Ces sommets entre exécutifs des États membres ont pour but de définir les grands axes de la politique de l'Union européenne, essentiellement en matière de politique étrangère. Ils servent également tous les cinq ans à la nomination, à la majorité qualifiée, duprésident de la Commission européenne, décision ensuite validée par un vote duParlement européen.
Le Conseil européen siège au sein dubâtiment Europa, au 175rue de la Loi, àBruxelles. À l'instar des autres institutions européennes, le Conseil européen est ouvert au public et des visites y sont organisées[1].
En 1959-1961, le président françaisCharles de Gaulle souhaitait revenir sur le caractère supranational de laCommunauté économique européenne et transformer sa structure afin qu'elle devienne plus intergouvernementale[2],[3]. Il déclara par ailleurs :« se figurer qu'on peut bâtir quelque chose qui soit efficace pour l’action et qui soit approuvé par les peuples en dehors et au-dessus des États, c'est une chimère »[4],[3]. La coopération en matière économique, culturelle, de relations étrangères, et en matière de défense reste cependant possible sur le plan intergouvernemental[5]. Il appelait à l'établissement d'un« concert organisé régulier des Gouvernements responsables »[4]. Cette position fut cependant mal accueillie par les partenaires de la France notamment car elle signifierait la fin de l'indépendance de la CEE ainsi qu'un retour aux négociations où« chaque État défend[rait] âprement son propre intérêt »[6].
Les six États membres des Communautés se retrouvent les 10 et 11 février 1961 lors d’un Sommet à Paris[7]. L'objectif était de déterminer une méthode pour la mise en place d’une coopération politique renforcée. La proposition française souhaitait placer les Communautés entre les mains des chefs d’État et de gouvernement. À la demande des Pays-Bas, la forme que devait prendre le développement futur des Communautés devait être traité lors du sommet[8].
Un second sommet se tint le 19 juillet 1961 àBonn. Selon les conclusions de ce sommet, les chefs d’État et de gouvernement souhaitaient former une union politique et, afin d'y parvenir, organiser des réunions régulière afin de partager leurs opinions et coordonner leur politique[9].
Lors du Sommet à Paris de février 1961, le président françaisCharles de Gaulle soumet à ses partenaires, la création d’une Commission d’études composée de représentants des six gouvernements qui aurait en charge l’étude des modalités d’une coopération diplomatique et politique entre les États membres de la Communauté économique et européenne (CEE)[10].
Cette proposition prend forme, avec une commission d’études présidée parChristian Fouchet (diplomate français et ancien député gaulliste) d’oú le nom : Comité Fouchet. Celui-ci crée deux sous commissions pour organiser le travail[10].
Le premier projet du Comité est présenté le 2 novembre 1961. Celui-ci propose la création d'une union politique dans laquelle les chefs d’État et de gouvernement des États membres prendraient des décisions en matière de politique étrangère et de sécurité et coopéreraient dans les domaines culturel, scientifique, démocratique, des droits de l'homme et des libertés fondamentales. De plus, le Conseil se réunirait tous les quatre mois ou à la demande de réunion d’un État membre[11]. Enfin, les décisions seraient prises à l'unanimité (avec l'abstention possible d'un ou deux États, mais dans ce cas, la décision ne les contraindrait pas). Un second projet est publié le 18 janvier 1962[12], il inclut des aspects économiques de l'intégration européenne dans le projet d'union politique intergouvernementale[13].
Cependant, la Belgique, l'Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas rejettent les propositions car celles-ci entraîneraient une détérioration du caractère supranational des Communautés (avec l'inclusion de l'économie dans le domaine intergouvernemental) mais également car le gouvernement français refusait d'entamer les négociations d'adhésion du Royaume-Uni[13].
Le 20 janvier 1962, les cinq partenaires de la France dévoilent un projet de traité disposant les éléments suivants : le Conseil serait formé des représentants des États membres et n'empièterait pas sur les compétences des Communautés, les décisions adoptées à l'unanimité (pouvant être levée exceptionnellement) et qu'une « union d’États et des peuples européens » devaient être créées (le plan Fouchet parlait simplement d'« Union d’État »)[14].
