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Fiat 804 | ||||||||
![]() Pietro Bordino sur une Fiat 804 peu avant le GP de l'ACF de 1922. | ||||||||
Marque | ![]() | |||||||
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Années de production | 1922 | |||||||
Classe | Sportive | |||||||
Moteur et transmission | ||||||||
Énergie | Essence | |||||||
Moteur(s) | 6 cylindres en ligne | |||||||
Position du moteur | Longitudinale avant | |||||||
Cylindrée | 1 991 cm3 | |||||||
Puissance maximale | 92 ou 112 ch | |||||||
Boîte de vitesses | Mécanique 4 rapports | |||||||
Masse et performances | ||||||||
Masse à vide | 660 kg | |||||||
Châssis - Carrosserie | ||||||||
Suspensions | À lames semi-elliptiques | |||||||
Freins | À tambours | |||||||
Dimensions | ||||||||
Empattement | 2 500 mm | |||||||
Voies AV/AR | 1 207 mm / 1 207 mm | |||||||
Chronologie des modèles | ||||||||
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LaFiat 804 ou804 Corsa est une automobile de course du début desannées 1920 développée par le constructeur automobile italienFiat. Destinée exclusivement à la compétition, elle s'illustre notamment en 1922 en remportant leGrand Prix de l'Automobile Club de France ainsi que leGrand Prix d'Italie, établissant ainsi la domination de Fiat en Grands Prix devant des constructeurs aussi prestigieux queBallot ouBugatti.
Le règlement de ces Grands Prix ayant, en 1922, fixé la cylindrée des automobiles en lice à 2 litres maximum, le nouveau moteur Type 404 à 6 cylindres en ligne de1 991 cm3 de cylindrée est retenu pour propulser la Fiat 804 ; en réalité, il s'agit simplement du moteur de la802, le Type 402, amputé de deux cylindres et dont la course est diminuée de20 mm. À l'inverse du moteur, le châssis, dont la dénomination « 804 » donne son nom à l’automobile, inaugure une configuration innovante et « élégante ».
Après le départ de l'ingénieurGiulio Cesare Cappa de la direction de la Section Études Spéciales, à l’origine de la Fiat 804, celle-ci est remplacée en 1923 par la805, à laquelle est assigné l'objectif de préserver la compétitivité de Fiat en Grands Prix automobiles.
Pour beaucoup de constructeurs automobiles du début desannées 1900, la compétition est un moyen extraordinaire, si ce n'est un passage obligé, pour se faire connaître et promouvoir ses modèles, une victoire en course permettant de rapidement se forger une réputation. À cette époque, le rendez-vous de toutes les sportives se tient auGrand Prix de l'Automobile Club de France etGiovanni Agnelli, le fondateur deFiat, ne manque pas cette occasion de« prouver l'endurance et la qualité de ses automobiles »[1]. Il s’entoure pour cela de deux pilotes italiens encore célèbres aujourd'hui :Vincenzo Lancia etFelice Nazzaro[1].
Dès lapremière édition en 1906, Fiat engage deux130 HP et celle pilotée par Nazzaro termine certes deuxième, mais à plus de trente minutes du vainqueur ; la Fiat devance néanmoins les automobilesLorraine-Dietrich,Panhard ou encoreBrasier et par ce résultat, le constructeur italien non seulement gagne en reconnaissance, mais endosse également l'habit du concurrent sérieux. Cependant, c'est véritablement en 1907 que se situe l'apogée de Fiat en compétition ; Felice Nazzaro s'adjuge en effet la victoire au GP de l'ACF, à laTarga Florio et auKaiserpreis, soit les trois plus importantes courses de l'époque[2].
Les années qui suivent sont des années de transition pour Fiat : les deux pilotes Lancia et Nazzaro quittent Fiat au début des années 1910 pour fonder leur propre entreprise, l'Automobile Club de France ne parvient pas à organiser de Grand Prix en 1909 faute d'un nombre suffisant de participants et l'Italie, comme beaucoup d'autres pays, se prépare à affronter unconflit mondial qui va l’occuper jusqu'en1918. Si Fiat remporte tout de même quelques succès — Victor Hémery remportant notamment sur une Fiat de tourisme leGrand Prix de France 1911 —, il faudra attendre, à l'instar des autres constructeurs européens, le début des années 1920 pour faire son retour officiel en compétition[3],[4].
