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archives 1998-1999


Les principaux acteurs du conflit afghan 

  Rapport rédigé par Mme Soukhria Haidar
                Présidente de l’Association de soutien aux femmes afghanes (NEGAR) 
Sanctions financières internationales 
AFGHANISTAN: PAIX ET STABILITÉ  DÉPENDRONT AUSSIDE L'AGRICULTURE, SELON LA FAO

Le coût de la relance agricole estimé à 39 millions dedollars pour 2002

Rome/Tokyo, 21 janvier 2002 /PR 02-01f . - En Afghanistan, la paix et lastabilité économique à long terme dépendent ausside la relance du secteur agricole
dont le coût est estimé, pour 2002,  à 39 millionsde dollars selon l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation etl'agriculture (FAO).
A l'occasion de la tenue aujourd'hui à Tokyo d'une conférenceinternationale de bailleurs de fonds, la FAO a souligné la nécessitéd'aider les paysans afghans à reprendre leurs activités agricoles,retourner à leurs champs et relancer la production agricole dans unpays où 85 pour cent de la population dépend du secteur primaire.
Selon la FAO, 39 millions de dollars sont nécessaires pour améliorerl'accès à la nourriture dans les zones aussi bien urbainesque rurales, grâce à l'accroissement de la production, la fournitured'intrants (semences, engrais, outils...) et la création de revenusagricoles.
L'appel de la FAO aux donateurs s'insère dans le cadre d'un appelplus général lancé par les Nations Unies en faveur del'Afghanistan. A court terme, la FAO réclame 18 millions de dollarspour la distribution de semences et d'engrais, la relance de l'élevageet des activités horticoles, la vaccination du bétail, la préventiondu risque criquets pèlerins,  la création du service d'évaluationde la sécurité alimentaire et la coordination des opérationsagricoles d'urgence..
Selon Anne Bauer, qui dirige les opérations de la FAO en Afghanistan,la situation alimentaire demeure alarmante en zones urbaines et rurales. "Les semis d'automne ont considérablement souffert de la sécheresseet des actions militaires. A moins de les vacciner à temps, les troupeauxdes populations nomades pourraient ne pas survivre à l'hiver rigoureux,aux maladies et à la pénurie de fourrages. Les paysans déplacésont besoin de semences et d'engrais. Les familles qui sont retournéesen Afghanistan et

les communautés qui les hébergent méritent une attentionparticulière pour

faciliter la réintégration", a indiqué Mme Bauer.

 

Pour les actions à  moyen terme,  la FAO réclame21 millions de dollars pour

l'irrigation, le reboisement, la production de semences, les services

vétérinaires, la lutte intégrée contre les ennemisdes plantes et la

promotion de produits agricoles à haute valeur ajoutée (pourcontrebalancer

la production de pavot).

 

La FAO accordera une attention particulière aux femmes rurales, carce sont

elles qui s'occupent, traditionnellement, de la disponibilité de la

nourriture, des revenus du foyer, de la nutrition, des soins de santéet de

l'éducation.  En outre, 20 ans de guerre ont laissé undemi-million de

familles sans pères.  "Le point de départ, c'est l'identificationdes

besoins des femmes et des ressources dont elles disposent",  selon Mme

Bauer.

 

Pour inciter les paysans à abandonner la production d'opium, il fautleur

faciliter l'accès au crédit, aux cultures alternatives et auxmarchés.  A

cet égard, il convient d'améliorer les conditions de vie desménages et des

communautés rurales, a indiqué Mme Bauer.

 

A Islamabad, la FAO a déjà mis en place une unité decoordination des

opérations de secours.  Après l'appel qu'elle avait lancéen août dernier,

l'agence onusienne a reçu 6 millions de dollars de l'Allemagne, de

l'Irlande, des Pays-Bas, de la Norvège et des Etats-Unis.  L'acquisitionet

la distribution de semences est actuellement en cours pour les semis de

printemps.  Sont également en cours des achats de fourrage pourle bétail.

 

Le Département du développement international du Royaume Unia alloué 2,9

millions de dollars à la FAO pour un programme de secours et de

développement agricole intégré en Afghanistan.

 

En ce moment, huit fonctionnaires internationaux de la FAO sont basésà

Islamabad et un neuvième, à Mazar-e-Sharif, outre une quarantainede

nationaux qui travaillent dans le pays. 

 

A Kaboul, la FAO rouvrira prochainement ses bureaux situés dans leslocaux

abritant le personnel des Nations Unies dans la capitale afghane.

***
Pour toute information, contacter Erwin Northoff, Chargé d'informationFAO,

0039-06-5705 2232/3105, e-mail: erwin.northoff@fao.org
 

Rome, 29 novembre 2001.
Communiqué de presse FAO: PR 91/93 10 Site Internet de la FAO : <http://www.fao.org>

Aider les agriculteurs et les réfugiés à retourner dans leurs fermes et à reprendre la production vivrière est le défi qu'il faudra relever au cours des prochains mois en Afghanistan, souligne l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).

Dans un appel à la communauté internationale, la FAO indique que 10,1 millions de dollars sont nécessaires pour la reprise immédiate de son aide d'urgence à ce pays éprouvé par la guerre: fourniture de semences, d'engrais, de fourrage et de vaccins pour le bétail. L'appel de la FAO fait partie d'un effort plus vaste des Nations Unies destinéà alerter la communauté internationale sur les besoins del'Afghanistan, où sévit une grave pénurie alimentairegénéralisée due aux effets conjugués de la sécheresse,de la crise économique et de la guerre.

"Il est capitald'aider les agriculteurs et l'économie rurale à lutter contrela faim et la pauvreté en Afghanistan", déclare Madame Anne Bauer, Chef des opérations spéciales de secours et responsable du programme d'urgence de la FAO en Afghanistan. "Environ 85 pour cent des22 millions d'Afghans dépendent directement de l'agriculture. Depuisl'attentat du 11 septembre, les approvisionnements alimentaires commerciauxet l'assistance humanitaire ont été interrompus. La majoritédes ruraux luttent pour leur survie quotidienne. La demande d'intrants agricolesde base est considérable au moment où démarre la campagned'hiver."

"Nous devons fairetout ce qui est en notre possible pour réussir la prochaine campagne de semis", ajoute Madame Bauer. "Dès que les fonds seront disponibles, certaines des activités de la FAO pourront être aussitôt entreprises. L'enjeu consiste à aider le secteur de l'élevage pendant les semis d'hiver et de printemps, qui démarrent dès janvier dans certaines régions." Les semis d'automne de blé, qui représentent 80 pour cent de la production céréalière totale du pays, ont fortement souffert de la sécheresse et des actions militaires. "Sans fourrage et sans vaccins, le bétail a peu de chances de survivre à l'hiver, notamment les brebis qui devraient mettre bas à la fin de l'hiver", avertit Madame Bauer.

Les réseauxd'irrigation du pays sont dévastés et les services agricolesquasiment inexistants. Des milliers d'hectares de terres agricoles fertilesont été mis hors production à cause du manque d'irrigationet des millions de mines qui y ont été plantées. Lesarbres fruitiers et les forêts, autrefois source principale de devises,ont pratiquement disparu.

Afin de reprendreles projets déjà financés et faire démarrerde nouvelles activités d'urgence, la FAO rouvrira bientôt sonbureau principal à Kaboul et ses bureaux régionaux dans lesautres provinces. Une grande partie des immeubles a été détruiteet pillée ces derniers mois et du matériel important a été dérobé. La FAO se joindra à une mission de l'ONU à Kaboul au cours des prochains jours pour préparer le retour de son personnel à Islamabad.

Une des activités immédiates de la FAO sera la distribution de 1 500 tonnes de semences de blé pour les semis de printemps aux agriculteurs du nord du pays, avec un accent particulier sur les zones reculées. La production de blé pluvial dans les Provinces du Nord a chuté de 90 pour cent par rapport à 1998. La disponibilité de semences de qualitédans les zones pluviales et irriguées est une des principales entravesà la production de blé en Afghanistan, selon la FAO.

Moyennant une disponibilité de fonds, quelque 100 000 familles agricoles victimes de la guerre et de la sécheresse recevront des semences de printemps et des engrais pour la prochaine campagne de printemps. Ces projets seront également axés sur l'irrigation et la gestion des ressources en eau.

Par ailleurs,la FAO distribuera des lots de légumes de printemps à 100000 réfugiés et personnes déplacées àl'intérieur du pays, pour faciliter leur retour et leur réinstallationdans leurs bourgs et villages.
Pendant plusieursannées, la FAO, le Programme alimentaire mondial (PAM) et les ONGont travaillé ensemble dans le cadre d'un programme de vivres-contre-semencesen Afghanistan qui a incité les agriculteurs à améliorerles variétés de semences en échange de farine. La FAOet le PAM ont déjà convenu de poursuivre ce programme.
En outre, la FAOdistribuera dans le nord du pays 1 800 tonnes de fourrage et relancera sonprogramme de vaccination du bétail. Quelque 18 000 têtes debétail seront nourries. Plus de 50 000 agriculteurs et leurs famillesbénéficieront de ce programme. La vaccination des animauxdevrait protéger jusqu'à 70 pour cent du bétail dansles zones ciblées.
Les services desanté animale, dont la vaccination, étaient auparavant dispensés par plus de 220 unités vétérinaires de terrain de laFAO, qui employaient plus de 650 vétérinaires nationaux etagents de santé animale. La FAO, avec les ONG et d'autres partenaires, envisage de réactiver et d'étendre cet important réseau.
La FAO lanceraégalement une distribution d'urgence d'aliments pour animaux et unecampagne de santé animale dans d'autres zones du pays, en faveurde 100 000 éleveurs - la plupart nomades - victimes de la guerreet de la sécheresse. Un réseau d'ateliers sera créépour réparer les machines et les outils agricoles.
Une unitéde surveillance de la sécurité alimentaire et un systèmed'alerte rapide seront mis en place afin de mieux cibler et évaluerles interventions internationales en matière de sécuritéalimentaire dans la région.

Les activitésde la FAO bénéficient déjà des promesses decontribution des Pays-Bas, des Etats Unis et de la Norvège.

***

Noter : Clipaudio, durée: 2min12sec

Au cours d'une interview au Siège de la FAO, à Rome, Anne Bauer, coordinatrice des Opérations d'urgence de la FAO en Afghanistan, déclare que la priorité du moment est de préparer les paysans afghans àla saison culturale prochaine, au printemps.

En Realaudio (écoute instantanée, 144 Kb) ftp://ext-ftp.fao.org/Radio/Realaudio/2001/Afghanistan-A-Bauer-fr.ram

En Mp3 (qualité Broadcast, 1,000 Kb à télécharger) ftp://ext-ftp.fao.org/Radio/MP3/2001/Afghanistan-A-Bauer-fr.mp3

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Jusqu'en 1998, les Etats-Unis se sont vivement intéressés àla place de l'Afghanistan dans le grand jeu pétrolier d'Asie centrale.Car si les réserves d'hydrocarbures de ce pays sont trop faibles pourservir d'aliment aux guerres qui s'y sont déroulées, sa positiongéographique en fait une clé de l'évacuation des ressourcesd'Asie centrale. Il commande en effet l'accès aux mers chaudes, merd'Oman et océan Indien.
Cette position intéresse directement le Turkménistan, qui disposede réserves gazières importantes (plus de 20 billions - 1012- de m3). Quand le Turkménistan s'est libéré, avec lachute de l'URSS, de la tutelle de Moscou, il a cherché le moyen d'acheminerson gaz vers des pays émergents aux besoins énergétiques croissants : soit à l'ouest vers la Turquie, soit au sud - Pakistan, Inde, Thaïlande, etc.
Le Turkménistan ne pouvait guère compter sur la collaboration du géant russe Gazprom pour exporter le gaz vers l'Europe, cette compagnieétant peu désireuse de se créer une concurrente surson marché privilégié. Deux routes étaient possibles: à travers la Caspienne ou à travers l'Iran. Mais le champgazier de Shah Deniz, appartenant à l'Azerbaïdjan, est beaucoupplus attractif pour la Turquie, qui n'a donc pas manifesté d'intérêtpour le gaz turkmène.
Restait donc la voie du sud. Un projet de gazoduc commença à être élaboré, et un tracé prit forme en 1994 sousl'égide de la compagnie argentine Bridas.
Mais le président turkmène, Saparmurat Niazov, estimait queles Etats-Unis devaient mener ce projet - on ne sait si l'idée luien fut soufflée par Washington. Toujours est-il que Bridas fut éjectéedu projet au profit de la compagnie texane Unocal. Bridas allait d'ailleursporter l'affaire en justice en février 1996, pour se voir déboutéeen octobre 1998 par un tribunal du Texas.

En 1995, les détails techniques commencèrent à être posés : le gazoduc transporterait, sur quelque 1 400 km,le gaz du champ turkmène de Dauletabad jusqu'à Multan, au Pakistan,d'où il serait envoyé vers le port de Karachi. Sa capacitéserait de 50 millions de m3 par jour, son coût de construction de l'ordrede 2 milliards de dollars. En octobre 1997, le consortium Centgas (CentralAsia Gas) était formé, comprenant Unocal pour 54 % des parts,une compagnie d'Arabie saoudite, Delta, pour 15 %, des compagnies japonaise,coréenne et pakistanaise et le gouvernement turkmène.

En janvier 1998, un accord fut passé avec les talibans, quiavaient pris le pouvoir en 1996. A cette époque, le régimetaliban était donc vu favorablement à Washington. Mais cettecollaboration allait susciter aux Etats-Unis l'opposition de mouvements féministes, scandalisés qu'Unocal travaille avec le régime taliban. Autre facteur négatif : le prix alors bas du pétrole, et donc du gaz,diminuait l'intérêt du projet afghan. La situation pour le moinsinstable de l'Afghanistan compliquait encore ce projet très politique,que les institutions financières internationales refusaient de soutenir.

Les attentats du 7 août 1998 contre les ambassades américaines à Nairobi et Dar es-Salaam allaient ruiner le gazoduc. Le 21 août, Unocal annonçait qu'elle"suspendait toutes ses activités impliquées dans le projet de gazoduc en Afghanistan". Le jour même,l'aviation américaine bombardait des cibles supposées terroristesen Afghanistan et au Soudan. Unocal allait se retirer du consortium Centgazen décembre 1998.

Depuis, les talibans n'ont pas abandonné l'idée dugazoduc. En mars 2000, par exemple, il était au menu des discussionsentre les ministres des affaires étrangères pakistanais etturkmène, lors d'une rencontre à Islamabad à laquelleparticipaient des représentants de Kaboul. En janvier 2001 encore,un représentant des talibans, Haji Habib Ullah Fauzi, réitéraitl'intérêt du régime pour le gazoduc. Mais aucune grandecompagnie ne s'est manifestée sérieusement depuis le retraitd'Unocal. Le gaz turkmène attendra la paix.


Contrairement à la guerre du Golfe, la campagne militaire en Afghanistann'a pas de motivations pétrolières directes. En 1991, l'opération"Tempête du désert" contre l'Irak permettait aux Etats-Unisde s'installer durablement en Arabie saoudite, premier producteur mondiald'or noir. Aujourd'hui, l'opération "Liberté immuable" estune guerre contre Oussama Ben Laden et les talibans. L'Afghanistan n'estpas réputé pour ses ressources énergétiques. Lepays pourrait au mieux être une des voies d'acheminement du gaz etdu pétrole d'Asie centrale vers le Pakistan et l'océan Indien.L'exportation des hydrocarbures d'Asie centrale n'en reste pas moins un enjeudisputé entre Américains et Russes depuis la chute de l'URSS.

La zone de la mer Caspienne a été présentée, au cours des années 1990, comme un nouveau Moyen-Orient. En fait, lepotentiel s'est avéré beaucoup plus modeste; il reste cependant,avec près de 30 milliards de barils (4,5 milliards de tonnes) de réservesprouvées, comparable à celui de la mer du Nord. La Caspienne,plus grande mer fermée du globe, recèle ainsi environ 2 % desréserves prouvées mondiales de pétrole et 4 % des réservesprouvées de gaz naturel. Les gisements sont principalement concentréssur quelques pays de l'ex-Union soviétique: Azerbaïdjan, Kazakhstan,Turkménistan.

Depuis 1991, la région est au centre d'un nouveau "grandjeu" entre les Etats-Unis, la Russie et l'Iran pour le contrôle etl'acheminement des hydrocarbures de la Caspienne vers les marchéseuropéen et asiatique. Dix ans plus tard, les républiques musulmanesdes confins de la Russie, traversées par des crises d'identité, engluées dans des problèmes économiques et sociaux récurrents,n'ont toujours pas rattrapé leur niveau de vie d'avant 1991. Les tensionsgéopolitiques concernent tant la propriété des gisementsque le tracé des pipe-lines. Aucun accord définitif n'est encoreintervenu entre les pays riverains pour le partage de ces richesses. Lesincidents ne sont pas rares. Cet été, un navire de guerre iraniena contraint un bâtiment de prospection pétrolière venud'Azerbaïdjan à cesser ses forages. La Russie s'est posée en médiateur, mais Moscou a été soupçonnée de vouloir reprendre son hégémonie dans la région pourpeser sur le choix des tracés d'oléoducs.

L'enclavement est au cœur de toutes les difficultés.
Il faut traverser de nombreux pays aux relations souvent conflictuelles pourjoindre les ports de la mer Noire, de la Méditerranée ou ceuxdu Golfe. Les républiques d'Asie centrale souhaitent se dégagerdu réseau traversant la Russie, avec le soutien implicite des Etats-Unisqui veulent par ailleurs éviter la traversée de l'Iran.

Des multiples projets en compétition, ces dernièresannées, pour l'exportation du gaz turkmène, du pétrolekazakh ou azerbaïdjanais vers les marchés mondiaux, un seul avu le jour: l'oléoduc reliant – sur 1580 kilomètres via laRussie – le gisement de Tenguiz, au Kazakhstan (l'un des plus grands gisementsau monde, estimé à 6 milliards de barils, soit prèsde 900 millions de tonnes) jusqu'au port russe de Novorossiisk, sur la merNoire. Sa mise en exploitation, en mars 2001, permet au Kazakhstan, richeen pétrole, de doubler ses capacités d'exportation (l'oléoductransportera à plein régime 67 millions de tonnes de brut paran) et donne à la Russie, traditionnellement maîtresse des voiesd'acheminement des ressources de ses anciennes républiques "sœurs",un avantage certain. Exploité par le Consortium pour l'oléoducde la Caspienne (CPC), dont les principaux actionnaires sont la Russie (24%), le Kazakhstan (19%) et Oman (7%), l'existence de ce nouveau tube amoindrit les chances d'aboutir d'un autre projet, auquel s'opposent les Russes: celuide l'oléoduc Bakou-Ceyhan (1730 kilomètres et d'un coûtestimé à 2,5 milliards de dollars). Celui-ci est censétransporter le brut produit en Azerbaïdjan vers la Méditerranée, via la Géorgie, sa construction devant être, dans le meilleur des cas, finalisée en 2004.

Il est favorisé par l'administration américaine pourdes raisons politiques (il écarte la Russie et l'Iran du jeu), mais il rencontre l'opposition des "majors" du pétrole qui le jugent coûteuxet de réalisation difficile. En fait, la meilleure voie d'exportationdes hydrocarbures d'Asie centrale reste l'Iran. Mais cette perspective estbloquée par les sanctions américaines de 1996 contre ce pays.Il est, à l'heure actuelle, trop tôt pour dire dans quelle mesurela crise en cours et le rôle que l'Iran sera appelé àjouer en Afghanistan pourront changer les choses. Grand partenaire de laRussie dans la région, l'Iran a, certes, condamné les attentatsdu 11 septembre aux Etats-Unis mais a refusé à l'aviation américainel'utilisation de son espace aérien.