En juillet 1969, le ministre français des Affaires étrangères françaisMaurice Schumann propose la tenue d'une conférence entre les chefs d’État et gouvernement afin de discuter de l'approfondissement et de l'élargissement des Communautés[15].
Le sommet de Paris du 19 au 21 octobre 1972 eut lieu à l'initiative duParlement européen[17] avec le soutien du président françaisGeorges Pompidou en août 1971 et par le président de la CommissionFranco Maria Malfatti[18]. LeDanemark, l'Irlande et leRoyaume-Uni participaient également aussi aux discussions car leurs traités d'adhésion respectifs avaient été signés[18]. Les conclusions de ce sommet étendirent les attributions des institutions par l'interprétation et l'utilisation la plus large des dispositions du traité, dont l'article 235 du traité CEE[N 1],[19].
En 1973,Jean Monnet, alors président du Comité d'action pour les États-Unis d'Europe, reçut le rapport du chancelier allemandWilly Brandt et du Premier ministreEdward Heath qui proposait d'organiser des réunions périodiques. Jusqu'alors, les réunions avaient un caractère occasionnel. Cependant, les États formant le Benelux apportaient des réticences[20].
Laguerre du Kippour, suivie par la crise énergétique, et le silence de l'Europe dans ce conflit, convainquirent Georges Pompidou que des réunions régulières traitant des problèmes mondiaux devaient avoir lieu[20]. Il souhaitait qu'un sommet soit organisé avant la fin de l’année 1973 (avant la visite possible de Richard Nixon en Europe, prévu au début de l'année 1974)[21].
Le 2 novembre 1973, le Premier ministre danoisAnker Jørgensen (dont le pays présidait le Conseil de l'UE), après avoir reçu une lettre du président Pompidou, demanda l'organisation d'un sommet[22]. Durant une rencontre du Conseil des Affaires étrangères, les ministres des Affaires étrangères s'accordèrent pour que le sommet des 13 et 14 décembre 1973 donne« l'impulsion politique nécessaire […] pour amener les institutions communautaires à prendre des décisions sur des sujets […] difficiles »[22]. La seule décision prise fut que les chefs d’État et de gouvernement devaient se réunir plus souvent[23].
En 1974, de nouveaux chefs d’État et gouvernement participent au Conseil européen, dontValéry Giscard d'Estaing etHelmut Schmidt. Ils considéraient qu'une unification européenne approfondie nécessitait de forts engagements politiques en matière financière, monétaire, énergétique et économique. Selon eux, il était nécessaire de ramaner ces domaines dans la sphère du politique car il ne pouvait pas envisager d'autre méthode[24].
Valéry Giscard d'Estaing accepta la proposition de Jean Monnet de créer une autorité européenne composée des chefs d’État et de gouvernement. Il soulignait d'ailleurs que, de 1969 à 1974, les dirigeants des Communautés ne s'étaient réunis que trois fois alors qu'ils avaient rencontrés maintes fois les présidents américains et de l'URSS[25]. Il considérait cela comme« une anomalie pour l'Europe de voir ses chefs de gouvernement ne se rencontrer que trois fois en 5 ans »[25].
Giscard d'Estaing proposa de mettre en œuvre les élections au suffrage universel direct au Parlement européen[N 2], d'augmenter le nombre des domaines dont les décisions seraient prises à la majorité qualifiée et de renforcer l'intégration politique[N 3]. Ce dernier point anticipait la création d'une structure intergouvernementale : le Conseil européen. Les autres États considérèrent ces propositions acceptables[26].
