Alliance anglo-portugaise (pt)aliança luso-britânica (en)Anglo-Portuguese Alliance | |
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Situation | |
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Création | |
Type | Alliance militaire, diplomatique et commerciale |
Langue | Anglais Portugais |
Organisation | |
Membres | ![]() ![]() |
Personnes clés | Jean de Gand,FerdinandIer de Portugal,JeanIer de Portugal,Richard II d'Angleterre,Jean IV de Portugal,Charles II d'Angleterre,Catherine de Bragance,John Methuen,Frédéric-Guillaume de Schaumbourg-Lippe,Horatio Nelson,Domingos Xavier de Lima (pt),Jean VI de Portugal,William Carr Beresford,Arthur Wellesley,Henry Horne,José Norton de Matos,Antonio de Oliveira Salazar,Winston Churchill |
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L'alliance anglo-portugaise (Anglo-Portuguese Alliance), oualliance luso-britannique (aliança luso-britânica)[1] est une alliance diplomatique et militaire entre lePortugal et l'Angleterre (puis leRoyaume-Uni), complétée par une série de traités commerciaux. Inaugurée avec letraité de Londres de1373, elle est mise en activité à labataille d'Aljubarrota en1385 et scellée par letraité de Windsor en1386. Activée et renforcée au fil des siècles, elle est la plus ancienne alliance diplomatique et militaire encore en vigueur au monde actuellement[2],[3].
L'alliance, qui plonge ses racines dans leMoyen Âge, a globalement servi les intérêts des deux pays. Elle est à l'origine d'un grand nombre de victoires militaires au fil des siècles. Tournée d'abord contre laCastille et laFrance, puis contre le bloc franco-espagnol issu dupacte de famille desBourbons, elle a soutenu l'intégrité territoriale duPortugal, favorisé la domination anglaise puis britannique de l'Atlantique et de l'Inde et permis l'accélération des échanges commerciaux entre l'Angleterre et le Portugal. Après la fin des liens privilégiés entre la France et l'Espagne, elle s'est maintenue dans le contexte international changeant desXIXe et XXe siècles. Elle a notamment permisl'intervention du Portugal pendant la Première Guerre mondiale, l'ouverture des bases navales desAçores auxAlliés pendant laSeconde Guerre mondiale, l'entrée rapide du Portugal en1949 dans l'OTAN[4] et le soutien portugais au Royaume-Uni pendant laguerre des Malouines en1982[5],[6],[7]. Au-delà des déséquilibres conjoncturels liés aux histoires respectives duRoyaume-Uni et duPortugal, les deux puissances sortent globalement gagnantes de cette longue alliance, qui reste relativement équilibrée, et qui a été entretenue volontairement des deux côtés sans empêcher l'apparition de points de friction dans l'histoire des relations entre les deux pays.
Dans le cadre de cette alliance, le Portugal et le Royaume-Uni ont unifié leur commandement et leurs armées à plusieurs reprises[8]. L'armée portugaise a la tradition d'intégrer des unités et des officiers supérieurs britanniques jusqu'au plus haut niveau[9],[10],[11]. De la même façon, les officiers supérieurs et les soldats portugais basculent facilement vers les infrastructures et les corps d'armée britanniques[12],[13],[14]. Cette alliance a joué un rôle central dans l'histoireeuropéenne en incitant leRoyaume-Uni à s'engager militairement contre lesinvasions napoléoniennes dans la péninsule Ibérique[15].
Les liens entre le Portugal et l'Angleterre sont très anciens. Les prémices de l'alliance sont posées officieusement par un traité commercial signé par les deux puissances en1294 dans le cadre du grand commerce atlantique d'Europe du Nord[16],[17], puis par letraité de Tagilde signé le entreFerdinandIer de Portugal et l'AnglaisJean de Gand, destiné à coordonner leurs actions pour la conquête du trône de Castille[18].
D'un point de vue officiel, les fondements juridiques de l'alliance remontent autraité de Londres du, signé sous le règne du roiFerdinandIer de Portugal, établissant une relation « d'amitié, d’union et d’alliance perpétuelle » entre le Portugal et l'Angleterre[19]. Une dizaine d'années plus tard, pendant laguerre luso-espagnole de 1383-1385,JeanIer de Portugal, maître de l'ordre militaire d'Avis, signe une alliance offensive avecRichard II d'Angleterre. Des archers anglais prennent une part décisive dans labataille d'Aljubarrota, menée contre laCastille (1385). À la suite de ce conflit, le roi du PortugalJeanIer délaisse les traditionnelles alliances matrimoniales espagnoles pour épouser une aristocrate anglaise,Philippa de Lancastre (1360-1415), avec laquelle il fonde l'importantedynastie d'Avis. Un pacte d'assistance, d'entraide et d'amitié perpétuelle entre le Portugal et l'Angleterre est scellé en mai1386, avec letraité de Windsor. Cette alliance militaire luso-anglaise constitue la plus ancienne alliance militaire au monde en vigueur à ce jour (elle a encore été réactivée tout au long duXXe siècle)[2],[3].