Les réserves du Kazakhstan sont pour l'instant bloquées. Un oléoduc de près de 3000 kilomètres est évoqué pour alimenter la Chine depuis la rencontre en juin 1998 entre le président chinois Jiang Zemin et son homologue kazakh Noursoultan Nazarbaev. Mais leprojet, très coûteux, ne s'est pas encore concrétisé.

Le Turkménistan cherche lui aussi, pour son gaz, un débouché autre que la Russie, qui lui achète à moindre prix du gaz revenduensuite deux fois plus cher à la Turquie ou à l'Europe vial'Ukraine. Depuis 1999, le Turkménistan a raccordé son réseauà un gazoduc iranien mais les quantités ainsi fournies vial'Iran à la Turquie sont très faibles. Même si la Russiede Vladimir Poutine arbore une stratégie commerciale moins empreintede colonialisme que celle qui prévalait à l'époque deBoris Eltsine, s'engageant par exemple à payer le gaz turkmèneen devises, le Turkménistan continue à espérer pouvoirévacuer son gaz vers le rivage pakistanais. Mais il faut traverserl'Afghanistan… Le Turkménistan a donc besoin de la paix chez son voisin,quel qu'en soit le bénéficiaire.

Riche en réserves de gaz, l'Ouzbékistan voisin, doublement enclavé (il est, avec le Lichtenstein, le seul pays au monde séparé d'un accès à la mer par au moins deux pays), verrait lui aussid'un bon œil une éventuelle pacification de l'Afghanistan. Faute depouvoir exporter, l'Ouzbékistan, qui est la plus peuplée desrépubliques d'Asie centrale, avec 24,4 millions d'habitants, transformeson gaz en engrais et en polyéthylène.

Outre l'Iran à qui l'Ouzbékistan fournit du gaz liquide, un de ses principaux clients est le Kirghizstan voisin. L'arrivée dugaz ouzbek est souvent coupée, faute de paiement. Le robinet est rouvertà chaque fois que le Kirghizstan, petite république montagneuseet dépourvue de ressources, menace de ne plus fournir d'eau àl'Ouzbékistan, qui en a cruellement besoin. Ce pays, qui partage 137kilomètres de frontières avec l'Afghanistan, rêve detirer une ligne droite jusqu'à Karachi. Au total, si la guerre enAfghanistan n'a pas de motivation pétrolière, l'instaurationde la paix dans ce pays permettrait l'ouverture de l'Asie centrale sur lemonde, hors du face-à-face exclusif avec la Russie.

Trois questions à Michael Klare (Le Monde, 20/10/01)
1Vous êtes professeur au centre d'études sur la paix et lasécurité mondiale (massachusetts) et auteur de "resource wars: global geopolitics in the 21st century" (new york : metropolitan books).le pétrole est-il la clé de la crise actuelle ? 
La clé de la crise est l'engagement militaire américain enArabie saoudite. Cette implication n'a d'autre objet que le pétrole : l'Arabie saoudite possède 25 % des réserves mondiales et l'économieaméricaine est basée sur le pétrole. Les Etats-Unissont engagés dans la protection de la monarchie saoudienne et se trouventdonc en conflit direct avec ceux qui veulent renverser cette monarchie, doncavec Ben Laden.

2Pourquoi les Etats-Unis se sont-ils impliqués dans l'exploitation des ressources de la mer Caspienne dans les années 1990 ?
Les Etats-Unis cherchent à réduire leur dépendance àl'égard du Golfe en multipliant les sources d'approvisionnement alternatif.
Ils ont cherché à développer les champs de la Caspienne,à créer de nouveaux oléoducs et à renforcer lesRépubliques asiatiques de l'ex-URSS. Mais cela ne joue pas un grandrôle dans la crise actuelle. Ben Laden est un Saoudien qui s'est réfugiéen Afghanistan, et ses intérêts réels sont en Arabiesaoudite. Les Etats-Unis n'attaquent l'Afghanistan que parce que c'est làque se trouve Ben Laden.

3Comment les Etats-Unis pourraient-ils réduire leur dépendance à l'égard du Golfe ?
Sur le long terme, en diminuant leur besoin de pétrole. Aucune autrerégion du monde ne pourra remplacer les ressources du Golfe. Les Etats-Unisdoivent édifier un autre système énergétique :c'est une société pilotée par le pétrole. Elledoit se transformer. Une autre raison de bouger est la nécessité de lutter contre le changement climatique. Mais je ne crois pas que les Etats-Unissont prêts à considérer une telle transformation. Ilsmaintiendront des forces dans le Golfe face à la volonté del'Iran, de l'Irak, et maintenant d'une force non étatique, de leschasser de la région. S'ils ne changent pas de système énergétique,les Etats-Unis sont engagés dans un état de guerre permanent.


Les techniques de guerre des taliban d'Afghanistan, qui ont souvent conquisdes territoires en soudoyant leurs adversaires, sont à cent lieuesde ce que pourrait impliquer un conflit conventionnel avec les Etats-Unis.
 Lors de leur conquête du territoire afghan, au milieu des années90, les taliban ont généralement utilisé la tactiquesuivante : communication avec un commandant ennemi, tractations, prise decontrôle du secteur à bord de camionnettes souvent rempliesd'argent. En cas de résistance, bombardement appuyé des positionsrebelles et recherche du point faible chez l'adversaire susceptible de fairedéfection.
 Depuis la chute de l'ancien régime pro-soviétique deKaboul (1992), la guerre civile en Afghanistan a surtout été marquée par des changements d'allégeance. Le puissant voisin pakistanais est soupçonné d'avoir contribué à la montée en puissance des taliban depuis 1994.
 Cependant, en sept ans, les "étudiants en religion" ont réussiprogressivement à s'emparer de plus de 90% du territoire afghan. L'argentet la division de leurs ennemis ont permis aux taliban d'avancer et ensuitede garder leurs positions.
 L'exécutif des taliban serait à la tête d'une arméeenturbannée, évaluée à entre 40.000 et 60.000hommes. Selon le Jane's Intelligence Review, à cette force, il fautajouter "une légion étrangère" de "Jihadis" (volontairespour la guerre sainte), qui compterait entre 8.000 et 12.000 combattants,venus de pays comme l'Arabie Saoudite, l'Algérie ou l'Egypte, et pourla plupart loyaux au terroriste présumé Oussama ben Laden.
 Les véhicules de transport favoris des taliban et de leurs alliés: des camionnettes de fabrication japonaise, des camions lance-roquetteset quelques vieux chars de combat soviétiques.
 Ils disposent aussi d'une dizaine d'avions de combat datant de l'époquesoviétique (MiG-21, SU-22 et L-39) et d'une poignée d'hélicoptèresparticulièrement grinçants. A cela, il faut ajouter quelquesmissiles Scud (hors d'usage) et Stinger (ces derniers provenant des vieuxstocks d'armement fourni dans les années 80 via la CIA).
 En cas d'attaque américaine contre les taliban d'Afghanistan, peu d'analystes les considèrent suffisamment hardis pour une bataille conventionnelle, comme lors de la guerre du Golfe.
 Les Américains auraient, face à eux, un ennemi quasimentinvisible, qui se cacherait dans les montagnes ou dans les recoins de valléesimprenables.
 Tout envahisseur étranger sait que l'Afghanistan n'est pas uneproie facile : les Britanniques, les Perses, puis les Iraniens, les Russes,puis les Soviétiques, et aujourd'hui les Pakistanais, s'y sont casséles dents.
 Selon des experts, une option à examiner avant toute confrontation majeure consisterait à "travailler" les éléments les moins radicaux de l'exécutif taliban et à favoriser un coup d'Etat.
 Lors de leur ascension au pouvoir, les "étudiants en religion" ont absorbé d'anciens communistes, des royalistes, des nationalistes pachtounes (l'ethnie majoritaire) et des chefs religieux et tribaux aux intérêtsdivergents, susceptibles de changer de camp et de provoquer des fissuresau sein du pouvoir.
 "Si la délégation pakistanaise (qui exerce actuellement des pressions sur eux) échouait dans ses efforts, certains milieux au sein de l'appareil militaire d'Islamabad pourraient être tentés de favoriser un coup d'Etat en Afghanistan", estime une source pakistanaise.


Les taliban au pouvoir à Kaboul ont posé des conditions àla livraison du dissident d'origine saoudienne Oussama ben Laden, demandantqu'il soit emmené dans un pays islamique neutre pour y êtrejugé, annonce la presse afghane.
Ces conditions ont été émises lors de la rencontre delundi à Kandahar, fief taliban dans le sud de l'Afghanistan, entredes responsables de haut rang pakistanais et le guide suprême taliban,le mollah Mohammad Omar, écrivent les journaux Nation et Jang.
"Avec des garanties d'un traitement juste, les taliban pourraient être prêts à livrer Oussama à un pays islamique neutre ou àl'Organisation de la conférence islamique", écrit Jang, quicite une source non identifiée.
Parmi les autres conditions posées par le mollah Omar figurent lalevée des sanctions de l'Onu contre le gouvernement taliban, reconnupar trois pays seulement, et l'attribution d'une aide économique aupays ravagé par la guerre.
Toujours selon la presse, les taliban demandent également la suspensionde l'aide étrangère et militaire à l'Alliance du Nord(opposition), qui lutte contre les taliban dans les montagnes du Nord-Estet contrôle moins de 10% de l'Afghanistan.


La réduction drastique de la culture du pavot à opium en Afghanistanrisque d'être l'une des grandes victimes de la campagne militaire américainedans ce pays. Selon le rapport annuel du Programme des Nations unies pourle contrôle international des drogues (Pnucid), publié mercredi17 octobre, l'interdiction totale de la culture du pavot, décidéeen juillet 2000 par le chef suprême des talibans, le mollah MohammedOmar, a quasiment éradiqué l'opium dans les 90 à 95% du pays sous contrôle taliban.

La production est passée à 185 tonnes en Afghanistanen 2001 contre 3 276 tonnes en 2000."3 100 tonnes qui disparaissent du marché, cela représente 75 % de la production mondiale,relève Bernard Frahi, responsable du Pnucid pour le Pakistan et l'Afghanistan. L'Afghanistan était le premier pays producteur du monde. Il ne produit plus aujourd'hui que 10 % du total, soit très loin derrière la Birmanie."

Mais tout semble en passe de changer. Les agriculteurs afghans sepréparent à reprendre cette culture extrêmement rentable."Nous recevons déjà des informations sur des endroitsreculés où les fermiers ont préparé leurs champspour des semences de graines de pavot",indique M. Frahi. Les champspréparés pour recevoir les graines de pavot sont creusésà intervalles réguliers de rigoles qui permettront d'inonderles semences après quelques semaines.

Une semaine avant les attentats du 11 septembre, le mollah Omaravait renouvelé,"à l'approche de la saison des semences,l'interdiction totale de la culture du pavot", prolonge M.Frahi. Mais, dans les circonstances présentes, les talibans ont d'autres priorités. De plus,"la crise nourrit des rumeurs selon lesquelles les talibans ne seront peut-être plus là au moment de la récolte". La saison des semences se déroule de mi-octobre à mi-novembre en fonction des régions, la récolte en avril et mai.

Un signe ne trompe pas : le cours de l'opium sur le marchélocal s'est effondré."L'opium se vendait 600 dollars le kilo enaoût. Son cours est tombé à 180 dollars aprèsle 11 septembre et il s'établissait la semaine dernière à90 dollars",observe M. Frahi.

Les fermiers, qui avaient gardé de l'opium des récoltes précédentes, se sont rués au marché pour vendre leur stock et obtenir de l'argent liquide, indispensable en cas d'exode. Pourles petits fermiers, cette marchandise, qui se conserve d'une année sur l'autre, est à la fois une source de crédit et d'épargne.

L'éradication de la culture de l'opium dans les zones souscontrôle taliban constituait pourtant le grand succès de l'ONUobtenu par le Pnucid, grâce à trois ans de dialogue continuavec les talibans et sans grands moyens financiers. Cette quasi-élimination du pavot en Afghanistan"résulte clairement de l'application del'interdiction de la culture du pavot",note le rapport du Pnucid.

Cette année, ses agents ont visité 10 030 villagesdans 160 districts ; 23 des 32 provinces d'Afghanistan sont concernées.
Sur les 7 606 hectares de terre consacrés au pavot en Afghanistan (contre82 172 l'an dernier), 6 342, soit 83 % du total, se trouvent dans la provincedu Badakhshan, territoire du Nord-Est, sous contrôle de l'Alliancedu Nord, coalition d'opposition aux talibans, précise le rapport.La province d'Helmand, à l'ouest de Kandahar, qui arrivait en têtel'an dernier (plus de 42 000 ha de terres consacrées au pavot), n'ena pas produit du tout cette année. A l'inverse, les fermiers du Badakhshanont profité de l'interdiction décrétée par lemollah Omar, en multipliant par 2,6 les surfaces consacrées àla culture du pavot."Les commerçants leur ont offert dix foisle prix pour l'opium ainsi que des avances en liquide",explique M. Frahi.

Pour que les années d'efforts du Pnucid ne soient pas perdues,"tout programme de reconstruction devra tenir compte de la luttecontre la drogue et intégrer des plans de développement afinque les fermiers ne retournent pas au pavot",ajoute-t-il. Surveilléeavec rigueur par les talibans, l'interdiction de la culture du pavot a coûté très cher aux fermiers afghans. A présent, ceux-ci risquent d'être encore plus difficiles à convaincre.

Selon Alain Labrousse, "l'opium n'a pas été lenerf du terrorisme" pour Ben Laden(Le Monde, 20/10/01)
Au pays de l'opium, les talibans ont cultivé le paradoxe. Sous leurférule, la production a battu tous les records en 1999. Puis leurrégime a éradiqué presque tous les champs de pavot,sur ordre de leur chef suprême, le mollah Omar, en juillet 2000. Lestalibans ont ainsi rompu avec un passé qui avait fait de l'Afghanistan,depuis 1994, le premier producteur mondial de pavot à héroïne.

Dans cette histoire mouvementée de la drogue en Afghanistan, les talibans et leur protégé, Oussama Ben Laden, sont donc loind'incarner le "Mal"."Contrairement à ce qu'avance le premier ministrebritannique Tony Blair, la drogue n'a pas été le nerf de ceterrorisme-là", explique Alain Labrousse, chargé de missionà l'Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT).

De la guerre contre les Soviétiques jusqu'à la prisedu pouvoir par les talibans en 1996, la production d'opium est allée croissant en Afghanistan."Les services spéciaux pakistanais (ISI)avaient le monopole des livraisons d'armes aux moudjahidins afghans, avecdes financements assurés par l'Arabie saoudite et les Etats-Unis",rappelle M. Labrousse. Les camions d'armes revenaient d'Afghanistanchargés d'opium."L'argent du trafic servait à financerdes groupes dissidents en Inde, des islamistes actifs au Cachemire et, dansles années 1980, des sikhs au Pendjab. Mais on ne peut pas dire quela guerre d'Afghanistan a été financée par la drogue."

Avec environ 2 800 tonnes d'opium produites en 1994, le pays a détrôné la Birmanie.
Plus de 80 % de l'héroïne livrée en Europe occidentale provient alors du Croissant d'or (Afghanistan et Pakistan). Jusqu'en 1998, c'est-à-dire sous le gouvernement du président Rabbani puis sous les talibans, la production s'est maintenue à ce niveau, avant d'atteindre le record de 4 600 tonnes en 1999.

Pourtant, les talibans n'ont tiré qu'un profit limité du trafic. Ils se sont contentés de la zakat (dîme musulmane), soit environ 10 % du prix, comme pour les autres cultures. "Rien n'indique que les talibans soient allés au-delà de ce commerce local etqu'ils se soient impliqués dans l'exportation, qui rapporte beaucoup plus", note M. Labrousse. Les prélèvements sur la drogue constitueraient"au mieux 200 millions de dollars, c'est-à-dire à peine 10%" de toutes les taxes perçues par les talibans sur le commerce légalet la contrebande.

Et du côté de l'Alliance du Nord ? "Le commandant Massoud a toujours été un puritain, antidrogue et même antitabac. Il s'est opposé à des commandants locaux de l'Alliance qui, eux, notamment dans le Badakhshan -nord-est-, tiraient profit de la drogue. Selon les services de sécurité russes, le général Rachid Dostom aurait aussi participé au trafic d'opium et d'héroïne vers la Russie." Selon l'Association d'études géopolitiques des drogues (AEGD), à laquelle participe M. Labrousse, le trafic financeaussi des groupes islamistes d'Asie centrale, dont le Mouvement islamiqued'Ouzbékistan, dirigé par Djouma Namangani et basé dansle nord de l'Afghanistan.
Jusqu'à ces derniers mois, de nombreux spécialistes internationaux des drogues estimaient que le décret d'interdiction du mollah Omar, en juillet 2000, était motivé par la nécessité d'écouler les volumineux stocks d'opium afin de ne pas faire chuter les prix. Mais comment expliquer son renouvellement, un an plus tard ? "L'hypothèseoptimiste est que le mollah Omar est convaincu que la sécheresse frapppantle pays est une punition d'Allah, à cause du trafic de drogue. Selonune autre hypothèse, les trafiquants avaient plus d'une annéede stock à écouler", risque M. Labrousse.


Depuis les attentats du 11 septembre, les prix de l'opium vendu à Peshawar(Pakistan) se sont en tout cas effondrés. Parce que des petits producteursont eu besoin de liquidités face aux incertitudes de la situation?"On peut plutôt penser que, dans ce contexte, des trafiquantsont remis des stocks sur le marché",pense M. Labrousse.
Une chose est sûre : depuis la guerre, les talibans ne se préoccupent plus de cette question."Ni les talibans, ni les forces alliées n'ont intérêt à embêter les tribus qui cultivaient habituellement le pavot", conclut-il. D'autant moins qu'elles sont nombreusesdans les provinces de l'Helmand et du Nangarhar, deux importantes régionsde tribus pachtounes dont chacun - les talibans comme leurs adversaires dela coalition alliée - escompte aujourd'hui les bonnes grâces.

