Comme c'est le cas pour beaucoup de localités voisines, l'église d'Ammertzwiller a été détruite pendant la première guerre mondiale. Reconstruite en 1927 par Paul Horn et Renatus Voegtlin, son patrimoine mobilier s'est joliment reconstitué : elle abrite aujourd'hui un maître-autel de Théophile Klem, un "Christ au tombeau" œuvre de Jean-Jacques Henner, natif de Bernwiller, et un orgue post-symphonique de 1929, que Joseph Rinckenbach logea dans un buffet néo-renaissance original bien en accord avec le reste du mobilier.
Historique
Un premier orgue est attesté à Ammertzwiller dès1801 par la présence d'un organiste : J. B. Cron. [IHOA] [PMSSUND1984]
L'instrument a été réparé en1806 parFrançois Callinet. On connaît aussi le nom de l'organiste en 1812 : Paul Tschän, en 1815 : J. B. Lindecker, et de 1819 à 1826 : Joseph Zürcher. [IHOA] [PMSSUND1984]
Historique
En1886,Jean-Frédéric II Verschneider (1810-1884) fournit un orgue neuf, à un seul manuel. C'est François Staudt qui signa les quittances. [PMSSUND1984] [ITOA]
L'ancien buffet devait être conservé, et la partie instrumentale devait être identique à celle deBruebach, mais dotée d'une pédale indépendante. [IHOA] [PMSSUND1984] [Barth]
L'instrument fut reçu le 21/06/1886 parFrançois Antoine Ginck, le curé Gerber de Zimmersheim, et Ignace Gerber (Thann). La Gambe et la Voix céleste (munies de freins harmoniques) ont été considérées comme particulièrement bien réussies. [PMSSUND1984]
L'instrument fut détruit, comme l'église et pratiquement toute la localité d'Ammertzwiller en1915. La reconstruction de l'église fut achevée en juin 1927. [IHOA]
Historique
En1929,Joseph Rinckenbach posa à Ammertzwiller son opus 192. [IHOA] [ITOA] [Barth]
Avec 16 jeux, il est un peu plus petit que ses contemporains deWattwiller (24 jeux),Vieux-Thann (20) ouWolschwiller (19), et un peu plus grand que son voisin d'Eglingen (1928, 15 jeux).
Il y eut quelques dégâts en novembre1944, causés par des tirs de blindés. [ITOA]
L'orgue a été relevé en1981 par la manufacture d'orgues Franc-Comtoise deBernard Aubertin. [ITOA]
Le buffet
Le buffet, de style néo-renaissance, est en chêne, et d'un dessin particulièrement élégant. Trois tourelles, la plus petite au milieu, encadrent deux plates-faces, comme àVieux-Thann (qui est contemporain d'Ammertzwiller). Contrairement à la tourelle centrale, et aux trois tourelles du buffet de Vieux-Thann, les tourelles latérales ne sont ici pas en tiers-point, mais prismatiques, sur une base de demi-hexagone.
Les claires-voies sont particulièrement ouvragées, et dorées. L'ornementation est complétée par des culots de tourelles et des frises sculptées.
Caractéristiques instrumentales
Console indépendante face à la nef, fermée par un rideau coulissant. Tirants de jeux à porcelaines, placés en ligne au-dessus du second clavier. De gauche à droite : les 2 tirants de la pédale (porcelaine à fond marron-rouge), les 7 du grand-orgue (fond blanc), et les 7 du récit (fond rose). Ces tirants rappellent les instruments que Joseph a construits avec son père Martin entre 1911 et 1914.
Claviers blancs. Commande des tirasses et accouplements par pédales-cuillers à accrocher. De gauche à droite : "II aigu-I" (II/I 4'), "II grave-I" (II/I 16'), "II-P", "I-P", "II-I", "G.O." (I/I). Vient ensuite la pédale basculante de l'expression du récit (au-dessus du "g" du pédalier, "Expression"), puis celle du crescendo ("Crescendo"), et, à droite, la pédale-cuiller à accrocher du trémolo ("Tremolo" ; la porcelaine est à fond blanc).
Commande des combinaisons fixes par pistons blancs, placés au centre sous le premier clavier, et repérés par de petites porcelaines blanches placées sur la table horizontale, sous chaque piston : "P.", "MF.", "F.", "T." et "O" (annulateur et retour à la registration manuelle). Plaque d'adresse incrustée dans le bois à gauche des claviers, dans la partie inclinée, en laiton, avec cadre arrondi, et disant :
Pneumatique tubulaire (notes et jeux), très réactive et agréable à jouer.
A membranes.
Le grand orgue est diatonique, en "M" (basses aux extrémités). L'accès à la passerelle se fait entre les deux sommiers.
Le récit est placé à l'endroit habituel : au fond, et un peu en hauteur. Il est également diatonique, disposé en "M". Il est prévu pour 68 notes (pour un accouplement II/I 4' actif aussi sur la dernière octave). Même les faux-sommiers ont été (pré-) percés pour cette octave aiguë supplémentaire, mais les tuyaux n'ont jamais été posés.
Il y a deux sommiers chromatiques pour la pédale, perpendiculaires à la façade : un pour les basses (C-cis), à droite et au niveau sol, un autre pour les dessus (d-f’), à gauche au niveau du grand-orgue. La Soubasse est contre les flancs, et la Flûte 8 vers l’intérieur.
Les basses sont en bois ou en zinc (ce qui, une fois de plus, témoigne de la grande valeur de ce métal en facture d'orgues), les dessus en étain, ou alliages étain/plomb (étoffe et spotted). Les Bourdons sont à calottes mobiles, les tuyaux ouverts à entailles d'accord ou de timbre, et les biseaux sont munis de dents bien marquées.
Directement inscrit dans la tradition post-romantique alsacienne élaborée par Edmond-Alexandre Roethinger, Georges Schwenkedel et Joseph Rinckenbach, cet instrument confirme une fois de plus l'intérêt historique et musical des orgues de l'époque 1918-1939. Après cet opus 192, Rinckenbach ne construisit plus que 10 instruments, dont certains des plus remarquables, comme celui de Raon-l'Etape. On trouve dans la localité voisine deBalschwiller le "chant du cygne" de la maison Rinckenbach.
L'orgue d'Ammertzwiller est donc un précieux témoin du niveau atteint par la facture d'orgues alsacienne dans l'ente-deux-guerres, et de ses spécificités.
Sources et bibliographie :
Remerciements à Dominique Hinderer.
Photos du 06/10/2018 et données techniques.
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