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Sommaire -
DOSSIER

La fabrique européenne de la race (17e-20e siècles) : Introduction

DavidHamelin et SébastienJahan
p. 13-26

Texte intégral

  • 1 Étienne Balibar, « Le retour de la race »,Mouvements, 2007/2, n° 50, p. 162-171.

1Dans un article de la revueMouvements paru en 2007, le philosophe Étienne Balibar évoquait le « retour de la race », un retour qui s’opère non pas de manière explicite, avec les mots du 19e siècle, mais « avec un autre visage et sous d’autres noms », témoignant avec force d’un phénomène aussi diffus qu’inquiétant : la banalisation sociale et culturelle de « représentations qui rapportent à l’origine et à la descendance des “mentalités” ou des “aptitudes” individuelles ou collectives supposées ». En ce sens, le racisme non seulement « est toujours là », mais il a acquis dans nos sociétés « une nouvelle virulence1 ». La persistance comme la vigueur réactivée de ce fléau ont, ces derniers mois, été exposées au grand jour à l’occasion des manifestations et des débats qui ont accompagné la médiatisation de violences policières à caractère raciste aux États-Unis ou en France. Les militants duBlack Live Matterset leurs semblables européens ne se sont toutefois pas contentés de dénoncer la répétition inquiétante d’agressions, parfois meurtrières, commises par des représentants de l’ordre public sur des personnes « racisées » : tout en rattachant cette brutalité à un racisme systémique qui se déploie au quotidien de façon plus insidieuse, avec la discrimination dans l’accès au logement ou au travail, par exemple, ils ont voulu aussi démontrer, par une série d’actions symboliques (déboulonnage ou dégradations de statues) que ces inégalités vécues n’étaient que le prolongement de pratiques d’infériorisation très profondément et très anciennement ancrées dans les sociétés occidentales. L’existence, dans l’espace public de nombreux pays d’Europe ou d’Amérique, de monuments ou d’odonymes honorant des négriers, des criminels de guerres coloniales ou des promoteurs de l’impérialisme ultramarin, met en effet en évidence à quel point ce passé imprègne, silencieusement, notre environnement, comme un tacite et troublant consentement de notre mémoire collective à la perpétuation de modes de domination fondés sur la couleur de peau.

  • 2 Voir le controversé William B. Cohen,Français et Africains, Les Noirs dans le regard des Blancs, 1(...)
  • 3 Le livre, traduit en français en 1556, largement diffusé et commenté, contient notamment ce jugemen(...)
  • 4 Voir les extraits des ouvrages de Claude Jannequin, du père Labat ou de William Bosman, cités par C(...)
  • 5 Pierre Dockès, « Le Paradigme sucrier (XIe-XIXe siècles) », dans Fred Célimène, André Legris (dir.)(...)

2Une telle actualité conduit à s’interroger sur les circonstances, intellectuelles et socio-économiques qui ont permis la naissance du racisme, si l’on considère – et c’est notre cas – que ce dernier n’est pas un invariant anthropologique, un motif universel présent dans toutes les cultures et à toutes les époques, mais bien une construction idéologique promue dans un contexte spécifique par des élites désireuses de justifier leur domination sur une partie de l’humanité. Car le racisme, théorie sans fondement scientifique mais qui aime à se parer des atours de la raison, repose avant tout sur unecroyance : celle qu’il existe des races humaines et que certaines d’entre elles sont supérieures aux autres. Or, il est possible de dater et de documenter dans leurs grandes lignes la lente genèse de cette croyance. Pour la France, dès les années 1980, les travaux de chercheurs, souvent nord-américains, ont mis en évidence la corrélation très nette qui existe entre l’émergence du racisme et l’expansion ultramarine des 17e et 18e siècles2. Vers les années 1630/1640, lorsqu’arrivent aux Antilles les premiers navires négriers apportant leur cargaison de captifs destinés à l’esclavage dans les plantations de tabac, puis de canne à sucre, la conviction qu’on aurait affaire avec les Noirs à une « race inférieure » n’existe pas encore. Les préjugés à leur égard sont, en revanche, déjà très dévalorisants. Ils se sont diffusés en Europe à partir du 16e siècle, du fait, entre autres, de la popularité croissante de récits de voyages comme laDescription de l’Afrique de Léon l’Africain3. À propos des populations vivant au sud du Sahara, ces textes propagent des stéréotypes promis à une longue carrière, comme la paresse, la lubricité, la tendance à voler ou à dissimuler, ou encore la robustesse et l’endurance physique4. Ces représentations arrivent à point nommé pour régler l’épineuse question morale que pose l’esclavage : idolâtres et vicieux, dénués de capacités autres que physiques, les Noirs n’auraient ainsi pas d’autre destin que la servitude. Elles permettent d’escamoter les raisons prioritairement économiques de la traite : la rareté de la main-d’œuvre disponible aux Antilles, la nécessité d’utiliser des personnes déracinées qui ne connaissent pas le terrain, la proximité relative des marchés négriers africains et surtout l’existence tant de réseaux antérieurs avec la traite transsaharienne que d’un « paradigme productif » qui avait déjà fait ses preuves dans les îles de l’Atlantique5.

