Il succéda en 1758 sur le trône dePierre àBenoîtXIV. La famille della Torre di Rezzonico était alors au faîte de sa puissance : la même année elle célébrait le mariage de Ludovico Rezzonico avec une épouse de la puissante famille des Savorgnan. Très lié à sa famille, le nouveau pontife romain était connu pour sonnépotisme.
En 1759,ClémentXIII mit à l'Index l'Encyclopédie ded'Alembert etDiderot[1]. Plus pudique que ses contemporains, il fit recouvrir de feuilles de figuier artificielles les parties sexuelles de sculptures de l'époque classique.
Le pontificat deClémentXIII fut troublé par les pressions continues exercées par les cours catholiques européennes (Portugal, France, Espagne etDeux-Siciles), pour qu'il supprimât laCompagnie de Jésus. En1758, le marquis de Pombal, ministre deJosephIer de Portugal (1750-1777), très en faveur d'unrégime absolutiste royal, voulait réduire l'Église catholique en une sorte d'anglicanisme lusitanien. Il fit arrêter les Jésuites du Portugal et de ses colonies. Nombre d'entre eux moururent en prison et plusieurs furent exécutés[2]. D'autres furent expédiés àCivitavecchia, comme « cadeau pour le pape ». En1760, Pombal renvoya à Rome le nonce apostolique et rappela l'ambassadeur du Portugal. Une brochure intituléeBrève Relation représenta les Jésuites comme ayant fondé en Amérique du Sud sous leur propre souveraineté un royaume pratiquement indépendant où ils tyrannisaient les Indiens, le tout pour servir leur insatiable ambition et leur avarice : un tissu de calomnies mais qui fit du tort aux Jésuites.
EnFrance, leParlement de Paris, dominé par la haute bourgeoisie et qui affichait des sympathiesjansénistes etgallicanes, commença auprintemps1761 à faire pression pour bannir lesJésuites de France. Quoiqu'un synode épiscopal réuni à Paris en recommandât de ne rien faire,LouisXV (1715-1774) promulgua un ordre royal qui ne permettait à la Compagnie de Jésus de rester dans leroyaume de France, que si certains changements étaient apportés dans leursConstitutions pour la conformer aux souhaits du Parlement et si l'on créait le poste d'un vicaire général des Jésuites français qui serait indépendant dusupérieur général résidant à Rome.ClémentXIII refusa avec les paroles devenues célèbres : « Sint ut sunt aut non sint ». Le, le Parlement rendit la situation impossible en imposant des conditions inacceptables à chacune de leurs demandes de rester dans le pays,ClémentXIII répondit par une protestation contre la violation des droits de l'Église et cassa l'arrêt, mais les ministres deLouisXV ne pouvaient permettre qu'on annulât ainsi une loi française et le roi finalement dut expulser les Jésuites en au grand dam de la famille royale notamment, la reine, le dauphinLouis et de la dauphineMarie-Josèphe de Saxe, tous trois proches de leur fin.
Par une sorte de bravade,ClémentXIII renouvela son soutien à l'Ordre religieux et l'approuva à nouveau publiquement par unebulle papaleApostolicum pascendi (), où il repoussait comme calomnies les critiques contre les Jésuites et louait l'utilité de l'Ordre. En1766, il rédigea labulleChristianæ reipublicæ salus, contre lesLumières. Face à la France et au Portugal, il refusa de modifier lesConstitutions de la Compagnie de Jésus.
Tout cela fut fait en vain. Un an avant sa mort, en1768, les Jésuites avaient été expulsés de France, d'Espagne, duroyaume de Naples et deSicile et duduché de Parme et Plaisance. En Espagne, les Jésuites se croyaient en sûreté, maisCharlesIII d'Espagne (1759-1788), impressionné par ce qu'on affirmait en France, choisit finalement d'agir encore plus énergiquement : dans la nuit du au, toutes les maisons des Jésuites en Espagne furent soudainement encerclées, et ceux qui s'y trouvaient furent arrêtés, expédiés vers les ports dans les vêtements qu'ils portaient sur eux et entassés sur des bateaux qu'on envoya àCivitavecchia, port desÉtats pontificaux. Dans une lettre àClémentXIII, le roitrès catholique prévint que son allocation annuelle de100 piastres serait retirée pour l'ordre entier si n'importe lequel de ses membres s'avisait à un moment quelconque d'écrire une justification quelle qu'elle fût ou de critiquer les motifs de leur expulsion.