L'aide des Anglais à ladynastie d'Aviz naissante et letraité de ouvrent la voie à une coopération spéciale avec l'Angleterre, qui constitue la pierre angulaire de la politique étrangère portugaise pendant plus de 500 ans. Dès1387, l'AnglaisJean de Gand, duc deLancaster, fils d'Édouard III, et père d'Henri IV d'Angleterre, débarque enGalice avec une armée afin de s'imposer comme prétendant au trône de laCastille avec le soutien duPortugal. Il n'obtient pas le soutien de la noblesse deCastille et retourne en Angleterre avec une compensation financière importante de la part de son rival à la succession[18]. Par la suite,JeanIer de Portugal assure, avec l'appui de mercenaires anglais, l'indépendance de son royaume qu'il fait reconnaître par la Castille en1411.
À la suite de la bataille d'Aljubarrota,Jean de Gand laisse sa fillePhilippa de Lancaster (Filipa enportugais) épouserJeanIer en gage de l'alliance anglo-portugaise. Par cette union, célébrée en1387, les deux époux donnent naissance à la génération « sublime » chantée parLuis de Camões, qui conduit le Portugal vers son Âge d'Or, avec les découvertes maritimes. Philippa introduit à la cour du Portugal la traditionanglo-normande d'une éducation aristocratique pour ses enfants. Elle y impose une réforme de l'étiquette, de la hiérarchie nobiliaire et une morale rigoureuse. Elle soutient les intérêts économiques anglais. Déjà très actifs, les échanges traditionnels entre les deux partenaires prennent alors leur envol. Les deux nations échangentmorue, textile,vin, mais aussiliège,sel ethuile portugais[20].
Pendant les 150 ans qui suivent, lePortugal s'élève au rang de première puissance maritime et militaire européenne d'envergure mondiale. Le pays est un modèle d'organisation et de continuité politique, et prend pied sur les cinq continents. Il a les moyens de son indépendance et de ses ambitions : les flottes et les armées portugaises dominent l'Atlantique Sud et l'océan Indien, battent les flotteségyptienne etturque à plusieurs reprises, interviennent contre l'avancéemusulmane enÉthiopie et entreprennent la conquête des plusgrandes cités-États d'Orient. Le Portugal dispose d'un vaste arsenal et de techniciens hautement qualifiés. Il produit et vend ses propres navires et ses propres armes, qu'il exporte dans le monde entier. Les expéditions vers l'Orient, qui relèvent d'un monopole d’État, rapportent jusqu'à 800 % de bénéfices[21]. L'allié anglais n'est jamais sollicité militairement[2].
L'alliance entre les deux pays n'est réactivée que dans la seconde moitié duXVIe siècle, à la suite d'un problème interne qui dégénère en guerre contre laCastille. Lors de la crise de succession au trône du Portugal de1580, le prétendantAntoine entre en conflit avecPhilippe II d'Espagne, qui prétend unifier les deux couronnes ibériques. Attaqué frontalement, et abandonné par une partie de sa noblesse, le prétendant portugais doit se réfugier auxAçores. Pendant trois ans, il défie l'Espagne et parvient à tenir tête auxarmadas envoyées le déloger. En1583, avec l'envoi massif de troupes espagnoles, il doit quitter l'archipel. Il passe en France, puis il décide de s'exiler en Angleterre sur les conseils deRené II de Rohan. Depuis lesîles britanniques, il planifie son retour àLisbonne avec l'aide des Anglais, en échange de privilèges commerciaux auBrésil, auxAçores, et d'une aide dans la lutte anglaise contre lamaison d'Autriche. En1589, une flotte anglaise commandée parFrancis Drake etJohn Norreys essaye, en vain, d'installer Antoine sur son trône. Le prétendant parvient à débarquer àPeniche, mais le pays, occupé militairement, est pacifié depuis une dizaine d'années. La population, effrayée, accueille son retour avec indifférence. La flotte commandée parDrake est frappée par lapeste et doit se retirer[22],[23]. Antoine se heurte à de très forts contingents espagnols à Lisbonne. L'expédition est un échec et le corps d'armée indépendantiste finit par quitter le pays. Antoine fait une dernière tentative de débarquement dans le Sud du pays, au large ducap Saint-Vincent, puis il se retire définitivement en France, où il meurt désargenté en1595[24],[25].
Pendant l'Union des deux couronnes ibériques (1580-1640), le Portugal perd progressivement sa place de première puissance maritime européenne au profit de sa vieille alliée. L'Angleterre, qui s'est dotée d'une flotte puissance, prend pied enAmérique, enAsie et enAfrique. Dans le même temps, l'Empire portugais, mal défendu par les souverains castillans, et attaqué de toutes parts, est sur le recul.
