitution de l'an VIII. Il y est désigné comme premier consul donc de fait à la tête de l'exécutif. Il a le pouvoir de nommer aux principales fonctions publiques et il a le pouvoir d'initiative des lois et du budget. Il y a trois consuls en tout mais les deux autres,Cambacérès etLebrun, n'ont qu'un pouvoir consultatif. Bien que Bonaparte possède une grande partie du pouvoir législatif, il prend soin de créer quatre assemblées mais aucune n'est élue par les citoyens. Leurs membres sont choisis par le premier consul ou par le Sénat, une des quatre chambres. Parmi elles on peut signaler leConseil d'État qui doit préparer, rédiger les projets de loi et interpréter les lois. Il est à l'origine du Conseil d'État actuel. Le suffrage universel est rétabli mais il n'y a plus d'élections. Les Français sont consultés pour des plébiscites. Le pouvoir personnel de Napoléon Bonaparte est renforcé par la constitution du 16 thermidor an X (). Il est consul à vie et peut nommer son successeur de son vivant. Les pouvoirs des assemblées sont réduits au profit dessenatus-consulte acte émanant du Sénat. Les élections sont rétablies mais elles se déroulent à plusieurs degrés et seuls les 600 citoyens les plus imposés peuvent faire partie du collège départemental[57]. De plus, les citoyens ne choisissent pas des représentants, ils proposent des candidats dans ce qui est appelé des « listes de confiance ». De plus les libertés publiques sont supprimées : liberté de presse, de réunion, censure dans l'édition et le théâtre.
Bonaparte renforce la centralisation administrative. À partir de 1800, il nomme à la tête de chaque département, unpréfet et un sous-préfet pararrondissement. Il prend soin aussi de nommer ou faire nommer les maires. Les préfets sont chargés de mettre fin aux divisions nées de la Révolution et de briser tout ce qui reste de particularismes locaux. Les institutions financières et judiciaires sont organisées de la même manière, les juges étant nommés par le premier Consul.
Napoléon Bonaparte rétablit progressivement la stabilité financière. Il crée laBanque de France en 1800, la seule institution à pouvoir émettre de la monnaie. En 1803, le décret de Germinal crée lefranc, ditfranc germinal. La pièce d'un franc est d'un poids invariable de 5 g d'argent. Elle gardera la même valeur jusqu'en 1914. La promulgation ducode civil de 1804 permet l'achèvement de l'unité du pays. Ce code, en projet depuis 1789, traite de la famille, de la propriété et des contrats. Il mélange les règles de droit écrit et les coutumes des différentes régions dans un texte applicable à tous les Français. La loi du crée laCour des comptes, un corps unique centralisé de contrôle des comptes publics. Le premier consul met aussi fin au brigandage et à l'insécurité dont souffraient beaucoup de départements. En 1804, les Français acceptent parplébiscite que Napoléon Bonaparte devienne empereur héréditaire sous le nom deNapoléon Ier. On sait aujourd'hui qu'il a choisi le titre d'empereur pour ne pas se mettre à dos une partie de la population anti-monarchiste et par référence à l'Antiquité. Ce n'est qu'après la flamboyante victoire d'Austerlitz le qu'ilenvisage de créer un empire continental[réf. nécessaire].
SousNapoléon Bonaparte, la France est presque sans arrêt en guerre. En 1810, à l'apogée du Premier Empire, elle compte 130 départements qui englobent lesPays-Bas, une partie de l'Allemagne jusqu'auDanemark et une partie de l'Italie. Les annexions sont en grande partie dues à la nécessité pour Napoléon de faire respecter leblocus continental qui vise à asphyxier leRoyaume-Uni économiquement. De plus, un grand nombre d'États sont inféodés à la France : laconfédération du Rhin, laConfédération helvétique, les royaumes d'Italie, deNaples et d'Espagne. En tout, près de la moitié de l'Europe est sous influence française. Mais cette domination est de plus en plus contestée. En effet, la France favorise son économie aux dépens des États vassaux. En 1812, pour contraindre la Russie à respecter leblocus continental qu'elle a rompu, Napoléon Ier l'envahit. Mais il s'avance de manière trop imprudente jusqu'àMoscou et doit effectuer une retraite en subissant les rigueurs de l'hiver et les assauts des troupes et des partisans russes. Il perd 90 % de ses effectifs. Le désastre de lacampagne de Russie en 1812-1813 précipite la fin du Premier Empire. Une nouvelle coalition se noue contre la France. En octobre 1813, à la suite de la défaite deLeipzig, les Français doivent évacuer l'Allemagne. LesPays-Bas et l'Espagne sont perdus. En 1814, la France est envahie. Napoléon abdique en avril et devient roi de l'île d'Elbe. Le frère du roiLouis XVI, le comte de Provence, devient roi sous le nom deLouis XVIII. La France garde ses frontières de 1792, incluant laSavoie et lecomté de Nice, et peut conserver toutes les œuvres confisquées à l'étranger. Mais en 1815,Napoléon Ier s'enfuit de l'île d'Elbe et revient au pouvoir à partir du 20 mars jusqu'au, date à laquelle il est définitivement vaincu àWaterloo et envoyé en exil dans l'Atlantique Sud, sur l'île de Sainte-Hélène. La France paie durement lesCent-Jours. Elle doit rendre une grande partie des œuvres pillées et perd les acquisitions de 1792, Savoie et Nice notamment plus laSarre. Elle doit en outre payer l'entretien d'une force d'occupation de 150 000 soldats.
LesBourbons reviennent au pouvoir lors d'une période appeléeRestauration qui débute le. Le,Louis XVIII débarque àCalais. Le, il accorde unecharte par laquelle il consent volontairement à limiter son pouvoir. Il affirme par là même la souveraineté de droit divin du monarque. De ce fait, la charte de 1814 accorde un pouvoir important au roi, personnalité « inviolable et sacrée »[57]. L'initiative des lois lui est réservée, mais celles-ci sont votées par le Parlement composé de deux chambres : laChambre des pairs dont les membres sont nommés à vie par le roi et dont le nombre est illimité ; laChambre des députés lesquels sont élus pour cinq ans ausuffrage censitaire. Les députés parviennent à obliger les ministres à venir justifier leur politique devant eux, et à répondre à leurs questions.
Louis XVIII se voulant un roi conciliant, sa politique n'est pas du goût des « Ultras » qui exigent un châtiment contre ceux qui ont soutenu Napoléon pendant les Cent-Jours. Dans ce climat de vengeance, les élections d'août 1815 leur donnent la majorité, et paradoxalement, ce sont eux qui mettent en pratique la responsabilité politique des ministres devant la chambre, ce que la charte de 1814 ne prévoyait pas.