3La dégradation de l’image des Noirs dans l’imaginaire européen ne peut donc que s’accentuer avec leur réduction massive en esclavage, comme le démontre le double sens du mot « nègre » au 18e siècle, qui signifie à la fois « habitant de la Nigritie » et « esclave », orientant ainsi rapidement les connotations du terme dans un sens négatif. Avec ces stéréotypes mis au service d’un système d’exploitation violent et déshumanisant, une bonne part des ingrédients du racisme se trouvent donc déjà présents à cette époque. Mais il manque encore ce qui rend ce système de pensée si dangereux et si efficace : le caractère essentiel et irréversible de la race.

  • 6 Thierry Hoquet, « Biologisation de la race et racialisation de l’humain : Bernier, Buffon, Linné »,(...)

4Cette théorisation à prétention scientifique se développe dans le cadre de la constitution d’un savoir visant à classifier et hiérarchiser le vivant. Deux ouvrages ont joué un rôle particulièrement important dans la formalisation de la nouvelle orthodoxie raciale : le Système de la nature de Linné (1735) et l’Histoire naturellede Buffon (1749). Pour le premier, les humains font partie du règne animal et se divisent en quatre groupes (la « tétrade de Linné ») : les Américains, « rouges, bilieux, droits et régis par les coutumes », les Européens, « blancs, sanguins, musculeux et régis par les lois », les Asiatiques, « basanés, mélancoliques, raides, régis par l’opinion », les Africains, « noirs, flegmatiques, relâchés et régis par le hasard ». Pour Buffon, le type humain originel, le plus proche de la perfection, c’est l’Européen, parce qu’il évolue dans un climat tempéré. Les autres « variétés » sont d’autant plus dégénérées qu’elles subissent des climats extrêmes : il est donc logique de trouver à la base de la hiérarchie humaine les habitants des extrémités de la planète que sont les Samoyèdes du nord de l’hémisphère, et les Hottentots (Khoikhoi) d’Afrique australe qui sont, chacun dans leur genre, « lourds, grossiers, stupides... ». Même si le mot race n’est pas employé, même si, chez Buffon, ces dégradations ne sont pas irréversibles ni forcément liées à la couleur, cette hiérarchisation des groupes humains, la suggestion aussi d’une proximité de certains avec les animaux, nous rapprochent de ce que nous appelons racisme6

5L’impact de ces ouvrages, lus et débattus dans toute l’Europe, fut considérable. Leurs idées deviennent une norme adoptée par les sciences naturelles et contaminent la pensée philosophique ou politique de certaines grandes figures des Lumières. Voltaire est peut-être la personnalité emblématique du mouvement qui va le plus loin dans la naturalisation du processus de sujétion des Africains. Dans l’introduction de l’Essai sur les mœurs,il affirme ainsi que les Noirs sont à tel point dissemblables des autres « races » humaines qu’ils ne peuvent prétendre appartenir à la même souche :

  • 7 Voltaire,Essai sur les mœurs et l’esprit des nations [1756], Paris, Garnier, 1963, t. 1, p. 6.

« Leurs yeux ronds, leur nez épaté, leurs lèvres toujours grosses, leurs oreilles différemment figurées, la laine de leur tête, la mesure même de leur intelligence, mettent entre eux et les autres espèces d’hommes des différences prodigieuses. Et ce qui démontre qu’ils ne doivent point cette différence à leur climat, c’est que des Nègres et des Négresses transportés dans les pays les plus froids y produisent toujours des animaux de leur espèce, et que les mulâtres ne sont qu’une race bâtarde d’un noir et d’une blanche, ou d’un blanc et d’une noire. »7

6Un autre passage justifie l’esclavage en ces termes :

  • 8Ibidem, tome 2, p. 335.

« La nature a subordonné à ce principe ces différents degrés de génie et ces caractères des nations qu’on voit si rarement changer. C’est par là que les Nègres sont les esclaves des autres hommes. »8

  • 9 David Theo Goldberg,Racist Culture : Philosophy and the Politics of Meaning, Malden and Oxford, Bl(...)
  • 10 Andrew S. Curran,L’Anatomie de la noirceur. Science et esclavage à l’âge des Lumières, Paris, Garn(...)

7Sans aller jusqu’à soutenir l’idée polémique – et simpliste – que la représentation racialisée des Africains s’insère dans un projet de domination globale (intellectuelle, culturelle, coloniale et physique) de l’Europe sur le reste du monde, consciemment servi par la philosophie des Lumières9, il reste difficile de ne pas reconnaître une tension, sensible dans la pensée du 18e siècle, entre « la loi naturelle supposément inviolable » (l’égalité et l’unité des espèces humaines) et « certains postulats de l’histoire naturelle qui semblent la contredire10 » (la spécificité anatomique et intellectuelle des Noirs). Ce discours savant sur la race plus ou moins ambiguë est en tous les cas une aubaine pour les planteurs coloniaux et les négriers qui l’utilisent dans leur propagande pour tenter de fonder le système esclavagiste sur des arguments rationnels, précisément à un moment où, dans les années 1760-1770, parallèlement à la dissociation entre le statut moral de l’esclavage et le statut physique des Africains asservis, se développe le courant abolitionniste français avec des personnalités comme Montesquieu, l’abbé Raynal ou encore l’administrateur colonial Pierre Poivre.