Lors de laguerre de Restauration (1640-1668),Jean IV de Portugal s'appuie sur la vieille alliance anglaise, qu'il réactive en1642, pour lutter contre l'Espagne et lesPays-Bas. Pendant la première phase du conflit, l'Angleterre est absorbée par ses problèmes internes, avec laguerre civile entre le Parlement et le roi[26],[27], et à partir de mai1649 leCommonwealth d'Angleterre mis en place parCromwell (hostile par principe aux monarchiescatholiques)[26]. Mais dès l'arrivée deCharles II sur le trône en1660, avec laRestauration anglaise, les deux puissances renouvellent leur engagement au sein de l'Alliance. Le, Portugais et Britanniques signent le traité de White-Hall. Au terme de ce traité, en 1661, afin de renforcer les liens entre les deux nations, l'infante portugaiseCatherine de Bragance, sœur du roiAlphonse VI de Portugal, épouse le roiCharles II d'Angleterre[28]. « Le contrat de mariage est approuvé par le Conseil d'État portugais le. » Outre la dot magnifique apportée par la princesse portugaise, « un traité de paix est signé « par lequel le Portugal offre « la ville deTanger et l'île deBombaim (dans les Indes orientales) aux Anglais. » En contrepartie, la flotte anglaise s'engage à défendre le Portugal et ses territoires coloniaux contre toute agression d’un pays tiers, et à porter secours aux territoires et aux comptoirs portugais des Indes, menacés par laCompagnie néerlandaise des Indes orientales. Les Anglais reçoivent aussi des privilèges auBrésil, qu'ils ont dès lors tout intérêt à maintenir sous dépendance portugaise[28].
L'alliance devient alors un élément-clé de la politique des deux pays. À partir du milieu duXVIIe siècle, lePortugal devient un instrument essentiel de la politique d'expansion duRoyaume-Uni[29]. Au terme de laguerre néerlando-portugaise,Lisbonne dispose encore de bons ports et desterritoires sur toutes les mers du globe, en Europe, en Afrique, en Amérique et en Asie[29], qui servent de débouchés ou de base-arrière aux Britanniques. L'horizon portugais est quant à lui défini par le « cercle de fer ». L’État tire ses revenus du commerce colonial, qu'il alloue par des expéditions (carreiras) à des groupes métropolitains privilégiés[30],[31],[32]. Avec ces revenus, il stimule l'expansion maritime portugaise, qui lui assure des territoires et des marchés outre-mer. Cédés ou entrouverts au commerce anglais, ceux-ci servent de gage à l'alliance anglo-portugaise. Et l'alliance anglo-portugaise assure l'indépendance duPortugal qui, à son tour, légitime la monarchie, permettant que l'appareil d’État se superpose aux institutions et aux structures métropolitaines et coloniales[33].
Ayantconsolidé sa position en 1668 face à l'Espagne[34], et fidèle à l'alliance anglaise, lePortugal rejoint leRoyaume-Uni dans laligue d'Augsbourg (1686) formée contre la France deLouis XIV alors au sommet de sa puissance[35]. Pendant près de neuf ans, de1689 à1697, le roiPierre II de Portugal soutientGuillaume III d'Orange-Nassau dans son désir de consolider son trône, de réduire la puissance française et de protéger lesProvinces-Unies, tout en fournissant les conditions permettant d'encourager les échanges et le commerce[36],[37]. Trois ans après l'instauration de la paix avec la signature destraités de Ryswick, en1700, dans le cadre de laguerre de Succession d'Espagne, laFrance déclare la guerre auRoyaume-Uni et ordonne auPortugal de fermer ses ports aux navires britanniques[38]. Le Portugal refuse et réagit en s’alliant avec leRoyaume-Uni et lesPays-Bas en1703 dans la « Grande Alliance » contre les Français et la dynastie espagnole desBourbons, accédant ainsi à la demande de l’émissaire britanniqueJohn Methuen[39],[40].
En 1703, les deux pays signent un traité d'alliance et de commerce, letraité de Methuen, qui renouvelle et renforce leurs liens militaires, financiers et commerciaux[29]. En contrepartie de l'assurance de vendre facilement ses vins àLondres — au détriment des vins français[41] — et de l'appui de laRoyal Navy, le Portugal et le Brésil s'ouvrent largement aux produits manufacturés anglais (l'économisteDavid Ricardo prendra exemple plus tard sur lesavantages comparatifs issus de ce traité pour les deux puissances)[42],[43]. Par la suite, bien que le Portugal reste une puissance d'envergure mondiale, du fait de la détérioration de ses infrastructures maritimes, des investissements peu productifs de la Couronne, et malgré l'afflux de l'or du Brésil et les mesures dumarquis de Pombal, il tend à passer progressivement sous dépendance économique britannique. À partir du milieu duXVIIIe siècle, les intérêts économiques et géopolitiques des deux pays sont inextricablement liés[33].
Progressivement, avec l'arrivée des Bourbons sur le trône d'Espagne et la signature dupacte de famille, l'alliance luso-britannique s'oppose à un bloc franco-espagnol[44]. En1762, à la faveur de laguerre de Sept Ans, la France promet à l’Espagne qu’elle pourra récupérer à la fin du conflit lePortugal qui vient de rallier le camp de laGrande-Bretagne. Pendant laguerre fantastique qui s'ensuit, l'armée franco-espagnole chargée d'envahir le Portugal, et composée de 40 000 hommes, concentre son offensive sur la frontière de la province deTrás-os-Montes e Alto Douro, enlevant laterre de Miranda, et les villes deBragance et deChaves. Ces réussites espagnoles contre ces forteresses mal défendues amènent rapidement le gouvernement portugais à demander l'aide de son allié britannique. La Grande-Bretagne envoie une force de 8 000 hommes sous le commandement deJohn Burgoyne soutenir les Portugais. Une armée anglo-portugaise plus vaste, de 18 000 soldats, est ensuite formée sous la direction deFrédéric-Guillaume de Schaumbourg-Lippe, et parvient finalement à enrayer puis repousser l'avancée adverse. L’issue malheureuse de la guerre pour l'Espagne etLouis XV, conclue par le désastreuxtraité de Paris, préserve l’indépendance portugaise, et confirme la puissance des armées anglo-portugaises[45],[46],[47].