À la mort sans héritier deLouis XVIII en septembre1824, son frèreCharles X lui succède. Contrairement à son frère, ce dernier n'a pas compris que certains changements étaient irréversibles. Il se fait sacrer à Reims en 1825 dans la pure tradition capétienne, et tente de rétablir l'Ancien Régime en favorisant la noblesse et le catholicisme. Il fait voter une loi sur l'indemnisation des nobles qui avaient émigré pendant la Révolution et dont les propriétés avaient été vendues comme biens nationaux. Une autre loi, dite loi sur lesacrilège, punit de mort le vol des ciboires contenant deshosties consacrées ou la profanation de ces dernières. Il s'appuie sur les ultras, c'est-à-dire les députés partisans d'un retour à l'Ancien Régime. Mais sa politique réactionnaire se heurte à l'opposition déterminée de la bourgeoisie libérale. En 1830, le ministrePolignac publie quatre ordonnances réactionnaires. Elles prévoient le rétablissement de lacensure pour la presse, la dissolution de la chambre, la modification du cens électoral pour réserver le droit de vote aux grands propriétaires fonciers, et la fixation de la date des nouvelles élections. La publication de ces ordonnances le provoque une révolution dite desTrois Glorieuses en juillet 1830.
Dans un Paris couvert de barricades, on crie vive la République ou vive l'Empereur. Mais dans les coulisses du pouvoir, des bourgeois modérés commeAdolphe Thiers ouCasimir Perier parviennent à imposer le duc d'Orléans comme nouveau souverain. La branche aînée de la famille royale, celle desBourbons, est donc remplacée par la branche cadette, celle des Orléans. La bourgeoisie libérale a su utiliser la révolution populaire pour mettre sur le trône un roi conforme à ses intérêts. La révolution de Juillet ne constitue donc pas une rupture avec le régime précédent. Le principal changement est le fait que la souveraineté nationale remplace la souveraineté de droit divin. Ce changement se manifeste dans le titre donné au roi :Louis-Philippe devient roi des Français, c'est-à-dire qu'il détient son pouvoir de la volonté du peuple, alors que ses prédécesseurs portaient le titre de roi de France. LaChambre des pairs perd son influence. Le drapeau tricolore remplace définitivement le drapeau blanc.
Lamonarchie de Juillet correspond aux débuts de l'industrialisation de la France. La France expérimente, dans le sillage de l'Angleterre, unboom ferroviaire des années 1840, qui stimule la production d'acier. Le Premier ministreGuizot lance lecredo d'une nouvelle société : « enrichissez-vous ! ». Les grandes dynasties bourgeoises, liées aux banques ou aux grandes entreprises, se constituent et affirment leur volonté de dominer la vie politique. Lesuffrage censitaire étant très restreint, elles sont les seules, avec l'aristocratie traditionnelle, à pouvoir voter et à avoir des élus à la Chambre des députés. Cela se traduit par l'apparition de deux partis politiques, les conservateurs, les représentants de la vieille noblesse, et les libéraux, les représentants du monde des affaires. Mais ces deux groupes s'entendent sur la conservation du régime tel qu'il est, puisqu'il sert leurs intérêts. La loiGuizot de 1833 oblige chaque commune à entretenir une école élémentaire. Cependant la révolution industrielle crée une nouvelle classe sociale, celle des ouvriers en proie à la misère. Les théories socialistes deLouis Blanc et deProudhon cherchent à remédier aux injustices sociales dont le prolétariat est la victime.
Lamonarchie de Juillet est aussi marquée par un nouvel essor de lacolonisation française. L'incident diplomatique du coup d'éventail donné par ledey d'Alger au consul français en 1827 sert de raison à laconquête française de l'Algérie en juillet 1830. La colonisation s'étend progressivement à toute l'Afrique. En 1842 les générauxBinger, Crozat et Marchand se lancent à la conquête de laCôte d'Ivoire, mais doivent faire face à la résistance deSamory.
Le roi se présente comme un bon père de famille bourgeois, mais en réalité, c'est un homme autoritaire et un habile manœuvrier. La faiblesse du corps électoral, l'autorité du roi, et la révélation d'une grande corruption au sein du gouvernement finissent par discréditer totalement le régime. De plus, à la suite de mauvaises récoltes, le pays connaît une crise économique profonde à partir de 1846. L'opposition républicaine en profite pour s'agiter à nouveau.
En1847, l'opposition, alimentée par une vague de mécontentement due à la corruption du régime en place et par la crise économique, organise dans tout le pays des banquets pour demander l'élargissement du corps électoral. La liberté de réunion n'existant pas, la présence à cesbanquets républicains permet aux opposants au régime de se réunir sans enfreindre la loi. Le, le pouvoir interdit la tenue d'un banquet. Ceci entraîne des manifestations qui se poursuivent le lendemain. C'est alors que la troupe tire sur les manifestants. Quand la nouvelle de cette fusillade est connue, tout le Paris populaire s'embrase. Le roi abdique le lendemain car il ne veut pas être responsable d'un massacre de la foule parisienne. Les insurgés ont retenu la leçon de1830. Ils exigent que des républicains siègent dans le gouvernement provisoire. Celui-ci proclame la République le soir même. Ladeuxième République commence.
Un ouvrier pose son fusil, privilégiant lesuffrage universel à la violence politique.Lithographie de Louis Marie Bosredon, 1848.
La Deuxième République institue définitivement lesuffrage universel masculin en France. Elle abolit l'esclavage sur proposition deVictor Schœlcher. Ceci n'empêche pas l'armée française de commencer la conquête duSénégal la même année. Sous la pression du peuple et des socialistes, des mesures sociales sont prises : proclamation du droit au travail, limitation de la journée de travail à 10 heures à Paris et à 11 heures en province. Desateliers nationaux sont créés pour donner du travail aux parisiens touchés par la crise économique. Mais aux élections d'avril 1848, les Français élisent majoritairement des modérés hostiles aux mesures novatrices (500 députés) ou des monarchistes (300). Lessocialistes qui défendent les mesures sociales ne sont qu'une centaine. Le gouvernement provisoire qui découle de cette assemblée décide de fermer les ateliers nationaux. L'est parisien se révolte à l'annonce de cette décision. Le généralCavaignac est muni des pleins pouvoirs pour mater la rébellion. Il brise celle-ci dans un bain de sang après trois jours de combats,du 23 au. Ces « journées de juin » discréditent ou salissent la jeune République aux yeux de certains milieux, notamment ouvriers. Mais tandis que ceux-ci, victimes de la répression, s'en désintéressent, les paysans et les possédants craignent les désordres sociaux et recherchent un régime stable et autoritaire.