Les deux principales conséquences dusommet de Paris des 9 et 10 décembre 1974 sont l'introduction de la périodicité dans les rencontres des dirigeants des États membres, et la « banalisation » de ces réunions[27],[28]. D'après le communiqué final :« les chefs de gouvernement ont, en conséquence, décidé de se réunir, accompagnés des ministres des affaires étrangères, trois fois par an et chaque fois que nécessaire, en Conseil de la Communauté et au titre de la coopération politique »[29].
Le paragraphe 2 du communiqué final faisait quant à lui référence à une « approche globale des problèmes internes » par laquelle les dirigeants européens souhaitaient limiter l'influence des experts dans le processus de décisions en établissant des objectifs globaux laissant suffisamment de manœuvrabilité aux institutions européennes[30].
Par ce sommet, le Conseil européen fut formalisé.Jean Monnet considérait sa création comme la« décision la plus importante en faveur de l'union de l'Europe » depuis le traité de Rome[31]. À l'inverse, le Premier ministre luxembourgeoisGaston Thorn mit en garde contre le risque que leConseil des ministres consulte le Conseil européen pour les questions politiques importantes nécessitant une décision[32].
En 1987, une légère évolution eut lieu. En effet, la position du président en tant que membre du Conseil européen fut entérinée dans l'Acte unique européen qui disposait que le Conseil européen se composait des « chefs d’État et de gouvernement et du président de la Commission des Communautés européennes »[33]. D'un point de vue légal, le président de la Commission avait un statut égal à celui de chef d’État ou de gouvernement et participait pleinement à l'adoption d'une décision par consensus. Cependant l'Acte unique restait muet sur les compétences du Conseil européen[34].
Réunion du Conseil européen présidée par le Premier ministre belgeWilfried Martens avec le chancelier allemandHelmut Kohl en juin 1987.
Il faut attendre letraité de Maastricht pour consacrer officiellement le rôle politique du Conseil européen : « le Conseil européen donne à l'Union les impulsions nécessaires et en définit les orientations politiques générales »[35].
« Le Conseil européen réunit les chefs d'État ou de gouvernement des États membres ainsi que le président de la Commission. »
— Disposition communes, article D, traité de Maastricht
Depuis le début desannées 2000, le Conseil européen a pris de l'importance, notamment en participant à la stratégie de Lisbonne élaborée par laCommission européenne. Cette stratégie expérimente un mode de fonctionnement appeléméthode ouverte de coordination (MOC) qui vise à harmoniser les politiques nationales.
Avant le, laprésidence du Conseil européen était attribuée à l'exécutif de chaque État membre de l'Union (en synchronisation avec le Conseil de l'Union Européenne), pendant six mois à tour de rôle. Il s'agissait d'une présidence tournante synchronisée avec celle duConseil des ministres. Les changements de présidence s'effectuaient chaque année, pour les deux institutions en même temps, le1er janvier et le1er juillet : alors que le chef d'État ou de gouvernement de l’État exerçait la présidence des sommets, son ministre des Affaires étrangères exerçait celle du Conseil des ministres.
Avec les différents élargissements, le principe de la présidence tournante devenait difficilement gérable dans uneUnion européenne à 27. Tout en conservant la présidence tournante pour le Conseil des ministres, letraité de Lisbonne a institué un président stable pour le Conseil européen dans le but d'assurer une visibilité et une permanence à l'organe rassemblant les chefs d'État ou de gouvernement[37].
La nomination du premier président ne s'est toutefois pas fait au moyen de la procédure de majorité qualifiée mais par consensus[38] après des réunions bilatérales secrètes notamment car les gouvernements allemand, britannique et français ont conclu ungentlemen's agreement selon lequel ils ne soutiendraient pas de candidat qui ne serait pas convenable pour l'un d'eux[39],[40],[41]. FinalementHerman Van Rompuy fut choisi et prit ses fonctions le[42].