Les taliban déclarent la "guerre sainte" aux Etats-Unis(Reuters, 18/9/2001)
Les extrémistes musulmans au pouvoir à Kaboul ont déclaré une guerre sainte (djihad) aux Etats-Unis, a rapporté la radio afghane Voix de la charia enregistrée par la BBC.
"Je voudrais dire à notre peuple que notre djihad va officiellement reprendre contre les Américains", a déclaré le vice-président du Conseil des ministres taliban, le mollah Mohammad Hasan Akhond, dans undiscours enregistré lundi soir.
Akhond a ajouté qu'il était inimaginable que les "attentats terroristes" perpétrés contre le World trade center et le Pentagoneaient été commis par les taliban ou le milliardaire d'originesaoudienne Oussama ben Laden.
"Mais les Etats-Unis et tous les impérialistes du monde, les juifset les chrétiens et leurs sympathisants, tentent de détruire sous ce prétexte l'ordre islamique qui a été établi au prix de notre sang", a ajouté Akhond.
Cet déclaration survient alors que les responsables religieux islamiquesafghans devaient se réunir mardi pour discuter du sort de ben Laden,"hôte" de Afghanistan, mais rien n'indiquait que les taliban avaientl'intention de livrer le dissident d'origine saoudienne accusé parWashington d'être derrière les attentats-suicide commis auxEtats-Unis.
Le choura (conseil) des oulemas (chefs religieux) est aux ordres du mollahMohammad Omar, le guide suprême des extrémistes taliban.
Un porte-parole taliban, Abdoul Hai Moutamaen, a déclaré àl'agence AIP que le conseil "discutera dans le détail et prendra unedécision sur la situation récente soulevée par une possibleattaque des Etats-Unis et sur Oussama ben Laden."
Réunion des chefs religieux taliban
"La décision et les ordres des religieux (...) sont importants etobligatoires et le gouvernement les mettra en oeuvre complètement", a-t-il ajouté.
Le choura a été convoqué à la demande du mollahOmar, mais ce dernier ne devrait pas y participer.
Les responsables pakistanais ont indiqué que la délégation pakistanaise présente à Kaboul pourrait être informée des décisions prises lors du conseil religieux.
La mission pakistanaise, désireuse de persuader les taliban d'extraderOussama ben Laden, a quitté mardi marin l'ambassade du Pakistan àKaboul pour se rendre à une réunion dans un lieu tenu secret.
Le chef des services secrets pakistanais, le général MahmoudAhmed, a quitté l'ambassade en compagnie de son adjoint, d'un responsabledu ministère des Affaires étrangères, du vice-ambassadeuret de l'attaché militaire à Kaboul.
La médiation entreprise par Islamabad pour tenter de convaincre lestaliban de livrer ben Laden n'avait pas donné de résultat lundimalgré trois heures de discussion. La délégation a décidéensuite de prolonger de 24 heures son séjour en Afghanistan.
Ben Laden laden et les taliban ont nié toute implication dans lesattentats-suicide, ce qui n'a pas convaincu les Etats-Unis.
"Toutes les pistes" nous conduisent vers ben Laden, a même affirmé le secrétaire d'Etat américain Colin Powell.
A l'instar de l'Iran samedi, le Pakistan a fermé lundi sa frontière avec l'Afghanistan vers où se précipitaient des dizaines demilliers d'Afghans terrorisés à l'idée d'être bombardéspar l'armée américaine.
Plus de 2,5 millions d'Afghans s'entassent déjà dans des campsinstallés en bordure de frontière, au Pakistan.

L'opposition veut tirer profit d'un possible changement de donne en Afghanistan(AFP, 18/9/2001)
Les forces du général Babajan, positionnées à moins de 40 kilomètres au nord de Kaboul, tiennent le poste le mieux placé de l'opposition afghane pour frapper le régime des taliban.
 Alors que Washington prépare des représailles contre lestaliban et leur "hôte" Oussama ben Laden, principal suspect dans lesattentats aux Etats-Unis, Babajan voudrait bien profiter d'un éventuel changement de donne en Afghanistan.
 D'abord effondrés par l'attentat mortel contre leur chef, lecommandant Ahmed Shah Massoud, deux jours avant les attaques terroristes deNew York et Washington, Babajan et ses hommes se prennent maintenant àespérer.
 Si les Etats-Unis veulent raser les camps d'entraînement dontdispose ben Laden en Afghanistan et empêcher les taliban d'accueillir de nouveaux extrémistes, ils devraient fournir un soutien militaire de grande envergure aux opposants, estime Babajan.
 "Je suis confiant que le début de la fin du terrorisme et destaliban s'amorcera ici et que nous vengerons le sang de Massoud et de l'Amérique",déclare Babajan depuis la ligne de front.
 "Nous pouvons aider les Etats-Unis en matière de renseignement et d'opérations militaires", ajoute-t-il scrutant les positions talibandepuis le sommet d'une tour de contrôle décatie de l'anciennebase aérienne de Bagram.
 Pour l'instant, les Etats-Unis n'ont pas donné de signes concretsd'une volonté de s'engager directement dans les combats que mènel'Alliance du nord du défunt commandant Massoud contre les milicienstaliban.
 Pourtant Babajan sent de la nervosité chez ses ennemis, qu'ilvoit à trois kilomètres en train de convoyer du ravitaillement et de renforcer leurs positions.
 La possibilité d'un soutien américain arrive à un moment critique pour l'opposition, même si Massoud n'avait pas ététué dans l'attentat perpétré par deux Arabes se faisantpasser pour des journalistes.
 Depuis cinq ans qu'ils ont pris la capitale Kaboul, les taliban ontétendu leur influence et leur contrôle sur plus de 90% du territoireafghan. Malgré l'aide de la Russie, de l'Inde ou de l'Iran, l'oppositionn'a cessé de perdre du terrain.
 Son dernier pré-carré se limite au fief natal de Massoud,la vallée du Panchir, à la province du Badakshan (nord-est)et à quelques poches de résistance dans le nord et l'ouest.
 Une alliance hétéroclite de chefs de guerre des minoritésouzbèke, hazara et tadjike (l'ethnie de Massoud) compose l'essentieldes combattants anti-taliban. La coalition très fragile n'étaitcimentée que par le charisme, la conviction et le leadership du commandantMassoud, décédé à 49 ans et enterré dimancheau Panchir.
 Sa mort a fait redouter l'éclatement de cette alliance.
 "Sa voix donnait le moral à chacun, leur donnait la force", serappelle Babajan.
 "J'aurais préféré perdre dix mille hommes quede voir mourir Massoud."
 Le successeur de Massoud, le général Fahim est peu connu.Egalement basé dans le Panchir, il commandait jusqu'à présentles lignes de front de la province de Takhar (nord-est). "C'est quelqu'unde très réservé", note un proche de Massoud.
 "Massoud dépassait tout le monde de la tête et des épaules.Mais tous les autres commandants sont au même niveau. L'Alliance abesoin de quelqu'un qui inspire le respect", ajoute cette source qui requiertl'anonymat.
 Les 15.000 hommes dont dispose l'opposition ne sont pas à lataille des taliban, réputés bénéficier d'un importantsoutien matériel pakistanais, ainsi que de contingents de volontairesarabes.
 L'opposition n'a plus qu'un rôle défensif.
 Deux jours après l'attentat contre Massoud, les taliban avaientprofité de son absence et lancé une offensive en directionde Bagram. Elle avait été repoussée.
 Bagram avait été construit par l'Union soviétique qui en avait fait sa principale base aérienne en Afghanistan. Mais elle a changé de mains à plusieurs reprises depuis la prise de Kaboul par les taliban en 1996.
 Il n'en reste plus que des bâtiments bombardés et de leferraille éparse.
 Porte d'entrée vers Kaboul par les plaines, Bagram n'est qu'à25 km de la gorge de la vallée du Panchir.
 Ce que Babajan redoute, c'est que les Américains ne recourent qu'à des frappes aériennes, laissant les forces anti-taliban se débrouiller seules au sol.
 "Il faut qu'ils montent des opérations communes avec nous. Cen'est pas avec les seules frappes tactiques qu'ils vont éradiquer leproblème terroriste". 


A peine sorti de la guerre froide, le système internationalest en train de basculer dans un nouvel affrontement binaire de très grande ampleur.
Victimes d'un acte de guerre sans précédent dans leur histoire,qui a frappé deux lieux symboles de leur richesse et de leur puissanceet tué des milliers d'innocents, les Etats-Unis s'apprêtent àmener des opérations de guerre de grande envergure en Asie centraleet au Moyen orient. Selon le vice-ministre de la défense, Paul Wolfowitz,elles auraient pour but "de supprimer les sanctuaires, d'éliminerles réseaux de soutien et d'achever les Etats qui appuient le terrorisme"(1).

Les États : l'utilisation du pluriel est inquiétantecar le conflit qui s'annonce comporte d'immenses risques, surtout s'il s'étend au delà de l'Afghanistan. A Washington, de hauts responsables présents et passés, tel l'ancien directeur de la CIA James Woolsey, parlent d'une éventuelle frappe massive contre l'Irak : "Si jamais il est démontréque l'Irak est impliqué dans les attentats, alors tous les instrumentsdu pouvoir d'Etat irakiens devraient être détruits - la Garderépublicaine et tout ce qui est associé à Saddam Hussein"(2). Certains évoquent aussi d'autres cibles éventuelles, commele Soudan, le Yémen ou encore la Syrie. 

Dans une telle hypothèse, il faudra redouter que l'extrême et légitime colère devant la barbarie du 11 septembre ne setransforme par contagion en affrontement entre l'Occident et le monde arabo-musulman,en un conflit de civilisations par définition sans fin. Cette crainte,très forte en Europe, est aussi celle de spécialistes américainsmilitaires et civils :"On ne peut simplement y aller et dévaster unpays ; […] une approche militaire [n'intégrant pas] les facteurs économiqueset politiques régionaux ne fera que perpétuer le problème",a déclaré le Général Anthony Zinni, ancien commandanten chef du Commandement Central des forces armées américaines(3). David Ignatius, directeur du International Herald Tribune, a pour sapart souligné : "Il est facile de commencer des guerres, mais trèsdifficile d'y mettre fin. C'est une règle que les terroristes auraientété sages de garder en mémoire, et c'est une règlequi devrait guider les responsables américains" (4). 

Prendre en compte la complexité de la situation régionale se heurte à la puissance des passions déchaînées qui poussent l'exécutif américain à se lancer indistinctement dans une réplique rapide. Cela impliquerait de déterminer lesraisons profondes et non conjoncturelles ayant conduit les Etats-Unis àce choc frontal avec l'islamisme politique sunnite, pourtant leur ancienallié de guerre froide (voir encadré). Comment les "combattantsde la liberté" d'hier (Ronald Reagan) sont-ils aujourd'hui devenusdes "ennemis de la civilisation" (George W. Bush)? 

Il ne suffit pas d'affirmer, comme le faisait un rapport de 1997du département de la Défense, l'existence d'une "forte corrélation entre l'action internationale des Etats-Unis et l'accroissement des attentats terroristes contre le pays. Cette forme d'action, poursuit le rapport, découlede la situation d'asymétrie militaire qui interdit aux Etats-nationsde s'attaquer ouvertement aux Etats-Unis et les pousse à recourirà des acteurs transnationaux [non-étatiques]". 

Aussi fondée soit-elle sur le plan technique, cette analysene rend pas compte des causes de la montée en puissance du terrorisme islamiste dans les années 90. Elle n'explique en rien la "talibanisation" progressive de la société pakistanaise, le désordre idéologiquequi s'est emparé de l'Islam, les frustrations profondes et multiplesdes sociétés arabes, et les rancœurs anti-occidentales engendréespar celles-ci. Elle ne rend pas compte non plus de l'aveuglement américaindevant les conséquences à long terme de leurs propres stratégiesrégionales, de "l'action internationale des Etats-Unis" dont parlele rapport. 

Comme les puissances coloniales d'hier, les Etats-Unis ont longtemps fermé les yeux sur les effets découlant de leur prégnante emprise économique et politique sur les sociétés du tiersmonde. Cet aveuglement est la source fondamentale de la "faillite de renseignement"dont on parle tant aujourd'hui. Car, dans cette affaire, le problèmetechnique imputable aux services est lui-même tributaire d'un problèmepolitique, à savoir la pensée binaire propre aux grandes puissances.Celle-ci empêche de penser l'autre, comme en témoigne l'histoirerécente dans le Golfe arabo-persique et en Asie. 

Si les Etats-Unis n'ont pas su prédire la révolutioniranienne de 1979, ce n'est pas parce qu'ils manquaient de renseignementsou de sociologues et autres spécialistes de la zone. Certes, le personnelde l'ambassade américaine à Téhéran comptaitpeu de spécialistes parlant le farsi. Mais les experts étaientnombreux à Washington et dans les centres spécialisésuniversitaires (qui, aux Etats-Unis, ont toujours eu des liens forts avecl'Etat). Eux maîtrisaient la langue, la civilisation et les réalitéspersanes et s'inquiétaient des évolutions. 

Une révolution politique et sociale ne se préparepas en quelques mois ni même en quelques années et ne peut s'expliquer par la simple action d'une minorité déterminée. Quoi qu'on en pense par ailleurs, la révolution iranienne avait des racines socio-politiques profondes : une modernisation rapide mais superficielle etdéséquilibrée, des inégalités sociales criantes et la violation systématique de droits humains élémentaires par une monarchie manquant de légitimité populaire. Auteurs du coup d'Etat de 1953 qui a porté le Shah Reza Pahlavi au pouvoir, les Etats-Unis ont pendant des années, voire des décennies, ignoré les innombrables signes de la révolution à venir: manifestations étudiantes de masse, instabilité sociale, fortmécontentement exprimé par les élites lettrées qui se sont ultérieurement ralliées à l'ayatollah Khomeyni.Le contraire aurait supposé une remise en cause de l'alliance de guerrefroide avec l'Iran du Shah Pahlavi, "gendarme du Golfe" arabo-persique. 

On retrouve le même aveuglément idéologiquedans l'autisme des autorités politiques et militaires pendant la guerre du Vietnam. Ils refusaient d'entendre ceux qui, au sein même de l'appareil d'Etat américain (en particulier les analystes de la CIA), affirmaient à juste raison à la fin des années soixante que les bombardementsstratégiques du Vietnam souderaient la population sud-vietnamienneau Viêt-cong. Deux administrations successives ont refusé dereconnaître ce que Franklin D. Roosevelt et l'Office of Strategic Services(le précurseur de la CIA) avaient pourtant compris : le nationalismeet le communisme s'alliaient dans la lutte indépendantiste des Viêt-minhcontre la France, puis dans celle des Viêt-cong contre un Etat sud-vietnamienautoritaire créé de toutes pièces par les Etats-Uniset perçu comme illégitime par une partie importante de la population.Que les communistes vietnamiens aient perdu la paix après avoir gagnéla guerre en 1975, ne change rien au constat. 

La logique binaire de guerre froide a renforcé l'insensibilité des institutions américaines insensibles aux réalités sociologiques et politique des tiers mondes. Elle les a poussés àprêter leur soutien à des régimes autoritaires ou despotiqueset à des mouvements terroristes financés par la drogue, commeles "contras" en Amérique latine. Elle a trop souvent conduit àla mise entre parenthèse des valeurs éthiques occidentaleset a autorisé des pratiques et des politiques aux antipodes des droitshumains et des principes issus des Lumières. C'était vrai auMoyen Orient comme dans le Golfe arabo-persique, ou en Amérique Latine.Et aussi en Asie orientale où les Etats-Unis ont, après l'interventionvietnamienne au Cambodge en 1979, maintenu des relations diplomatiques avecl'auteur du plus grand génocide de l'après guerre, Pol Pot.Les liaisons dangereuses des services spéciaux américains avecl'islamisme radical sunnite au cours des années 80 participaient decette logique de guerre froide. 

C'est pour des raisons géostratégiques et géoéconomiques que les Etats-Unis ont tout au long de la guerre froide soutenu le Pakistan contre l'Inde (quoique cette dernière ne se soit jamais vraiment alignéesur l'URSS pendant la guerre froide). L'islam ultra conservateur pakistanaiset le wahabisme saoudien semblaient un rempart sûr contre "l'athéismesoviétique". Ainsi, ce sont les mouvements islamistes les plus radicaux(le Hezb-i-islami de Gulbuddin Hekmatyar) crées par les services spéciauxpakistanais, et non les plus modérés, qui ont bénéficiéde l'aide américaine en Afghanistan. Et quand Ahmed Shah Massoud (quivient d'être assassiné) réussit à prendre Kaboulen 1992, le Pakistan créa les Talibans pour le combattre et fairede l'Afghanistan un Etat satellite. Les Etats-Unis ont laissé faire.Ils ont même tenté de se rapprocher du régime taliban. 

L'histoire, ancienne et complexe, des rapports entre les Etats-Unis et l'Islam ne se résume bien sûr pas à cela. Dans les années cinquante, le Président Eisenhower s'était radicalementdistancé de Londres, Paris et Tel-Aviv lors de l'affaire de Suez en1956. Dans son esprit, l'Amérique devait bâtir des liens decoopération économiques et politiques avec les pays arabesnouvellement indépendants. Sur ce point, il partageait les idéesanti-coloniales de Roosevelt. Plus tard, dans les années soixante,ses successeurs ont mis en œuvre une politique différente, soutenantdes mouvements islamiques conservateurs (les Frères Musulmans) contrele panarabisme nassérien jugées sous influence soviétique. L'ordre moyen oriental d'après 1973 s'articulait autour d'Israël, les monarchies du Golfe, le Pakistan, la Turquie, et l'Iran. Après 1979, autour des quatre premiers et l'Irak, devenu jusqu'en 1991 un allié de circonstance. Ces va et vient géopolitiques ont permis de maintenir les équilibres stratégiques et de sécuriser les approvisionnements pétroliers. Mais, souterrainement, se préparait une tempête, la montée de l'islamisme politique radical. 

Aujourd'hui, c'est un immense défi que de ne pas s'aveuglerà nouveau. Puisque guerre il y aura, il faudrait la mener en tenantcompte des besoins et des aspirations des peuples du monde arabo-islamique(entre autres), de peuples soumis depuis des décennies à l'arbitraire de gouvernements autoritaires. Il faudrait une démocratisation et uneouverture politique, une répartition plus équitable des ressources,une politique d'aide généreuse pour la modernisation économiqueet un règlement définitif et juste du conflit israélo-palestinien.Dans un contexte historique différent, c'est ce que les Etats-Unisont fait au plan économique en Europe de l'Ouest au lendemain de ladeuxième guerre mondiale avec les résultats que l'on sait.

Ces politiques de longue portée ne résoudront évidemment pas le problème immédiat posé par les réseaux terroristes. Mais sans elles on risque un conflit sans fin. 













Mort du commandant Massoud, figure de proue de la résistance (Le Monde, 18/9/2001)
Le "Lion du Panshir" a succombé à un attentat-suicide aprèsvingt ans de combats. Son profil d'aigle, sa barbe clairsemée, sesyeux perçants ont fait le tour du monde.

PORTRAIT
"Je suis sûr que je verrai la paix de mon vivant et que je participerai à la réhabilitation de l'Afghanistan",nous déclarait en mai 1999, le commandant Ahmed Shah Massoud, dans ce quiétait alors son fief de Taloqan, au nord-est de l'Afghanistan. Cetancien étudiant de la faculté polytechnique de Kaboul rêvaità l'époque d'utiliser ses études inachevées pourreconstruire son pays ravagé par vingt ans de guerre. Son rêve a été stoppé brutalement, non sur les champs de batailles qu'il courrait depuis vingt ans, mais par l'explosion d'une bombe cachée dans une caméra. Une fin teintée d'ironie pour cet homme trèsconscient de son image et qui savait tenir à ses différents interlocuteurs le discours qu'ils attendaient. Son profil d'aigle, sa barbe clairsemée, ses yeux perçants avaient fait le tour du monde. Toujours élégamment vêtu, son pacoul (chapeau plat enlaine) vissé sur la tête, Massoud savait jouer du charme dontil ne manquait pas.
Sa jeunesse à Kaboul, ses études au lycée français de l'Istiqlal (indépendance), son origine petite bourgeoise - son pèreétait colonel dans l'armée du roi Zaher Shah - lui avait donnéune aisance avec les Occidentaux qui tranchait avec la rigidité desautres dirigeants de la résistance islamique afghane.
Massoud était toutefois un très fervent musulman, qui étudiaitquotidiennement le Coran avec des mollahs et ne craignait pas de dirigerla prière pour ses soldats. Dans son fief de la vallée du Panshir,les femmes portent la burqa (la longue robe traditionnelle recouvrant toutle corps avec un filet à hauteur des yeux) et, sans le comitésuédois pour l'Afghanistan, les écoles de filles seraient inexistantes.La femme de Massoud, mère de leurs cinq enfants, respecte le purdah(réclusion) et vit dans le village d'origine de Massoud, Bazarak,au cœur de la vallée du Panshir.