Pour décider des nouvelles institutions, les constituants s'inspirent desÉtats-Unis dont le modèle a été popularisé parAlexis de Tocqueville dans son livreDe la démocratie en Amérique, publié en1835. La constitution du choisit de confier le pouvoir exécutif à un président élu au suffrage universel direct pour une durée de quatre ans. Il peut se représenter après un intervalle de quatre ans. Comme aux États-Unis, l'Assemblée et le président sont totalement indépendants. Mais contrairement aux États-Unis, le président n'a pas le droit de veto.
Louis Napoléon Bonaparte,Lamartine,Cavaignac,Ledru-Rollin et le socialisteRaspail sont candidats à l'élection présidentielle, la première ausuffrage universelmasculin en France. Le neveu deNapoléon Ier peut notamment profiter de la division des gauches et de la faiblesse du niveau d'instruction, tandis que le nom de Bonaparte est bien plus connu dans les campagnes. Le, et avec près de 75 % des voix, issues notamment duParti de l'Ordre, il est élu pour quatre ans. La nouvelle assemblée élue enmai 1849 est dominée par les monarchistes. Elle mène une politique extrêmement conservatrice. Elle envoie àRome des troupes pour maintenir le pape dans sesÉtats pontificauxmenacés par les révolutionnaires républicains italiens. Elle vote laloi Falloux qui met l'école sous le contrôle de l'Église catholique. Le 31 mai1850, l'Assemblée vote une loi électorale qui exclut du corps électoral ceux qui ne peuvent pas justifier de trois ans de résidence continue dans la même commune, ce qui élimine 3 millions de personnes du corps électoral, principalement des artisans et des ouvriers saisonniers. En s'opposant à cette réforme, Louis-Napoléon fait figure de héros pour le peuple.
Au début de l'année1851,Louis Napoléon Bonaparte demande une révision de la constitution pour lui permettre de se représenter dès la fin de son mandat. Devant le refus de l'Assemblée Nationale, il exécute uncoup d'État minutieusement préparé le 2 décembre1851, qu'il entérine par unréférendum. Le 2 décembre est en effet une date symbolique pour les Bonaparte :Napoléon Ier a été couronné un 2 décembre et a remporté l'année suivante l'éclatante victoire d'Austerlitz, le. La deuxième République finit renversée par son propre président, qui ne tarde pas à instaurer un régime impérial.
Lecoup d'État du 2 décembre 1851 entraîne peu de réactions. Seules quelques personnalités s'opposent ouvertement au nouveau régime. C'est le cas deVictor Hugo qui part en exil àGuernesey d'où il ne cesse de fustiger Louis-Napoléon Bonaparte qu'il appelle « Napoléon le Petit ». Le plébiscite du donne au nouvel homme fort les pleins pouvoirs pour rédiger une nouvelle constitution. Après un nouveauplébiscite, il est proclamé empereur sous le nom deNapoléon III. Celui-ci met en place un régime autoritaire où la liberté de la presse est limitée et les opposants sont pourchassés. La pratique des candidatures officielles réduit l'opposition au silence. Seuls quelques républicains parviennent à se faire élire. Mais comme le pays bénéficie d'une bonne conjoncture économique, les protestations sont peu nombreuses.
À partir de 1860, le Second Empire se libéralise.Napoléon III a perdu une grande partie du soutien des catholiques car il aide le roi dePiémont-Sardaigne,Victor-Emmanuel II à réaliser l'unité italienne, ce qui va à l'encontre des intérêts de la papauté. De plus, la signature d'un traité de libre-échange avec le Royaume-Uni, alors première puissance industrielle mondiale, mécontente les industriels qui craignent la concurrence de produits anglais. L'empereur cherche donc de nouveaux soutiens en allant vers les libéraux et les classes populaires. Le droit de grève est accordé en 1864. Les ouvriers ont le droit de constituer des caisses d'entraide (suppression de laloi Le Chapelier). Le corps législatif obtient peu à peu des droits. Il peut critiquer le gouvernement, voter le budget. Il a même l'initiative des lois à partir de 1869. Le Second Empire a peu à peu évolué vers un régime parlementaire, les ministres étant responsables devant le Parlement. Cette libéralisation du régime est approuvée massivement par un plébiscite en mai 1870 qui donne à l'empereur 7 336 000 « oui » contre 1 560 000 « non ». Le Second Empire semble consolidé sur des bases plus démocratiques. Il est cependant balayé en quelques semaines par laguerre franco-prussienne.
Le décollage industriel de la France se fait sous le Second Empire. Le crédit se libéralise, la création desociétés anonymes (SA) est facilitée. L'État montre lui-même l'exemple. Des grands travaux de modernisation sont entrepris dans Paris sous la houlette du baron Haussmann. La Sologne et les Landes sont bonifiées (création de la forêt des Landes)[58].
Napoléon III, très influencé par l'épopée napoléonienne, veut donner à la France un rôle prépondérant dans le monde. La France intervient dans laguerre de Crimée aux côtés des Britanniques pour contrer l'expansionnisme russe. À partir de 1854,Faidherbe donne une nouvelle impulsion à la conquête du Sénégal. Il forme les fameuxtirailleurs sénégalais. La France commence à s'intéresser à l'Indochine. Les troupes françaises interviennent même auMexique pour soutenir l'archiduc d'AutricheMaximilien qui tente d'y instaurer un grand empire latin et catholique. L'aventure mexicaine est un échec. Maximilien est fusillé par les révolutionnaires mexicains.
NapoléonIII soutient les processus d'unité italienne et allemande. En échange de ses bons offices, la France reçoit duroyaume de Sardaigne leduché de Savoie et lecomté de Niceannexés à la France en 1861 après la signature dutraité de Turin. En échange de sa neutralité bienveillante lors de laguerre austro-prussienne de 1866, l'empereur réclame des compensations territoriales queBismarck, le chancelier prussien, refuse de lui accorder. Derrière cette neutralité de Louis Napoléon il y a en fait son inquiétude face à la montée en puissance en Europe de la Prusse à la suite de la victoire de Sadowa alors que dans la lignée du bonapartisme l'empereur aspire à des conquêtes territoriales et un prestige au-delà des frontières. Bismarck multiplie alors les provocations envers la France pour la pousser à déclarer la guerre à la Prusse. À la suite de la publication de ladépêche d'Ems, le, la France déclare laguerre à laPrusse. Le Second Empire ne peut opposer que 265 000 hommes aux 500 000 Prussiens et alliés allemands. La guerre tourne rapidement au désastre. Le 6 août, l'Alsace est prise. Napoléon capitule àSedan le. À cette annonce, les Lyonnais dès le matin puis les Parisiens dans la soirée proclament la république le.