  • 11 Pierre H. Boulle,Race et esclavage…, op. cit., p. 59-80.

8Le racisme français serait donc né de la rencontre de deux phénomènes historiques majeurs : d’une part, pour les planteurs, la nécessité de catégoriser la société coloniale selon la couleur de la peau afin de maintenir leur autorité sur les esclaves ainsi que leur prééminence sociale sur les affranchis et les libres de couleur, d’autre part le développement d’un courant de pensée, proto ou pseudo-anthropologique, qui classe et organise le monde physique selon des espèces hiérarchisées, dans un contexte où l’Occident se découvre une vocation à dominer le monde. La théorisation de la race qui en résulte gagne ensuite les cercles du pouvoir, du fait d’une double porosité des ministères aux cercles scientifiques et aux milieux coloniaux. À ces deux facteurs à l’origine du racisme en France, l’historien Pierre Boulle ajoute un troisième point, moins décisif en terme de causalité quoique idéologiquement archétypal : le préjugé nobiliaire11. C’est, en effet, par lui que le terme de race a transité pour arriver à sa signification contemporaine première. Voyons-en sommairement les étapes.

  • 12 Antoine Furetière,Dictionnaire universel…, La Haye-Rotterdam , A. et R. Leers, vol. 3, 1690, p. 28(...)
  • 13 Pierre H. Boulle, « François Bernier et le concept moderne de race », dans Pierre H. Boulle,Race e(...)

9Si le terme de racisme est très récent (1902), celui de « race » apparaît en revanche dans la langue française dès le 15e siècle. Ce dernier vocable viendrait de l’italienrazza, terme qui dans cette langue désignait les catégories d’animaux reproduits pour la chasse ou la guerre (les chevaux et les chiens). Très vite, il s’est étendu aux humains pour les ranger selon leurs qualités héritées par la naissance. C’est ainsi que dans leDictionnaire de Furetière (1690), on trouve ces deux sens : celui utilisé en élevage (« espèces particulières de quelques animaux »), mais aussi la race comme synonyme de lignée (« de bonne race, de noble race »), de maison (« les rois de la IIIe race »)12. Vers la même époque, pourtant, le terme « race », se rapportant à des catégories d’hommes distinctes par les traits physiques (en particulier la couleur de la peau) et les qualités qui leur sont liées, éclôt pour la première fois en France sous la plume d’un médecin et voyageur, François Bernier, né en 1620. En 1684, dans un article duJournal des Sçavans, Bernier considère ainsi qu’il existe « quatre ou cinq espèces ou races d’hommes dont la différence est si notable qu’elle peut servir de fondement à une nouvelle division de la Terre » : il y aurait donc ainsi les Européens, les Africains, les Asiatiques et les Samoyèdes (les Lapons que l’on nomme aujourd’hui Sami). Ce sont ces derniers qui constituent pour Bernier la plus méprisable des espèces : « de petits courtauds avec de grosses jambes, de larges épaules, le col court et un visage je ne sais comment tiré en long, fort affreux et qui semble tenir de l’ours. Ce sont de vilains animaux ». Il ajoute que les Américains, les Indiens et les Arabes appartiennent à la « race européenne ». Quant aux Africains, la couleur de leur peau n’est pas due à l’exposition au soleil, elle leur est essentielle. Bernier, toutefois, ne fait pas école. Il n’est jamais cité dans les traités coloniaux du 18e siècle, offrant ainsi juste le reflet d’une certaine mutation de la pensée13.

  • 14Dictionnaire de l’Académie française, 6e édition, tome II, Paris, Firmin Didot frères, 1835, p. 553
  • 15 Pierre H. Boulle,Race et histoire…, op. cit., p. 65-66.

10Il faut cependant attendre les lexicographes du début du 19e siècle pour voir apparaître dans un dictionnaire la race telle que l’entend Bernier, dans le sens qui est donc au cœur du présent dossier. LeDictionnaire de l’Académie de 1835 signale, en effet, que « race » se dit aussi « d’une multitude d’hommes qui sont originaires du même pays, et se ressemblent par les traits du visage, par la conformation extérieure.La race caucasienne. La race mongole. La race malaise14 ».En d’autres termes, c’est au cours du 18e siècle que s’est opérée en France l’introduction de la couleur de peau dans le discours sur la race, marquant ainsi le passage d’une définition généalogique à une définition biologique. L’historien Pierre Boulle a cependant démontré que le racisme français n’est pas né d’un simple glissement du préjugé de la « race noble » vers le sentiment de supériorité de la « race blanche ». Le mépris des nobles pour les catégories roturières n’avait pas de fondement « ethnique » et même la fameuse théorie des « origines franques de la noblesse » visait moins à mettre en avant une filiation biologique qu’à rappeler les temps où le roi n’était qu’unprimus inter pares, dans une optique avant tout politique de dénonciation des dérives absolutistes de la monarchie15.