Jusqu'à la seconde moitié duXVIIe siècle, lePortugal et leRoyaume-Uni gèrent leurs affaires maritimes de façon très autonome. Au tournant desXVIIe et XVIIIe siècles, laRoyal Navy anglaise se structure commemarine de guerre permanente pour s'imposer comme la première marine mondiale. Dans le même temps, laReal Marinha portugaise s'efforce de protéger et de relier entre elles les vastes possessions de l'Empire portugais. Progressivement, au fur et à mesure où les intérêts coloniaux des deux puissances se rapprochent, des liens d'interdépendance et des actions communes apparaissent. Dans la seconde moitié duXVIIIe siècle, alors que lamarine portugaise est essentiellement devenue une marine coloniale et connaît un nouvelâge d'or, les forces navales portugaises et britanniques travaillent à plusieurs reprises ensemble, notamment dans le cadre desguerres révolutionnaires.
Pendant laguerre du Roussillon, en1793-1794, une escadre portugaise de sixcaraques, deuxfrégates et troisbrigantins est envoyée dans lecanal de la Manche à la demande dugouvernement britannique, afin d'aider leRoyaume-Uni en guerre contre laFrance[48],[49]. La division navale portugaise croise au large de l'Angleterre unie à celle deLord Richard Howe[50]. Parmi les officiers supérieurs portugais présents, on trouve alors le commandantFrancisco de Paula Leite de Sousa, et surtout l'amiralDomingos Xavier de Lima (pt), à bord de la puissante caraqueVasco de Gama[51],[52]. Du fait des situations distinctes du Portugal et du Royaume-Uni, les relations entre les officiers supérieurs portugais et britanniques ne sont pas sans poser quelques problèmes protocolaires et hiérarchiques[48],[49]. Mais ces questions n'entament jamais le principe de l'alliance.
En plus de soutenir militairement la flotte britannique, lePortugal sert de base-arrière aux navires anglais. Placé à un point de passage entre l'Atlantique Nord et laMéditerranée, le pays constitue un enjeu stratégique majeur[53]. Au début de l'année 1797, l'amiralJohn Jervis appareille depuisLisbonne avec une flotte de 10 navires afin d'intercepter une puissante flotte espagnole en route vers la France. Le6 février, il arrive au large ducap Saint-Vincent, devant la province de l'Algarve, où il reçoit le renfort de 5 navires de l'amiralWilliam Parker. Le 13, il est rejoint par la frégateMinerve d'Horatio Nelson[54]. Le lendemain, le14 février, à labataille du cap Saint-Vincent, les quinze vaisseaux de ligne de Jervis, Parker, Nelson et Collingwood l'emportent sur les vingt-quatre navires de l'amiral espagnol DonJosé de Córdoba, qui sont forcés de battre en retraite versCadix, confirmant la supériorité britannique sur mer[55],[56]. Tout au long des opérations, les Britanniques évoluent dans les eaux portugaises avec la bienveillance du gouvernement portugais et du prince régentJean VI de Portugal[53].
Par la suite, lorsque leRoyaume-Uni renforce son escadre de laMéditerranée pour faire face à lacampagne d’Égypte deNapoléon Bonaparte, les bâtiments anglais sont épaulés par une force navale portugaise de 6 navires commandée par Xavier de Lima, composée descaraquesPríncipe Real, le puissantnavire amiral (90 pièces d'artillerie), etRainha de Portugal, auxquels se joignent les caraquesAfonso de Albuquerque (64 pièces) etS. Sebastião (64 pièces), la frégateBenjamim (26 pièces) et le brigantinFalcão (24 pièces), qui part deLisbonne le. À l'époque, laGrande-Bretagne demande avec insistance à son allié portugais de mettre à sa disposition des moyens navals pour l'aider dans ses actions militaire. Revenue àLagos le30 juin, l'escadre portugaise est renforcée avec lebrûlot anglaisIncendiary, et intègre deux officiers britanniques pour le service des transmissions entre les deux forces. Le même jour, l'amiral Domingos Xavier de Lima, qui se trouve en mer avecJohn Jervis, reçoit des instructions pour croiser dans ledétroit de Gibraltar et se joindre à la force de l'amiral Nelson, avec lequel il doit partager le commandement de la flotte, en raison du nombre supérieur de bâtiments britanniques[48],[49].