La république naît dans des conditions difficiles. Legouvernement provisoire décide de continuer la guerre. Les Allemands atteignent rapidement Paris qu'ils assiègent.Gambetta, ministre de l'Intérieur du gouvernement de défense nationale, quitte Paris en ballon pour appeler la province à la levée en masse. Mais les troupes ainsi constituées ne parviennent pas à rompre l'encerclement prussien. La ville subit des bombardements réguliers et souffre du manque de nourriture. Pour permettre aux Parisiens de ne pas tomber dans la misère, le gouvernement décrète le moratoire des dettes et des loyers. Des armes sont distribuées aux volontaires qui forment une garde nationale.
Le, le gouvernement doit se résoudre à signer l'armistice. Les Allemands laissent se dérouler des élections. Celles-ci donnent la majorité aux monarchistes. La nouvelle assembléesigne une paix qui ampute le pays de l'Alsace et du nord de la Lorraine et oblige les Français à payer au vainqueur une lourde amende de guerre.Thiers, un ancien premier ministre de Louis-Philippe est nommé chef du pouvoir exécutif en attendant que l'assemblée statue sur la nature du régime et son organisation.
Les Parisiens qui ont vaillamment résisté pendant le siège de Paris sont scandalisés par l'armistice et les conditions imposées par la Prusse. Ils se méfient d'une assemblée monarchiste qui par peur des périls révolutionnaires préfère s'installer à Versailles plutôt que dans la capitale. Alors que la situation économique des Parisiens est toujours précaire, le gouvernement provisoire abroge le moratoire des loyers et des dettes. Le, Thiers ordonne de désarmer les Parisiens. Cette annonce déclencheune émeute. Thiers se retire de la capitale et décide de la reprendre par la force. À Paris, le comité central des gardes nationaux décide de l'élection d'un conseil municipal. LaCommune de Paris se met en place à partir du. Les principaux animateurs de laCommune de Paris viennent d'horizons différents. Ils prennent des mesures radicales pour soulager la misère populaire : réquisition des logements, instruction gratuite, laïque et obligatoire. Ils inventent une démocratie participative en permettant aux citoyens d'intervenir dans les affaires de la commune. À côté de revendications issues du mouvement sans-culotte de 1793 comme l'anticléricalisme et le respect de la liberté de conscience, des revendications de type socialiste sont portées par les insurgés avec la condamnation du militarisme et du capitalisme. Cet événement restera central dans les cultures politiques socialistes car il est considéré par Marx dansLa guerre civile en France comme la première révolution authentiquement prolétarienne.
La commune ne dure que 70 jours. Le, les troupes du gouvernement surnomméesles Versaillais par les communards investissent Paris. Les révoltés mènent un combat désespéré. Ils incendient des monuments comme le palais de Tuileries ou l'Hôtel de ville pour ralentir l'avance des Versaillais. Après l'exécution de l'archevêque de Paris par lescommunards, larépression tourne au bain de sang. Entre 20 000 et 30 000 communards sont exécutés en une semaine. Des milliers de révoltés sont envoyés dans des bagnes en Algérie ou en Nouvelle-Calédonie.
Les conditions imposées par la Prusse, qui avaient scandalisé les Parisiens au moment de l'armistice sont encore durcies par une loi de décembre 1871 exigeant de la France une indemnité de guerre représentant 25 % de son PIB. La dette publique augmente fortement, et avec elle une nouvelle classe de petits rentiers vivant de son intérêt puis participant à la nouvelleexpansion boursière, ce qui accélère la création de banques de dépôt.
Née de la défaite, aux prises à la révolte parisienne, dominée pendant 5 ans par une assemblée monarchiste, la République a peu de chances de survivre. Elle doit son installation à la mésentente des monarchistes. En effet les royalistes sont divisés en deux groupes, leslégitimistes, partisans du petit-fils deCharles X, lecomte de Chambord, et lesorléanistes. Après de nombreuses tractations les orléanistes et les légitimistes s'entendent sur le nom ducomte de Chambord. Mais ce dernier exige le rétablissement du drapeau blanc, ce que refusent lesorléanistes. En attendant, laloi Rivet donne au chef de l'exécutif,Thiers, le titre deprésident de la République.
Les républicains qui ont prouvé grâce à la répression de laCommune de Paris qu'ils ne sont pas des révolutionnaires et savent maintenir l'ordre, gagnent la plupart des élections partielles. Faute de mieux, lesorléanistes rompent avec leslégitimistes et se rallient à l'idée d'un régime républicain. En 1875, toute une série delois constitutionnelles est votée. Elle fera office deconstitution pendant toute la durée de latroisième République. Le régime républicain est un régime parlementaire bicaméral. Le président de la République est élu pour sept ans par les deux chambres, leSénat et l'Assemblée nationale réunis en congrès à Versailles. Il est politiquement irresponsable.
En 1876, les républicains remportent 360 des 500 sièges à pourvoir. Le conflit entre le président monarchisteMac-Mahon et l'assemblée est inévitable. Le, Mac-Mahon renvoie le président du Conseil,Jules Simon, républicain modéré, et le remplace parAlbert de Broglie, un royaliste. Il est mis en minorité par 363 voix républicaines, et Mac-Mahon fait dissoudre la chambre. Cet épisode est connu sous le nom de crise de 1877. Une campagne électorale agitée s'ensuit opposant les monarchistes aux républicains. Les républicains font bloc autour de Gambetta. Deux conceptions de la république s'affrontent. Pour Mac-Mahon, le président de la république est l'égal du Parlement. Il peut donc avoir sa propre politique et renvoyer les ministres qui n'ont pas sa confiance. En cas de conflit avec le Parlement, c'est le peuple qui tranche. Pour les Républicains, le président n'est qu'une figure symbolique. Il doit nommer des ministres dont les vues doivent être conformes à celle de la Chambre des députés. C'est la seule à représenter la souveraineté nationale car la seule élue au suffrage universel. L'imprécision des textes permet les deux interprétations. De nouveau, les Républicains remportent les élections. En 1879, le renouvellement partiel du Sénat leur permet d'acquérir la majorité dans cette chambre. La victoire des républicains est totale. Désavoué et sans appui, Mac-Mahon démissionne. Son successeur, le républicainJules Grévy renonce volontairement à exercer ses prérogatives constitutionnelles (principalement le droit de dissolution) et s'interdit d'intervenir contre les vœux de l'Assemblée. Le président de la République se cantonne donc à une fonction représentative, laissant le pouvoir au président du Conseil et au Parlement. Les présidents de laIIIe République suivent cette pratique. En dix ans la France est devenue républicaine.