Depuis le traité de Lisbonne, l'article 15 du TUE dispose que le Conseil européen se compose duprésident du Conseil européen, élu pour un mandat de deux ans et demi renouvelable une fois, des chefs d’État et de gouvernement ainsi que du président de la Commission. L'article précise cependant que leHaut Représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité participe à ses travaux. Enfin, des ministres et des membres de la Commission, autre que le président de la Commission, peuvent être invités à assister à certaines rencontres sur des sujets particuliers. Il y a donc une distinction entre les membres du Conseil européen et ceux qui, pour diverses raisons, peuvent assister aux réunions.
Après les suggestions du ministre britannique des affaires étrangèresJack Straw, le président françaisJacques Chirac proposa que les dirigeants européens élisent une personne pour représenter l'Union européenne[43]. Le Premier ministre espagnolJosé María Aznar reprit cette idée en ajoutant des conditions : le président du Conseil européen ne doit pas détenir de mandat national et doit être un ancien chef d’État ou de gouvernement[43]; il souhaitait également doter le Conseil européen d’un pouvoir de dissolution du Parlement, à l'initiative de la Commission[43].Tony Blair, alors Premier ministre britannique, critiqua à son tour la présidence tournante du Conseil européen, copiée sur le modèle de laprésidence du Conseil de l'Union européenne[43]. La proposition de ces trois hommes était connue sous le nom « ABC », du nom de ces trois derniers dirigeants[43].
À la suite de ces demandes, des discussions furent lancées. La Commission proposait de retenir la présidence tournante[44]. Dans un avis publié le 11 décembre 2002, les États du Benelux déclaraient qu'ils n'accepteraient en aucun cas qu'un président non-membre du Conseil soit élu. Néanmoins, le 16 janvier 2003, le chancelier allemandGerhard Schröder et le président françaisJacques Chirac déclarèrent tous deux que le Conseil européen devait élire son président pour un mandat de 5 ans, ou un mandat renouvelable de deux ans et demi[43].
L'idée fut retenue par letraité établissant une Constitution pour l'Europe qui déclarait que le Conseil européen élirait son président à la majorité qualifiée pour un mandat de deux ans et demi renouvelable une fois[45]. D'après le traité, le président serait membre du Conseil européen, mais ne pourrait pas prendre part au vote, à l'instar du président de la Commission[45].
Le président de la CommissionRomano Prodi rejetait l'idée du système proposé car le président du Conseil manquerait de légitimité démocratique car, à l'inverse du président de la Commission qui est responsable devant le Parlement européen, il ne serait responsable que devant le Conseil européen[46].
Letraité de Lisbonne a repris les dispositions du traité constitutionnel.
L'article 15 §5 du TUE dispose que le président du Conseil européen est élu à la majorité qualifiée pour un mandat de deux ans et demi renouvelable. En accord avec la même procédure, le Conseil européen peut mettre un terme au mandat du président en cas d'empêchement ou de mauvais comportement présentant un caractère sérieux et grave[47]. Dans une déclaration concernant les dispositions du traité, il est en plus dit que, lors de la nomination du président du Conseil européen, mais aussi du président de la Commission et du Haut-Représentant, la diversité géographique et démographique de l'Union devait être prise en compte[48] de même que les partis politiques[49], le sexe des candidats[50], la taille de l’État membre d'origine, et probablement d'autres éléments tels que la neutralité militaire de l’État membre[51]. L'élection du président du Conseil européen ne doit pas être approuvée par le Parlement[51].
Le président ne peut pas détenir une fonction nationale pendant son mandat afin d'être détaché des intérêts nationaux[37]. Bien que cela ne soit pas prévu dans les traités, il peut cependant occuper d'autres fonctions au niveau européen[52],[N 4].
Au cas où ses fonctions prendraient fin de manière anticipée pour cause de maladie ou de décès, les fonctions de président doivent être exercées, pendant l'intérim, par le chef d’État ou de gouvernement de l’État membre ayant la présidence du Conseil de l'Union européenne[53].