Étonnamment, c'est aux500 miles d'Indianapolis que Fiat signe son retour en compétition, et il faut attendre l'année 1921 pour que soit conçue une automobile destinée spécialement aux Grands Prix européens, entièrement nouvelle car devant se conformer au règlement défini par l'Association internationale des automobiles clubs reconnus. Pour 1922 elle fixe à deux litres la cylindrée maximum et à650 kg le poids minimum des automobiles en lice, de façon à limiter les accidents[3],[2],[5] : la Fiat 804[6].
En 1922, l'histoire de l'automobile s'étale sur moins d'une trentaine d'années et il n'est donc pas étonnant que, du point de vue technique, la Fiat 804 ne soit pas fondamentalement différente des premièresautomobiles à essence, sa partie mécanique se résumant essentiellement au moteur. Ce dernier, dénommé « Type 404 », a été conçu par l'ingénieur italienGiulio Cesare Cappa sur la base moteur Type 402, un 8 cylindres en ligne ayant déjà fait ses preuves sur d’autres modèles[7].
Le règlement desGrands Prix limitant lacylindrée des moteurs engagés en compétition à 2 litres, Cappa décide de retirer deux cylindres au moteur 402. Cette modification ne suffisant pas pour atteindre la cylindrée requise, il diminue également lacourse du moteur, la faisant passer de120 mm à100 mm[7], ce qui donne un rapport course/alésage de 1,54 pour une cylindrée totale de1 991 cm3. Cappa emprunte également au moteur Type 403 les dernières technologies dont il est doté — l'articulation deslinguets, les trois ressorts de rappel dessoupapes et lespistons ajourés — pour les greffer au moteur 404[7]. Celui-ci pèse finalement170 kg[7].
Si le moteur de la 804, malgré sa nouvelle dénomination 404, n'adopte aucune architecture réellement innovante, Fiat en revanche inaugure sur la voiture une nouvelleboîte de vitesses, toujours équipée de 4 rapports mais à levier central, en remplacement de celles équipant les Fiat 801, 802 et 501SS[7]. Le châssis, dénommé 804, est certes d’une « construction classique », mais sa structure est inhabituelle : leslongerons sont en effet agencés parallèlement aux ressorts des suspensions avant (des ressorts à lames semi-elliptiques, comme à l'arrière) avant de suivre la carrosserie jusqu'à la pointe, dite « Bordino »[7]. Quelques détailsaérodynamiques font par ailleurs la particularité de la 804 : les échappements notamment, qui sont intégrés dans une conduite profilée rivetée le long du flanc gauche de la carrosserie[7].
Testé sur banc le[7], le moteur 404 développe67 ch (49 kW) à3 000 tr/min ; cependant, grâce entre autres à sa course réduite lui permettant des régimes plus élevés, il atteint une puissance maximale de92 ch (68 kW) à5 000 tr/min, soit seulement200 tr/min avant le régime-moteur maximal[7]. Le poids total de l’automobile étant par ailleurs limité à660 kg, soit seulement10 kg au-dessus de la limite fixée par le règlement, la vitesse maximale atteinte est de170 km/h[7],[8].
En 1922, Fiat engage auGrand Prix de l'Automobile Club de France trois automobiles 804 pilotées parPietro Bordino, Biago Nazzaro et son oncleFelice Nazzaro ; Ce dernier, qui a déjà couru pour Fiat dans les années 1900, signe à nouveau un contrat avec le constructeur italien pour disputer le GP de l'ACF 1922 ainsi que leGrand Prix d'Italie 1922[9]. L'épreuve française, à laquelle participent notamment les deux principaux concurrents de Fiat, les constructeursBallot etSunbeam, a lieu le 15 juillet àStrasbourg[9],[5].