Le, inauguration du monument à la République, tableau d'Alfred Roll.L'école républicaine dépeinte parGeo en 1889.
Les républicains s'attachent à enraciner la République en établissant les grandes libertés : laliberté de réunion et de la presse en 1881, le droit de se syndiquer par laloi Waldeck-Rousseau de 1884, la possibilité de divorcer la même année. Laloi de 1901 sur la liberté d'association permet la formation de partis politiques qui remplacent les groupements informels des clubs et des comités. Les premiers partis à se former sont leparti radical en 1901 et le parti socialiste, laSFIO, en 1905.
Jules Ferry joue un rôle central dans la mise en œuvre de ces évolutions, lui qui poursuit trois objectifs : étendre les libertés, soustraire l'école à l'emprise de l'Église catholique et « relever » la France de la défaite grâce à lacolonisation. Cependant le nom deJules Ferry évoque pour tous les Français l'instauration de l'école gratuite, obligatoire et laïque. En effet, pour rendre la république irréversible, la formation de jeunes générations paraît indispensable. Or l'école est placée depuis laloi Falloux sous l'autorité de l'Église qui s'est toujours montrée une adversaire de la République.Jules Ferry fait voter toute une série de lois portant sur la question scolaire : création de lycées publics pour jeunes filles parCamille Sée en 1880 (même si ceux-ci ne permettent pas de passer lebaccalauréat), instauration de l'école gratuite laïque et de l'instruction obligatoire par leslois Ferry de 1881-1882, laïcisation du personnel enseignant des écoles publiques. L'instituteur devient un des piliers de la République. C'est à lui que revient le devoir d'inculquer aux jeunes élèves la morale républicaine et l'amour de la patrie.
Mais face aux républicains au pouvoir appelés "modérés" ou "opportunistes" par leurs adversaires, une partie du mouvement républicain reste attaché aux convictions des années 1860 et auprogramme de Belleville de 1869 qui a été abandonné au profit du compromis avec les orléanistes. De là nait la division entre républicains modérés et républicains radicaux. En particulier la lutte contre l'influence de l'Église est un thème qui permet l'émergence d'un nouveau parti à gauche de l'échiquier politique, leparti radical. L'attachement des Français à la République n'empêche pas celle-ci d'être secouée par de nombreuses crises dues à la montée dunationalisme (épisodes duboulangisme dirigé par le généralGeorges Boulanger) ou de l'antisémitisme (affaire Dreyfus). Ces événements montrent qu'il existe deux France, l'une conservatrice et revancharde, l'autre acquise aux idéaux révolutionnaires et au progrès social.
Ce sont finalement les progressistes qui l'emportent. Les républicains forment un gouvernement d'union nationale dirigée parPierre Waldeck-Rousseau entre1899 et1902. L'arrivée au pouvoir duparti radical en 1902 accentue la laïcisation de la société. En 1904, les congrégations religieuses n'ont plus le droit d'enseigner et un grand nombre d'entre elles sont expulsées de France. En 1905, sous l'impulsion duprésident du conseilÉmile Combes, L'Assemblée nationale vote la loi deséparation de l'Église et de l'État. Les ministres du culte cessent d'être rétribués par l'État. Les biens mobiliers et immobiliers du culte sont nationalisés et mis à la disposition d'associations cultuelles religieuses après un inventaire de tous les biens nationalisés. Dans quelques régions, les inventaires ont donné lieu à des affrontements violents entre les catholiques et les forces de l'ordre, mais le phénomène reste marginal même s'il a beaucoup frappé les esprits. À partir de 1905, la religion devient une affaire privée.
La paye des moissonneurs, tableau deLéon Lhermitte, 1882.
La France connaît un fort déclindémographique. Alors qu'en 1800, la France était deux fois plus peuplée que l'Allemagne et trois fois plus que le Royaume-Uni, elle compte en 1913 moins d'habitants que chacun de ces deux pays. La France devient le pays du fils unique, protégé, poussé, sur lequel reposent les projets d'ascension sociale de la famille. Lemalthusianisme français s'explique en partie par la volonté de ne pas diviser l'héritage familial. Face à la montée des tensions, la faiblesse démographique de la France inquiète. Pour pallier le manque de soldats, le service militaire est porté à trois ans en juillet 1913. Le recrutement de troupes coloniales a débuté dès la fin duXIXe siècle ; il s'accélère en 1910.
Autre conséquence, le recours à l'immigration, qui apparaît comme une solution au déclin démographique. Elle est encouragée par l'instauration du principe dudroit du sol pour l'obtention de lanationalité française en 1889. En 1914, la France compte 1,2 million d'étrangers venus de Belgique et d'Italie[réf. nécessaire], ce qui suscite une série de réactionsxénophobes (Vêpres marseillaises en 1881, pogrom d'Aigues-Mortes en 1893, etc.).
La France reste ainsi un pays essentiellementagricole, comme le prouve la part du secteur primaire dans la population active (43,2 % en 1906), alors que ce secteur représente moins du quart de la production nationale[réf. nécessaire]. L'exode rural qui a commencé en 1848 continue. Environ 35 000 personnes quittent chaque année les campagnes vers 1900[réf. nécessaire]. Les petites exploitations dominent : 80 % d'entre elles ont moins de10 hectares. Dans les petites exploitations, les rendements sont très médiocres : 13 quintaux de blé à l'hectare en moyenne voire 4 ou 5 dans les régions où les sols sont les plus pauvres. En fait, les petites exploitations pratiquent une polyculture vivrière où seule une petite partie de la production est commercialisée.
Au nord de la Loire existe une agriculture capitaliste et productive. Les années 1900 sont en effet celles d'une timide mutation agricole : semoirs mécaniques, moissonneuses deviennent plus courants dans ces exploitations. Leur poids électoral font des agriculteurs une préoccupation des Républicains. En 1881, leministère de l'Agriculture est créé. Un tarif protectionniste est instauré en 1892 parJules Méline pour protéger les petits agriculteurs de la baisse mondiale des prix agricoles.
Faidherbe forme les fameuxtirailleurs sénégalais qui accompliront la conquête des régions du Niger en 1898 avec des officiers commeGallieni, Voulet-Chanoine, Fourreau-Lamy, Monteil et Gentil. Les Touaregs opposeront une sérieuse résistance. La France confère le statut de « commune française de plein exercice » à Saint-Louis,Gorée et Dakar en 1872 et à la ville de Rufisque en 1880. À compter de ces dates, les habitants de ces quatre communes sont citoyens français avec tous leurs droits et tous leurs devoirs, représentés dans les Assemblées parlementaires de France. À tout cela viendront s'ajouter la conquête du Gabon, du Congo, de la Mauritanie, de la Guinée, de la Haute-Volta, du Tchad, du Dahomey et de l'Indochine. En1914 l'empire français est alors 22 fois plus grand que l'Hexagone.