Il a pour fonction de présider le Conseil européen et diriger ses travaux, d'en assurer la préparation et la continuité avec l'aide du président de la Commission. Il doit faciliter le consensus lors des rencontres et faire un rapport au Parlement européen après chacune d'elles[42]. Le président du Conseil européen dispose, à l'instar du président de la Commission, d'uncabinet composé de 17 membres, 8 assistants, trois huissiers, et deux conducteurs[N 5],[37].
D'après le rapport du Comité chargé des affaires constitutionnelles, le président du Conseil européen doit représenter l'Union au niveau des chefs d’État et de gouvernement dans les domaines concernant laPESC, mais il n'est pas en mesure de mener les négociations politiques au nom de l'UE[54]. De même, il aurait aussi pour fonction de représenter l'Union lors de certains évènements internationaux[54].
D'aprèsKoen Lenaerts,Jean-Marc Binon etPiet Van Nuffel, le fait de ne pas confier au président du Conseil européen un rôle dans les procédures traduit l'absence de volonté de donner au président du Conseil européen un vrai rôle politique afin de ne pas en faire un « président de l'Union européenne »[55].
La présence de tous les chefs d’État et de gouvernement aux réunions est importante afin d'établir un consensus[56]. Il est donc rare que l'un d'eux ne se présente pas aux réunions. Ainsi, lorsque leTaoiseachCharles James Haughey ne s'est pas présenté au Conseil européen de Luxembourg du 29 au 30 juin 1981, il fut lourdement critiqué à Dublin[57]. En dépit de cela, leur absence n'empêche pas la tenue du Conseil[58].
Cependant, il est arrivé qu'un chef d’État ou de gouvernement quitte la salle de réunion lors du Conseil soit en signe de protestation, à l'instar duTaoiseachGarret FitzGerald marquant son désaccord sur les quotas laitiers[59], soit du fait d'autres obligations tel que chancelier allemandGerhard Schröder qui devait se rendre auBundestag (à cette occasion, le chancelier demanda à son homologue français, le présidentJacques Chirac de le représenter pour le reste de la réunion)[60].
Ce dernier point est aujourd'hui prévu à l'article 235(1) du TFUE qui dispose que,« en cas de vote, chaque membre du Conseil européen peut recevoir délégation d'un seul des autres membres ». Cependant, le vote ne peut avoir lieu que si deux tiers des membres du Conseil européen sont présents.
La position nationale des membres du Conseil européen varie en fonction du système politique en vigueur dans chacun des États membres.
Lorsque l'État membre est unemonarchie, le chef de gouvernement, et non le chef d’État (Reine, Roi ou Grand-Duc dans le cas du Luxembourg), siège au Conseil européen[59].
En 1974, lors du communiqué final du sommet de Paris, il était écrit :« les chefs de gouvernements décident de se rencontrer […] trois fois par an… » sans référence aux chefs d’État[29]. En 1974, le seul chef d’État de la CEE qui avait un important pouvoir politique était leprésident de la République française[61]. L'expression« chef de gouvernement » fut interprété par Valéry Giscard d'Estaing comme désignant« celui qui préside le Conseil des ministres au niveau national », tâche qui incombe, en France, au chef de l’État[62]. Bien que théoriquement le chef du gouvernement français soit le Premier ministre, dans la pratique constitutionnelle de laVe République, le président exerce la fonction[63].
Lors de la premièrecohabitation de laVe République, le président français François Mitterrand et le premier ministre Jacques Chirac participèrent tous les deux aux sessions du Conseil européen de la réunion du Conseil européen de La Haye du 26 et 27 juin 1986 au Conseil européen de Bruxelles du 11 au 13 février 1988[64]. Par conséquent, le ministre français des affaires étrangères n'assistait pas aux réunions[65]. Étant de deux partis politiques différents, François Mitterrand et Jacques Chirac défendaient alors chacun un point de vue opposé[57].