Le, les Portugais assistent la petite force navale britannique quibloque le port d'Alexandrie après labataille d'Aboukir[57]. Le15 septembre, Xavier de Lima reçoit l'ordre d'initier leblocus de Malte, alors enrébellion contre l'occupation française. En un mois, les Portugais capturent 9 navires ennemis et offrent un appui militaire et logistique aux insurgés, qui ne parviennent cependant pas à expulser les occupants[58]. Les forces britanniques du capitaineAlexander Ball prennent le relai[59]. La force navale portugaise fait alors sa jonction au large deMalte, avec les navires deNelson, juste avant la reddition française[49]. Le, l'amiral Domingos Xavier de Lima reçoit l'ordre de débarquer àLivourne, afin de soutenir leroi de NaplesFerdinand IV qui marche surRome[60]. Entretemps, les naviresS. Sebastião,Benjamim etBalão, naviguent entreGênes etToulon pour maintenir le blocage anglais de ces ports[48],[49]. Les relations entre les commandements portugais et britannique atteignent leur point le plus bas lorsqueNelson publie le un ordre de service dans lequel il considère les chefs de division portugais inférieurs hiérarchiquement à ses capitaines-de-mer anglais, brisant les équivalences hiérarchiques et les règles de courtoisie en vigueur côté portugais. En dépit de cet incident, les forces portugaises et britanniques continuent à travailler en étroite collaboration, avec un degré d'intégration réciproque élevé[48],[49].
Sur terre, confronté aux revers et à la fuite du roiFerdinand IV des Deux-Siciles face aux Français, Xavier de Lima pose le siège devantNaples. Il a des instructions claires pour ne pas laisser la flotte napolitaine tomber aux mains des Français, que ce soit en favorisant son évasion ou en la détruisant. Dans l'urgence de la situation, contraint par l'avancée des ennemis et l'afflux de réfugiés à bord (parmi lesquels se trouvent des cardinaux romains), il donne l'ordre d'incendier la flotte napolitaine[49]. En, l'amiral portugais planifie une mission diplomatique auprès despirates berbères, afin de les amener du côté des alliés, et de les encourager à attaquer les embarcations françaises. Il envoie le navire portugaisAfonso de Albuquerque, sous le commandement du chef de division britanniqueDonald Campbell (en), faire une démonstration de force à terme de laquelle il obtient le soutien désiré dubei de Tripoli[48],[49]. Peu après, le commandantPinto Guedes,chef d'état-major de la force portugaise, se rend à bord dubrûlot anglaisStromboli auprès dubei de Tunis, afin que ses embarcations suspendent leurs attaques contre les navires britanniques[48],[49].
En, les Portugais et les Anglais sont informés d'une possible attaque franco-espagnole surMinorque, siège du commandement britannique dans laMéditerranée, puis sur laSicile.Nelson réunit tous les navires alliés disponibles, qu'il répartit en deux divisions, l'une placée sous son propre commandement, l'autre sous le commandement de l'amiral Xavier de Lima. À l'époque, les relations entre commandements portugais et anglais se sont considérablement améliorées. L'attaque franco-espagnole n'arrivant pas, l'escadre anglo-portugaise se rend en juin àNaples, pour appuyer les forces ducardinal Ruffo qui essaye de prendre la ville. Des contingents de même dimension de laReal Marinha et de laRoyal Navy prennent part aux opérations, qui passent par la prise deCapoue et deGaeta[48],[49].
Le25 août, une force combinée anglo-portugaise reprend leblocus de Malte sous le commandement du seul Xavier de Lima. Mais le, coupant court aux opérations, lebrigantinGaivota do Mar amène des ordres du ministre de la Marine portugais exigeant le retour de la force portugaise auPortugal. Les hommes de Xavier de Lima attendent jusqu'au13 décembre afin que les Britanniques prennent la relève. Les forces du capitaineAlexander Ball poursuivent seules le blocus et mènent l'opération à son terme, en expulsant les Français le[58],[59].
Avant de partir, l'amiral portugais reçoit une carte de remerciements ducongrès de Malte, et une mention d'estime de la reine de NaplesMarie-Caroline d'Autriche[61]. Les navires portugais se dirigent versTrieste, où ils trouvent un convoi d'approvisionnement avec des vivres et de l'argent pour l'escadre en janvier1800. Le12 février, ils engagent le voyage deTrieste vers lePortugal, où ils arrivent à la fin du mois d'avril. De retour au pays, l'amiral Xavier de Lima reçoit la reconnaissance officielle de laCouronne britannique, et le prince régentJean VI de Portugal le remercie par lettre royale le[48],[49]. Dans les années qui suivent, le soutien du gouvernement portugais et l'ouverture des ports portugais à la marine anglaise constituent les points de litige majeurs entre leroyaume de Portugal, lePremier Empire et leroyaume d'Espagne. Le refus duPortugal de tourner le dos à laGrande-Bretagne est à l'origine de laguerre des Oranges et desinvasions napoléoniennes de la péninsule Ibérique[15].
Un des épisodes les plus marquants de l'alliance anglo-portugaise est l’intervention duRoyaume-Uni dans lapéninsule Ibérique lors desinvasions napoléoniennes au Portugal.