Les conquêtes coloniales sont entreprises en partie pour des raisons économiques, apporter des matières premières des territoires colonisés à l'industrie française, créer des débouchés grâce aux colonats ou aux colonisés. Elles sont effectuées sous la pression delobby coloniaux commeAfrique française ouAsie française (voir article sur l'Indochine française) dans lesquelles on trouve des banquiers, des hommes d'affaires, des journalistes, des parlementaires et des militaires. À côté de la prétention à apporter la « civilisation » aux peuples « sauvages », les protestations contre cette expansion coloniale sont nombreuses.
L'exposition coloniale de 1931 voit la reconstruction du temple d'Angkor Vat à Paris, mais aussi des zoos humains. Au total cette exposition attire à peu près 8 millions de visiteurs (dont 1 million d'étrangers).
Les manuels scolaires de laIIIe République propagent un discours nationaliste, une large partie de l'opinion publique n'a pas renoncé à récupérer l'Alsace-Lorraine, voire à une revanche contre l'Allemagne.
Uneloi rétablissant le service militaire, supprimé depuis 1815 parLouis XVIII, est adoptée le car une des raisons de la défaite de1871 avait été la déficience de la mobilisation des réserves et l'insuffisance numérique de l'armée française.
Le, leprésident de la République,Armand Fallières, chef constitutionnel des armées, avait déclaré : « Nous sommes résolus à marcher droit à l'ennemi sans arrière-pensée, l'offensive convient au tempérament de nos soldats et doit nous assurer la victoire, à condition de consacrer à la lutte toutes nos forces actives sans exception »[59].
La mobilisation décrétée le suscite cependant la stupeur et la consternation dans certains milieux, notamment dans le monde rural en pleine moisson : l'idée d'une revanche contre l'Allemagne pour reprendre les provinces perdues s'est éloignée peu à peu des jeunes générations. Mais les mobilisés font preuve d'une véritable résolution devant cette guerre à entreprendre : la France fait figure d'agressée par l'Allemagne, de plus beaucoup pensent qu'elle sera courte. Les Français sont décidés à se battre comme en témoigne le nombre dérisoire de déserteurs, 1,5 % des mobilisés, et convaincus dans leur immense majorité de la légitimité de leur cause.
On attendait une guerre éclair, faite de mouvements rapides, mais dans les premiers affrontements entre les armées allemande et française lors de labataille des Frontières (août 1914), la doctrine de l'offensive à outrance adoptée par les états-majors entraîne des pertes humaines considérables, à cause notamment des tirs demitrailleuse : le est le jour le plus meurtrier de l'Histoire de France ; environ 27 000 soldats français sont tués pendant cette seule journée dans lesArdennes belges, soit quatre fois plus qu'àWaterloo. Les soldats seront contraints de s'enterrer dans des tranchées pour se protéger, et le conflit se transformera rapidement en uneguerre de positions.10 départements du nord de la France à l'arrière du front seront occupés par l'Allemagne pendant la durée de la guerre.
Au sortir de la Grande Guerre, la France est victorieuse mais exsangue à la suite des sacrifices humains, financiers et matériels concédés pendant la guerre. La joie de vivre prend le pas sur les heures sombres de la guerre : ce sont lesAnnées folles. La France reste cependant un pays encore en grande partie rural avec une proportion élevée de population vivant de l'agriculture (35 % en 1921 et 25 % en 1936) et ce n'est qu'en 1931 que celle des villes (agglomérations de plus de 2 000 habitants) dépasse celle des campagnes[60].Au niveau politique, les gouvernements deRaymond Poincaré ont pour principal objectif le rétablissement des finances publiques. Pour payer ladette de laPremière Guerre mondiale, laFrance crée unimpôt sur les plus-values et unimpôt sur les sociétés[61], qui s'ajoutent à l'impôt sur le revenu de1914. Majorée de 20 % en mars1924 par la « Chambre bleu horizon » l'imposition marginale supérieure atteint 90 %, contre 2 % dix ans avant[62].
Unecroissance française des années 1920 plus forte que dans les autres pays est stimulée par la multiplication par huit, en une décennie, de la production hydroélectrique. L'électrification facilite la diffusion du cinéma, de la radio et de l'automobile, qui utilise les produits de l'électro-métallurgie.
La France n'est touchée par laGrande Dépression qu'en 1931. La France entre assez tardivement dans la crise, dont elle a apparemment été protégée durant quelques années, lorsque la chute de l'activité économique des autres pays affecte fortement ses exportations. Quand legouvernement britannique décide de dévaluer lalivre le (et de finir l'Étalon-or), les prix français sont trop élevés à l'exportation. La crise entraîne une baisse assez longue de la production industrielle. Entre1929 et1935 laproduction industrielle recule de 25 %. Si la France est plus tardivement et moins profondément touchée par la crise, elle commence plus tard à en sortir, contrairement auxÉtats-Unis ou auRoyaume-Uni. En outre, elle ne met pas en place des politiques de relance comme l'ont fait lesÉtats-Unis avec leNew Deal. En1938, laFrance n'a toujours pas retrouvé son niveau de production d'avant la crise.
La France se dote d'un gouvernement de gauche en1936, le « Front populaire », et de nombreux droits sociaux, tels lescongés payés ou lesconventions collectives, sont institués. Cependant, laFrance se trouve impuissante face aux bouleversements qui touchent au même moment plusieurs pays d'Europe. Elle entame une large politique d'alliance, qui ne mènera nulle part. Elle refuse d'intervenir dans laguerre d'Espagne. Bien plus, traumatisée par la Première Guerre mondiale, elle n'ose pas s'opposer à la politique extérieure agressive de l'Allemagne nazie dont le chef d'État,Adolf Hitler, veut revenir sur letraité de Versailles de 1919 et réunir à sonReich les peuples germaniques limitrophes, en vertu des idéespangermanistes. Coup sur coup, la France laisse l'Allemagne opérer son réarmement (1934-1935),remilitariser la Rhénanie (mars1936) etannexer l'Autriche (mars1938). L'état d'espritpacifiste français atteint un sommet en septembre1938 avec la signature desaccords de Munich permettant àHitler de prendre possession duterritoire des Sudètes sans combattre (au mépris de ces accords, Hitler progressera plus loin enTchécoslovaquie quelques mois plus tard, enmars 1939)[67]. La paix à tout prix était alors le mot d'ordre, mais la signature desaccords de Munich marque la dernière concession faite à Hitler par les diplomaties française et britannique, enfin unies sur ces sujets.