Depuis le, le président français n'est plus le seul chef de l’État à assister aux réunions du Conseil européen. En effet, les chefs d’État suivant assistent aux réunions :
àChypre, leprésident de la république de Chypre représente l’État[66]. Le Conseil des ministres exerce le pouvoir exécutif dans les affaires étrangères mais il est pour autant sujet au pouvoir exécutif exclusivement réservé au président et au vice-président[67]. C'est donc le président qui siège au Conseil européen.
enFinlande, la politique étrangère est dirigée directement par leprésident de la république de Finlande en collaboration avec le gouvernement[68]. Par conséquent, le président et le Premier ministre finlandais siègent tous deux au Conseil européen[69].
enLituanie, leprésident a pour fonction de représenter l’État ainsi que d'établir la ligne directrice de la politique étrangère[70]. À l'inverse, le gouvernement a pour fonction de maintenir les relations diplomatiques[71]. Il n'y a pas de règles claires concernant la personne représentant la Lituanie aux sessions, ainsi lorsqu'une question importante était traité, le président, lePremier ministre et le ministre des affaires étrangères assistaient aux réunions. Pour les questions moins importantes, la délégation se composait soit du couple « président-Premier ministre » soit du couple « Premier ministre-ministre des Affaires étrangères »[72].
enPologne, leprésident est le représentant suprême de la Pologne[73], notamment en ce qui concerne les affaires étrangères[74]. Cependant, cette représentation n'est pas strictement exclusive car le président doit coopérer avec leprésident du Conseil des ministres et le ministre compétent dans la conduite des affaires étrangères[75]. Ainsi, la Pologne a, tour à tour, été représentée par son président ou par son Premier ministre.
enRoumanie, leprésident a pour fonction de représenter l’État[76] tandis que lePremier ministre est le chef du gouvernement et coordonne ses activités[77]. La plupart du temps, le président représente la Roumanie, cependant il arrive que le Premier ministre et le ministre des affaires étrangères siègent à sa place, voire qu'ils siègent tous les trois[72]. Lorsque le président et le Premier ministre ne sont pas d'accord, le mécanisme constitutionnel est bloqué car le partage de compétences entre eux n'est pas clair cependant, jusqu'à présent, la Roumanie a parlé d'une seule voix[72].
enTchéquie, leprésident et leprésident du gouvernement ont tous les deux le droit de représenter leur État[78]. Normalement, le Premier ministre assiste aux réunions du Conseil, cependant, il est arrivé que ce soit le président qui siège à sa place[78].
Les chefs d'État et de gouvernement du Conseil européen sont généralement membres d'un parti politique national et, dans la plupart des cas, ce parti est membre d'un parti politique européen. Les membres se réunissent régulièrement par tendance politique avant un Conseil européen.
Les tableaux ci-dessous montrent le rapport de force entre partis et groupes au sein du Conseil européen même si ses membres représentent en premier lieu leur État membre et non pas un parti ou un groupe :
La présence du président de la Commission européenne au Conseil européen est entérinée par l'Acte unique européen à la demande des États duBenelux[33]. D'un point de vue légal, le président de la Commission a, jusqu'à l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, un statut équivalent à celui des chefs d’État et de gouvernement. Depuis l'entrée en vigueur du traité, il n'est plus autorisé à voter[79].
Le président de la Commission n'est pas en mesure de bloquer la prise de décision au sein du Conseil européen en cas de désaccord[80]. Cependant, il cherche à influencer le résultat des délibérations avec le soutien d'un ou plusieurs États membres[81].
Avant l'acte unique européen, les chefs d’État et de gouvernement étaient accompagnés des ministres des affaires étrangères depuis lesommet de Paris de 1957. Alors que Valéry Giscard d'Estaing souhaitait que les réunions au sommet ne concernent que les dirigeants, les petits États membres étaient en faveur d'une pleine participation des ministres des Affaires étrangères[82]. De plus, Giscard d'Estaing dut prendre en compte l'obligation constitutionnelle néerlandaise selon laquelle le Premier ministre ne pouvait se rendre à un sommet sans la présence de son ministre des Affaires étrangères. Le fait que le Premier ministre danois n'ait aucune compétence en matière de politique étrangère devait aussi être pris en compte. Finalement, les ministres des Affaires étrangères furent invités[82].