UN STRATÈGE HORS PAIR
C'est dans cette vallée étroite et sereine où couleentre deux falaises dénudées, à la vitesse d'un torrent,le Panshir, qu'Ahmed Shah Massoud avait acquis durant ses années delutte contre l'occupant soviétique son titre de gloire de"lion du Panshir". Son opposition aux communistes, Massoud l'avait manifestée très tôt. Etudiant à Kaboul, il avait adhéré au mouvement étudiant islamiste, alors dirigé par un jeune professeurde théologie, Burhanuddin Rabbani. Parmi les adhérents, unautre futur dirigeant de la résistance, Gulbuddin Hekmatyar, déjàcélèbre pour son rigorisme extrême. Ces deux hommes,pour le meilleur et pour le pire, ne sortiront plus de la vie de Massoud.Quand en 1975, leur parti (le Jamiat) est sur le point de se soulever contrele président Daoud qu'il juge otage d'officiers communistes, les troishommes menacés s'enfuient au Pakistan.
Massoud ne reviendra en Afghanistan qu'après le coup d'état du 27 avril 1978, qui porte au pouvoir le chef du parti communiste khalk, Noor Mohammad Taraki. Il rejoint la première vallée qui s'enflamme contre les communistes, la Kunar, avant de partir organiser la résistance dans son Panshir natal. De 1980 à 1983, Massoud résiste avec ses hommes à six offensives soviétiques avant de conclure -au grand dam des Moujahideen - une trêve avec l'Armée rouge. En 1984, les Soviétiques rompent la trêve et lancent une offensive de grande envergure avec des troupes héliportées sur le Panshir. Peine perdue : cela sera leur dernière grande offensive et jusqu'à aujourd'hui le Panshir garde, sous forme de carcasses de chars, de canons, de camions, les stigmates de la défaite russe. 
De son père, Massoud avait hérité le goût de lachose militaire et l'amour du commandement. Même ses ennemis le reconnaissaientcomme un stratège hors pair. Mais ce soldat était avant toutun politique ambitieux, pour son pays et pour son ethnie (les Tadjiks représententenviron 20 % de la population), comme pour lui-même. Quand en 1992,à la chute de Najibullah, les Moujahideen s'emparent de Kaboul, ilest l'un des premiers à investir la ville à la tête deses Panshiri, le 29 avril. Le 8 mai, il est nommé ministre de la défensesous la présidence de Sibqatullah Modjadeddi, poste qu'il garderaquasiment sans interruption jusqu'à l'arrivée des talibans,le 27 septembre 1996. 
L'espoir né de la prise du pouvoir par les Moudjahideen, après quatorze années de guerre, sera toutefois de courte durée. Incapablesde s'entendre, ceux-ci décident d'une présidence tournante.Mais, une fois son tour fini, le président Burhanuddin Rabbani convoqueune Choura (Assemblée) pour se faire confirmer. D'alliances rompuesà peine formées en féroces oppositions, les Moujahideense déchirent Kaboul. En 1993, Ahmad Shah Massoud détruit notammentle quartier chiite de la ville, faisant des milliers de morts. Dans un conflitdevenu de plus en plus ethnique, Massoud est d'abord un Tadjik et, dans sonentourage immédiat, les autres ethnies (Pashtouns, Ouzbeks, Hazaras)sont absentes. 

A l'arrivée des talibans, ces étudiants en religionqui, avec l'aide du Pakistan, bouleversent la carte afghane depuis 1994,Massoud rassemble ses hommes et quitte Kaboul, parmi les derniers, pour seréfugier dans la plaine de Shomali, à l'entrée de sonfief du Panshir. Depuis cette date, Massoud symbolisait l'opposition àun régime qui n'a cessé de gagner du terrain. Incapable devaincre militairement les talibans, la stratégie de Massoud consistaitsurtout à entretenir des fronts divers pour fixer les miliciens islamisteset les empêcher de se jeter ensemble contre ses troupes. A plusieursreprises, les chefs de l'opposition, Karim Khalili pour les chiites, AbdelRachid Dostom pour les Ouzbeks, et Ismaïl Khan, ancien chef d'Hérat, rentré récemment d'Iran, s'étaient regroupés derrièrela bannière de Massoud. Mais la méfiance caractérisantleurs relations empêchait toute véritable stratégie militaire. 

ADMIRATEUR DE DE GAULLE
Ces derniers mois, la lutte était devenue plus incertaine pour Massoud.Il avait été incapable de reprendre son fief de Taloqan, capitalede la province de Takhar, perdu en septembre 1999. Le soutien plus accentuéde la Russie qui lui vendait des armes, l'incorporation dans ses rangs d'officiersgénéraux ayant appartenu au régime communiste, la lassitudede la guerre, ainsi que les offres sonnantes et trébuchantes des talibans,avaient provoqué des défections parmi ses commandants. Sesrelations jamais très sereines avec le président Rabbani, dontil était toujours, sur le papier, ministre de la défense, s'étaientdétériorées encore dernièrement. Ses relationsétaient aussi très tendues avec Abdul Rassoul Sayyaf, vice-premierministre du gouvernement déposé. 
Acquise sur les champs de bataille, l'aura de Massoud tenait aussi au faitde sa présence presque constante en Afghanistan, à la différencede ses pairs qui fréquentaient assidûment les capitales du mondeà la recherche de gloire ou d'argent. Pendant les dix ans de Jihad,alors que quasiment tous les mouvements de résistance avaient leurquartier généraux à Peshawar (Pakistan) ou en Iran,il était le seul à maintenir le sien dans le Panshir. Depuis1996, il ne se rendait quasiment qu'au Tadjikistan, où il avait acquisune résidence. Son voyage à Paris, Strasbourg et Bruxelles,au début de la présente année, avait de ce fait ététrès remarquée. 
Grand admirateur du général de Gaulle, Massoud restera dansl'Histoire de son pays comme un ardent nationaliste et un grand résistant face à l'invasion soviétique. Son image se brouille ensuite, tant il était devenu un chef de guerre tadjik représentant lessiens dans un conflit fratricide et tribal. 

Disparition confirmée par l'opposition aux talibans
L'opposition afghane a confirmé, samedi 15 septembre, auprès de l'AFP à Douchanbé (Tadjikistan) ainsi qu'à l'agence Interfax à Moscou, la mort du commandant Massoud. Celui-ci avait ététrès gravement blessé dimanche 9 septembre lors d'un attentat-suicideperpétré par deux pseudo-journalistes "arabes" qui avaientplacé une bombe dans leur caméra. Depuis une semaine, des rumeurscontradictoires couraient sur son état de santé et, selon certainessources, il serait mort le jour de l'attentat. Jeudi, le présidentdéchu Burhanuddin Rabbani, dont Massoud était officiellementle ministre de la défense, l'avait remplacé par le généralMoukhammad Fakhim (44 ans). Lui aussi Panshiri, ce dernier est l'ancien chefdes services de sécurité intérieure du gouvernementdes Moudjaheedin à Kaboul en 1992. Déjà trèsfragile, rongée par les ambitions de ses chefs et ethniquement divisée,l'Alliance du Nord a peu de chances de survivre à la mort de Massoud,qui disparaît au moment où l'avenir du régime talibanest sous la menace d'une action américaine.

Kaboul : "Les Américains échoueront comme les Soviétiques"
"si un pays ou un groupe viole notre pays, nous n'oublierons pas notre revanche"a menacé, vendredi 14 septembre, le porte-parole officiel des talibans,Abdul Hai Muttmain, interrogé à Kandahar. Il a soulignéque les "missiles américains ne peuvent atteindre un seul individu",en évoquant Oussama Ben Laden, qui vit en Afghanistan depuis 1996,avant d'ajouter : "L'Union Soviétique a détruit ce pays, maiselle n'a jamais pu accomplir ses buts. Les Etats-Unis aussi échoueront".Dans un message lu à Radio Shariat, Mollah Mohammad Omar a invitéles Afghans à la fermeté "contre l'ennemi". "La mort frappetout le monde. Comme Afghans, nous devons rester fiers pour la défensede l'Islam , a ajouté le chef suprême des talibans. Je n'aipas peur de la mort ou de perdre le pouvoir (...) mais je n'abandonneraisjamais l'Islam". Par précaution, Mollah Omar aurait toutefois quittersa résidence habituelle, près de Kandahar, pour une destinationinconnue. - 


n, les taliban et OussamaBen Laden d'avoir organisé l'attentat-suicide contre Massoud, établissantun lien entre celui-ci et les attentats antiaméricains du 11 septembre." Ce sont les mêmes réseaux qui ont commis les attentats auxEtats-Unis et contre Massoud ", insistait le docteur Abdoullah.
 Bien qu'islamiste lui-même, le commandant Massoud dirigeait l'Alliancedes forces du Nord, seule opposition armée structurée au régimedes taliban. Celle-ci contrôle moins de 10 % du territoire national,dont une seule des trente-deux provinces du pays, le Badakshan (nord-est).Cette mort pourrait faire renaître les divisions de la trèshétéroclite opposition afghane, largement composée d'adversairesde la veille, dont le seul trait commun est d'avoir souffert des taliban.Elle renforce les risques de déstabilisation pour la région,en particulier au Tadjikistan, qui partage une frontière de plus de1 200 kilomètres avec l'Afghanistan.
Douchanbé, la capitale tadjik, on craint notamment l'arrivée d'un flot de réfugiés dans le cas où les taliban lanceraient une offensive majeure contre la poche du nord-est. Signe de cette inquiétude, des diplomates et responsables des services spéciaux de cinq pays quisoutiennent l'opposition armée aux taliban - Inde, Iran, Russie, Tadjikistanet Ouzbékistan - s'étaient réunis vendredi dans la capitaletadjik pour des consultations.
 Plusieurs milliers de villageois ont rendu dimanche, dans la valléedu Panchir, un dernier hommage au commandant Massoud. Dans le district deBozarak, dont ce dernier était originaire, ils étaient nombreuxsur le bord des pistes pour assister aux funérailles du " Lion duPanchir ". Son cercueil, drapé du drapeau vert, blanc et noir du gouvernementdéchu (où il avait été ministre de la Défense)était arrivé par hélicoptère depuis la provincede Takhar où il est officiellement décédé samedi.
 Des centaines d'hommes tentaient de s'en approcher, jetant des fleursaux cris de " Allah ou Akbar " (Dieu est grand), rapporte l'AFP. Son successeurvraisemblable, le général Fakhim, de même que le présidentdéchu Burhanuddin Rabbani, assistaient à cette cérémonieainsi qu'Ahmad, treize ans, le fils du " héros ", qui s'est engagéà reprendre le flambeau de la lutte contre les taliban. " Je veuxjuste suivre la route de mon père et obtenir l'indépendancede mon pays ", a déclaré le garçon devant une fouleen pleurs.

Afghanistan: le retour de l'obscurantisme (Dossier, Le Monde)

Ahmad Shah Massoud appelle à l'aide l'Europe et les Etats-Unis(Le Monde, 5/4/2001)
Le chef militaire afghan Ahmad Shah Massoud, en difficulté sur leplan militaire face à la milice intégriste des taliban au pouvoirà Kaboul, a lancé mercredi 4 avril à Paris un appelà l'aide à l'Europe "pour la restauration de la paix en Afghanistan".

Le chef militaire afghan Ahmad Shah Massoud, en difficultésur le plan militaire face à la milice intégriste des taliban au 
pouvoir à Kaboul, a lancé mercredi à Paris un vibrantappel à l'aide à l'Europe et aux Etats-Unis.
"Toute aide que des pays pourraient nous donner pour reconquérir notre pays, nous en avons besoin",a-t-il dit lors d'une conférence de presse, à l'issue d'un entretien d'une heure avec le ministre françaisdes affaires étrangères, 
Hubert Védrine. Ahmad Shah Massoud, dont c'est le premier voyage enOccident hors du réduit montagneux du Panchir (nord-est de l'Afghanistan) qu'il tient face aux taliban, n'a pas spécifié quel type d'aideil souhaitait obtenir pour résister au rouleau compresseur de la miliceintégriste. Les "étudiants en théologie" soutenus parle Pakistan, l'Arabie saoudite et 
les Emirats arabes unis, contrôlent plus de 90 % du territoire afghan,à l'exception du Panchir et du nord-est afghan.
Coiffé comme toujours de son bonnet traditionnel, le pakul, allantde rendez-vous politique en rendez-vous politique dans la capitale française,Massoud a demandé à la communauté internationale d'exercerdes"pressions fortes"sur le Pakistan, qui dispose d'une influencecertaine sur les dirigeants taliban, afin de faire cesser"l'ingérence"pakistanaise en Afghanistan.

Parmi les grands pays occidentaux, Massoud s'est adresséen priorité au nouveau président américain, George W.Bush. Il a demandé que les Etats-Unis fassent pression sur leur alliépakistanais afin de"mettre fin à la guerre en Afghanistan",comme, a-t-il dit, ils ont fait pression sur le Pakistan pour mettre un termeau conflit du Cachemire, où existe une guérilla pro-pakistanaise.Interrogé à plusieurs reprises lors de sa conférencede presse dans la capitale française sur le fait de savoir s'il souhaitaitrecevoir une aide militaire occidentale, Ahmad Shah Massoud n'a pas répondu aux questions ou a 
éludé."Cela dépend de la décision des dirigeantset des présidents européens. Veulent-ils défendre lacause du peuple afghan ou se contenter de déclarations", s'est-ilborné à dire. Selon le compte rendu de l'entretien qu'il aeu mercredi matin avec le ministre français des affaires étrangères,Hubert Védrine, il a"fait appel à une mobilisation renouveléede la communauté internationale en faveur de l'aide humanitaire auxpopulations afghanes".Lors de sa rencontre avec la presse, Ahmad ShahMassoud, qui parlait, via un traducteur, en dari, le persan parléen Afghanistan, a expliqué que"face aux 
ingérences, claires et évidentes du Pakistan"en Afghanistan, il était prêt à"prendre de l'aide partout". Entouré de plusieurs "commandants" anti-taliban appartenant aux ethnies hazara, pachtoune et ouzbèque, Massoud, luimême d'origine tadjike, a expliqué que"l'Europe doit mettretout son poids dans la balance pour la restauration de la paix en Afghanistan"."En prenant en considération le passé de sacrifice consentipar notre peuple contre le communisme, nous avons le droit, dans cette situationdifficile, à ce qu'on nous apporte l'aide nécessaire",a-t-il dit. En dehors de sa rencontre avec Hubert Védrine et de saconférence de presse, le séjour du commandant Massoud àParis a été marqué par des rencontres avec le présidentde l'Assemblée nationale, le socialiste Raymond Forni, et des hommespolitiques tels que le dirigeant libéral Alain Madelin. Massoud, selonson entourage, devait également rencontrer, avant son départmercredi soir pour Strasbourg, où il sera reçu au Parlementeuropéen, diverses personnalités françaises qui ontsoutenu de longue date la "cause" afghane ou des "humanitaires" qui ont travaillé sur le terrain en Afghanistan.

Le commandant Massoud estime que sans l'aide du Pakistan lestalibans "ne pourraient pas tenir" (Le Monde, 5/4/01)
Lors de son premier séjour en Europe, Ahmad Shah Massoud, ministre de la défense et vice-président du seul gouvernement d'Afghanistan encore reconnu par l'ONU, a rencontré, mercredi 4 avril à Paris,le ministre des affaires étrangères et les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat. Dans un entretien au Monde,il appelle les Occidentaux à soutenir ses efforts de "reconquête" de son pays aux mains des talibans.

"A Paris, je ne me sens pas étranger", sourit AhmadShah Massoud, l'ancien étudiant du lycée français deKaboul, au soir de son premier séjour en Europe.

Saharienne beige, bottines de cuir noir, coiffé de son éternel pakul, le bonnet de laine roulée qu'il porte rejeté en arrière et fait partie de sa légende, leLion du Panshirrépond aux questions duMonde, tard mercredi 4 avril, dans la suite d'un grandhôtel parisien proche des Champs-Elysées. Le jeune "vieux guerrier", qui frise aujourd'hui la cinquantaine, a eu une journée chargée.

Le matin, il a pris son petit déjeuner avec le ministre français des affaires étrangères, Hubert Védrine, puis a répondu aux questions des journalistes durant une longue conférence de presse fréquemment interrompue par les applaudissements de ses partisans, rencontré la communauté afghane de France sous les lambris dela vieille ambassade décatie du 16e arrondissement, s'est entretenu avec les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat. Pas mal pour un homme qui n'était quasiment jamais sorti d'Afghanistan et reste confiné, depuis la prise de Kaboul par ses ennemis talibans, à l'automne 1996, dans son Nord-Est natal et sa vallée du Panshir.Mais pourquoi avoir tant tardé à venir en Occident? "J'aitoujours été très occupé", répond-il avec une lueur malicieuse dans le regard. Massoud joue de son charme, élude les questions qui fâchent, assène son programme, argumente sesobsessions. "Le Pakistan et ses services secrets, l'ISI, a une influence déterminante sur les talibans; sans cette aide militaire et économique, les talibans ne pourraient pas tenir."

UN "ISLAMISME MODÉRÉ"

Pour le chef militaire afghan, qui cumule les fonctions de ministre de la défense et de vice-président du gouvernement de l'Etat islamique d'Afghanistan, seule instance reconnue par les Nations unies, lapolitique pakistanaise est bien la cause de tous les malheurs de son pays en guerre, endeuillé par un conflit de vingt ans qui a coûté la vie à plus d'un million de personnes.

Mais qu'a-t-il à proposer, lui qui, lorsque son gouvernement était encore au pouvoir, avait parfois donné de son personnage l'image ambiguë d'un chef de guerre prestigieux flanqué trop souventd'officiers corrompus et d'alliés peu recommandables? "Je n'aijamais essayé d'accaparer le pouvoir, explique-t-il;quand lerégime post-communiste de Kaboul est tombé entre nos mains, c'est-à-dire aux mains des moudjahidins, en 1992, j'ai mis à la disposition des autres chefs tout le pouvoir possible afin d'éviter le conflit interne.

Mais cela n'a pas pu être évité, finalement, et cela m'a conduit à ne devoir compter que sur mes propres forces."Il concède: "C'est vrai, je ne nie pas qu'il y avaitde la corruption parmi certains de ses hommes; mais il n'y avait pas quemon parti au pouvoir! Il y avait un grand nombre d'organisations politiqueset militaires différentes!"

Sa définition de l'Etat futur d'Afghanistan–quand, un jour,les talibans auront disparu emportés par une "rébelliondu peuple" qu'il appelle de ses vœux et promet pour bientôt–est simple, claire: "Je répète que je suis un islamiste modéré, partisan d'un gouvernement modéré qui peut se dresser face àl'islamisme extrémiste. Nous sommes attachés au principe d'électionsoù hommes et femmes joueront un rôle dans le respect des droitsdes personnes. Et ce gouvernement modéré en paix avec ses voisinsse lèvera contre le terrorisme et le trafic de drogue."

Plus tôt dans la journée, le commandant Massoud avaitlancé un appel aux pays occidentaux, déclarant "acceptertoute aide que l'on pourrait nous donner pour reconquérir notre pays". Mais que retire-t-il de ses échanges avec les responsables français, en particulier avec Hubert Védrine ? "J'ai demandé au ministreque la France prenne des initiatives pour œuvrer pour le retour de la paixen Afghanistan. Notamment en exerçant des pressions sur le Pakistan."