Soldats allemands défilant devant l'Arc de Triomphe à Paris,.
Après avoir déclaré la guerre le à l'Allemagne à la suite de son entrée enPologne, la France tente avec leRoyaume-Uni de secourir laNorvège victime d'un même assaut allemand ; sans succès probant. Cette « drôle de guerre » où il ne se passe pas grand-chose sur le front prend fin le avec une offensive éclair (blitzkrieg) de l'Axe qui conquiert la France (directement la partie nord) en six semaines. Pourtant,Philippe Pétain avait fait construire laligne Maginot le long de lafrontière franco-allemande (il aurait voulu la construire également le long de la frontière belge mais le roiLéopold III voulait conserver la neutralité de son pays). Les Allemands sont passés par laBelgique et la forêt des Ardennes, et grâce à l'aide des chars et de l'aviation, ont réussi à atteindre la France très rapidement et prendre à revers la Ligne Maginot. Les mots sont trop faibles pour relater l'état d'esprit desFrançais et même du reste du monde à l'occasion de cet effondrement: « L'Abîme », pour reprendrede Gaulle, apparaît le plus cohérent. Le corps expéditionnaire britannique se replie avec quelques soldats français sur Dunkerque, puis vers l'Angleterre. Le reste des soldats se bat contre l'avancée inexorable des Allemands. Près de 10 000 000 d'habitants des régions du Nord et du Centre fuient l'avance de l'armée allemande et se réfugient temporairement dans le sud de la France. Quand l'armistice est signé le 22 juin, on compte moins de 100 000 pertes militaires, environ 100 000 pertes civiles lors de l'exode et 1 million et demi de prisonniers.
Les gouvernements concurrents du régime de Vichy et de la France libre
Après le débarquement des Alliés en Normandie, De Gaulle déclare le 14 juin : « Nous combattons aux côtés des Alliés, avec les Alliés, comme un allié. Et la victoire que nous remporterons sera la victoire de la France ». Il s'impose à tous comme l'homme fort français.Roosevelt qui s'était méfié de lui se résout à le recevoir en grande pompe à Washington en juillet1944. De Gaulle a gagné la partie et, fort de l'accord secret conclu avecWinston Churchill, le, la France retrouve bien vite sa position de « grande puissance ».
Fin, le Gouvernement provisoire deCharles de Gaulle s'impose sur le terrain. Il faudra attendre mi-octobre pour qu'il soit officiellement reconnu par lesÉtats-Unis. Il est composé descommunistes, dessocialistes et desgaullistes. L'engagement des communistes français dans la résistance, le courage des soldats soviétiques et la victoire finale de l'URSS et des Alliés procurent aux dirigeants communistes un prestige important dans l'opinion publique. Le gouvernement provisoire (GPRF) accorde notamment le droit de vote aux femmes le, dans l'article 17 de l'ordonnance d'Alger : elles voteront pour la première fois aux élections municipales des et.
En 1946, le Gouvernement provisoire cède la place à la Quatrième République, instaurée par une nouvelle constitution approuvée parréférendum. Mais l'instabilité politique et les divergences concernant les problèmes coloniaux enIndochine et enAlgérie conduisent à des crises ministérielles successives et finalement à la chute du régime.
En matière de politique étrangère, la France entre dans l'OTAN, acceptant même le maintien des bases américaines sur le territoire national. En1956, la mise en échec par les États-Unis et l'URSS de l'intervention franco-britannique sur lecanal de Suez encourage le rapprochement des États européens : le marché commun (CEE) est créé en 1957.
Dès 1940, les Japonais qui occupent l'Indochine française encouragent le mouvement de décolonisation qui aboutira le à la proclamation de l'indépendance duViêt Nam parHô Chi Minh. À partir desannées 1950, leViệt Minh, mouvement nationaliste d'inspiration communiste, est aidé par l'URSS et la république populaire de Chine. Dans le contexte de laguerre froide, la France se trouve placée au premier rang mondial de la lutte contre l'avancée communiste en Asie. Le conflit indochinois se développe et s'amplifie dans un contexte général d'indifférence pour cette guerre lointaine et ruineuse.
En 1954, le généralHenri Navarre, commandant en chef des forces françaises en Indochine, espérant attirer le Viêt-minh sur un terrain où il pourrait le combattre de façon classique, concentre ses troupes dans la cuvette deÐiện Biên Phủ. Le camp retranché de Diên Biên Phu, commandé par legénéral de Castries, comporte les meilleures unités du corps expéditionnaire. Après 55 jours de combats et de nombreuses erreurs stratégiques des dirigeants de l'armée française, les Français, épuisés par huit années de guérilla menée par le généralGiap, sont noyés sous un déluge de feu. Diên Biên Phu tombe le.Pierre Mendès France signe lesaccords de Genève le 21 juillet qui mettent fin à la guerre et, par conséquent, à l'Indochine Française.
Le 7 août, le cessez-le-feu est total en Indochine. La guerre aura provoqué du côté français plus de 75 000 morts et coûté environ 300 milliards de francs.
La guerre d'Indochine est à peine terminée que commence la guerre d'Algérie. Le, une poignée de nationalistes algériens regroupés en Front de Libération National déclenchent l'insurrection en organisant enKabylie et dans lesAurès une série d'attentats qui feront 8 morts. Le Gouvernement Français réagis rapidement. Le gouvernement (Pierre Mendès France) envoie des renforts militaires et prend des mesures répressives.
Le 12 novembre, Mendès-France proclame sa détermination de rétablir l'ordre alors queFrançois Mitterrand, ministre de l'intérieur, affirme que l'Algérie fait partie de la France et qu'il faut tout tenter pour que le « peuple algérien se sente chez lui, comme nous et parmi nous » et propose même, le, que l'Algérie soit intégrée à la France. Cette intégration remettrait en cause le statut de l'Algérie voté en1947 qui avait institué uneAssemblée algérienne comprenant deux collèges de 60 membres — l'un élu par les Français minoritaires, l'autre par les musulmans majoritaires en nombre — qui envoyait six députés à l'assemblée de l'Union française. Ainsi l'idée de remettre en cause les avantages et privilèges de la communauté française provoque un profond mécontentement. Le gouvernement Mendès-France est renversé le.