11Dans d’autres langues européennes, les mots ont toutefois pu emprunter des itinéraires divergents qui témoignent de l’histoire particulière des nations qui les utilisent. C’est ainsi que le parcours du termeraza, en espagnol, ne correspond pas tout à fait à celui de son équivalent français « race », au moins dans le parler du 17e siècle. En premier lieu, là où le français utilise alors « race » pour évoquer une lignée honorable ou caractériser la bonne origine des chiens ou des chevaux, l’espagnol préfère le termecasta, d’origine probablement celtibère, et qui a donné, via le portugais, notre français « caste ». LeDiccionario de la lengua castellana de l’Académie royale espagnole définit ainsi lacasta :

  • 16Diccionario de la lengua castellana,tome II, lettre C, Madrid, Imprenta de la Real Academia, Franc(...)

« Génération et lignage qui proviennent de parents connus (“Bien qu’étant de très illustre lignage et de noble race [noble casta], il était de constitution corporelle maladive”). On nomme également ainsi la lignée distincte des chevaux, taureaux et autres animaux, parce qu’ils proviennent de parents connus pour leur loyauté, leur combativité ou d’autres qualités qui les rendent remarquables et particuliers. »16

  • 17Ibidem, tome V, lettres OPQR, Madrid, Imprenta de la Real Academia, Heredéros de Francisco del Hier(...)

12La même édition du dictionnaire17 fait deraza un quasi-synonyme decasta : « caste ou qualité de l’origine ou du lignage ». Il ajoute cependant que « parlant des humains, il se prend très régulièrement en mauvaise part ». L’exemple cité par l’article illustre cette connotation très dévalorisante du mot qui le distingue alors du français :

  • 18Ibidem : « Hablando de los hombres, se toma muy regolarmente en mala parte. (…) Ordenamos y mandamo(...)

« Nous ordonnons et commandons qu’aucune personne de quelque qualité ou condition qu’elle soit, ne soit reçue dans ledit Ordre ni ne reçoive l’habit, si elle n’est pas d’ascendance noble, selon les lois de l’Espagne, du côté du père comme de la mère et des grands-parents de l’une et l’autre part, née de légitime mariage, et non touchée par la race du juif, du Maure, de l’hérétique et du vilain. »18

13Loin de valoriser, la race exclut, servant à désigner tous ceux qui ne correspondent pas aux statuts de « pureté du sang » (limpieza de sangre), alors en vigueur pour obtenir le droit d’accéder aux principales responsabilités civiles ou religieuses.

  • 19Diccionario de la lengua castellana, 16e édition, Madrid, Espasa-Calpe, 1936-1939 : « se toma a vec(...)
  • 20 Isidro Sepúlveda Muñoz,El Sueño de la madre patria : hispanoamericanismo y nacionalismo, Madrid, M(...)
  • 21 Elías Zerolo, Miguel de Toro y Gómez, Emiliano Isaza y otros,Diccionario enciclopédico de la lengu(...)
  • 22 Gonzalo Álvarez Chillida,El Antisemitismo en España. La Imagen del judío (1812-2002), Madrid, Marc(...)

14La définition lexicographique deraza n’évolue pas au 19e siècle. Et même si une légère nuance apparaît dans les éditions du début du 20e siècle (« elle se prendparfois en mauvaise part » – édition de 1936)19, on peut se demander pourquoi un terme aussi péjoratif a servi à désigner, à partir de 1914, une manifestation officielle et triomphaliste comme laFiesta de la Raza Española (« Fête de la race espagnole ») qui, chaque année le 12 octobre, en Espagne et dans de nombreux pays d’Amérique latine, célébrait sous ce nom les premiers pas de Colomb au Nouveau Monde et, à travers eux, « l’intimité spirituelle » associant la « nation découvreuse et civilisatrice » à ses anciennes colonies20. La raison en est sans doute que la norme des linguistes de l’Académie se trouve en retard sur les usages savants du motraza qui, depuis quelques années, étend son spectre sémantique à la définition pseudo-scientifique des « races humaines », intégrant, sur le modèle du français, mais avec quelques années de décalage, les nouvelles théories sur la répartition, les caractères et la hiérarchie des différentes variétés d’hommes et de femmes. Dès 1895, des dictionnaires espagnols qui, comme le Zerolo, développent des notices encyclopédiques à partir des définitions, consacrent quelques lignes auxrazas humanas (« races humaines »). Soulignant le rôle de certains caractères (comme la couleur de peau) dans leur différenciation, l’auteur de l’article du Zerolo considère qu’il en existe cinq (race caucasienne ou blanche, race mongolienne ou jaune, race américaine ou rouge, race malaise, race éthiopienne ou noire) et que la première « offre ainsi, tant au physique qu’au moral, une prééminence marquée sur les autres21 ». Dans l’usage, et spécialement chez les scientifiques et les intellectuels, le terme de race perd donc ses connotations négatives, peu de temps après que disparaissent de la loi les statuts de pureté de sang (abolis entre 1865 et 1870). Les clivages entre les hommes se détachent ainsi des considérations religieuses pour se fonder sur d’autres critères, tégumentaires et biologiques, parés d’une légitimité scientifique. Dans ce contexte – qui est celui d’une nouvelle phase d’expansion planétaire des Européens – peut s’opérer la promotion de la « race espagnole », comme branche de la « race blanche », qui bien avant toutes les autres aurait contribué à porter au-delà des mers et des océans le flambeau d’une civilisation supérieure. À l’heure où la France, la Grande-Bretagne et quelques autres se bâtissent des empires en Afrique et en Asie, l’Espagne n’a certes plus guère de projet colonial, mais elle a toujours le moyen de mettre en avant la part déjà considérable qu’elle se targue d’avoir apporté à « l’œuvre civilisatrice22 ».