Infatigable Massoud qui, en difficulté militaire sur le terrain, ne songe pas une seconde à renoncer à son combat. Mais conserve-t-il la nostalgie des années enfuies, songe-t-il parfois à l'infinie tristesse des choses ? "Je vais vous dire monsentiment, affirme-t-il en se redressant sur sa chaise alors que son visage s'éclaire d'un sourire bonhomme, lavie, que ça se passe dans la joie ou sans joie,ça se passe. Chaque homme qui, en réfléchissant surson passé, a l'impression d'avoir été utile, n'a rienà regretter. Moi, grâce à Dieu, je suis sûr duchoix que j'ai fait, du chemin que j'ai suivi, j'en ai la certitude absolue.Je n'ai pas de regrets. Oui, le temps s'enfuit, la vie passe mais qu'importequand c'est au nom de la justice…"
 

"Une catastrophe culturelle mondiale", selon l'ancien directeurafghan de l'archéologie (AFP, 26/2/2001)
La décision des talibans de détruire toutes les statues enAfghanistan est "une catastrophe culturelle mondiale", a déclaré à l'AFP l'ancien directeur général de l'archéologie et conservateur des monuments historiques d'Afghanistan, Zémar Tarzi, lundi à Paris.
"Je suis sidéré par cette nouvelle. Je ne comprends pas. Ilfaut sensibiliser d'urgence l'opinion mondiale face à cette action inadmissible", a ajouté M. Tarzi, maître de conférence à l'Université de Strasbourg II et qui fut directeur général de l'archéologie afghane de 1972 à 1979.
Le chef suprême des taliban au pouvoir à Kaboul, le mollah MohamedOmar a ordonné lundi la destruction de toutes les statues en Afghanistany compris celles des époques pré-islamiques, ont annoncédes sources officielles.
L'UNESCO, interrogée, n'avait pas encore réagi officiellement lundi en fin de journée.
"L'Afghanistan est le pays qui a le patrimoine le plus important du mondeen statues bouddhiques", souligne M. Tarzi, notant que "sur les deux plusgrands Bouddhas debout creusés dans le roc à Bamiyan (centredu pays) -l'un de 55 m de haut, l'autre de 38 m-, le moins haut avait eula tête déjà endommagée par les talibans".
"Par ailleurs, les peintures murales de la voûte qui abrite le plusgrand des deux Bouddhas -datés entre le IVe et le VIe siècle après J.C.-, ont également été endommagées. Enfin, l'un des Bouddhas latéraux a été totalement détruit".
 "Je comprends d'autant moins cette décision iconoclaste qu'ilétait question de restaurer des statues du musée de Kabouldétruites dans les bombardements survenus pendant la guerre civile.En 1992, le musée avait été détruit et pillépar les Moudjahidine, mais il était question que les Taliban les récupèrent".
L'Afghanistan compte parmi ses sites archéologiques les plus importants,celui de l'ancienne Bactrian, au nord-est du pays (IIe-IIIe siècleav. J.C) et le site de Hadda, à l'est, dans la région de Jallalabad,très riche en statues gréco-bouddhiques modelées enstuc et en argile, trouvées dans les monastères.
Dans le passé, alors que certains taliban zélés s'attaquaientà des "idoles" d'une religion non-islamique, le mollah Omar avaitpublié plusieurs décrets ordonnant la protection de ces chefsd'oeuvres artistiques et archéologiques.
Le décret visant à la destruction des statues intervient alorsqu'une équipe de diplomates occidentaux est arrivée àKaboul pour enquêter sur des destructions par les taliban d'oeuvresd'art du musée de Kaboul.

The 53-meter (175-foot) tall, 2000-year-old Buddha statue located in Bamyan, about 150 kilometers (90 miles) west of the Afghan capital Kabul, is shown in this undated photo. (AP Photo) 

Les Taliban ordonnent la destruction de toutes les statues dontles Bouddhas géants de Bamiyan(AP, 26/2/2001)
Le chef des Taliban, le parti au pouvoir dans la majeure partie de l'Afghanistan,a ordonné lundi la destruction de toutes les statues du pays, dontcelles des  deux Bouddhas géants de Bamiyan, classés patrimoinemondial de l'humanité. 
Le mollah Mohammed Omar a promulgué un décret déclarant toute statue comme faisant insulte à l'islam. ''Car Dieu est unique et ces statues sont là pour être vénérées alors que cela est erronée, elles doivent être détruites afin de ne plus être objets de culte maintenant ou dans l'avenir'', décrète Cheikh Omar dans un texte publié par l'agence de presse afghane Bakhtar. Il ordonne aux fonctionnaires du ministère du vice et de la vertu de détruire toutes les statues du pays. 
Ce décret est promulgué au moment même où unedélégation internationale se trouve à Kaboul pour tenterde préserver le patrimoine afghan. Le musée national de Kaboul,qui recelait des trésors uniques dont certains datant de la périodebouddhiste, a été en grande partie pillé et détruitentre 1992 et 1996. 
Les Bouddhas géants se trouvent à Bamiyan, localité ducentre du pays, située à environ 150 kilomètres àl'ouest de la capitale. Sculptés dans une falaise au Ve siècle,le plus grand des deux mesure 53 mètres, le second 37.Contrairementà la plupart des Bouddhas, représentés assis en tailleur,ceux-ci se tiennent debouts. Ce n'est pas la première fois qu'ilssont menacés depuis que le pays est déchiré par la guerrecivile, les extrémistes religieux les ayant en horreur. L'une desdeux statues géantes a d'ailleurs déjà été détériorées au lance-grenades. Dans un passé pluslointain, elles ont été défigurées par les hordesde Genghis Khan. Les Taliban, qui contrôlent 95% du territoire afghan,n'occuperaient plus Bamiyan depuis plusieurs semaines. 

Le plus grand Bouddha du monde menacé de disparition enAfghanistan (AFP, 26/2/2001)
Certains des plus anciens exemples de l'art du bouddhisme, dont le plus grandBouddha sculpté dans le monde, sont menacés de destructionaprès la décision prise lundi par les taliban de détruiretoutes les statues en Afghanistan.
La milice des taliban, qui ont déjà endommagé par destirs de mortiers et des rafales d'armes automatiques les Bouddhas géantsdécoupés dans la falaise de Bamiyan, dans le centre du pays,a  maintenant décidé de les achever.
Ces Bouddhas, l'un de 55 mètres et l'autre de 38 mètres, datentde la première moitié du premier millénaire de notreère. Si leurs visages en partie mutilés portent encore encorele sourire serein propre à de nombreuses reproductions du Bouddha,leurs tuniques de style grec les rendent uniques non seulement dans l'histoirede l'Afghanistan mais dans celle du monde en général.
Auparavant protégés par les pèlerins et les moines, lesstatues nichées dans la falaise ne sont plus désormais visitésque par les enfants de Bamiyan qui aiment à grimper sur leurs têteset quelques rares visiteurs.
Lors de leur construction, l'Afghanistan était un grand centre cosmopolitesur la route de la soie, au carrefour de puissantes civilisations. Dévastépar plus de vingt ans de guerre, ce pays est maintenant dominé parles taliban, les  "étudiants en théologie" qui affirmenten avoir fait faire le "plus pur" état islamique du monde.
Dans ce pays où les photos d'êtres vivants, les films, la télévisionet la musique sont interdits, les jeunes filles ne sont plus éduquéeset rares sont les femmes qui peuvent travailler. Tous les hommes doiventporter la barbe, à l'instar du Prophète.
Le mollah Mohamed Omar, le chef suprême des taliban, dont le régimen'est pas reconnu par la communauté internationale et qui est sousle coup de sanctions des Nations Unies, a pris la décision de fairedétruire toutes les statues du pays.
Ces statues "ont été utilisées auparavant comme desidoles et des divinités par les incroyants, maintenant elles sontrespectées et peuvent redevenir des idoles dans le futur", a ajoutéle mollah Omar. "Seul Dieu, le tout puissant, doit être vénéré,personne et rien d'autre".
Le décret ordonnant la destruction des statues est intervenu alorsqu'une délégation de diplomates occidentaux est arrivée à Kaboul pour s'enquérir de destructions par les taliban d'unedouzaine d'oeuvres d'art du musée de Kaboul, dont un Bouddha assisdatant de quelque 2.000 ans.
L'un des diplomates, qui a demandé à ne pas être nommé,a estimé que "la communauté internationale ne peut pas acceptercela". "C'est incroyable et scandaleux", a-t-il dit en souhaitant que lemollah Omar revienne sur sa décision de condamner à mort legrand Bouddha de Bamiyan et les autres.

La famine en Afghanistan : une tragédie humaine majeure (Le Monde, 13/2/2001)
Alarmé par l’ampleur du drame que vivent les réfugiés afghans, le secrétaire général adjoint des Nations uniespour les affaires  humanitaires, Kenzo Oshima, a commencé, mardi13 février à Kaboul, une mission de trois jours pour évaluerune situation qui se détériore de jour en jour. 
Alarmé par l’ampleur du drame que vivent les réfugiés afghans, le secrétaire général adjoint des Nations uniespour les affaires humanitaires, Kenzo Oshima, a commencé, mardi 13février à Kaboul, une mission de trois jours pour évaluerune situation qui se détériore de jour en jour. Ajoutéeau poids de la guerre, la sécheresse exceptionnelle qui ravage depuisdeux ans l’Afghanistan a jeté sur les routes des centaines de milliersde nouveaux réfugiés auxquels l’ONU a beaucoup de mal àvenir en aide.
  Depuis plus de trois mois, les agences humanitaires de l’ONU sonnentl’alarme mais sans grands résultats de la part des pays donateurs."Deux ans de sécheresse et tant d’années de guerre culminenten une tragédie humaine majeure" a affirmé, à Islamabad,Eric de Mul, coordinateur des Nations unies pour l’Afghanistan. Selon M.de Mul, plus de 150 personnes, dont 130 enfants, sont morts de froid la semainedernière dans la région d’Hérat, dans l’ouest de l’Afghanistan,où le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) a installésix camps dans lesquels vivent près de 100000 personnes dans des conditionsplus que précaires. "Ces morts marquent le début d’une situationqui va dégénérer rapidement et dramatiquement dans lesprochains mois. Des Afghans vont mourir et la crise va s’approfondir si desressources supplémentaires ne sont pas dégagées", apoursuivi M. de Mul, invitant les pays donateurs à répondreplus massivement à l’appel de fonds de 229 millions de dollars pourl’Afghanistan en 2001.
La situation à Hérat risque de s’aggraver avec l’arrivée attendue dans les prochaines semaines de plus de 20000 personnes venues desprovinces de Ghor, Badghis et Fariab, toutes dans l’ouest du pays. La tuberculoses’étend dans les camps d’Hérat, en particulier chez les enfantssans chaussures ou en sandales de plastique alors que la températuredescend, la nuit, sous 0°C. Pour tenter de contrer les critiques émisespar les Afghans mais aussi par les responsables humanitaires internationauxcontre les nouvelles sanctions entrées en vigueur le 20 janvier contreles talibans au pouvoir à Kaboul, les Etats-Unis ont envoyéen fin de semaine à Hérat un premier lot de tentes et de couvertures.
CAMPS DE RÉFUGIÉS La condition des 170000 nouveaux réfugiés qui ont réussi depuis septembre à s’infiltrer au Pakistan n’estpas meilleure. Le Pakistan, qui abrite déjà 2 millions de réfugiésafghans – dont certains sont là depuis l’invasion soviétiqueen 1979 –, a refusé la demande du HCR de  lui donner des terrespour ouvrir un autre camp. Le ministre de l’intérieur pakistanais,Moinuddin Haider, qui s’est rendu à Kaboul pour discuter de la situationavec les talibans, demande que les camps soient désormais établisà l’intérieur de l’Afghanistan. "Les réfugiésprovoquent des problèmes socio-économiques très importants.Les talibans ont accepté le principe d’installer les camps en Afghanistan",a-t-il dit, appelant les Nations unies et les agences internationales àaider les Afghans. Islamabad est le plus proche allié des talibans.Les deux camps établis par le HCR  dans la province pakistanaisedu Nord-Ouest sont aujourd’hui surpeuplés. Les nouveaux réfugiés vivent sous des tentes faites de vêtements ou de feuilles de plastique qui n’offrent aucune protection contre le froid. "Il n’y aucune installation sanitaire ou eau potable. Seule une assistance limitée  peut êtrefournie à ces camps de fortune", affirme le HCR, qui poursuit: "Lesgens sont tellement nombreux et désespérés qu’il estquasiment  impossible de distribuer de l’aide dans ces camps sans provoquerdes émeutes."
De plus, pour tous les responsables humanitaires, la tragédie estloin d’avoir atteint son point culminant et l’aide nécessaire pouréviter plus de morts devra durer encore longtemps, compte tenu deseffets d’une sécheresse qui a détruit les récoltes etle cheptel.

Nettoyage ethnique en Afghanistan 
Les taliban ont massacré des centaines de chiites hazaras en janvier. (Libération, 20/2/2001)


Les taliban ont tué de manière systématique des centaines de civils de la minorité chiite hazara, le mois dernier à Yakawlang,au centre du pays.Libération a recueilli les témoignagesde deux rescapés de ce massacre. Des membres d'organisations humanitaireset de l'ONU travaillant dans la région avaient fait état, finjanvier, de telles exactions, mais en des termes très généraux.Les taliban, au pouvoir à Kaboul, avaient aussitôt démenti- tout en interdisant à la petite poignée de journalistes enposte dans la capitale afghane, comme aux responsables d'ONG occidentalesou de l'ONU, de se rendre sur place. 

Ali, un Hazara, se souvient qu'il était dans le bazar deYakawlang lorsque les taliban ont attaqué la ville, le 9 janvier.Celle-ci était tombée depuis peu aux mains de 250 combattantsdu Hezb-e Wahdat, une unité de moudjahidin composée d'Hazarasalliés au commandant tadjik Ahmed Shah Massoud, en lutte contre les«étudiants en théologie». L'opposition et les taliban(qui contrôlent 90 % du pays) mènent depuis des annéesune guerre de positions incessante. Les deux camps gagnent puis reperdentdes régions, souvent au prix de lourdes pertes de part et d'autre. 

«Plus que dix minutes à vivre.»«L'attaque a eu lieu vers midi, raconte Ali. Le Hezb-e Wahdat, qui n'avait plusde munitions, avait évacué la ville, ne laissant que deux combattantssur place. La première vague d'assaut des taliban est arrivéeà pied, suivie de dizaines de pick-up tirant de tous côtés,y compris au lance-roquettes. Je me suis enfui dans le village de Dareli,à 2 km de là, où je me suis caché. Je me croyaisen sécurité car l'endroit n'est pas accessible en voiture.Mais des taliban sont arrivés à cheval, ont encercléle village, puis ont fouillé maison par maison. Ecartant les femmes,ils ont pris tous les hommes qu'ils trouvaient, ainsi que des enfants dontcertains n'avaient pas plus de 7 ans. J'ai moi-même étédécouvert. Comme aux autres, ils m'ont attaché les mains derrièrele dos avec des turbans dont ils se servent comme coiffe. Les femmes criaientet les taliban les repoussaient en les frappant. L'une d'elles s'est interposéepour les empêcher de prendre son mari d'une vingtaine d'années.Elle les suppliait en disant qu'ils n'étaient mariés que depuisun mois. Ils l'ont frappée, puis l'un d'eux a vidé son chargeurde Kalachnikov sur le jeune homme, en tirant des pieds à la tête.Nous nous sommes retrouvés à 70 ou 80 captifs, hommes, enfantset vieillards. Ils nous ont d'abord descendus du village, puis nous ont misdans leurs pick-up pour nous ramener à Yakawlang. Ils nous disaient:"Nous allons vous tuer... votre vie arrive à son terme, vous n'avezplus que dix minutes à vivre." A Yakawlang, on nous a regroupésavec d'autres prisonniers. Comme je parlais le pachtou(la langue desPachtouns, ethnie dont sont originaires l'immense majorité des taliban,ndlr),j'ai pu expliquer que je n'étais pas de la région,et l'un d'entre eux m'a libéré. Après, ils ont emmenéles prisonniers, qui étaient alors plus d'une centaine, sur un terrainderrière le bazar et j'ai entendu des coups de feu...»

Mussah, un autre Hazara de Yakawlang, a fui dans un village pluséloigné, échappant ainsi à la rafle. Mais ilest retourné sur place pour enterrer les morts après le départdes taliban (entre-temps, le Hezb-e Wahdat avait repris la ville et la tenaitencore à la mi-février, ndlr). Son récit corrobore celui d'Ali. Il explique que les taliban, qui avaient apparemment ordre de ne tuerque les hommes, ont poursuivi leurs massacres pendant près d'une semaine,commençant le matin vers 9 heures jusqu'en fin d'après-midi.«Ils encerclaient un village, faisaient sortir les hommes,les emmenaient un peu à l'écart, les exécutaient, puispassaient à un autre village.»Il dit avoir enterrélui-même, avec des femmes et d'autres rescapés, 15 corps dansle village de Sari Osiop. 

Il dresse une liste non exhaustive des villages de la banlieue deYakawlang où tous les hommes présents ont ététués: Mandiak, Ghumbzi, Kushkak, Katahona, Akhundon, Bedemoushkin,Girtbeid... Toutefois, de nombreux habitants se sont enfuis dans les montagnesavec leurs familles et y étaient toujours quand il est parti, début février, assure-t-il, car la peur ne les a pas quittés. Une bonne partie de ceux-là sont morts de froid, selon Mussah. Quelque 1500 familles de Yakawlang se sont réfugiées à Panjao, à 40km de là, où il est lui-même allé avantde se rendre à Jalalabad. Il explique encore que le Hezb-e Wahdatest parvenu à reprendre Yakawlang sans combattre à la suitede ces massacres indiscriminés, en rassemblant tous les hommes encorevalides des environs, qui jusqu'alors refusaient de s'engager.«Ils ont mis des haut-parleurs sur leurs voitures, disant que désormais plus personne n'avait le choix, qu'il fallait combattre les taliban ou selaisser massacrer»,raconte Mussah. En constatant une telle mobilisation,les taliban, au nombre de quelques centaines, ont décampé sanscombattre. 

Haine raciste.Les villageois ont alors entrepris de compter les victimes. Au bout de quelques jours, ils sont arrivés au chiffre de 530 morts - un décompte qui inclut toutefois les réfugiés morts de froid dans les montagnes. Au moins deux employés afghans d'uneONG occidentale, ainsi qu'un chauffeur employé par l'ONU, ont égalementpéri dans ce nettoyage ethnique: toutes les victimes sont des Hazaras,des musulmans chiites d'origine mongole, traditionnellement méprisésen Afghanistan. Les taliban avaient déjà à plusieursreprises pris cette ethnie pour cible. En 1998, ils avaient tentéd'affamer le Hazarajat par un embargo sur la nourriture qui dura de nombreuxmois.«Les taliban étaient allés jusqu'à interdirela région aux organisations humanitaires»,se souvient unresponsable d'ONG en poste à Kaboul, qui met ces derniers événementssur le compte d'une«haine raciste»des taliban (pachtounset sunnites) à l'encontre des autres ethnies afghanes et des Hazaras(chiites) en particulier. Les Hazaras avaient, il est vrai, eux-mêmesmassacré froidement plus d'un millier de prisonniers de guerre talibanà Mazar-i-Sharif en 1997. La guerre civile afghane, qui a commencéaprès la chute du pouvoir communiste en 1992, prend de plus en plusl'allure d'une guerre ethnique entre un pouvoir pachtoun (seuls deux ministrestaliban sont non pachtouns) et l'opposition, presque exclusivement composéed'autres ethnies. Cette nouvelle tournure du conflit inquiète nombred'Afghans ainsi que les ONG et les experts onusiens sur place. 