Les effectifs des forces armées augmentent rapidement.Jacques Soustelle est nommé gouverneur général de l'Algérie. La situation s'aggrave et l'état d'urgence et la censure sont proclamés le 3 avril. Cependant l'intégration semble encore possible jusqu'au déclenchement de la grève générale organisée par leFLN qui marque la coupure définitive entre les deux communautés.Guy Mollet, chef de laSFIO, est pressenti, après les élections législatives de 1956 pour former le gouvernement. Il se rend àAlger le 6 février pour investir le généralCatroux à la place deSoustelle. Il est accueilli par un climat insurrectionnel (Lagaillarde, Ortiz) et se soumet. Il remplace Catroux parRobert Lacoste, bien vu des militaires. Le, l'Assemblée vote les pouvoirs spéciaux au gouvernement. Désormais, Guy Mollet et Robert Lacoste peuvent mettre en place la politique de maintien de l'ordre en Algérie. La spirale des attentats et de la répression s'amplifie. Le pouvoir progressivement passe la main aux militaires. Face à la recrudescence des attentats les parachutistes du général Massu livrent la bataille d'Alger (janvier 1957) au cours de laquelle la torture est souvent utilisée pour avoir des renseignements sur les réseaux. Ce recours à la torture est légitimé par le gouvernement français.
Dans les territoires européens de la République, le fossé se creuse entre partisans de la guerre et opposants (communistes, intellectuels et journaux d'avant-garde). La fraction la plus ultra des partisans est conduite par l'extrême droite (Tixier-Vignancour) relayée parSoustelle etBidault au sein de l'Union pour le salut et le renouveau en Algérie française (USRAF) qu'ils créent. Les positions se durcissent lors de la prolongation du service militaire porté à 27 mois (1957) et du rappel du contingent libéré. De violentes manifestations et des blocages de convois en partance pour l'Algérie ont lieu à l'initiative de la CGT et des communistes. Sur le terrain, le quadrillage et la répression ainsi que la surveillance des côtes par la marine rendent difficile le ravitaillement en armes du FLN. L'audience du FLN diminue cependant que les désertions dans ses rangs et les engagements dans l'armée française se multiplient. Les militaires obtiennent le droit de poursuite sur le sol tunisien et effectuent unbombardement sur Sakiet Sidi Youssef. Mais la France est aussitôt condamnée par l'ONU, ce qui va l'affaiblir politiquement.
Félix Gaillard président du conseil par intérim confie les pleins pouvoirs en Algérie au général Salan, puis au général Massu qui constitue un Comité de salut public. Félix Gaillard est remplacé parPierre Pflimlin. Mais celui-ci jugé trop libéral n'a pas la confiance des militaires. Legénéral Massu, lance alors un appel augénéral de Gaulle lui demandant de former un gouvernement de salut public. De Gaulle répond au cours d'une conférence de presse, le 19 mai, qu'il est prêt à assumer les responsabilités du pouvoir.
En1981,François Mitterrand estélu président de la République, battant le chef de l'État sortantValéry Giscard d'Estaing et ramenant la gauche au pouvoir pour la première fois depuis laQuatrième République. En politique, leParti communiste français entame un long déclin, tandis que leFront national constitue, à l'extrême droite, une nouvelle force. Après deux années de cohabitation durant lesquelles il doit travailler avecJacques Chirac comme premier ministre, François Mitterrand estréélu en 1988 face à ce dernier. La persistance de problèmes sociaux, et notamment duchômage, entraînent en 1993 une nouvelle cohabitation, avecÉdouard Balladur comme premier ministre.
Ayantsuccédé à François Mitterrand en1995,Jacques Chirac est confronté aux mêmes problèmes avant d'être lui-même contraint de cohabiter, durant cinq ans, avecLionel Jospin comme premier ministre. En2002, Jacques Chirac estréélu face àJean-Marie Le Pen, après un premier tour qui aura vu l'élimination surprise de Lionel Jospin.
Depuis les années 1970[76], et comme pour toutes lesnations, la visionnationaliste et mythifiée de l'histoire de France est remise en cause par de nombreux historiens et qualifiée de« roman national » (Pierre Nora)[77],[78] ou de« mythe national » (Suzanne Citron)[79]. Selon les historiens qui ont étudié la construction des histoires nationales le choix d'y inclure ou d'en exclure des personnages, des peuples et des événements ainsi que le point de vue selon lequel ils sont présentés est systématiquement biaisé (voire déformé[80]) vers la légitimité de tout ce qui va dans le sens de l'éternité de la Nation dans ses limites au moins actuelles et l'illégitimité ou l'inexistence de tout ce qui la mettrait en cause.
↑« L'un des plus importants mouvements migratoires serait celui des proto-Indo-Européens caractérisés par les haplogroupes de l'ADN-Y R1a et R1b provenant des peuples des steppes pontiques et asiatiques utilisant des sépultures recouvertes de tumulus, les kourganes »,Jean Chaline (préf. Jean-Louis Beaucarnot),Généalogie et génétique : La saga de l'humanité : migrations, climats et archéologie, Paris,Ellipses,, 471 p.(ISBN978-2-7298-8871-8),p. 307
↑Anne Logeay, maître de conférences à l'université de Rouen, « Aux champs Catalauniques, en 451 Attila prend une déculottée à la romaine », dansHistoria, juin 2007
↑Moins anecdotique et déjà significatif des influences culturelles mutuelles est le nom tout à fait germanique que portait cette pieuse gallo-romaine, « Genovefa ».
↑La chronologie du règne de Clovis est incertaine, vu la médiocrité des sources historiques. Cette date se base sur l'Historia Francorum, livre II deGrégoire de Tours, mais est discutée (Lucien Musset,Les Invasions, les vagues germaniques,PUF, collection Nouvelle Clio – l’histoire et ses problèmes, Paris, 1965,2e édition 1969,p. 390-391)
↑La ate se situerait plutôt entre498 ou499 selon la majorité des historiens, même si certains penchent pour une conversion plus tardive, en505 voire508. CfSylvain Gouguenheim,Regards sur le Moyen Âge,Tallandier,,p. 336
↑Laurence Bénichou, « Militants historiens, ou l’histoire au service du militantisme »,Les Actes de Lecture,no 4,,p. 74-77(lire en ligne)
↑GaëtanLe Porho,Syndicalisme révolutionnaire et éducation émancipatrice : L'investissement pédagogique de la Fédération unitaire de l'enseignement, 1922-1935, Paris, Noir et Rouge & EDMP,, 398 p.(ISBN979-10-93784-11-3,lire en ligne), « L'histoire »,p. 214-235
↑Cette expression aurait été utilisée pour la première fois en 1992 parPierre Nora dans la conclusion du tome final desLieux de mémoire (1992), renvoyant par une note en bas de page à l'ouvrage dePaul YonnetVoyage au centre du malaise français. L'antiracisme et le roman national, qu'il s'apprêtait à édite.cf.Suzanne Citron,Le Mythe national. L'Histoire de France revisitée,Éditions de l'Atelier,,p. 43.