En1801, désormais alliée de la France républicaine, l’Espagne envahit l’Alentejo avec l’appui du corps expéditionnaire français du généralLeclerc. L'intervention a surtout pour objectif d‘obligerLisbonne à rompre ses liens privilégiés avec le Royaume-Uni. Après avoir subi les défaites d’Arronches (pt) et deCampo-Maior, le Portugal est contraint de demander la paix le. Cette guerre est appelée la « guerre des Oranges » parce que l’avant-garde espagnole victorieuse a offert à son chef, lePremier ministre et généralissimeManuel Godoy, deux branches d’orangers cueillies dans les jardins de la place d’Elvas demeurée au pouvoir des Portugais jusqu’à la fin du conflit. Par la paix deBadajoz, le, le Portugal est contraint de se fermer aux Britanniques, de payer une indemnité aux Français, d'importer leurs tissus au détriment des tissus britanniques, et de céder aux Espagnols le district d’Olivença (qu’il ne récupérera jamais, même après les traités de1815 qui prévoyaient pourtant sa rétrocession par l’Espagne). Mais le princeJean VI de Portugal fait trainer l'application du traité en longueur, et refuse de rompre l'alliance avec leRoyaume-Uni[62]. En1804, Napoléon envoie à Lisbonne comme ambassadeur le généralAndoche Junot, futur duc d’Abrantès, qui est davantage un homme de guerre qu’un diplomate et qui abandonne son poste dès1805 pour aller servir dans laGrande Armée victorieuse àAusterlitz.
En novembre1807, les armées deJunot envahissent le Portugal, qui refuse d'appliquer leblocus continental et de briser l'alliance anglaise. Le roiJean VI de Portugal et les membres de lamaison de Bragance partent pour leBrésil avec la Cour dans une immense escadre portugaise, sous escorte de la flotte britannique. Comme les Espagnols, les Portugais se révoltent en1808 contre les occupants français, qui sont chassés en1811 grâce à l'intervention des Britanniques, commandés parArthur Wellesley. Le, et pendant toute la durée des opérations, le prince régentJean VI de Portugal place l'armée portugaise sous le commandement de l'AnglaisWilliam Carr Beresford, qui est nommé généralissime par le roi portugais, avec le titre de maréchal du Portugal[63]. Rapidement, celui-ci réorganise en profondeur et modernise l'armée portugaise, qui conserve cependant ses propres généraux et officiers. Achevant l'unification des états-majors portugais et britanniques, le, le prince régentJean VI nommeArthur Wellesleymaréchal général et autorité suprême de l'armée du Portugal[63], avec autorité sur tous les autres officiers, généraux et maréchaux portugais. Devenu égalementcommandant en chef de toutes les forces britanniques au Portugal à lamort de Moore en janvier 1809, celui-ci prend alors le commandement unifié desarmées portugaise etbritannique. Sous son autorité, en cinq ans, l'armée anglo-portugaise expulse les troupes napoléoniennes duPortugal, libère l'Espagne et passe lesPyrénées, initiant lacampagne de France qui aboutit à la chute duPremier Empire[15].
À la suite de la victoire anglo-portugaise et ducongrès de Vienne, le roiJean VI de Portugal préfère rester au Brésil et confie l'administration du Portugal àBeresford. En remerciement pour de son action à la tête des armées anglo-portugaises, le souverain portugais accorde à Wellesley les titres nobiliaires de comte deVimeiro, de marquis deTorres Vedras, et surtout deDuc de la Victoire, seul titre ducal portugais concédé à un étranger. De son côté, adulé par la population portugaise, Beresford reçoit en récompense les titres de duc d'Elvas et de marquis de Campo-Maior. L'alliance entre le Portugal et le Royaume-Uni est alors à son apogée. Mais elle n'est acceptée par les Portugais que dans un contexte d'équilibre entre les deux puissances. Sept ans après le congrès de Vienne, exaspérés par les excès de l'administration anglaise et l'absence de leur souverain, les Portugais se soulèvent en1820-1822, expulsent définitivement Beresford et exigent le retour de Jean VI et sa famille à Lisbonne, avec un retour duBrésil au statut de colonie[64].
Sur le plan colonial, un contentieux oppose dans la seconde moitié duXIXe siècle lePortugal et leRoyaume-Uni à propos de la domination sur l’Afrique dite « méridionale ». Selon un projet cher à son père, le roiCharlesIer de Portugal désire construire un bloc homogène d’influence lusitanienne depuis l’Angola (côte ouest) jusqu’auMozambique (côte est). Ce projet dit de la « carte rose » s’oppose aux ambitions des Britanniques qui souhaitent établir une jonction continue entreLe Caire etLe Cap (selon le projet deCecil Rhodes). Dans un climat de forte tension, après plusieurs escarmouches en1889 et un ultimatum anglais, CharlesIer est contraint d’accepter un compromis : il n’y aura pas de « carte rose », et les Britanniques lui offrent, en contrepartie, des compensations territoriales qui sauvegardent très partiellement le prestige impérial d’un pays ayant perdu la plus importante de ses colonies en1825, le Brésil[65]. Au Portugal même, le recul de la monarchie face au vieil allié anglais provoque un ressentiment durable au sein de la population, et favorise le développement du mouvement républicain, très nationaliste, qui triomphe une vingtaine d'années plus tard. C'est à cette occasion qu'est composé l'hymne national portugais.
Durant leXXe siècle le traité d'amitié anglo-portugais est invoqué à plusieurs reprises.