  • 23 lona Katzew,La Pintura de castas : representaciones raciales en el México del siglo XVIII, Madrid,(...)

15La « caste » des Espagnols du Siècle d’Or a, en effet, traversé l’Atlantique, sans doute avant la « race » des Français, pour distinguer non plus les « vieux chrétiens » des péninsulaires de souche juive ou morisque, mais les différentes composantes ethniques d’une Amérique coloniale rendue de moins en moins déchiffrable en raison du métissage. Si, dans un premier temps, les groupes humains se distinguent aisément par leur couleur de peau, à laquelle est globalement associé un statut (les « naturels » ou « Indiens », soumis au tribut, les « Noirs », esclaves, et les « Blancs », Espagnols ou créoles, en position de commandement), le mélange des sangs vient rapidement brouiller les repères. Pour tenter d’éviter l’effacement progressif des frontières ethniques, les élites coloniales espagnoles tentent donc de garder le contrôle des règles du jeu social en inventant un système de classement et une nomenclature propres à identifier les différentes combinaisons ethniques. Cette « société des castes » qui s’établit au 17e siècle, bien que fondée sur une construction théorique difficilement adaptable à la réalité, illustre les efforts des classes dirigeantes pour limiter les conséquences potentiellement subversives du métissage, mais aussi leur volonté de pérenniser une grille de lecture des rapports sociaux fondée sur des critères raciaux. Au Mexique ou au Pérou, des tableaux (pinturas de castas) sont ainsi composés, qui permettent de visualiser des croisements sur plusieurs générations et de nommer la catégorie de sang-mêlé qui en découle, identifiant jusqu’à 52 appellations différentes23. Lorsqu’il voyage en Amérique espagnole au début du 19e siècle, Alexander von Humboldt ne distingue pour sa part que sept catégories (Espagnols, créoles, Indiens, Noirs,mestizos issus de Blancs et d’Indiens,mulatos, nés de Noirs et de Blancs, etzambos pour les métis d’Indiens et de Noirs). Mais il perçoit clairement la déclinaison sociologique de ce dégradé de couleurs :

  • 24 Alexandre de Humboldt,Voyage de Humboldt et Bonpland. Troisième partie : essai politique sur le ro(...)

« Dans un pays gouverné par les Blancs, les familles qui sont censées être nées avec moins de sang nègre ou mulâtre sont naturellement aussi les plus honorées. En Espagne, c’est pour ainsi dire un titre de noblesse de ne descendre ni de juifs, ni de Maures. En Amérique, la peau plus ou moins blanche décide du rang qu’occupe l’homme dans la société. Un Blanc qui monte pieds nus à cheval s’imagine appartenir à la noblesse du pays. »24

  • 25Ibidem, p. 89.

16Un tel système inspire les colons français de la Caraïbe, qui succèdent sur ces terres aux Espagnols (à Saint-Domingue) ou voisinent avec eux (aux Petites Antilles). Dans les colonies esclavagistes françaises, le développement du préjugé de couleur et la mise en place d’une « pigmentocratie » se traduisent, notamment, par une discrimination des mulâtres et n’est sans doute pas sans lien avec la hiérarchisation des castes dans l’Empire espagnol. L’avocat Moreau de Saint-Méry, historien de Saint-Domingue, propriétaire d’esclaves et membre de ce qu’il nomme « une aristocratie de l’épiderme », développe ainsi avec une sophistication extrême la logique des tableaux de croisement espagnols et aboutit à dénombrer 128 combinaisons possibles de Noirs et de Blancs à partir de 9 catégories, dans le but de calculer la proportion de sang noir. Il prétend aussi pouvoir reconnaître le degré de métissage à partir de certains caractères physiques. Ainsi le quarteron a-t-il, selon lui, « la peau blanche, mais ternie par une nuance d’un jaune très affaibli, ses cheveux sont plus longs que ceux du mulâtre et bouclés. Il les a même assez souvent blonds (...)25 ».

  • 26 Carole Reynaud-Paligot, « Construction et circulation de la notion de “race” au cours du XIXe siècl(...)

