Pour les articles homonymes, voirBarenton (homonymie).
Fontaine de Barenton | ||||
La fontaine de Barenton en forêt de Paimpont. | ||||
Localisation | ||||
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Pays | ![]() | |||
Région | Bretagne | |||
Département | Ille-et-Vilaine | |||
Commune | Paimpont | |||
Protection | ![]() | |||
Coordonnées géographiques | 48° 02′ 20″ N, 2° 14′ 49″ O | |||
Caractéristiques | ||||
Type | Fontaine | |||
Altitude | 181 m | |||
Géolocalisation sur la carte :Forêt de Paimpont Géolocalisation sur la carte :Bretagne (région administrative) Géolocalisation sur la carte :France | ||||
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Lafontaine de Barenton est unefontaine qui est à la fois un lieu légendaire dansBrocéliande selon les textes ducycle arthurien, et un site decentre-Bretagne, dans la forêt nommée administrativementforêt de Paimpont. Elle est devenue l'un des sites touristiques liés à la légende arthurienne enBretagne et un des sites deBrocéliande le plus célèbre à travers le monde entier[2].
On rencontre de nombreuses attestations du nom à partir de l'époque médiévale :Berenton,Belenton ouBalenton. Sur les cartes IGN actuelles, on peut trouver la graphieBaranton. Il existe plusieurs hypothèses étymologiques, par le vieux-celtique, le roman ou le breton.
LeBerenton deWace serait à rattacher à la racine indo-européenne*bher-, qui signifie « bouillonner », et au celtiqueandon, qui désigne la source[3]. La racine *berw- se rencontre tant en celtique continental qu'en celtique insulaire : gauloisberu- signifiant « source, fontaine » qui se poursuit dans le mot gauloisberura, berula qui désigne le cresson d'eau, plante qui nécessite de l'eau de source (ce mot se perpétue dans les langues romanes : françaisberle, provençalberlo, espagnolberro « cresson d'eau ») , celtique insulaire : bretonbirviñ "boullir ; bouillonner", galloisberwr, vieux bretonberor, bretonbeler « cresson d'eau ». Ils remontent tous à la racine indo-européenne*bher(u)- « source »[4]. Une autre explication se base sur les formes plus régulières du typeBarenton, qui serait basée sur l'élémentbar- qui désigne un sommet (gauloisbarros « tête », sens métaphorique dans les noms de lieux dansBar-le-Duc,Barre-des-Cévennes, etc., cf. vieil irlandaisbarr « sommet, cime, pointe, bout », gallois, corniquebar « sommet », bretonbarr ar penn « sommet de la tête »[4]), d'où le sens global de « source de la colline ». Une dernière proposition se base sur les variantesBelenton etBalenton et repose sur l'élémentBel- que l'on retrouve dans le nom du dieu gauloisBelenos, ce qui donne la « source de Bel »[5], bien qu'il s'agisse plus probablement d'un simple processus dedissimilation comme dans le vieux bretonberor > bretonbeler. L'explication possible par le breton se fait à partir debarr (sommet, paroxysme" ou de vx-bretonbell "agitation, querelle" (d'où le préfixé mod.arvell) ettonn "flot". Un composé avecandon (supra) est aussi possible[réf. nécessaire]. Quoi qu'il en soit, le lieu est associé à un certain type d'eau bouillonnante.
Il existe en France plusieurs Barenton, dontBarenton (Manche,Barenton 1180) etBarentons, rivière de l'Aisne[6] et on retrouve ce radicalBarent- dansBarentin (Seine-Maritime,Barentini 1006), également dans Barentin, hameau àMeulers (Seine-Maritime)[6], suivi du suffixe gaulois-in-[6]. Cela accréditerait l'idée d'une formation hydronymique enBarant-, suivi d'un suffixe gaulois-on-[6]. Mais la distribution de la racine*ber- n'indique pas à quelle période se serait créé le toponyme, d'autant que les accusatifs latins en-onem se confondent avec le celtique-on-. La question se charge de toute la complexité des légendes.
Le premier texte à citer la fontaine est leRoman de Rou du clerc et poète normandWace de Jersey. Ce long poème enancien français (scripta normande), daté de 1160 ou à peu près, donne en effet :
«
La fontaine de Barenton
sort d'une part lez le perron
aler i solent veneor
a Berenton par grant chalor,
e a lor cors l'eve espuiser
e le perron desus moillier
por ço soleient pluie aveir.»
— Wace, Roman de Rou, vers 11 518 à 11 524[7]
Wace parle de la forêtde Bréchéliant (c'est-à-direBrocéliande), « dont les Bretons vont souvent fablant », et décrit la fontaine comme une « merveille ». D'après son texte, par temps de sécheresse, les Bretons viennent puiser l'eau de cette fontaine et la verser sur le perron pour déclencher la pluie. Désireux de voir le prodige lui-même, Wace raconte plus loin qu'il s'est rendu lui-même sur le site, mais n'a rien trouvé :« fol m'en revins, folie quis, por fol me tins »[8].
Un quart de siècle plus tard, dansYvain ou le Chevalier au lion,Chrétien s'inspire du texte de Wace et développe l'histoire de la fontaine et de son perron, en l'associant à la légende arthurienne. Il décrit la petite chapelle, le pin à proximité où pend un bassin d'or, mais il ne la nomme pas. Étant située en forêt deBrocéliande et pourvue des mêmes caractéristiques merveilleuses, il ne fait pas de doute qu'il s'agit de Barenton.
«
Mesire Yvains chele nuit ot
Mout boin hostel et mout li plot.