Le pouvoir taliban, qui cherche en vain depuis 1996 à être reconnu comme légitime par la communauté internationale, déploiedepuis janvier beaucoup d'efforts pour empêcher les rares témoinsqui parviennent à traverser les lignes de front de parler de ce derniermassacre. Les sentinelles des postes de contrôle à l'entréede Kaboul demandent aux voyageurs d'où ils viennent et arrêtentceux en provenance de Yakawlang...

Moscou accuse les Talibans d'abriter des camps terroristes (Reuters, 4/2/2001)
Le secrétaire du Conseil de sécurité russe, Sergueï Ivanov, a accusé les Talibans au pouvoir à Kaboul d'abriter en Afghanistan une trentaine de "camps d'entraînement pour terroristes" venant de pays d'Asie centrale, arabes et européens. 
 Lors d'une conférence de presse en marge de la conférence sur la sécurité de Munich, le responsable russe a également reproché aux anciens "étudiants en religion" afghans de se livrerau trafic de drogue et  à la contrebande d'armes. 
En janvier, les Nations unies ont imposé de nouvelles sanctions enraison du refus des Talibans de remettre aux Etats- Unis Oussama Ben Laden,le milliardaire saoudien intégriste soupçonné d'êtrele commanditaire des attentats anti-américains de 1988 au Kenya eten Tanzanie. 
 Ivanov a également prôné une coopération accrue en matière de lutte anti-terroriste."Aujourd'hui, la pieuvre du terrorisme étend ses tentacules jusqu'en Asie centrale et aux Philippines,et son souffle peut se faire sentir jusqu'en Europe", a-t-il dit. 

A Sangin, l'opium se vend à la tonne (AFP, 8/5/2000)
Les trafiquants iraniens et pakistanais achètent l'opium par tonnesà Sangin, une petite bourgade du désert de la province du Helmand(sud de l'Afghanistan) qui constitue sans doute le plus grand marchéd'opium du monde.
 Au bout d'une piste harassante, au coeur de cette province -- contrôléepar les taliban -- qui a produit l'année dernière la moitiédes 4.600 tonnes d'opium afghan, Sangin, écrasée de soleil,ressemble à toutes les villes du desert avec ses maisons basses enterre et ce vent brûlant qui soulève une poussière salequi s'insinue partout.
 Ici, les étrangers, surtout s'ils sont occidentaux, ne serontpas forcement les bienvenus, et doivent être accompagnés d'uneescorte d'ombrageux taliban, les miliciens islamiques qui controlent 80%du pays devenu en 1999 le principal pourvoyeur d'opium du monde.
 L'activité quasi-exclusive des 200 boutiquiers pachtouns dela localité est en effet la vente de l'opium "liquide" ou séché, -première étape d'un long voyage- qui, après transformation en morphine puis en héroïne, sera vendu notamment en Europe ouen Amérique du nord.
 Sangin draine vers elle la production d'opium des trois provinces dusud de l'Afghanistan: Helmand, Kandahar et, dans une moindre mesure Uruzgan,car les commerçants de la ville s'assurent l'exclusivité del'achat par une habile politique des prêts sans interêts auxpaysans avant la récolte.
 C'est ensuite une question de patience et d'habileté commerciale: il faut attendre les acheteurs balouches, principalement iraniens, mais aussipakistanais, selon les gens de Sangin.
 Ceux-ci viennent en pick up tous terrains acheter entre 3 et 4 tonnesd'opium après de longues discussions dans ces boutiques obscures imprégnéesde l'odeur aigre de l'opium, une pâte marron foncée vendue dansdes sacs en plastique.
 "Les trafiquants viennent dans le village sans armes", affirme HajiMira Jan, qui a plusieurs boutiques dans lesquelles il vend l'opium depuis16 ans. "Leurs escortes armées les attendent quelque part dans ledésert", dit-il.
 Selon des sources spécialisées, les convois des trafiquantssont souvent très bien équipés d'armes lourdes, mitrailleuseset mêmes parfois de bi-tubes anti-aériens montés surdes plateformes de camions.
 Mira Jan affirme faire peu de profits dans sa boutique où lessacs d'opium sont remisés dans des cantines en fer blanc. Il achètele kilo d'opium au paysan 2.000.000 d'Afghanis (35 dollars environ) et lerevend 2.200.000 afghanis soit un bénéfice de 3,5 dollars.
 Il sait que les bénéfices augmentent tout au long dela chaîne du trafic. "Nous ne faisons pas beaucoup de profit, maisles autres on sait qu'ils gagnent des dizaines de milliers de dollars", assure-t-il.
 Selon lui, il y a en permanence entre 50 et 60 tonnes d'opium disponibledans les boutiques qui vendent chacune entre 1 et 25 tonnes par an àl'ombre des muriers qui bordent les rues défoncées de la localité.
 Ici, tout le monde touche à l'opium: l'administrateur-adjoint du district M. Aminullah admet qu'il en cultive 1/2 ha. Mais il s'empresse d'ajouter qu'il a réduit ses cultures de 50% cette année àla suite d'un décret du mollah Mohamed Omar.
 Le chef charismatique des taliban a en effet ordonné en septembrede réduire les surfaces cultivées de 30% après la récolterecord de 1999 qui a constitué environ 75% de l'opium produit dansle monde.
 Mais les mollahs perçoivent une taxe de 10% sur les transactions, selon Abdul Ali, un négociant de 35 ans qui affirme pour sa part lesverser à l'Imam de sa mosquée.
 Une garnison de 85 miliciens est d'ailleurs installée dans unfortin à l'entrée de la ville et contrôle tous les véhiculesqui entrent et qui sortent.
 L'opium va vers le sud de la province du Helmand, dans la zone désertiquedite "des trois frontières" (Afghanistan, Iran et Pakistan) oùse trouvent, selon des sources spécialisées, des laboratoiresqui en transforment une partie en morphine.
 De là, la drogue part vers l'Iran ou le Pakistan d'où elle ira principalement en Turquie -- où elle sera transformée en héroïne -- avant d'atteindre les "marchés" occidentaux.

La récolte d'opium bat son plein en Afghanistan(AFP, 8/5/2000)
 La récolte d'opium bat son plein dans le sud de l'Afghanistan, le premier producteur mondial, où elle devrait être moins importanteque celle de 1999 en raison de la sécheresse et de l'ordre donnéaux paysans par les taliban de réduire les cultures du pavot.
 Dans un décret publié en septembre dernier après une récolte record de 4. 600 tonnes, le mollah Mohamed Omar, le chefsuprême des taliban, avait ordonné aux paysans de réduire en 2000 de 30% les surfaces de pavot cultivées.
 Difficile pour les paysans du sud de l'Afghanistan de ne pas obéirà une "fatwa" d'Amirul Momineen (le commandeur des croyants) qui diriged'une main de fer la redoutable milice islamiste qui contrôle environ80% du pays, mais est toujours en quête d'une respectabilitéet d'une reconnaissance internationale.
 Il faut dire que la production de l'année dernière avaitde quoi faire pâlir de jalousie les seigneurs de l'opium du Triangled'Or birman et rendre nerveux toutes les organisations de lutte contre ladrogue.
 Avec une telle quantité, l'Afghanistan assure désormais environ 75% de la production mondiale d'opium, affirme Bernard Frahi, le responsabledu Programme des Nations Unies pour le Contrôle International des Drogues(PNUCID) pour l'Afghanistan et le Pakistan.
 Pour cet ancien avocat français, à peine quadragénaire, que le goût de l'action a poussé à devenir un des responsables du PNUCID, la récolte devrait diminuer cette année.
 "Pour diverses raisons, la production devrait être inférieure à celle de 1999", a-t-il estimé lors d'une visite dans les provincesde Helmand et de Kandahar (sud) où le PNUCID, avec les responsablestaliban, mène un programme expérimental de cultures alternatives(blé, raisin, cumin ...) au pavot dans le but d'abord d'en diminuerla production puis de l'éradiquer.
 Certains pays, notamment les Etats-Unis engagés dans un brasde fer avec les taliban qu'ils accusent de soutenir le terrorisme islamiste,mettent en doute la sincérité de ces derniers, qui perçoiventune taxe de 10% sur la récolte.
 Le PNUCID, qui affirme avoir toujours eu le soutien des taliban, pourses programmes, admet cependant qu'il est encore trop tôt pour jugerde leur sincérité et de leur attitude.
 De fait, si le décret du mollah Omar a pu jouer, la sécheresse que connaît le sud de l'Afghanistan a aussi limité les rendements, ont estimé des experts internationaux sur place.
 La province de Helmand, à l'ouest de Kandahar, est la principaleproductrice d'opium avec 45.000 hectares cultivés l'année dernièrequi ont fourni 50% environ de la production totale afghane.
 La province de Nangarhar, elle aussi sous le contrôle des taliban,dans l'est du pays, arrive en 2ème position avec 23.000 ha et la provincede Kandahar, le quartier général et le bastion des taliban,est au 3ème rang.
 Mais les zones contrôlées par l'opposition armée du commandant Ahmed Shah Massoud dans le nord-est du pays sont aussi des régionsde production comme les provinces de Badakshan (2.700 tonnes) et Takhar (200tonnes).
 Alors que la récolte du sud part vers l'Iran et le Pakistan, celle du nord est principalement exportée à travers les anciennes républiques soviétiques de l'Asie Centrale.
 La destination finale, après un passage par la plaque tournanteprincipale que constitue la Turquie, est pour l'essentiel les "marchés"occidentaux de l'Europe et de l'Amérique du Nord.
 En ce début de récolte, les premières ventes despaysans montrent que le kilogramme d'opium s'enlève pour 35 dollars,alors que l'année dernière le kilo valait en moyenne 50 dollars.
 "Les prix du début de récoltes sont traditionnellement les plus faibles", a estimé Bernard Frahi qui souligne que la récolte record de 1999 a généré des stocks importants qui pèsentsans doute sur les prix.
 Après les transformations successives (morphine puis héroïne) et les coupages nécessaires, ce même kilogamme, vendu à Paris par doses d'un gramme à 7% d'héroïne maximum, rapporteraquelque 160.000 dollars. Un ratio de 1 à 4. 000 environ.

L'ONU signale un risque de famine en Afghanistan et au Pakistan(Reuters, 2/5/2000)
Une sècheresse persistante fait peser de lourdes menaces de faminesur des millions de personnes dans le sud de l'Afghanistan et au Pakistan,a déclaré un représentant de l'Onu.
Mike Sackett, directeur du Programme alimentaire mondial pour l'Afghanistan, a assorti cet avertissement d'un appel à une aide internationale d'urgence.
"Il n'y a pas encore de squelettes ambulants mais sans une réponse adéquate, des milliers d'Afghans des provinces du sud vont passer unété impitoyable parce qu'ils ont perdu presque toutes leursrécoltes et 80% de leur bétail", a-t-il dit au cours d'uneconférence de presse donnée à Kandahar au terme d'unevisite de trois jours dans les régions sinistrées.
A Islamabad, des représentants de l'Onu ont déclaré quela famine menaçait de 2,5 à trois millions de personnes enAfghanistan et autant au Pakistan.
"Nous avons assez d'éléments après une première évaluation pour nous rendre compte que nous sommes confrontés à une situation très difficile", a dit le coordinateur de l'Onupour la Pakistan, Onder Yucer.
Son collègue pour l'Afghanistan, Erick de Mul, a souligné quela sècheresse était la plus sévère dans cetterégion depuis 1971.
Aucune chute de pluie ne peut être espérée avant le moisde novembre et les 400.000 habitants de la région qui était un des greniers à blé de l'Afghanistan n'ont pas assez de réservespour attendre les récoltes de l'été 2001, a-t-il ajouté.
Quiconque sillonne la région de Kandahar s'aperçoit immédiatement que les champs qui devraient être couverts de céréales sont jaunis par la sècheresse. Les routes sont encombrées parle flot des gens qui espèrent trouver de l'eau et la survie dans lesprovinces du nord.
Les Nations Unies ont déclenché un programme de distribution de nourriture. Elles ont également lancé un appel à l'aideinternationale et demandé au régime des Talibans de consacrerdavantage de ressources à l'aide alimentaire au lieu de financer uneguerre civile apparemment sans fin contre une opposition pourtant trèsaffaiblie.

Oussama Ben Laden est mourant, selon un magazine hong-kongais(AP, 16/3/2000)
Oussama Ben Laden, commanditaire présumé des attentats meurtrierscontre les ambassades américaines de Nairobi (Kenya) et de Dar es-Salaam(Tanzanie) de 1998, est en train de mourir d'une insuffisance rénale,selon un magazine de Hong-Kong publié jeudi, qui cite une source occidentalenon précisée.Les proches de l'extrémiste islamiste cherchentune machine à dialyse pour essayer de stabiliser son état,selon ``Asiaweek''. Le millionnaire d'origine saoudienne, qui se serait réfugiédans les montagnes de l'Afghanistan, est conscient la plupart du temps etpeut encore parler et participer à des réunions.Avec 16 autrespersonnes, Oussama Ben Laden est recherché par les Etats-Unis quil'accusent d'avoir ourdi les attentats simultanés qui ont coûtéla vie à 224 personnes, dont 12 Américains, le 7 août1998.

Début de nouveaux pourparlers de paix entre factions afghanes(AP, 7/3/2000)
Les représentants des factions en lutte en Afghanistan ont entamé mardi sur les bords de la Mer rouge en Arabie saoudite une nouvelle session de pourparlers destinés à mettre un terme à des années de guerre civile. La rencontre de Djeddah, sous l'égide de l'Organisation de la conférence islamique (OCI) est une nouvelle tentative pour queles talibans au pouvoir à Kaboul et contrôlant désormais 90% du pays, signent la paix avec l'opposition nordiste, dirigée parAhmed Shah Massoud et l'ancien président Burhanuddine Rabbani. Desresponsables iraniens et pakistanais, ainsi que Francesc Vendrell, représentantspécial du secrétaire général de l'ONU pour l'Afghanistan,participent aux pourparlers, précisait-on de sources saoudiennes.Aucune rencontre directe n'avait encore eu lieu mardi, les parties rencontrantséparément les représentants de l'OCI, et tous les effortsportaient sur l'organisation d'un face-à-face. L'Arabie saoudite etle Pakistan sont considérés comme les principaux partisansdes talibans, qui pratiquent une version extrêmement dure de l'Islam.L'Iran, qui préside actuellement l'OCI, est considéré comme plus proche de l'alliance nordiste. Plusieurs tentatives de l'ONU oude l'OCI de ramener la paix en Afghanistan ont échoué, lesparties ne réussissant pas à mettre au point une formule departage du pouvoir. 

Afghanistan: l'OIC organisera les pourparlers de paix(Reuters, 5/3/2000)
L'Organisation de la conférence islamique réunira lundi àDjeddah (Arabie saoudite) les parties en conflit pour discuter de la paixen Afghanistan. Un groupe de contact de l'OIC s'entretiendra d'abord séparémentavec des représentants des Talibans au pouvoir à Kaboul etde l'opposition, avant d'organiser un face-à-face entre les deux camps.Des représentants du Pakistan, de l'Iran et de la Guinée, plusl'émissaire de l'Onu pour l'Afghanistan, Francesco Vendrell, assisterontaux discussions, qui devraient durer deux jours. Les anciens "étudiantsen religion", qui contrôlent 90% du territoire afghan, sont repassésà l'offensive contre les forces du
commandant Ahmad Shah Massoud. Vendredi, le Conseil de sécurité des Nations unies avait exigé un arrêt des combats. 

Drogue: l'ONU préoccupé par le manque de coopération des taliban afghans(AFP, 23/2/2000)
La production de drogues en Afghanistan ne cesse de croître alors quece pays est déjà l'un des principaux producteurs d'opium, jugel'ONU dans un rapport annuel qui doit être rendu public mercredi.L'Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS), organisme del'ONU qui siège à Vienne, critique également l'expansion rapide en Asie des amphétamines, soulignant le rôle majeur dela Chine.Mettant en doute la volonté des taliban, milice islamiste intégriste, au pouvoir en Afghanistan de s'attaquer au fléau de la drogue, l'OICS relève que la culture illicite d'opium s'est élargieà de nouvelles zones, placées en très grande majoritésous le contrôle des taliban. L'Afghanistan fournit 75% de la productiond'opium du monde, indique le rapport. "En Afghanistan, la culture illiciteà grande échelle du pavot à opium continue de s'étendreà des régions du pays qui n'avaient jusque-là pas ététouchés. La volonté des autorités d'interdire la culturedu pavot à opium et la fabrication d'héroïne reste douteuse", indique le rapport, soulignant que 97% de la production du pavot à opium sont assurés sur des terres contrôlées par les taliban.En outre, les auteurs du rapport ont observé que la production d'héroïnese déplace du Pakistan --où elle a pratiquement disparu--versl'Afghanistan."L'Organe s'inquiète de la progression rapide des culturesillicites ainsi que du trafic et de l'abus de drogues en particulier d'héroïnedans les pays d'Asie centrale et du Caucase".L'OICS, qui invite "la Communautéinternationale à prendre des mesures appropriées", ajoute queles drogues synthétiques connaissent un essor en Asie. "L'abus etle trafic de stimulants de type amphétamine progressent rapidementdans toute la région de l'Est et du Sud-Est de l'Asie" et "la Chinedemeure un gros fournisseur", note le rapport qui met en garde "les groupesvulnérables des grandes agglomérations urbaines, notammentles jeunes".
Le rapport loue cependant les efforts du Laos, de la Birmanie, de la Thaïlandeet du Viêtnam pour réduire leurs productions d'opium. En revanche,la Chine, la Malaisie et la Thaïlande demeurent des marchés importantspour l'héroïne et des lieux de transit prisés pour l'exportationd'héroïne vers l'Amérique du Nord et l'Océanie.Pour l'Asie du Sud, l'OICS note une augmentation de la production d'héroïneet de drogues synthétiques, de cannabis et d'opium. Le port de Chittagong,au Bangladesh, les Etats indiens du Manipur, du Mizoram et du Nagaland, ainsique les frontières entre l'Inde et le Pakistan, et les régionsde Bombay et New Delhi sont devenus des plaques tournantes du trafic de stupéfiants,selon le rapport.
Phénomène général en Asie, le manque d'argent perturbe les efforts pour enrayer la prolifération de drogues, conclut l'OICS.
"L'insuffisance des ressources empêche toujours les autorités de plusieurs pays et leurs partenaires d'appliquer dans leur intégralité les programmes destinés à réduire l'offre et la demande illicites de drogues", indique le rapport.