17L’influence du système des castes espagnoles dans la construction des classifications antillaises françaises paraît donc vraisemblable, contribuant ainsi à la construction du racisme européen dans sa version coloniale. Par un étonnant mouvement de va-et-vient, le préjugé de couleur, « ennobli » de prétentions scientifiques, revient, comme on l’a vu, en Espagne vers la fin du 19e siècle sous la forme de la théorie des races humaines pour célébrer rétrospectivement le caractère pionnier des Espagnols dans l’entreprise coloniale. Ce type de circulations ne se limite évidemment pas à la France et à l’Espagne. Toutes les puissances européennes colonisatrices de l’Amérique (Espagne, Portugal, Grande-Bretagne, France, Provinces-Unies, Suède, Danemark) ont été, à un moment ou à un autre, impliquées dans la traite négrière et l’établissement de structures de production esclavagistes où cohabitaient Européens et Africains. Au 18e siècle, ce sont les élites intellectuelles de l’ensemble du Vieux Monde, y compris dans des puissances demeurées en marge de l’expansion ultramarine, comme les États allemands ou italiens, qui se retrouvent engagées dans le débat sur l’origine de la diversité humaine, le rôle du climat et de l’environnement, l’identification et la classification des caractères somatiques, leur transmission et leur mutabilité, etc. Au siècle suivant s’opère enfin une « transnationalisation » des théories de l’anthropologie raciale, avec la circulation tant des hommes que des idées sur les cinq continents, au rythme du développement des sciences anthropologiques26 et de la naissance du second impérialisme colonial, étape majeure du processus d’occidentalisation du monde et de la popularisation d’un racisme globalisé, ciblant les populations soumises et leurs descendants. Comme le remarque fort justement Achille Mbembe,

  • 27 « Le racisme n’est pas un accident, c’est un écosystème », entretien avec Achille Mbembe,Quartier(...)

« Il n’y a guère d’ADN du racisme qui soit purement national. Les régimes du racisme ne cessent de se plagier les uns les autres, de se copier, et s’il est quelque chose qui les aura caractérisés tout au long des trois à quatre derniers siècles, c’est leur puissance mimétique. Les “chaînes racistes” non seulement circulent, sont connectées les unes aux autres, mais elles se soutiennent mutuellement. »27

18La construction de la race dans les mondes francophones ou hispanophones, relativement bien documentée, ne saurait dès lors épuiser le sujet. C’est donc dans la perspective de comprendre comment ont pu se développer ces phénomènes pluriels visant à hiérarchiser l’humanité, dans d’autres aires culturelles et dans d’autres temporalités, que nous avons mobilisé plusieurs chercheurs qui nous permettent de décentrer le propos.

  • 28 Aurélien Aramini et Elena Bovo (dir.),La Pensée de la race en Italie. Du romantisme au fascisme, B(...)

19Aurélien Aramini et Elena Bovo, auteurs d’une somme de référence sur la construction de la race en Italie28, permettent de réinsérer dans le débat sur la race la place et le rôle de ce pays, dont les contributions au sujet restaient particulièrement méconnues en France. Ils montrent que cette pensée raciale a su se nourrir, en l’espace d’un siècle, de théories parfois contradictoires, issues de la recherche académique ou des élites politiques. Aurélien Aramini et Elena Bovo saisissent trois « moments » de cette pensée. L’émergence de la philologie comparée en Italie au 19e siècle et le rôle capital que joue Gaspare Gorresio dans l’affirmation du « mythe aryen » dans la péninsule italienne structurent la première période. Dans l’approche du philologue, qu’il partage avec des homologues de son temps, l’idée indo-européenne rassemble certains peuples, mais établit une différence raciale avec d’autres, jugés « barbares » (dans son propos, les Mongols). Lui succède la naissance de l’anthropologie criminelle portée par les recherches du célèbre Cesare Lombroso, laïc et progressiste, et de ses disciples, qui puisent aussi bien dans la linguistique que dans des interprétations des théories de l’évolutionnisme (faisant que les « races » peuvent s’améliorer), ou encore de la criminologie, alimentée par le principe de l’atavisme et génératrice de la figure du « criminel-né ». Le « moment » fasciste clôt l’approche des deux chercheurs. Cette dernière période prend le contre-pied du racisme positiviste de Lombroso et contribue à une extériorisation des différences raciales, le peuple italien étant considéré par les fascistes comme unique et se rattachant aux « Aryens méditerranéens ». Les sous-figures du juif et du colonisé apparaissent alors et supplantent ainsi les catégories raciales antérieures.

20Le concept de race ne suit pas un parcours linéaire dans le cas sud-africain étudié par l’historien Gilles Teulié sur une longue période (15e-20e siècles). Tout en rappelant les différentes étapes de la colonisation de l’Afrique du Sud et les évolutions politiques, économiques, mais aussi sociales affectant ce territoire, Gilles Teulié montre comment la question raciale pénètre durablement les esprits. Les figures du Hottentot ou du Bushman, inventées par les Européens, viennent gommer des relations parfois plus complexes, voire pacifiées, entre, d’une part, les Khoesans au 17e siècle ou les Xhosas au 18e siècle et les colons néerlandais, d’autre part (certaines périodes favorisant même les mariages métissés ou les échanges commerciaux). Le racisme semble se développer et se nourrir des multiples conflits territoriaux entre colons (anglais et néerlandais, qui se combattent entre eux) et Africains (Xhosas, Bantous, Zoulous…) qui ne cessent de se développer sur fond d’accès aux matières premières et à la terre. Il est alimenté par les scientifiques du 19e siècle, surtout anglais ou français, qui auront ainsi à cœur de démontrer que les Khoesans par exemple constituent « le plus bas de l’échelle humaine », la « race » blanche se plaçant naturellement en haut de cette nomenclature.

