Ungisant est unesculpture funéraire de l'art chrétien représentant un personnagecouché (par opposition àorant oupriant) généralement à plat-dos, vivant ou mort dans une attitude béate ou souriante (par opposition autransi), l'effigie étant habituellement placée sur le dessus d'uncénotaphe ou, plus rarement, d'unsarcophage.
C’est, lorsqu'il existe, l'élément principal de décoration d'untombeau ou d'unenfeu. Les tombeaux à gisant peuvent être au ras du sol comme la plupart despierres tombales mais ils sont le plus souvent sur un socle ou soubassement.
Par extension, un gisant gravé ou sculpté enbas ou demi-relief sur unedalle funéraire peut également représenter l'effigie d'un grand personnage.
Gisant est le participe présent du verbegésir : être couché, étendu (généralement malade ou mort). Le même verbe est employé dans la formule « ci-gît » (ici repose).
Le gisant est généralement associé à l'iconographie médiévale, mais il est une résurgence païenne antique, un débat historiographique existant pour savoir si le gisant médiéval s'inspire du gisant antique. Les gisants étrusques sont éveillés et sur leur séant. Les gisants romains sont représentés dans des attitudes de sommeil ou de convive, à demi-couché sur un « lectus triclinaris »[1].
Au Moyen Âge, les aristocrates français et anglais préfèrent l'embaumement aumos Teutonicus (technique funéraire d'excarnation), pratiquant pour certains une partition du corps (dilaceratio corporis, « division du corps » en cœur, entrailles et ossements[2]) avec des sépultures multiples[3] qui devient à partir duXIIIe siècle un privilège[4] de ladynastie capétienne dans leroyaume de France (majoritairement les rois, parfois les reines ou les proches). Cettedilaceratio permet la multiplication des cérémonies (funérailles du corps, la plus importante, puis funérailles du cœur et funérailles des entrailles) et des lieux (avec un tombeau de corps, un tombeau de cœur et un tombeau d'entrailles[5]) où honorer le roi défunt[6]. Pour chacun de ces tombeaux, on réalise un gisant différent : gisant d'entrailles pour le tombeau des viscères, gisant de cœur pour le tombeau du cœur, et gisant de corps pour le tombeau du reste du corps. On identifie un gisant d'entrailles par la présence d'un petit sac dans une main, et un gisant de cœur par la présence d'un petit cœur ou d'un petit sachet censé le contenir, sculpté dans la main gauche du personnage et posé sur son cœur[7].
Les gisants médiévaux les plus anciens, exécutés dans la pierre, représentent le personnage debout, comme en témoigne la manière dont tombe le plissé des vêtements. À partir duXIIIe siècle, ils sont parfois exécutés dans des matériaux plus précieux (bronze, cuivre doré ou émaillé)[8].
Par la suite, le personnage est représenté couché, mais vivant, à plat-dos, à l'exception des chevaliers anglais desXIIIe siècle etXIVe siècle représentés « en mouvement » (couchés sur le flanc, jambes croisées et dégainant leur épée)[8].
AuxXIIe et XIIIe siècles, beaucoup de tombes sont encore abstraites, portant seulement, par exemple, une croix processionnelle et des feuillages. Lorsque des gisants sont sculptés, ils gardent les yeux ouverts et sont dans l'attente sereine dujugement dernier, leur attitude rappelant celle de personnes vivantes, ce qui suggère une foi chrétienne robuste en la résurrection de la chair à cette époque[9]. Les bras, d'abord le long du corps, sont de plus en plus croisés et les mains jointes, indice d'une participation à lacommunion des saints. Les sculpteurs inventent le sourire auXIIIe siècle[10]. Vers le milieu duXIVe siècle, les sculpteurs ferment leurs yeux, leur donnant l'apparence du sommeil mais pas de la mort. Au cours du dernier tiers duXIVe siècle, on représentera des cadavres réalistes, lestransis avec leurs têtes posées sur un coussin. Originalité duXVIe et XVIIe siècles, le demi-gisant (appelé aussi accoudé), qui s'appuie sur l'un de ses bras, s'inspire de la statuaire étrusco-romaine. À partir duXVIIe siècle, le gisant tend à disparaître au profit de l'orant[11].
Le gisant peut représenter soit le personnage lui-même, habituellement dans une habitude pieuse (joignant les mains, comme pour prier, ou lisant un livre saint), royale (une main tenant le sceptre royal) ou se reposant, ou même le Christ.