Sous une pluie battante, les automobiles débutent le GP de l'ACF par un départ groupé et Felice parvient rapidement à prendre la tête, favorisé par un placement chanceux[10],[11]. Quelques tours plus tard, marqués en particulier par l'abandon de deux Sunbeam en raison d'un problème de soupape, il est rejoint par Bordino et Biago Nazzaro. Les trois pilotes Fiat vont alors mener la course pendant près de quarante tours — au cours desquels la plupart des automobiles concurrentes sont victimes de différents problèmes techniques[10],[5] — avant que Biago soit lui-même victime, au cinquante-troisième tour, d'un accident qui va lui coûter lavie : le train arrière de sa 804 se rompt dans une ligne droite et perd une roue, et l'automobile percute un arbre à pleine vitesse[5]. Au dernier tour de l'épreuve, Bordino est lui aussi victime de la même défaillance mais réussit à arrêter sa voiture, indemne ; il ne termine pas la course[10],[5]. Felice Nazzaro remporte la victoire avec une avance d'une heure sur ses deux poursuivants, desBugatti Type 30[10].
En dépit du décès de Biago, Fiat aligne à nouveau trois automobiles 804 — au châssis remanié pour éviter les incidents survenus au GP de l'ACF — au départ duGran Premio d'Italia 1922 (Grand Prix d'Italie) qui se tient le 10 septembre sur le tout nouveaucircuit de Monza[12]. Felice Nazzaro et Pietro Bordino sont une nouvelle fois présents, accompagnés d'Enrico Giaccone sur la troisième automobile. La puissance du moteur est portée à112 ch (82 kW)[12]. De façon inattendue, la domination de Fiat au Grand Prix de l'ACF suscite de très nombreuses défections pour le GP d'Italie :Ballot,Benz,Bianchi,Bugatti,Mercedes,Rolland-Pillain etSunbeam annoncent ainsi leur retrait de la course.Austro-Daimler est contraint également de quitter la course à la suite d'un accident lors des essais[12]. En fin de compte, seules 7 automobiles dont 2 Fiat prennent le départ : la Fiat 804 de Giaccone ne peut en effet prendre le départ en raison d'unembrayage défaillant. Au bout de 80 tours,Pietro Bordino termine en tête, suivi deFelice Nazzaro[12],[note 1].
Année | Épreuve | Position | Pilotes | Équipe | Modèle |
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1922 | Grand Prix de l'ACF | 1er | ![]() | ![]() | Fiat 80492 ch |
Grand Prix d'Italie | 1er | ![]() | ![]() | Fiat 804112 ch | |
2e | ![]() | ![]() |
Si les succès de la Fiat 804 aux deux principaux Grands Prix de la saison 1922 permettent de« redorer le blason de Fiat »[13], ils provoquent en revanche d'importants bouleversements dans les bureaux d'études du constructeur italien. Le principal concerné estGiulio Cesare Cappa, toujours à la quête d'innovations, désire entre autres abandonner l'architecture vieillissante du moteur 404 (issu des moteurs 402 et 403) pour une nouvelle. Cette idée déplait à Guido Fornaca, l'un des dirigeants de Fiat, qui considère à l'inverse qu’il est préférable d'améliorer les technologies existantes ayant fait leurs preuves, afin de garantir à Fiat de nouveaux succès en compétition, vitaux pour les ventes d’automobiles de tourisme[13].
Se sentant les mains liées, Cappa décide de quitter son poste à la direction de la Section Études Spéciales pour ne plus se consacrer qu'aux automobiles de tourisme, espérant ainsi pouvoir y marier conception élégante et haute technicité[13] ; de cette volonté naîtront d'ailleurs lesFiat 519 et509. Mais encore une fois, cette vision s'oppose à celle de Fiat dont l'objectif est de produire des modèles de très grande série, aux exigences techniques limitées. Frustré, Cappa quitte définitivement Fiat le 6 février 1924[13]. Pour sa part, Vincenzo Bertarione, le superviseur des moteurs 402/403/404, avait quitté Fiat dès la fin 1922 en raison du refus d'une augmentation demandée à la suite des victoires en Grands Prix[13].
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