Lors du communiqué final du sommet de Paris de 1974, le point 3 précisait que les ministres des Affaires étrangères, se réunissant au sein duConseil des Communautés, agiraient comme initiateurs et coordinateur des travaux et activités de la Communauté. Ils n'étaient donc pas au même niveau que les chefs d’État et de gouvernement car leur rôle était de les « accompagner »[82].
Depuis l'acte unique et jusqu'au traité de Lisbonne, les dirigeants devaient être « assistés » par les ministres des Affaires étrangères, ce qui n'a pas la même portée que l'emploi du terme « accompagner » utilisé dans le communiqué de 1974. Cette différence impliquait que la présence des ministres des Affaires étrangères n'était obligatoire que lorsque ces deux termes étaient considérés comme homonyme. En revanche, dès lors qu'il était considéré que le ministre des Affaires étrangères avait assisté le chef de l’État ou de gouvernement, sa présence n'était pas requise. D'autre part, l'emploi du mot « assister » implique que le ministre des Affaires étrangères avait plus d'importance que s'il avait simplement accompagné le chef de l’État[82].
Haut Représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
Le Haut Représentant est nommé, à la majorité qualifiée, par le Conseil européen avec l'accord duprésident de la Commission[83]. Le Conseil européen peut décider de le démettre de ses fonctions[83]. Il participe aux réunions du Conseil européen et y rend compte de ses actes[84].
Au sein du Conseil européen existe une formation réduite des dix-neuf États membres de lazone euro : lesommet de la zone euro. Cette formation, distincte, dispose d'unprésident propre. Lorsque ce sommet se réunit, les chefs d’État et de gouvernement sont accompagnés de leurs ministres des finances respectifs.
Le Conseil européen réunit tous les chefs d'État ou de gouvernement des États membres de l'Union européenne et le président de laCommission européenne. Les chefs d'État ou de gouvernement sont assistés par leurs ministres des Affaires étrangères respectifs et par un membre de la Commission européenne (le plus souvent le Commissaire chargé des relations extérieures), ainsi que par leurs ministres des Finances lors des réunions relatives à la monnaie unique. Sont également présents lesecrétaire général du Conseil de l'Union européenne, lesecrétaire général de la Commission européenne et quelques fonctionnaires.
Les décisions sont prises par consensus à l'issue de négociations entre les États membres, commencées bien avant le sommet. À l'issue de chaque réunion, la présidence publie les conclusions du sommet européen.
Jusqu'en 2004, les Conseils européens, qui durent généralement deux jours, avaient lieu dans une ville du pays dont l'exécutif assumait la présidence tournante. Depuis l'entrée en vigueur du traité de Nice, en février 2003, deux Conseils par an devaient avoir lieu à Bruxelles (au terme de chaque présidence tournante du Conseil des ministres). À partir du, les Conseils européens ont tous lieu au « Justus Lipsius » deBruxelles, par ailleurs siège du Conseil des ministres. Depuis début 2017, ils ont lieu dans lebâtiment Europa[85],[86].
La Commission européenne n'a pas perçu la création du Conseil européen comme un échec notamment parce que les lignes directrices du Conseil européen permettent à la Commission de lui demander d'adopter ses propositions en priorité quand celles-ci sont en accord[87]. Il était ainsi perçu comme une institution renforçant la Commission. Cependant, peu à peu, alors que la Commission a laissé un vide dans son rôle d'initiateur des politiques européennes, le Conseil européen a occupé cet espace[87]. Ainsi, le Conseil européen invite-t-il la Commission à soumettre des propositions ou des documents. Il acquiertde facto un pouvoir d'initiative de l'initiative, mais le Conseil européen ne peut légalement obliger la Commission à proposer une législation (car cela serait contraire à l'article 17(3) du traité sur l'Union européenne)[87].