Il favorise l'entrée du Portugal dans laPremière Guerre mondiale aux côtés de son allié britannique. Alors qu'il était plutôt en bons termes avec les puissances germaniques avant le début du conflit[66], le gouvernement portugais choisit la belligérance en septembre1914 sous couvert de l’alliance luso-britannique afin de défendre l'intégrité territoriale de ses colonies, de garantir la reconnaissance de la jeune République portugaise proclamée en1910 et de prendre sa place dans le concert des nations européennes. D'abord opposé à l’engagement des troupes portugaises, leRoyaume-Uni recommande dans un premier temps auPortugal de ne rien faire qui soit contraire à sa neutralité. Cependant, en1915, le besoin de navires de ravitaillement devient tellement urgent que sur demande expresse du Royaume-Uni, le gouvernement portugais réquisitionne les navires allemands mouillant dans les ports portugais et, malgré les tentatives de médiation, l’Allemagne cède à la provocation et déclare la guerre au Portugal le[66]. Le, lecorps expéditionnaire portugais quitte le Portugal pour aller se battre aux côtés des soldats britanniques dans l'Est de la France. En raison de ses dimensions considérables, il est intégré en tant que corps d'armée dans la1re armée britannique. Le gouvernement portugais envoie en outre leCorps d'artillerie lourde portugaise (en)(CALP) sur le front, spécialisé dans l'artillerie super-lourde de chemins de fer, qui est placé sous commandement français. Après labataille de La Lys, à l'occasion de laquelle le corps expéditionnaire portugais est décimé, certaines unités portugaises sont placées sous le commandement direct britannique[67].
Pendant laSeconde Guerre mondiale,Salazar, officiellement neutre sous couvert dupacte ibérique (ardemment désiré par les Britanniques[68]), maintient en réalité des relations commerciales avec les deux blocs afin d'offrir des débouchés à l'industrie portugaise, et favorise l'effort de guerre britannique. Jouant de sa neutralité, il continue à faire des affaires et fournit quelques métaux rares aurégime nazi. Dans le même temps, fidèle à l'alliance britannique, et désirant sincèrement la victoire des Alliés, il reste militairement à la disposition de l'allié anglais, offre l'asile à 2 500 résidents britanniques deGibraltar àMadère en1940[69],[70] et permet en1943 aux Alliés de s'installer sur labase militaire de Lajes dans lesAçores pour surveiller l'Atlantique et lutter contre lesU-Boots[71]. Toutefois, appliquant le deuil protocolaire, en1945, à l'annonce de la mort d'Hitler, il fait mettre les drapeaux en berne. La neutralité, l'ambivalence et la politique d'équilibre du Portugal salazariste, fidèle à l'alliance anglaise, mais exprimant une véritable correction protocolaire à l'égard de l'Allemagne nazie ont parfois été des points de questionnement. En réalité, elle est de l'avis même des Britanniques strictement conforme aux intérêts duRoyaume-Uni et de l'alliance anglo-portugaise[72],[73],[74].
En, lePremier ministreWinston Churchill écrit àSalazar pour le féliciter de sa capacité à maintenir le Portugal hors de la guerre, affirmant que « comme souvent avant au cours des nombreux siècles de l'alliance anglo-portugaise, les intérêts britanniques et portugais sont identiques sur cette question vitale »[72]. Dans ses écrits, l'ambassadeur britannique àMadrid de 1940 à1944 LordSamuel Hoare affirme que « Salazar [déteste]Hitler », que le régime portugais diffère fondamentalement dunazisme et dufascisme, et que Salazar n'a jamais laissé aucun doute dans son esprit quant au fait qu'il désire une défaite nazie[73]. En, l'ambassadeur britannique àLisbonne,SirRonald Campbell (en), écrit (en paraphrasant Salazar) que « la stricte neutralité portugaise [est] le prix à payer pour que les Alliés profitent des avantages stratégiques [...] du Portugal, et que si sa neutralité au lieu d'être stricte était plus bienveillante en faveur [du Royaume-Uni], l'Espagne se jetterait inévitablement corps et âme dans les bras de l'Allemagne. Si cela arrivait, la péninsule serait occupée, puis l'Afrique du Nord, avec pour résultat que tout le cours de la guerre serait modifié au bénéfice de l'Axe. »[74] Au moment où le gouvernement portugais loue à la Grande-Bretagne labase aérienne et navale portugaise des Açores,Churchill fait un rapport à laChambre des communes sur le bail. Dans ses mémoires sur la Seconde Guerre mondiale, il rapporte le caractère exceptionnel de l'alliance anglo-portugaise :
« J’ai une annonce à faire à la Chambre en vertu du traité signé entre ce pays et le Portugal en 1373 entre Sa Majesté le roiÉdouard III et le roiFerdinand et la reineEleanor du Portugal »[75]. J’ai parlé à haute voix, et fait une pause pour permettre à la Chambre de bien prendre en compte la date, 1373. Elle était empreinte de quelque chose comme un halètement. Je ne suppose pas une telle continuité des relations entre les deux puissances n’a jamais été, ou ne sera jamais, énoncés dans le travail ordinaire quotidien de la diplomatie britannique[76]. »
La mise à disposition de labase aérienne de Lajes par lePortugal a une importance cruciale pour lesAlliés pendant la guerre. De à, 8 689 avions américains quittent l'archipel portugais, parmi lesquels 1 200B-17 et des avions bombardierB-24. Les avions-cargos alliés transportent du personnel et du matériel nécessaires à l'Afrique du Nord, auRoyaume-Uni, puis à lacampagne contre l'Allemagne en Europe après ledébarquement. Les vols de retour vers les Açores rapatrient les militaires blessés. Pendant deux ans, le personnel médical installé à Lajes organise environ 30 000 évacuations aériennes vers lesÉtats-Unis pour des soins médicaux et de réadaptation. En utilisant la base de Lajes, le temps de vol entre lesÉtats-Unis et l'Afrique du Nord est réduit de 70 à 40 heures. Cette réduction considérable du temps de trajet permet aux Alliés de faire presque deux fois plus de passages par mois entre les États-Unis et l'Afrique du Nord, démontrant clairement la valeur géostratégique desAçores dans les opérations contre l'Axe[77],[74].