Et quant che vint a l'endemain,
Si vit les tors et le vilain,
Qui la voie li enseigna;
Mais plus de .c. fois se seigna
De la merveille que il ot,
Conment Nature faire sot
Oevre si laide et si vilaine.
Puis erra dusque a la fontaine,
Si vit quanques il vaut veoir.
Sans arrester et sans seoir,
Versa seur le perron de plain
De l'yaue le bachin tout plain.
De maintenant venta et plut
Et fist tel temps que faire dut.
Et quant Dix redonna le bel,
Sor le pin vinrent li oysel
Et firent joie merveillouse
Seur la fontaine perillouse.»
— Chrétien de Troyes, Yvain ou le Chevalier au lion[9]
Dans le texte de Chrétien, le chevalierCalogrenant vient à la fontaine, déclenche la tempête, et est défié pour cela par le Chevalier Noir qui le vainc. Le roi Arthur veut voir la merveille et décide d'y aller. Mais le cousin de Calogrenant,Yvain, le devance, déclenche la tempête et combat le Chevalier Noir. Il le vainc et devient forcé d'être le gardien de la fontaine.
En 1128,Huon de Mery vient à la fontaine – ou plutôt prétend venir – mais il ne la nomme pas.Giraud de Barri, contemporain de Wace et de Chrétien de Troyes, parle de la fontaine dans saTopographia Hibernica (Topographie d’Irlande, 1188). Il cite une fontaine en Bretagne armoricaine, dont on arrose la pierre avec des eaux puisées dans une corne de buffle. Aussitôt, la pluie se met à tomber[10]. Dans le conte gallois d'Owein et Luned (débutXIIe) correspondant au roman de Chrétien, Owein remplace Yvain et Cynon remplace Calogrenant. La description de la fontaine dans le conte gallois est néanmoins, selon toute vraisemblance, empruntée au texte de Chrétien de Troyes.
En 1942,Louis Aragon évoque la fontaine dans son poèmeBrocéliande. C'est le titre d'une pièce de Henry de Montherlant, écrite en 1956.
Dès l'Antiquité, cette fontaine est le centre d'institutions sacrées, en lien avec les prétendus pouvoirs miraculeux de ses eaux froides qui se maintiennent toute l'année à une température de10 °C. Elles ont en effet parfois un aspect d'ébullition, surtout par temps orageux, paraissant bouillir sous l'effet de grosses bulles d'azote pur et du gaz carbonique qui s'en échappent[11]. D'autre part, les galets rouges du sol qui évoquent des braises et les brouillards matinaux à l'origine parfois de l'apparition d'un spectre analogue àcelui de Brocken (spectre que les gens du lieu attribuent au roiSalomon de Bretagne), renforcent la croyance aux vertus magiques de cette source[12]. C'est ainsi qu'elle est censée soigner les maladies mentales grâce à un collège de druidesses qui l'utilisaient, d'où le nom du hameau voisin de Folle Pensée[13].
Cette fontaine merveilleuse est mentionnée dans plusieurs sources médiévales, en particulier leRoman de Rou écrit parWace. Elle est citée vers 1160 comme une fontaine pouvant faire tomber la pluie, déclencher la tempête ou un orage. À la fin duXIIe siècle, elle est associée à la légende arthurienne et devient un lieu d'épreuve pour les chevaliers de la cour de Bretagne. Indissociable de la forêt deBrocéliande, elle a néanmoins connu moins de succès que cette dernière. Ainsi apparaît-elle souvent dans les textes médiévaux sans être nommée.
La première tentative de localisation précise arrive tardivement, en 1467. Dans la charteles Usemens de laforest de Brecilien, à l'époque où cette seigneurie appartient à Guy XIV de Laval. Le texte reprend celui de Wace et localise la fontaine dans laforêt de Paimpont :
« …Item auprès du dit breil, il y a un breil nommé le breil de Bellanton, et auprès d’yceluy, il y a une fontaine nommée la fontaine de Bellanton…[…] Item joignant la dite fontaine, il y a une grosse pierre qu’on nomme le perron de Bellanton, et toutes les fois que le seigneur de Montfort vient à ladite fontaine, et de l’eau d’icelle arrose et mouille le perron, quelque chaleur, temps sur de pluie, quelque part que le vent soit, soudain et en peu d’espace, plutôt que le dit seigneur n’aura pu recouvrer son chasteau de Comper, ains que soit la fin d’iceluy jour, plera en pays si abondamment que la terre et les biens estant en icelle en sont arrousées, et moult leur profite. »
— Aurélien de Courson,Le Cartulaire de Redon[14]
La tradition évoque effectivement la fontaine de Barenton comme étant miraculeuse, elle est utilisée commepierre manale, pour faire tomber la pluie. Les seigneurs de Montfort-Gaël s'y rendirent à plusieurs reprises afin de demander la pluie en versant quelques gouttes de l'eau de la fontaine sur un gros bloc de grès appelé aujourd'hui « Perron deMerlin » surplombant la fontaine, Merlin ayant rencontré la fée Viviane assise sur cette pierre[15]. La fontaine est re-popularisée auXIXe siècle par les romantiques et le développement de laceltomanie duXIXe siècle la popularise. Sa localisation est définitivement entérinée parFélix Bellamy[16]. Le 6 novembre 1934, un arrêté classe le site parmi les « monuments naturels et les sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire et pittoresque ». Le massif forestier de Paimpont compte plusieurssources, la fontaine de Barenton n'étant que l'une d'elles. Elle est au-dessus du lieu-dit de « Folle Pensée », à 190 mètres d'altitude, sur le contrefort nord de la Butte de Ponthus qui culmine à 258 mètres.
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