21Au 19e siècle, les considérations raciales ne peuvent se satisfaire des seules différences entre Européens et Africains. Alors que deux « races » européennes coexistent sur le même territoire, un discours raciste se développe dans chacun des deux camps. Les colons, militaires et penseurs anglais s’interrogent sur la dégénérescence et l’infériorité des Boers, qui auraient côtoyé durant une trop longue durée les Africains, et justifient de cette façon leur violence à leur égard. Du côté des Boers, des théoriciens du « saxonisme » ou du « nordicisme » apparaissent sur fond d’aryanisme, dynamisé par des théologiens néerlandais ayant les oreilles du pouvoir et promouvant une « race calviniste » dont la nomenclature distingue « noirs », « blancs », « métis », « asiatiques », etc., et préfigure la classification raciale de l’apartheid qui s’installe en 1948.

22Les travaux de Silvia Sebastiani sur les approches de la race durant les Lumières écossaises d’une part, et ceux de Michel Prum concernant le discours britannique sur la race d’autre part, viennent démontrer, à l’instar des théoriciens français, la grande fécondité, si l’on peut parler ainsi, des penseurs et philosophes sur cette thématique, et par conséquent leur rôle dans la classification des humains, mais aussi, comme dans les contributions précédentes, l’instabilité même du concept de race, celui-ci pouvant recouvrir des réalités fort différentes.

23Silvia Sebastiani met en exergue une dimension très méconnue des Lumières écossaises (David Hume, Adam Smith, William Robertson…) surtout mises en valeur pour leurs nouvelles manières d’appréhender l’histoire ou la philosophie, mais pourvoyeuses dans le même temps d’un discours racial élaboré, parfois contradictoire, à l’image même de ce mouvement d’idées présenté trop souvent comme homogène selon la chercheuse.

24Conceptualisant l’évolution humaine avec un prisme universel, les Lumières écossaises ne considèrent pas fondamentalement dans un premier temps des différences indépassables entre les humains, l’homme « sauvage » ou « civilisé » n’ayant pas atteint le même état de développement. Or les débats autour de la place des habitants de l’Amérique du Nord cristallisent les divergences entre le monogénisme de William Robertson et le polygénisme d’Henry Home, alias Lord Kames, qui malgré des cheminements intellectuels différents convergent pour démontrer une différence raciale, ou de nature, entre Européens et Amérindiens. En résumé, les Lumières écossaises restent enfermées dans ce dilemme : les Amérindiens sont-ils ainsi une image du passé des Européens, ou représentent-ils autre chose du fait de leur incapacité à progresser ?

25Michel Prum interroge plus spécifiquement la relative banalisation du terme de race en Grande-Bretagne, en opposition à la France où la notion resterait taboue. Au 19e siècle, le chercheur rappelle que les débats initiés durant le siècle précédent entre monogénistes et polygénistes perdurent, sans que la question raciale soit résolue. Pour Michel Prum, c’est l’apport scientifique indéniable de Charles Darwin qui impose, par ses travaux défendant l’unicité du genre humain, du fait de l’interfécondité, mais surtout de l’unicité ontologique, une vision nouvelle et pérenne de l’humanité.

26Cette certitude n’empêche pas Darwin, par pragmatisme, de considérer que le terme de race puisse être utilisé avec des guillemets. Cet usage s’est maintenu dans la communauté scientifique au 20e siècle, puis diffusé dans le monde politique et la société, qui, tout en considérant le terme inadapté, l’ont paradoxalement essentialisé.

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Notes

1 Étienne Balibar, « Le retour de la race »,Mouvements, 2007/2, n° 50, p. 162-171.

2 Voir le controversé William B. Cohen,Français et Africains, Les Noirs dans le regard des Blancs, 1530-1880, Paris, Gallimard, 1981, dont les conclusions ont été actualisées par Pierre H. Boulle (Race et esclavage dans la France de l’Ancien Régime, Paris, Perrin, 2007) ou par Sue Peabody et Tyler Stovall (The Color of Liberty : Histories of Race in France, Durham, Duke University Press, 2003).

3 Le livre, traduit en français en 1556, largement diffusé et commenté, contient notamment ce jugement souvent rapporté, qui contredit d’ailleurs certaines de ses propres descriptions : « Ceux de la Terre noire sont gens fort ruraux, sans esprit, sans raison, ni pratique : n’étant aucunement expérimentés en choses que ce soit, et suivant la manière de vivre des bêtes brutes, sans loi ni ordonnance » (Jean Léon l’Africain,Historiale description de l’Afrique, tierce partie du monde..., Lyon, Temporal, 1556, p. 45).

4 Voir les extraits des ouvrages de Claude Jannequin, du père Labat ou de William Bosman, cités par Catherine Coquery-Vidrovitch (éd.),La Découverte de l’Afrique, Paris, L’Harmattan, 2003, p. 209-213, ou, pour une vision dans la longue durée, Catherine Coquery-Vidrovitch, « Le postulat de la supériorité blanche et de l’infériorité noire », dans Marc Ferro (dir.),Le Livre noir du colonialisme, XVIe-XXIe siècles : de l’extermination à la repentance, Paris, Robert Laffont, 2003, p. 646-691.

5 Pierre Dockès, « Le Paradigme sucrier (XIe-XIXe siècles) », dans Fred Célimène, André Legris (dir.),L’Économie de l’esclavage colonial, Paris, CNRS, Biblis, 2012, p. 179-207.