73 ex-otages du Boeing afghan en route vers l'Afghanistan (Reuters, 14/2/2000)
Soixante-treize ressortissants afghans, soit plus de la moitié desotages du Boeing détourné la semaine dernière sur laGrande-Bretagne, faisaient route vers leur pays lundi matin à bordd'un avion spécialement affrété. Les autorités britanniques étudient des demandes d'asile émanant de 69 autresex-otages libérés jeudi à l'aéroport londoniende Stansted. Dix-neuf hommes ont été arrêtés aprèsle détournement du Boeing 727 de la compagnie afghane Ariana, et certainspourraient comparaître en justice dès lundi. Un avion Tristarde la compagnie cambodgienne Kampuchea Airlines a décollé peuaprès minuit GMT de la base aérienne de Brize Norton, àl'ouest de Londres, à destination de Kandahar, dans le sud de l'Afghanistan,a indiqué un porte-parole du Home Office (ministère de l'Intérieurbritannique). Les anciens otages avaient quitté un peu plus tôten autobus, sous escorte policière, un centre de regroupement temporaire.Dans la journée de dimanche, on avait rapporté de source autoriséeque seuls 17 ex-otages étaient prêts à rentrer en Afghanistan, pays ravagé par la guerre, la plupart des autres réclamant l'asilepolitique en Grande-Bretagne. 
"Il a fallu du temps pour réaliser les entretiens, établir lesintentions des gens, leur expliquer les options qui étaient offerteset
quelles en étaient les implications", a dit le porte-parole du ministèreà Reuters. "Tous ceux qui restent ici ne sont pas prêts àpartir de leur plein gré. Cela semble signifier qu'ils demandent l'asile."Selon certaines informations de presse, l'augmentation du nombre des rapatriésa fait suite à des assurances reçues des talibans au pouvoirà Kaboul quant à leur sécurité. 
Controverse politique 
Le porte-parole a précisé que les 73 personnes parties pourKandahar se répartissaient comme suit: 58 hommes, huit femmes et
sept enfants. Selon la BBC, leur avion doit faire une escale technique auxEmirats arabes unis (EAU). Les talibans, mouvement islamiste qui n'entretient pas de relations diplomatiques avec la Grande-Bretagne, avaient réclamé le rapatriement de tous les ex-otages. Le détournement du Boeing afghana provoqué une vive controverse politique en Grande-Bretagne, desmédias ayant laissé entendre durant les négociations qu'il masquait en fait un stratagème des pirates de l'air et d'une grande partie des passagers pour obtenir l'asile politique et des conditions de vie plus agréables en territoire britannique. Après le dénouementpacifique de l'affaire jeudi dernier à l'aéroport de Stansted,il était vite apparu que des dizaines d'entre eux réclamaient l'asile. L'opposition conservatrice avait alors accusé le ministre de l'Intérieur Jack Straw de faire apparaître la Grande-Bretagne comme un refuge d'accès trop facile. Straw a riposté dimanche en assurant disposer de tous les moyens de refouler les anciens otages sil'asile ne leur était pas accordé. "Une fois les procédures terminées, nous avons parfaitement le droit de renvoyer du pays lesgens qui ne peuvent y rester à aucun titre. Cela arrive chaque jour",a-t-il dit à la BBC-télévision. Le ministre a notéque Londres devait à la fois remplir son obligation d'accorder l'asileà ceux qui craignaient à juste titre des persécutionsdans leur pays, et exercer "prévention et dissuasion contre le crimeterroriste international très grave que constitue le détournement".Des militants des droits de l'homme ont exhorté Straw à nepas refouler ceux qui souhaitaient rester en Grande- Bretagne aprèsleur épreuve et échapper à des conditions de vie misérablessous le régime intégriste des talibans. La police n'a pu préciserlundi matin combien de personnes seraient inculpées à la suitedu détournement, mais elle a indiqué que certains prévenuscomparaîtraient dans la journée devant un tribunal. L'un despilotes du Boeing afghan a déclaré samedi à la presseque les pirates de l'air armés qui avaient pris le contrôlede l'appareil au cours d'un vol intérieur, avaient menacé detuer leurs otages et de faire sauter l'avion à son arrivéeen Grande-Bretagne. 

10.000 dollars pour "fuir vers la liberté"(AFP, 28/1/2000)
10.000 dollars: c'était le prix de la liberté pour Diana Kamos,une jeune réfugiée afghane de 25 ans hébergée à Sangatte (nord de la France) depuis quelques jours, et qui a fui Kaboul et les Taliban. Les nouveaux maîtres de l'Afghanistan l'ont battueà trois reprises, sans raison. "Depuis leur arrivée àKaboul, les femmes sont prisonnières, elles n'ont plus le droit d'allerà l'école, plus le droit de travailler. Elles vont toutes finirpar devenir folles", explique Diana. Etudiante en troisième annéede médecine à l'arrivée des Taliban, elle a choisi de"fuir vers la liberté". Sa famille rassemble 10.000 dollars et contacteun passeur. Elle quittera Kaboul par avion et sans passeport (les femmesn'ont plus le droit d'en avoir en Afghanistan, explique-t-elle) avant dedébarquer en France. Gravement malade, elle veut pourtant àtout prix franchir la Manche pour rejoindre son cousin à Londres.Le cas de Soheil, un Iranien de 21 ans, est un peu particulier. Il est l'undes rares à avoir formulé une demande d'asile et à vouloirrester en France. "La traversée est trop dangereuse, l'autre jourun homme est tombé d'un camion et on l'a emmené à l'hôpitalavec une fracture du crâne. Moi j'ai fui mon pays pour éviterla mort, alors si c'est pour la trouver en essayant de passer, autant rentrerchez moi", affirme-t-il. Harcelé par la police pour son amitiéavec un membre des Baha'is, une communauté religieuse répriméepar le régime de Téhéran, il a échappéde peu à une arrestation. Lui aussi a dû débourser 10.000 dollars pour arriver à Calais via la Bosnie, après trois moissur les routes. "Moi je ne voulais pas partir pour l'argent. Je vivais bienen Iran, où je tenais un magasin de vêtements et un garage", dit Soheil. En attendant d'être fixé sur son sort, il aide àla cuisine du centre de la Croix Rouge. "Ici je ne connais personne, àpart Dieu", lâche-t-il.

La Tchétchénie va ouvrir une ambassade en Afghanistan(AP, 21/1/2000)
La république indépendantiste de Tchétchénie vaouvrir une représentation diplomatique à Kaboul, a annoncé vendredi le ministre afghan des Affaires étrangères. Au cours d'une conférence de presse conjointe avec le porte-parole des séparatistes tchétchènes Zelimkhan Banderaïev, le ministre taliban WakilAhmed Muttawakil a appelé les musulmans du monde à se rallierderrière les Tchétchènes contre l'armée russe.Le régime des talibans au pouvoir à Kaboul est le seul àreconnaitre l'indépendance de la Tchétchénie et n'estlui-même reconnu que par trois pays. Kaboul s'est attiré lesfoudres de Moscou, qui l'accuse de fournir des hommes et du matériel aux Tchétchènes. Ce qu'a démenti le ministre, affirmant que les talibans, en guerre contre l'opposition nordiste dirigée parle commandant Ahmed Shah Massoud, n'en avaient pas les moyens. Wakil AhmedMuttawakil a comparé l'offensive russe en Tchétchénie à l'invasion de l'Afghanistan par l'URSS en 1979. ``Des musulmans dumonde entier sont venus aider l'Afghanistan. Maintenant, les musulmans devraientaider le peuple tchétchène''. Banderaïev, venu àKaboul à la tête d'une délégation de six membres,s'en est violemment pris aux Nations Unies, accusées de ne rien fairepour arrêter l'intervention russe.

Moscou qualifie de ``juridiquement nulle'' la reconnaissancede la Tchétchénie par les Talibans (AP, 18/1/2000)
Le ministère russe des Affaires étrangères a qualifié lundi de ``juridiquement nulle'' la reconnaissance de l'indépendance de la Tchétchénie par les Talibans, qui contrôlent 90%de l'Afghanistan. En agissant de la sorte, le régime taliban ``conduità la création d'une sorte d'internationale du banditisme'', ce qui montre ``la nécessité d'unir les efforts de la communaute internationale dans la lutte contre le mal universel que represente le terrorisme'',souligne le ministère. La Russie a accusé à plusieursreprise les Talibans de venir en aide aux combattants indépendantistes tchétchènes. Kaboul est pour l'heure la seule capitale à reconnaître la Tchétchénie en tant qu'entité indépendante. 
 


 
Chronologie de la guerre d'Afghanistan(AP, 15/2/99)
Voici une chronologie de la guerre d'Afghanistan qui opposa les moudjahidineafghans à l'envahisseur soviétique
entre 1979 et 1992 : Plus de vingt ans de conflit en Afghanistan 

1978

-27 avril: conduit par Hafizullah Amin, un coup d'Etat militairepro-soviétique renverse le président Mohammad Daoud Khan, cousin
du roi Zahir Shah, détrôné en 1973. Au pouvoir, le Partidémocratique populaire d'Afghanistan (PDPA) installe Nour Mohammad
Taraki à la présidence 

1979

-12 mars: le Front de libération nationale (musulman) lancele djihad le 12 mars contre le pouvoir. En juillet, les Soviétiques déploient
leur première unité de combat dans le pays, un bataillon aéroportéde 400 hommes envoyé à Bagram (nord de Kaboul) 

-14 décembre: de moins en moins soutenu par Moscou, le Premier ministre Amin fait étrangler le président Taraki lors d'un coup
d'Etat, alors que la rébellion islamiste s'accroît 

-24 décembre: 40.000 soldats de l'Armée rouge entrent en Afghanistan pour renverser Amin, ramenant dans leurs bagages le
pro-soviétique Babrak Karmal. L'invasion provoque un exode qui poussedes millions d'Afghans à se réfugier en Iran et au Pakistan.
On en recensera plus tard 2,9 millions au Pakistan et à 2,3 millionsen Iran. 

Trois jours plus tard, l'URSS installe Karmal à la tête du pays. La guerilla afghane commence à se former et harcèle les troupes
soviétiques 

1980

-Alors que l'assemblée générale de l'ONU réclame le ``retrait immédiat, sans condition et total des troupes étrangères'', l'Armée
rouge est portée en février à 75.000 hommes, avant d'atteindreles 115.000 hommes, selon des estimations occidentales 

1984

-janvier: les rebelles prennent temporairement le contrôlede Kandahar, deuxième ville du pays. En avril, les Soviétiques pilonnent
pour la première fois les places fortes et les villages des rebelles,avec des bombardiers Tupolev-16

1985

-mai: l'Institut international des études stratégiques de Londres estime que les Soviétiques ont perdu 20.000 à 25.000hommes en
cinq ans. A Peshawar (Pakistan), une alliance de rebelles fondementalistes musulmans rejoint des modérés au sein de l'Unité
islamique de groupes afghans, à sept composantes 

1986

-4 mai: Karmal doit céder la place à Mohammed Najibullah, ancien chef du Khâd (police secrète). Vers la fin de l'année, les
moudjahedines basés au Pakistan et répartis en sept factions reçoivent des armes américaines, dont des missiles Stinger, et
intensifient leur lutte contre Kaboul 

-juin: Mikhaïl Gorbatchev annonce le retrait de six régiments mais il s'agit, selon Washington, de forces anti-aériennes peu utiles qui sont remplacées par des régiments blindés 

-septembre: les rebelles auraient reçu leurs premiers missiles anti-aériens américains Stinger et britanniques Blowpipe quileur
permettent, en l'espace de quelques mois, d'abattre en moyenne un appareil ennemi par jour 

-décembre: rencontre Najibullah-Gorbatchev à Moscou.Annonce de la formation d'un gouvernement d'unité nationale qui comprendra des dirigeants en exil 

1987

-15 janvier: Najibullah offre un cessez-le-feu et un plan de réconciliation à la résistance, qui refuse 

-novembre: Najibullah propose un calendrier de 12 mois pour le retrait des troupes soviétiques 

1988

-janvier: le président pakistanais Zia ul-Haq déclare qu'il accepte une participation communiste dans un futur gouvernement afghan
comme prix d'un retrait soviétique 

-mars: Ronald Reagan affirme que l'aide à la résistance afghane continuera après le retrait soviétique

-14 avril: le Pakistan et l'Afghanistan signent sous l'égide de l'ONU un traité qui prévoit le retrait des 115.000 soldats soviétiques
d'Afghanistan dans les dix mois 

-15 mai: début du retrait soviétique 

1989

-15 février: le dernier soldat de l'Armée rouge quitte le pays. La guerre a fait plus de 1,5 million de morts et cinq millions deréfugiés 

-février-mars: bataille de Jalalabad; l'armée afghane repousse les assauts de la résistance 

1990

-6 mars: tentative de coup d'Etat du ministre de la DéfenseShah Nawaz Tanai, avec le soutien du chef résistant Gulbaddin
Hekmatyar 

1991

-avril 1991: après près de dix ans de combats, larésistance s'empare de la ville de Khost, infligeant à Najibullahun revers majeur 

-mai 1991: le secrétaire général de l'ONU Javier Perez de Cuellar présente un plan de paix prévoyant l'installation à Kaboul d'un
gouvernement intérimaire 

1992

-10 avril 1992: le nouveau secrétaire généralde l'ONU Boutros Boutros-Ghali annonce que les belligérants ont convenu de créer un
``conseil de pré-transition'' qui recueillerait le pouvoir et le remettraità un gouvernement intérimaire. Il ne dit rien du rôleque
Najibullah pourrait avoir dans cette dernière structure 

-15 avril: Najibullah est destitué, alors que la résistance prend la base aérienne stratégique de Baghram à 50km au nord de Kaboul 

-16 avril: les moudjahidine prennent Kaboul et chassent le pouvoirpro-soviétique. 

Chronologie de la guerre civile afghane(AP, 15/2/99)
Voici une chronologie de la guerre civile qui a éclaté en Afghanistanen 1992 : 

-16 avril 1992: à peine les moudjahidine prennent Kaboulqu'éclatent les luttes intestines entre les différentes factions.Le
Hezb-e-islami du pachtoune Gulbuddin Hekmatyar s'en prend à BurhanuddinRabbani et au commandant Ahmed Shah Massoud,
tous deux du parti centriste islamique Jamiat-i-Islami. Les combats éclatentaussi entre l'Ittihad-i-Islami (pachtounes sunnites
pro-saoudiens) et le Hezb-i-Wahadat (chiites pro-iraniens). C'est le coupd'envoi d'une guerre civile qui va faire 50.000 morts, essentiellement civils,et envoyer plus de deux millions de réfugiés au Pakistan voisin.Kaboul se transforme en champ de ruines. Au moins quatre accords seront signés,mais aucun ne serarespecté.

1994

-septembre: d'anciens étudiants en théologie donton n'avait jamais entendu parler, les talibans, entrent dans la batailleet
s'emparent en novembre de la province méridionale de Kandahar. Dansles deux années à venir, ils s'empareront du sud, de l'ouest
et de l'est du pays pour contrôler finalement 85% du pays 

1996

-13 mai: devant l'avancée implacable des talibans, Hekmatyar se rallie au régime 

-27 septembre: les talibans chassent le président Burhanuddin de Kaboul, conquièrent la capitale et pendent dans la rue l'ancien
président Mohammed Najibullah. La charia'a (loi islamique) est appliquéed'une main de fer. Les talibans se battent contre les forces du commandanttadjik Massoud et du chef de guerre ouzbek Rachid Dostom 

1997

-24 mai: soutenus par Malik Pahlawan, bras droit félon dugénéral Dostom, les talibans prennent le contrôle dunord et contraignent Dostom à l'exil. Mais leur alliance fait longfeu. En novembre, l'ONU découvre des charniers dans la région 

1998

-mars: le négociateur onusien Lakhdar Brahimi fait la navette entre les factions et dans la région pour tenter de faire ouvrir des
négociations. Les parties conviennent de mettre sur pied un conseilde sages 

-17 avril: l'ambassadeur des Etats-Unis à l'ONU Bill Richardson obtient des deux camps la promesse qu'ils entament des
négociations directes -les premières en deux ans- en vue deconclure un cessez-le-feu. Les combats se poursuivent néanmoins 

-26 avril: les talibans et l'opposition armée se retrouventà Islamabad pour tenter de mettre fin à la guerre civile 

-9 août : les taliban reprennent Mazar et une grande partiedu nord du pays, détruisant les forces de l'oppositon ouzbèke et
acculant Massoud dans le nord-est du pays. Dans les deux jours qui suiventla capture de Mazar, les Taliban massacrent plusieurs milliers d'Hazaras.

- 20 août : les Etats Unis lancent des dizaines de missilescontre des camps d'entrainement d'extremistes musulmans qui
visent Ousama ben laden accusé d'être le chef du terrorisme anti-américainréfugié en Afghanistan.

- 13 septembre : les taliban s'emparent du Hazarajat (centre dupays) le bastion du Hezb-i-Wahdat, le mouvement de
Khalili. les taliban controlent 80 % du pays sans être reconnus parla communauté internationale.

- octobre : les talibans consolident leur pouvoir sur 90% du territoire et éliminent toute l'opposition à l'exception du Jamiat-i-Islami de Rabbani. 

- novembre : Contre-offensives de Massoud, resté seul faceaux taliban, qui sécurise son bastion du nord-est et la zone qu'ilcontrôle au nord de Kaboul.

1999

- 21 avril : le Wahdat reprend une partie du Hazarajat dont Bamiyan la principale ville.

- 9 mai : les taliban repennent Bamiyan et le Hazarajat.

- 28 juillet : début de l'offensive des taliban contre Massoud.



Les principaux acteurs du conflit afghan(AFP, 7/2/2000)
Les taliban au pouvoir à Kaboul ont accusé lundi l'opposition afghane d'être à l'origine du détournement du Boeing-727 du vol intérieur de la compagnie Ariana qui se trouvait lundi sur unaéroport londonien.L'Afghanistan est déchiré par laguerre depuis plus de deux décennies. Après le retrait destroupes soviétiques en 1989, les combats pour le pouvoir ont continuéentre les factions victorieuses.Depuis la prise de Kaboul par les talibanen septembre 1996, la milice intégriste a conquis 80% environ du paysau détriment d'une opposition de plus en plus réduite.
Voici les principaux acteurs du drame afghan:
LES TALIBAN:
Il s'agit d'une milice religieuse inspiré par le sunnisme intransigeant d'inspiration déobandi du nom de Déoband, une madrassa (école coranique) située en Inde. Les taliban ("étudiants en théologie"), principalement d'ethnie pachtoune majoritaire dans le pays, sont issus demadrassa pakistanaises ou du sud de l'Afghanistan. Ils ont fait irruption sur la scène afghane à la fin de 1994 et ont conquis Kaboul le 27 septembre 1996.
Leur chef suprême, le mollah Mohamed Omar -- qui vit en reclus àKandahar, dans le sud du pays, d'ou il a imposé un Islam
particulièrement rigoureux -- vient d'affirmer qu'il n'était pas question de négocier avec les auteurs du détournement dontil a tenu
responsable l'opposition.
L'OPPOSITION:
Elle s'est étiolée au fils des années depuis le renversementdu président Burhanuddine Rabbani par les taliban en 1996 dont le
régime est cependant toujours reconnu par les Nations Unies et denombreux pays. Elles comprenait principalement des mouvements représentants les Tadjikes sunnites (Rabbani et Ahmed Shah Massoud), les Ouzbeks sunnites (le général Rachid Dostam, en exil en Turquie) et les Hazaras chiites (Karim Khalili, en exil en Iran). Désormais seules les troupes du commandant Massoud jouent un rôle significatif dans la lutte contre les taliban, notamment dans l'immense plaine de Chamali, au nord de Kaboul et dans un réduit de l'extrême nord-est du pays.
L'ANCIEN ROI:
Zaher Shah, 86 ans, vit à Rome depuis son renversement en 1973. Ilconstitue l'espoir de ramener la paix dans le pays pour certains groupes monarchistes.La famille royale est d'origine pachtoune et trouve de nombreux soutiensdans les tribus de l'est du pays, dont le soutien a toujours été un élément important pour la stabilité de la monarchie.

Le mollah Omar aussi bien que le commandant Massoud sont hostilesà l'option monarchiste.
 


 
L'Afghanistan et les taliban


Depuis leur prise de Kaboul, le 27 septembre 1996, la milice islamique des Taliban contrôle environ les 2/3 du pays. Dès leurentrée dans la capitale afghane, leur premier acte a symbolisé leur profond mépris de toutes les lois internationales : ils ont violéles locaux de l’ONU pour s’emparer de l’ancien président communisteNordjiballah qu’ils ont ensuite pendu sans jugement après l’avoirtorturé.