Au sortir de la guerre, bien que l'État Nouveau salazariste soit unedictature, l'aide apportée par le pays auxAlliés et surtout le soutien duRoyaume-Uni permettent l'entrée rapide du Portugal en 1949 dans l'OTAN, en tant que membre fondateur de l'organisation, alors même que celle-ci est censée paradoxalement représenter le « monde libre » (l'Espagne en est tenue à l'écart jusqu'en 1982 pour des raisons politiques). L'un des trois états-majors interarmées de l'OTAN est installé àOeiras, dans la banlieue de Lisbonne[78].
Bien que présentant des économies très différentes dans la seconde moitié duXXe siècle, les deux pays restent étroitement liés commercialement et sur des lignes politiques internationales assez proches. Opposés au développement de laCommunauté économique européenne, le, leRoyaume-Uni et lePortugal fondent avec sept autres pays européens l'AELE, l’Association européenne de libre-échange créée à l'initiative des Britanniques. Fondée par laconvention de Stockholm signée par les ministres des Affaires étrangères britannique,norvégien,danois,suisse, portugais,suédois etautrichien, l'association a pour objectif d'organiser une zone de libre-échange entre les pays d’Europe non-membres de laCommunauté économique européenne (CEE) et de contrebalancer le poids de la CEE en regroupant les États qui ne souhaitent ou ne peuvent pas y entrer. Le but est de créer une zone de libre-échange très souple, sansunion douanière, sansmarché commun, sans politiques communes (agriculture, transports, etc.) et sans objectif d'approfondissement progressif et d'union politique. En réalité, par la mise en place de l’AELE, les Britanniques et les Portugais espèrent surtout, pour des raisons différentes, pouvoir établir une grandezone de libre-échange avec la CEE. Le projet ayant échoué, les deux partenaires finissent par adhérer à la Communauté européenne, le Royaume-Uni en1973 et le Portugal en1986[79],[80].
En1961, après l'invasion par l'Inde des possessions portugaise de Goa, Diu et Daman, lePortugal demande l'aide desBritanniques, mais ayant eux-mêmesquitté le sous-continent Indien en 1947, et ayant accepté le mouvement dedécolonisation en cours à l'époque (bien que privilégiant les périodes de transition pacifiques), sa demande est suivie de peu d'effet. Fidèle à l'alliance portugaise, leRoyaume-Uni condamne l'intervention militaire indienne par voie diplomatique, tout en ayant le souci de ménager la susceptibilité de l'Inde, également membre duCommonwealth. Le, le secrétaire d’État chargé des relations avec leCommonwealth of NationsDuncan Sandys affirme devant laChambre des communes que, bien qu'il comprenne le désir et l'impatience de l'Inde, « legouvernement de Sa Majesté déplore profondément la décision du gouvernement de l'Inde d'utiliser la force militaire pour atteindre ses objectifs politiques. » Le chef de l'opposition à laChambre des communesHugh Gaitskell (Parti travailliste) exprime également son « profond regret » que l'Inde ait eu recours à la force dans son litige avec lePortugal, même si l'opposition « reconnaît que l'existence de colonies portugaises sur le sous-continent indien est depuis longtemps un anachronisme et que le Portugal aurait dû les abandonner depuis longtemps en vertu de l'exemple donné par la Grande-Bretagne et la France. » Exprimant la position officielle du pays dans les instances internationales, le représentant permanent duRoyaume-Uni auprès desNations unies,SirPatrick Dean (en) déclare à l'ONU que laGrande-Bretagne est « choquée et consternée » lors du déclenchement des hostilités[81]. En1974, larévolution des Œillets qui instaure une démocratie au Portugal fait coïncider la position officielle portugaise concernant les colonies avec la position britannique[82].
Pendant laguerre des Malouines opposant leRoyaume-Uni à l'Argentine en1982, le Portugal offre une nouvelle fois les installations desAçores à laRoyal Navy. À cette occasion, labase portugaise de Lajes est utilisée comme point de ravitaillement pour les avions et les porte-avions britanniques en mouvement vers l'Atlantique Sud[83].
Actuellement, les deux pays sont membres de l'OTAN. Leurs relations, coordonnées à l'intérieur de ces institutions, restent régies par les anciens traités d'alliance précédemment évoqués.