6 Thierry Hoquet, « Biologisation de la race et racialisation de l’humain : Bernier, Buffon, Linné », dans Nicolas Bancel, Thomas David et Dominic Thomas,L’Invention de la race. Des représentations scientifiques aux exhibitions populaires, Paris, La Découverte, 2014, p. 25-42.

7 Voltaire,Essai sur les mœurs et l’esprit des nations [1756], Paris, Garnier, 1963, t. 1, p. 6.

8Ibidem, tome 2, p. 335.

9 David Theo Goldberg,Racist Culture : Philosophy and the Politics of Meaning, Malden and Oxford, Blackwell, 2002.

10 Andrew S. Curran,L’Anatomie de la noirceur. Science et esclavage à l’âge des Lumières, Paris, Garnier, 2017, p. 270.

11 Pierre H. Boulle,Race et esclavage…, op. cit., p. 59-80.

12 Antoine Furetière,Dictionnaire universel…, La Haye-Rotterdam , A. et R. Leers, vol. 3, 1690, p. 289-290.

13 Pierre H. Boulle, « François Bernier et le concept moderne de race », dans Pierre H. Boulle,Race et histoire…, op. cit., p. 47-58.

14Dictionnaire de l’Académie française, 6e édition, tome II, Paris, Firmin Didot frères, 1835, p. 553.

15 Pierre H. Boulle,Race et histoire…, op. cit., p. 65-66.

16Diccionario de la lengua castellana,tome II, lettre C, Madrid, Imprenta de la Real Academia, Francisco del Hierro, p. 219. « Generacion y linage que viene de padres conocidos (Siendo de muy claro linage y de noble casta era enfermiza de cuerpo - Grac. Mor, fol 67). Se llama tambien el distinto linage de los caballos, toros y otros animales, porque vienen de padres conocidos por so lealtad, fiereza o otra circunstáncia, que los hace señalados y particulares... ».

17Ibidem, tome V, lettres OPQR, Madrid, Imprenta de la Real Academia, Heredéros de Francisco del Hierro 1737 : « casta o calidad del origen o linage ».

18Ibidem : « Hablando de los hombres, se toma muy regolarmente en mala parte. (…) Ordenamos y mandamos que ninguna persona, de qualquiera calidád y condición que fuere, sea recibida a la Dicha Orden, ni se le dé el Hábito, sino fuere Hijodalgo, al fuero de España, de partes di padre y madre, y de avuelos de entreambas partes, y de legitimo matrimónio nacido y que no le toque raza de Judio, Moro, Herege ni Villáno… ».

19Diccionario de la lengua castellana, 16e édition, Madrid, Espasa-Calpe, 1936-1939 : « se toma a veces en mala parte ».

20 Isidro Sepúlveda Muñoz,El Sueño de la madre patria : hispanoamericanismo y nacionalismo, Madrid, Marcial Pons, 2005, p. 202-204.

21 Elías Zerolo, Miguel de Toro y Gómez, Emiliano Isaza y otros,Diccionario enciclopédico de la lengua castellana…, tome 2, Paris, Garnier, 1895 : « Raza caucásica o blanca, raza mongólica o amarilla, raza amaricana o roja, raza malaya, raza etiópica o negra, ofrece así en lo fisico come en lo moral, una marcada proeminencia sobre las demás ».

22 Gonzalo Álvarez Chillida,El Antisemitismo en España. La Imagen del judío (1812-2002), Madrid, Marcial Pons, 2002, p. 221-227.

23 lona Katzew,La Pintura de castas : representaciones raciales en el México del siglo XVIII, Madrid, Turner, 2004.

24 Alexandre de Humboldt,Voyage de Humboldt et Bonpland. Troisième partie : essai politique sur le royaume de la Nouvelle-Espagne, Paris, Schoell, 1811, livre II, chapitre VII, p. 136.

25Ibidem, p. 89.

26 Carole Reynaud-Paligot, « Construction et circulation de la notion de “race” au cours du XIXe siècle », dans Nicolas Bancel, Thomas David, Dominic Thomas,L’invention de la race…, op. cit., p. 103-116.

27 « Le racisme n’est pas un accident, c’est un écosystème », entretien avec Achille Mbembe,Quartier général : le média libre, 25 juin 2020. <https://qg.media/2020/06/25/le-racisme-nest-pas-un-accident-cest-un-ecosysteme-par-achille-mbembe/>.

28 Aurélien Aramini et Elena Bovo (dir.),La Pensée de la race en Italie. Du romantisme au fascisme, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, coll. « Les Cahiers de la MSHE Ledoux », série « Archives de l’imaginaire social », 2018.

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Pour citer cet article

Référence papier

DavidHamelin et SébastienJahan,« La fabrique européenne de la race (17e-20e siècles) : Introduction »Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, 146 | 2020, 13-26.

Référence électronique

DavidHamelin et SébastienJahan,« La fabrique européenne de la race (17e-20e siècles) : Introduction »Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique [En ligne], 146 | 2020, mis en ligne le01 septembre 2020, consulté le20 avril 2025.URL : http://journals.openedition.org/chrhc/14433 ;DOI : https://doi.org/10.4000/chrhc.14433

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