Le monde entier a alors découvert avec horreur sous quelrégime de terreur vivaient les Afghans passés sous leur contrôle. Jamais, dans toute l’histoire de l’Afghanistan, on n’avait à ce pointnié les droits les plus élémentaires de l’être humain, ni tout ce qui faisait la culture millénaire du pays.

Les premières mesures prises par les Taliban concernentles femmes :

Le travail des femmes est interdit
Après 18 ans de guerre, et la mort ou l’exil demillions d’hommes, beaucoup de femmes étaient devenues soutiens defamilles et occupaient 70 % des postes dans l’administration, la santéou l’éducation. Les renvoyer à la maison signifie que les 40.000 veuves de Kaboul sont réduites à la mendicité, que l’enseignementet les soins ne peuvent plus être assurés correctement, quebeaucoup de femmes qui avaient des postes importants sont réduites à l’exil.

Le but des Taliban est la paralysie totale de l’appareil fonctionnel de l’Etat, de manière à pouvoir le contrôler à leur profit.

L’enseignement est interdit aux filles
Les Taliban ont fermé toutes les écoleset lycées de filles et ont interdit aux étudiantes de se rendreà l’université. A leur arrivée, il y avait 60 % de fillesà l’université de Kaboul. Toutes les familles qui en avaientles moyens ont envoyé leurs jeunes filles continuer leurs étudesen exil. Les autres se désespèrent dans leur maison et se tournentparfois vers le suicide.

Par exemple, en octobre 1996, une jeune étudiante deKaboul a voulu se suicider parce qu’elle n’avait plus le droit de continuerses études ; elle s’est injecté du poison dans les veines de la main. Elle n’est pas morte, mais on a dû lui couper la main et elleest devenue folle.

Après 20 ans de guerre, la pression exercéepar les Taliban est insupportable, il faut beaucoup de courage pour continuerà lutter malgré tout.

Dans toutes les villes occupées par les Taliban, desfemmes ont bravé les interdits et essaient d’organiser, dans leursmaisons, des classes clandestines pour les fillettes interdites d’études. Saluons le courage de ces femmes qui, sans aucun moyen et malgré lesmenaces de répression qui pèsent sur elles si elles sont découvertes,s’obstinent à continuer à transmettre leur savoir àdes fillettes qui ne souhaitent que retourner à l’école.

Il est interdit aux femmes de sortir sans un membre mâle de leur famille proche et sans une raison « valable » aux yeux des Taliban
De quel droit les Taliban se permettent-ils de jugerdes raisons « valables » d’une femme et osent-ils déciderà la place des femmes ? Quelles sont les femmes qui ont toujours unmâle à leur disposition pour les accompagner ?

Les femmes n’ont pas une vocation de prisonnièreset, malgré les menaces et les coups, continuent à sortir, leplus souvent en groupe, pour intimider les Taliban. Dans aucun pays au monde,aucun gouvernement n’a jamais décrété l’assignationà résidence de plus de la moitié de sa population, pourcause de « féminité » !

Le port du tchadri est obligatoire
Les Taliban ont décidé de ne plusvoir les femmes, qu’ils considèrent comme des invitatrices àla débauche. Comme ils ne peuvent pas les enterrer vivantes, ils lescachent sous le voile intégral du tchadri qui les recouvre de la teteaux pieds sans qu’un centimère carré de peau soit visible.

Même entièrement voilées, selon laconsigne, les femmes peuvent encore se faire battre sous n’importe quel prétexte : leur tchadri est trop court, ou trop joli, ou on a vu un bout de leurs doigts,ou le bout de leurs pieds…

En 1996, une femme de Kaboul, entièrement recouvertedu tchadri, a été rouée de coups par des Taliban. Elleest tombée par terre et ne pouvait plus se relever. Des hommes sesont alors interposés pour empêcher les Taliban de continuerà la frapper. Elle a alors pu leur demander pourquoi ils la frappaientainsi et l’un d’eux a répondu : « Parce que tu as des chaussettesblanches et que le blanc est la couleur de notre drapeau ».

Aucune femme ne se sent jamais en sécurité,même si elle a le sentiment de respecter tous les interdits, uniquementparce qu’elle est une femme.

Par exemple, début 1997 une femme médecin,membre d’une ONG française, attendait des amis dans une rue commençante de Kaboul. Une voiture était arrêtée non loin d’elle, et tous ses occupants étaient des Taliban qui la dévisageaient avec insistance. Avec ses cheveux noirs, elle pouvait passer pour une Afghane qui n’aurait pas mis de tchadri. Les Taliban ont alors reculé leur voiture dans sa direction, comme s’ils avaient l’intention de l’écraser contre le mur du magasin devant lequel elle se tenait. Aussitôt, enquelques secondes, une dizaine d’Afghanes qui passaient dans la rue recouvertesde leur tchadri, sans se concerter, sont venues vers elle et lui ont faitun rempart de leur corps. Intimidés par le nombre, les Taliban ontembrayé et se sont éloignés. Les femmes se sont aussitôtdispersées, et l’une d’entre elles s’est tournée vers la Françaiseen lui murmurant : « be careful ! ».

La répression
La répression envers les femmes est impitoyable.Les Taliban n’hésitent pas à les frapper jusqu’à lamort sous n’importe quel prétexte. Tout leur est interdit et même les fillettes sont menacées.

Par exemple, le 14 octobre 1996, une fillette de 10ans qui avait mis du vernis à ongles a été condamnéeà l’amputation de ses doigts. On a même interdit les hôpitaux aux femmes, après leur avoir interdit de se faire soigner par un médecinhomme.

En 1997, un médecin qui avait opéréune femme gravement brûlée, dans un hôpital de Kaboul,a eu les bras fracassés par les Taliban à coups de crosse deKalashnikov et a dû finalement s’exiler. 

Deux femmes en train d’accoucher dans une clinique deKaboul ont été violemment jetées dehors par les Taliban.

Les exemples sont innombrables d’actes horribles etinadmissibles perpétrés par les Taliban à l’encontredes femmes.

La répression touche aussi les hommes condamnéspar les Taliban à porter une barbe longue et hirsute, à seraser le pubis (ce qu’ils contrôlent en les déculottant en public), à porter des vêtements traditionnels et à aller prier tous les jours dans les mosquées. Les gens sont licenciés deleur travail sous n’importe quel prétexte et, de toute façon, les salaires des fonctionnaires ne sont plus versés depuis l’entrée des Taliban à Kaboul.

En 1997, 80 % des médecins et chirurgiens employésdans les hôpitaux de Kaboul ont fui à l’étranger à cause des conditions de travail devenues insupportables : défense desoigner les femmes, quel que soit leur état, obligation de pratiquer l’amputation en public des condamnés pour vol.

Début 1998, 35.000 personnes ont étérassemblées de force dans le stade de Kaboul pour assister àl’amputation de deux personnes accusées d’avoir volé pour 200$ de marchandises dans un magasin de Kaboul, et à la flagellationde deux jeunes gens qui ont reçu 100 coups de fouet chacun pour avoireu des relations sexuelles.

Même cérémonie en mars 1998 quandon a exécuté à la mitraillette un assassin présumé,puis quinze jours plus tard quand deux autres assassins présumésont été égorgés au couteau.

Depuis 1995, un certain nombre de lapidations de gensaccusés d’adultère ont aussi eu lieu en public dans les zonescontrôlées par les Taliban.

Les Taliban font passer tous ces actes barbares au nomde l’Islam, mais quand les Afghans leur démontrent que rien de toutcela n’est dans le Coran, ils se bornent à répondre que c’estleur politique.

Il s’agit pour les Taliban d’écraser toute aspirationau progrès et à la liberté, de punir et finalement defaire fuir tous les gens qui ont été sensibles aux courantsdémocratiques et libéraux qui ont influencé la capitaleet les grandes villes afghanes depuis un siècle, et finalement d’empêcher tout espoir d’évolution chez les campagnards qui ont un mode de vieplus traditionnel.
 
 

Cette situation de dictature obscurantistes’imposant par la terreur au nom de l’Islam est unique dans le monde et dansl’histoire de l’Afghanistan. Le pays est connu depuis l’antiquitécomme un carrefour des cultures védique, grecque, boudhiste, hindouisteet finalement musulmane. Les vestiges architecturaux du passé sontnombreux, de même que toutes les expressions littéraires etartistiques. Les femmes y ont toujours tenu une place importante, qu’ellesaient été reines, mécènes, poétesses,artistes ou héroïnes épiques. Quelques uns des plus grandsphilosophes ou scientifiques mondialement connus en sont originaires, commeAvicenne.

Dès le siècle dernier, le pays a étésensible aux mouvement réformateurs et modernistes et s’est engagé sur la voie du progrès.

En 1924, on ouvrait les premiers lycées defilles et, quelques années plus tard, des jeunes filles partaienten Europe.

Les femmes acquirent ensuite le droit de vote et,en 1954, des femmes siégeaient au Parlement. Plus tard, certainesdevinrent ministres. 

Dans les campagnes, les femmes avaient leur placedans les « Loya Djiija » ou Assemblées traditionnellesdes villages, déterminant l’avenir de la communauté. Des écoleset lycées de garçons et de filles s’étaient ouvertsdans tout l’Afghanistan. Partout les femmes avaient leur place dans la vieactive.

Les Taliban sont en rupture totale avec tout ce quifait le passé et la culture plusieurs fois millénaire de l’Aghanistan.A côté de leurs mesures mysogines et humiliantes visant àéliminer toute velléité de résistance, touteaspiration au progrès et à faire disparaître tous lesintellectuels, ils s’attaquent à tout ce qui fait partie depuis toujoursde la vie quotidienne, de la culture millénaire du pays, ainsi qu’à toute référence à la modernité :

La musique et le chant sont interdits

Dans tout le pays, ils font pourtant intimement partiede la vie quotidienne.

La peinture et le dessin sont interdits

Les miniaturistes, renommés depuis la Renaissance,et les peintres figuratifs s’exilent ou se cachent.

Les cinémas ont été fermés, les films brûlés, les télévisions et les vidéos (dénoncées par les Taliban comme « boîtes de Satan») cassées, ainsi que les radios et les magnétophones ; les cassettes sont impitoyablement fracassées, déroulées et suspendues en trophées à l’entrée des villes. On supprimeainsi toute information et toute source de connaissance.

Les jeux sont interdits. Tous les genres dejeux ou de sports, traditionnels ou modernes, pour tout âge et de toutordre, sont rigoureusement prescrits, malgré leur popularitédans toutes les couches de la société.

Les fêtes

Les fêtes traditionnelles sont supprimées.La fête du Nouvel-An elle-même, traditionnellement célébrée avec faste le 21 mars depuis plusieurs millénaires, a été interdite. Les Taliban viennent même de remplacer le calendrier solaire afghan par le calendrier lunaire arabe, changeant ainsi la date et le nom des mois de l’année pour les remplacer par la date et les mois arabes.

Pendant la guerre contre l’occupation soviétiquede l’Afghanistan, le Pakistan soutenait le parti fondamentaliste de la Résistance afghane, celui de Gulbudin Hekmatyar. Après le retrait de l’Armée Rouge, le Pakistan, désireux de vassaliser l’Afghanistan pour des raisonspolitiques de suprématie dans la région, et économiques d’accès aux nouveaux marchés et aux hydrocarbures d’Asie Centrale,décidait de continuer à jouer la carte Hekmatyar contre lenationaliste Massoud.
La carte Hekmatyar
Hekmatyar avait deux avantages aux yeuxd’Islamabad : il était l’ennemi juré du patriote Massoud etil désirait diriger seul un Afghanistan uni au Pakistan sous la formed’un « Marché commun » islamique.

Abondamment pourvu en munitions par Islamabad, Hekmatyar échoua pourtant à prendre Kaboul malgréun déluge de roquettes et la destruction de la capitale décidéepar le Pakistan.

Cet échec, ainsi que l’implication de Hekmatyardans l’attentat du World Trade Center de New-York en 1993, poussèrentIslamabad à le lacher et à jouer une autre carte susceptibled’empêcher l’installation à Kaboul d’un état souverain.

La carte Taleban
Pour remplacer Hekmatyar, les servicessecrets pakistanais créèrent alors de toute pièce unautre mouvement extrémiste, le mouvement des Taliban. Les Talibansont des jeunes gens issus des écoles islamiques pakistanaises, principalementcomposés de Pashtouns, ethnie commune au sud de l’Afghanistan et àl’ouest du Pakistan. Leurs rangs sont grossis de chômeurs des régionsdu Pandjab ou du Sindh pakistanais et de mercenaires arabes, kurdes ou autres,tous payés 300 US $ par mois par le Gouvernement pakistanais.

Leur coloration d’extrémistes sunnitessatisfait l’Arabie Saoudite, rivale politique de l’Iran chiite dans la région,et leur réputation « d’étudiants en religion vertueux» doit suffire, selon Islamabad, à les faire accepter par lapopulation afghane. Leur but est de prendre le contrôle de l’Afghanistanpour le compte d’Islamabad, donc de chasser les dernières «têtes pensantes » et les derniers nationalistes du pays.

L’avancée des Taliban
Ils sont précédésd’une habile propagande pakistanaise et saoudienne, relayée par uneminorité de collaborateurs afghans, liés à l’anciennefamille royale afghane. Ces derniers pensent revenir au pouvoir comme desdirigeants fantoches au service du Pakistan, grâce à la forcede frappe des Taliban. Sans armée présente sur le terrain,mais eux-mêmes présents dans toutes les organisations internationales,ils pensent pouvoir légitimer au niveau mondial leur future accessionau pouvoir. Cette propagande pakistano-saoudienne présente les Talibancomme des « envoyés de Dieu » venus réconciliertous les Afghans au nom du Coran, et rétablir la paix et la sécuritédans un pays ravagé par 18 ans de guerre. Elle leur fait aussi uneréputation d’honnêteté et de lutte contre la corruption.

Ils sont surtout abondamment pourvus en armeset en munitions par le Pakistan, encadrés par les officiers de l’arméepakistanaise et alimentés en dollars par l’Arabie Saoudite.

Cet équipement militaire est destinéà impressionner les forces du gouvernement central qui seraient insensiblesà leurs soit-disant buts vertueux, ainsi que les commandants locauxrefusant de les rallier sur leur bonne mine. Les dollars leur ont permisd’acheter la plupart des commandants locaux du sud afghan qui se sont ainsiralliés à eux par appât du gain et non par idéologie.

Le vrai visage des Taliban
Une fois installés dans lesrégions qu’ils ont conquises, les Taliban montrent leur vrai visage.Ils sont bien une armée d’occupation et non pas de libérateurspuisqu’ils imposent par la force une série d’interdits et d’obligationsqui n’ont jamais eu cours sur le sol afghan et qu’il reçoivent toutesleurs directives d’Islamabad. Ils se comportent en ennemis vainqueurs, sefaisant craindre par leur brutalité, leur pillage des biens de gensqu’ils sont censés être venus défendre, leur racismevis-à-vis des différentes ethnies coexistant depuis toujourssur le sol afghan et leur racisme linguistique vis-à-vis du persanqui est la langue véhiculaire du pays, la langue de culture depuisdes millénaires. Contre cette langue, la seule légitime enAfghanistan, ils veulent imposer la langue d’une ethnie commune au sud del’Afghanistan et à l’ouest du Pakistan. Ils veulent ainsi couper définitivementle pays de sa culture et de tout accès à la modernité,et s’imposer en perturbant les gens qui ne se comprendront plus.

Coupés de toute base populaire, lesmiliciens Taliban restent toujours entre eux, sans chercher à se faireaccepter par une population qui les hait. Leur réputation d’honnêtetés’est effondrée devant la réalité de leurs actions depillage et la sécurité qu’ils disaient apporter est en faitun sentiment d’insécurité permanent devant les coups qu’ilsdistribuent et les arrestations arbitraires qu’ils multiplient, ainsi quedevant les enlèvements de filles qu’ils épousent de force pourles abandonner dès qu’ils changent de garnison.

La résistance aux Taliban
L’avancée des Taliban avite été bloquée au nord de Kaboul. Devant leurs exactions,bombardements de villages, massacres de population, déportation deplus de 100.000 personnes, les gens se sont révoltés. Les femmesont pris les armes et, aux côtés des hommes, ont repousséles Taliban jusqu’à Kaboul.

Au centre du pays, craignant leur arrivée,des femmes se sont organisées en un groupe armé, prêtesà défendre leur région les armes à la main.

A Hirat, ville d’ethnie tarjike et deculture persane de l’ouest afghan, les femmes, soutenues par les hommes,ont fait plusieurs manifestations contre l’occupation de la ville par lesTaliban, que ceux-ci ont réprimées dans le sang.

Dans les régions sud, oùl’ethnie pashtoun prédomine et où les Taliban devraient doncêtre mieux acceptée, puisque beaucoup sont des Pashtouns, demultiples commandants qui les avaient ralliés, dégoûtéspar leur comportement et leurs actions dans lesquelles ils ne se reconnaissantpas, sont en train de s’unir pour organiser une résistance.

Le 1/3 du pays reste sous le contrôledes forces de l’ancien gouvernement qui continuent de s’opposer àleur avancée.

Il est maintenant clair que les Talibanne sont qu’une force de frappe au service des intérêts économiqueset politiques du Pakistan et de l’Arabie Saoudite (rappelons qu’ils viennentde changer le nom de « République d’Afghanistan » en «Emirat Islamique d’Afghanistan ») et des intérêts d’unefraction de collaborateurs afghans opportunistes qui veulent faire passerles Taliban pour des gens honnêtes et respectables, de façonà les utiliser pour éliminer toute opposition et retrouverle pouvoir.

Cependant, la communauté internationalene peut pas rester insensible à toutes les exactions commises parles Taliban dans toutes les régions qu’ils contrôlent et àla situation insupportable à laquelle ils réduisent la populationdu pays. Il est impossible, en cette fin du XXe siècle, de laisserune telle barbarie s’installer dans un pays qui fut le berceau et le lieud’épanouissement de cultures raffinées, connues dans le mondeentier. Il est du devoir de tout démocrate de dénoncer lesatteintes aux droits de l’être humain et en particulier aux droitsdes femmes, absolument inadmissibles, commises par les Taliban. Il ne fautpas les laisser s’exprimer au nom de l’Islam, car de quel Islam s’agit-il? Ni au nom de la sécurité, car ils ont apporté uneinsécurité totale.

Il est facile de soutenir la résistancede la population et de chasser les Taliban ; il suffit de leur couper toutsoutien extérieur et là, comme toute armée étrangèreau pays et à la population, ils s’effondreront d’eux-mêmes.Une action politique est donc nécessaire auprès des gouvernementspakistanais et arabes et de leurs commanditaires.

Avec leur départ, la populationafghane retrouvera sa liberté, les femmes en particulier retrouverontleur dignité et leur droit à la vie, comme dans n’importe quelautre pays du monde.



SANCTIONS FINANCIÈRES INTERNATIONALES 
source :http://www.finances.gouv.fr/pole_ecofin/international/sanctions/talibans.htm

Règlement (CE)N° 337/2000du Conseil du 14 février 2000 concernant l’interdiction des vols etle gel des fonds et autres ressources financières décidésà l’encontre des Taliban d’Afghanistan"Ajout à l'annexeI du règlement 337/2000 du 14 février 2000, de la ADB (AgriculturalDevelopment Bank of Afghanistan")

Position commune du Conseil, du 24janvier 2000, relative à l’Afghanistan - Journal officiel n° L021 du 26/01/2000 p. 0001 – 0003
 





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