LeConseil de l'Union européenne prépare les réunions du Conseil européen et adopte, avec le Parlement européen, les textes juridiques qui traduiront en actions les orientations fixées par les chefs d'État ou de gouvernement.
↑LesBritanniques etDanois ont émis des réserves sur ce point. Les Danois ont ainsi déclaré :« The Danish delegation is unable at this stage to commit itself to introducing elections by universal suffrage in 1978 ». Les Britanniques déclarèrent quant à eux :« The Prime Minister of the United Kingdom explained that Her Majesty's Government did not wish to prevent the Governments of the other eight Member States from making progress with the election of the European Assembly by universal suffrage. Her Majesty's Government could not themselves take up a position on the proposal before the process of renegotiation had been completed and the results of renegotiation submitted to the British people ».
↑Il s'agissait donc de mettre en œuvre pleinement les dispositions supranationales du traité CEE, à savoir l'article 138 CEE (ex-article 190 CE, remplacé, dans sa substance par l'article 14 paragraphe 1 à 3 du TUE et par l'article 223 TFUE) et l'article 148 CEE (ex-article 205 CE et remplacé, dans sa substance, par l'article 16 paragraphe 4 et 5 du TUE et l'article 238 du TFUE).
↑Cependant, le fait que le président du Conseil européen puissent être aussi président du Parlement ou de la Commission posent quelques problèmes légaux. En effet, le président du Conseil européen doit assurer la représentation de l'Union sur la scène extérieure lorsque cela concerne la PESC. À l'inverse, le président de la Commission doit assurer la représentation de l'Union à l'extérieur à l'exception de la PESC. Un autre problème légal repose sur les motions de censure qui peuvent être adoptées par le Parlement contre le président de la Commission. En effet, alors que ce dernier est responsable devant le Parlement, le président du Conseil européen n'est responsable que devant les membres du Conseil européen eux-mêmes (Eggermont 2012,p. 29).
↑LeCabinet de la Commission se compose quant à lui de 13 membres, 17 assistants, et neuf porte-paroles.
↑Déclaration du Ministre d’État, Président du Gouvernement concernant le résultat de la Conférence au sommet des Chefs de Gouvernement à Paris, 19 décembre 1974, Compte Rendu des Séances publiques, C-1974-O-032-0003
Conférence des Chefs d’État et de gouvernement des États membres de la CEE,Communiqué final du Sommet de Copenhague,(lire en ligne)
Déclaration du Président Giscard d'Estaing à la presse à l'issue de la réunion des chefs de gouvernement de la Communauté européenne à Paris,(lire en ligne)
Conseil européen,Communiqué final du Sommet de Paris,(lire en ligne)
Commission européenne,For the European Union. Peace, Solidarity, Solidarity,, COM (2002) 728
RomanoProdi,Discours au Bundestag, Berlin,(lire en ligne)
Déclaration n° 6 sur les articles 15 §5 et §6, 17 §6 et §7 et 18 du traité sur l'Union européenne, annexé à l'acte final de la CIG qui adopta le traité de Lisbonne
Comité chargé des affaires constitutionnelles,Rapport sur l'impact du Traité de Lisbonne,, A6-0142/2009
ÉmileNoël, « Quelques réflexions sur la préparation, le déroulement et les répercussions de la réunion tenue à Paris par les chefs de gouvernement (9-10 décembre 1974) »,Cahiers de Droit européen,
FrançoisJongen, « Le Conseil européen »,Courrier hebdomadaire,
FlorenceChaltiel, « L'identité européenne se précise, le pouvoir des États se réaffirme ; à propos des Conseils européens d'octobre et novembre 2009 »,Revue du marché commun et de l'Union européenne,
KoenLenaerts, JeanBinon et PietVan Nuffel, « L'Union européenne en quête d'une Constitution : bilan des travaux de la Convention sur l'avenir de l'Europe »,Journal des Tribunaux,